La phrase qui fait mouche… (Le Parisien du 23 février 2010, sur la campagne anti-tabac)

Cigarette.jpgDans Le Parisien du 23 février 2010, à propos de la campagne anti-tabac, la phrase qui fait mouche.. « A ma connaissance, pratiquer une fellation ne provoque pas de cancer », estime Antoinette Fouque, cofondatrice du Mouvement de libération de la femme.  

L’ARTICLE, REPRIS DANS LA PRESSE DU MONDE ENTIER : TABAC. VIDEO. Cette campagne anti-tabac fait scandale – En comparant l’addiction à la cigarette à une fellation contrainte, la nouvelle campagne de Droits des non-fumeurs joue la provocation. THIBAULT RAISSE | 23.02.2010, 07h00

Cigarette = sexe ? La comparaison semble fumeuse. Voilà la réaction unanime des associations familiales et féministes face à la nouvelle campagne de pub lancée hier matin par Droits des non-fumeurs (DNF). Sur le visuel concocté gratuitement par l’agence BDDP & Fils, on voit deux garçons et une fille simuler une fellation, le sexe étant remplacé par une cigarette.

Slogan : « Fumer, c’est être l’esclave du tabac. » L’étrange campagne s’étalera dans la presse et dans des milliers de lieux publics (bars, discothèques…) jusqu’au 31 mai. Le but avoué des publicitaires ? « Choquer ». Mission accomplie : depuis hier, les clichés suscitent un déluge de réactions hostiles. « Mélanger l’addiction au tabac et le sexe est un raccourci ridicule et scandaleux. Je suis inquiète de voir qu’on peut tomber aussi bas pour une juste cause », grogne Christiane Therry, déléguée générale de Familles de . « C’est cruel et déplacé : a-t-on pensé à la réaction d’une victime de sévices sexuels face à cette affiche ? » renchérit Christiane Ruel, présidente d’Enfance et Partage.
Les associations féministes, elles, fustigent l’apparente diabolisation du sexe.

 « A ma connaissance, pratiquer une fellation ne provoque pas de cancer », estime Antoinette Fouque, cofondatrice du Mouvement de libération de la femme.

« Cette image d’un vieil homme posant sa main sur la d’adolescents est insupportable », complète Florence Montreynaud, présidente des Chiennes de garde. Plus surprenant : même certains vétérans du combat anticlope n’applaudissent pas. « Ça va choquer les adultes sans faire peur aux ados », analyse Bertrand Dautzenberg, de l’Office français de prévention du tabagisme. Ce tollé ne froisse guère le concepteur de la pub. « Le discours classique, du type Le tabac c’est mal, ça ne fonctionne plus », explique Marco de La Fuente, chef de projet chez BDDP & Fils.  Mais comment faut-il comprendre une telle affiche ? « Le message c’est :Le tabac est une soumission.  Or dans l’imaginaