Emmanuel Bing critique « Nouvelles bartlebyennes » pour le site Écrits-Vains (29 juin 2014)

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J’aimerais mieux pas

 

Voici un petit livre étrange, reçu il y a quelques temps déjà, et dont je me proposais de dire quelque chose, sans réellement savoir quoi. Il semble que l’obsession fondamentale de la castration occupe beaucoup cet auteur  » je relis les quelques pages de ce journal et me demande ce que j’attends pour mettre mon projet à exécution, j’ai devant moi l’objet avec lequel je vais me sectionner le pénis, mais je dois rester fidèle à mon plan de départ, à savoir expliciter pourquoi et comment j’en suis venu à prendre une telle décision  » … Les personnages aux noms japonais en viennent à des extrémités d’une grande violence avec eux-mêmes.

 

L’écriture n’est pas d’une grande intensité, malgré la tentative de modernité à mon sens un peu vaine consistant à retirer les points et les majuscules initiales des phrases. C’est un peu dommage que cette préciosité masque ce qu’il aurait pu en être du réel tranchant d’une écriture.

 

La nouvelle de Melville est intéressante et angoissante, de cette phrase dont se soutient le personnage de Bartleby, I would prefer not to, comme si à chaque fois il tranchait sans le dire, et comme si ce refus masqué était une tentative, à la fois vaine et démesurée, de subjectivation, subjectivation qui lui semble impossible puisqu’il y a une fuite également devant un véritable refus, c’est un non qui n’est pas un non, c’est un non non, un à peine, un pas même ; ce qui dès lors fuit dans la nouvelle de Melville, c’est le sujet, il ne devient pas, jamais, il se fond dans une sorte de désêtre ultime, et ne disparaît que d’une sorte de déchéance inéluctable à laquelle il ne participe pas lui-même.

 

Je ne suis pas sûr que ce soit le cas des personnages d’Emmanuel Steiner, qui disparaissent de leur propre violence, de leur propre volonté, de leurs propres actes, de leur propre décision, consciente ou non, suicide (Seppuku), émasculation… ou qui ne sont qu’à peine là dans leurs actes, même sexuels (Accident)…

 

Il y a violence et jouissance qui s’étalent dans ces pages, dans une jubilation noire et interrogative, avec quelques vaines tentatives de rationalisation afin de ne pas perdre tout à fait le lecteur.

 

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Insatisfaisant par bien des points, il y a néanmoins quelque chose qui retient l’attention à la lecture, c’est la liberté que l’auteur semble vouloir se donner d’aller au bout de son fantasme — en ferait-il la traversée, ou serait-il traversé (fendu) par lui — cette liberté qui est si rare aujourd’hui en littérature et que je salue, attendant qu’il se remette au travail d’une écriture réelle, disons peut-être un peu moins ludique, un peu plus profonde, avec moins d’affèterie typographique inutile.

À suivre, pour voir, comme on dit au poker.

 

Emmanuel Bing

 

Emmanuel Steiner

Nouvelles Bartlebyennes

96 pages, 10 euros

ISBN 978-2-9541329-4-5

Chroniques du çà et là

Michel Marmin remarque les Nouvelles bartlebyennes d’Emmanuel Steiner (Eléments, n°150)

marmin2.jpgmarmin.jpgÉléments

janvier – mars 2014

N°150

 

p.6

Cartouches éditorial

Mathis, Millet, Steiner

 

(…) Le deuxième livre, Nouvelles bartlebyennes, est composé de récits d’un auteur dont c’est apparemment le premier ouvrage publié. Emmanuel Steiner signe là un coup de maître. Comme la référence au Bartleby d’Herman Melville le suggère, ce n’est pas un livre à lire en buvant un diabolo menthe sur les planches de Deauville avec de la techno en fond sonore. En de courts paragraphes, comme chuchotés à la cadence d’une respiration concise et un peu éteinte, l’auteur nous dépeint un monde parfaitement absurde, où l’apparition ou la disparition d’un être n’ont pas plus d’importance que celles d’un trèfle à trois feuilles, et où le sentiment de l’existence se réduit finalement à la question de savoir si tout cela n’est pas qu’une illusion en noir et blanc. C’est en tous cas ce que j’ai éprouvé à la lecture de ces « petits riens » vertigineux qui nous mènent au seuil du vide. Mais alors, pourquoi écrire ? Steiner pose en effet la question dans la dernière nouvelle, en invoquant le silence énigmatique de Rimbaud.

Michel Marmin

 

Emmanuel Steiner, Nouvelles bartlebyennes, Chroniques du çà et là, 96 p., 10€emmanuelsteiner id.jpg

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Emmanuel Steiner sur le Pandémonium littéraire, par Marianne Desroziers (10 novembre 2013)

Le Pandémonium littéraire par Marianne Desroziers

couvsteiner.jpg« Nouvelles bartlebyennes » est un recueil de nouvelles d’un jeune écrivain, Emmanuel Steiner, dont c’est le premier livre. L’ouvrage est publié par une nouvelle maison d’édition, Chroniques du çà et là. Trois bonnes raisons donc de s’intéresser plus particulièrement à ce recueil pour la curieuse que je suis.
 
Si le titre fait référence à la nouvelle de l’Américain Herman Melville intitulée « Bartleby », c’est plus du côté de la littérature sud-américaine (Borgès peut-être mais surtout Cortazar) et de la culture japonaise (littérature mais aussi cinéma) qu’il faudrait chercher les influences d’Emmanuel Steiner.

Ses 11 nouvelles sont peuplées de personnages perdus dans un monde absurde, de situations farfelues, de bizarreries en tout genre, laissant une grande place à l’imaginaire le plus débridé mais aussi aux questions existentielles et philosophiques. 
 
Parmi mes nouvelles préférées, Mycélium sur un homme effrayé par un champignon toxique qui se développe dans le métro qu’il doit pourtant prendre tous les jours.
 
Emmanuel Steiner est un nouvelliste talentueux et prometteur, à suivre… de même que les éditions Chroniques du çà et là (créée par Philippe Barrot, la maison d’édition était au départ une revue).

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Le grand public lit aussi les Nouvelles bartylebyennes d’Emmanuel Steiner, qu’attendez-vous ?

couvsteiner.jpgFanny de Hello Coton a aussi remarqué les Nouvelles bartlebyennes : 

Ces Nouvelles bartlebyennes est un recueil de nouvelles d’un jeune écrivain, Emmanuel Steiner, dont c’est le premier livre. L’ouvrage est publié par une nouvelle maison d’édition, Chroniques du çà et là. Trois bonnes raisons donc de s’intéresser plus particulièrement à ce recueil pour la curieuse que je suis. Si le titre fait référence à la nouvelle de l’Américain Herman Melville intitulée « Bartleby », c’est plus du côté de la littérature sud-américaine (Borgès peut-être mais… Lire la suite ici)

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Patrick Poivre d’Arvor a déjà lu les « Nouvelles bartlebyennes » d’Emmanuel Steiner (4 octobre 2013, revue L’Hémicycle)

Pour en savoir davantage sur le livre que Patrick Poivre d’Arvor a aimé, rendez-vous mercredi 16 octobre de 18h30 à 20h30 à la grande soirée de lancement des Éditions des Chroniques du çà et là.

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UN AUTRE REGARD 

(site http://www.lhemicycle.com/)

PAR PATRICK POIVRE D’ARVOR

DES NOUVELLES

Nouvelles bartlebyennes, d’Emmanuel Steiner (Éditions des Chroniques du ça et là)

Capture d’écran 2013-10-06 à 22.52.40.pngIl y a tout juste 160 ans paraissait dans un magazine américain une étrange nouvelle venue d’ailleurs : Bartleby, signée du futur auteur de Moby Dick, Herman Melville. Il y racontait l’histoire d’une sorte de clerc de notaire, un scribe plus précisément, qui recopiait des textes selon son bon vouloir. Car il lui arrivait de refuser certains travaux et, dans ces cas-là, il contournait le problème en disant de manière obsessionnelle : « I would prefer not to ». Ce « Je préférerais ne pas », si délicieusement british, est devenu le symbole de la stratégie de fuite théorisée par certains penseurs modernes. Et Bartleby a durablement influencé les écrivains de l’absurde. De Enrique Vila-Matas à Philippe Delerm en passant par Daniel  Pennac, nombreux sont les auteurs à se référer à lui.

C’est encore le cas d’Emmanuel Steiner, très marqué par ailleurs par les haïkus et la culture japonaise. Pour son premier recueil, publié dans une toute nouvelle maison d’édition au nom très melvillien (Chroniques du ça et là), il nous décline une série de nouvelles où l’individu se retrouve nié, ou effacé, par la société. Comme Georges Perec l’avait naguère tenté avec une expérimentation typographique originale, Emmanuel Steiner a choisi de supprimer de son écriture les majuscules en début de paragraphe et les points à la fin. Ce n’est pas gênant pour le confort de lecture… On peut même juger que cela rend la nouvelle plus fluide. En revanche le titre de son recueil, trop plat, ne reflète pas assez la qualité de l’ensemble.

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Le philosophe Robert Redeker affirme qu’Emmanuel Steiner va devenir un « grand » écrivain (9 octobre 2013)

J’ai lu hier soir « Nouvelles bartlebyennes » d’Emmanuel Steiner (éditions Chroniques du çà et là, 10€). Une découverte. Le titre fait référence à Melville, mais on pense aussi à Borges en lisant ce jeune écrivain de grand talent. Ces nouvelles sont d’une maîtrise technique et émotionnelle impressionnante, quasi japonaise (les lecteurs comprendront le clin d’œil). Je crois que cet auteur est, littérairement et dans le tour d’esprit, proche de Félix Fénéon. Si j’ai bien compris, il s’agit de son premier livre. Emmanuel Steiner va devenir un « grand » écrivain, un vrai, pas un à breloques et à prix décoratifs, et ce livre restera comme son galop d’essai réussi. Je remercie son attachée de presse, Guilaine Depis, d’avoir eu l’amabilité de m’envoyer cet ouvrage.

Robert Redeker, écrivain agrégé de philosophie (La Revue des Deux Mondes, Marianne, Valeurs actuelles…) le 9 octobre 2013 sur sa page facebook

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Frédéric Saenen, premier excellent lecteur des « Nouvelles bartlebyennes » d’Emmanuel Steiner pour Le Salon littéraire (20 septembre 2013)

Frédéric Saenen ouvre le bal des recensions en consacrant un très bel article au premier recueil de nouvelles d’Emmanuel Steiner (parution le 14 octobre 2013 aux Éditions Chroniques du çà et là)

Emmanuel Steiner : « Préférer ne pas »

par Frédéric Saenen pour Le Salon littéraire

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Il n’est pas fréquent de voir apparaître, de façon concomitante, une collection littéraire et, en son sein, un jeune auteur au talent fort abouti. Pourtant, lorsque d’ici quelques décennies l’on redécouvrira ses premiers textes divulgués, il se dira qu’Emmanuel Steiner est né à la publication en même temps que la maison d’édition qui l’accueillait.

Les Chroniques du çà et là portent un nom riche de ces hasards dont les surréalistes nous ont appris qu’ils étaient en fait des rendez-vous. Et les personnages qui peuplent l’imaginaire de Steiner correspondent à merveille à ce parti pris de dispersion et de décorticage par le menu que laisse entrevoir son éditeur.

Les « personnages » ? Plutôt les prête-noms, ou mieux encore, les prête-pronoms. Dépourvues de majuscule, sans véritable densité physique, les silhouettes floues que sont « elle » ou « il » se trouvent systématiquement présentées en situation, dans la synchronie de leur questionnement sur elles-mêmes. Qu’elles aient décidé, par arrêt arbitraire, de pratiquer le coït, de s’émasculer, de tourner le dos à leur domicile et à leur vie, de se faire seppuku, de détruire le chef-d’œuvre qu’elles viennent d’achever ou de changer de nom, les voix à peine incarnées qui traversent ce recueil n’ont en commun que de manifester la volonté d’un suprême renoncement. Et ce, sans lyrisme outrancier : après avoir esquissé une mise à plat de leurs objectifs ou entamé un vague projet de confession intime pour développer leurs raisons, les voilà le sexe tranché au creux de la main, le sabre fouaillant leurs entrailles fumantes, ou arpentant une rue, direction l’horizon désert.

emmanuelsteiner id.jpgChaque entité de Steiner pourrait faire sienne l’impression suivante, que l’une d’entre elles verbalise ainsi : « les événements extérieurs glissent sur lui, à moins que ce ne soit lui qui glisse à l’extérieur des événements, il ne saurait le dire avec précision, la seule chose dont il soit sûr, c’est d’un certain nivellement des valeurs. » Il ne s’agit en rien de valeurs morales dans ces pages, cette dimension en semblant d’ailleurs évacuée au plus grand bénéfice de la littérature pure ; mais de valeurs mathématiques des sensations, des émotions, des destinées, qui avoisinent dangereusement le zéro. À un tel stade, l’annulation du désir et des ambitions permet le ressourcement absolu, ou du moins procure-t-elle un sentiment d’indifférence libérateur, une jubilation mutique.  

Les fantômes de grands aînés planent sur ces Nouvelles bartlebyennes, à commencer par celui du fascinant personnage créé par Melville. Mais il y a aussi, « çà et là », une tonalité qui rappellera aux férus du genre l’acidité d’un Jacques Sternberg et le surréalisme à froid de certaines plumes japonaises contemporaines. Dans un style limpide, qui tire ses effets majeurs de son total dénuement d’affect, Steiner reformule la sempiternelle réponse : « Je préfère ne pas » par un questionnement : « et si la finalité de tout écrivain ou créateur en général était de viser à la cessation de son activité ? »

Ses épures minimalistes démontrent qu’à l’alternative entre espoir et désespoir, s’ajoute une troisième voie, très simple : celle de la vie immédiatement sondée.

Frédéric SAENEN

Emmanuel Steiner, Nouvelles bartlebyennes, octobre 2013, Chroniques du çà et là, 95 pp., 10 euros

Hommage au critique, Frédéric Saenen : 

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Frédéric Saenen vit à Liège. Il a étudié la philologie romane à l’ULg, avant d’y travailler comme chargé d’enseignement en français – langue étrangère au sein de l’ISLV. Son œuvre a d’abord été poétique, de Seul tenant (1998) à Qui je fuis (2003), ses deux principaux recueils. « Je suis de forme et pas de fond » annonce-t-il dans l’un de ses premiers textes. En effet, l’auteur affectionne tout ce qui rend sensible la matière sonore du langage et son écriture ne cesse d’être traversée par la performance orale.

L’œuvre de Céline – sur lequel Frédéric Saenen a réalisé son mémoire de licence – constitue indubitablement une source vive et une force motrice du projet esthétique de l’auteur et de sa réflexion sur le langage. Sa poésie n’est pas pur jeu verbal cependant ; elle recèle toujours une profondeur insoupçonnée derrière le ludisme de surface et nourrit la part obscure et féroce d’un regard sans concessions, sur le monde comme sur l’intime.

Plus récemment, Frédéric Saenen s’est consacré à l’écriture de textes brefs en prose (Quatre femmes, 2010), mais a aussi développé une intense activité de critique dans de nombreuses revues spécialisées. Il vient de publier un Dictionnaire du pamphlet (éd. Infolio) très remarqué. Son activité littéraire est enfin celle d’un animateur, fidèle à l’esprit collectif et joyeusement franc-tireur de la tradition liégeoise : il a participé au Big Band de Littérature féroce (2000-2001) et a co-dirigé la revue Jibrile (2003-2006).Capture d’écran 2013-09-29 à 12.46.45.png

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Le texte d’Emmanuel Steiner qui a choisi de verser 30% du fruit des ventes en avant-première de ses « Nouvelles bartlebyennes » à l’association Milaï, qui aide le Japon. (Journée du Patrimoine 2013)

443221430.jpgBonjour,

    Je suis très heureux d’être ici aujourd’hui, aux côtés de Milaï, les ailes de l’avenir et Japonaide, qui présente des photographies d’Ishinomaki, afin d’apporter mon modeste soutien à toutes les victimes de la catastrophe du Tohoku.

    Mon livre Nouvelles bartlebyennes n’a pas été écrit en lien à cette tragédie, ne comportant que quelques éléments issus de la culture japonaise, mais lorsque Guilaine Depis et Philippe Barrot m’ont proposé de venir en dédicacer quelques exemplaires afin d’en reverser 30% au profit des victimes, je n’ai pu qu’adhérer à ce projet, par amour pour ce pays dont la culture me fascine depuis tant d’années, déposant dans mon imaginaire une dimension japonaise que l’on retrouverait en filigrane dans ce livre.

    Dans la pratique du bouddhisme de Nichiren Daishonin (un moine japonais de l’époque Kamakura, XIIIème siècle), il y a une pensée pour la paix mondiale et le bonheur de toute l’humanité (apparentée au concept de Kosen rufu), qui me conforterait dans l’idée qu’une somme aussi symbolique (30% du prix d’un livre) puisse avoir un sens, car il n’y a pas de petite somme, ainsi qu’on peut le voir sur le site de Japonaide, il n’y a qu’une addition de dons générant au final un grand Don, celui de l’espèce humaine qui croit encore à l’espèce humaine, et peut-être serait-ce là l’essentiel ?

    Bien à vous, 

Emmanuel Steiner

こんにちは

 本日、石巻の写真を展示するMilaï, Les ailes de l’avenir Japonaideに私も賛同できまして大変光栄に思います。東北の震災被害者に私も哀悼の意を捧げます。

 私の本Nouvelles bartlebyennes はこの震災悲劇を語るものではありませんが、日本の文化に触れるものを書かせていただいているため編集者が収益の30パーセントを寄付することを提案しました。

 日蓮大聖人(13世紀鎌倉時代の僧侶)は人類の幸福と世界の平和を説いております。30パーセントと言う数字は小さなものかもしれませんがJaponaideのサイトにあるように小さな金額は最終的に大きな寄付を作り上げます。日蓮大聖人の教えである幸福と平和のために人類が出来ることは人々が助け合うことだと思いました。それは人として必要不可欠なことではないでしょうか?

エマニュエル ステイナー

(traduction Nojima Orie)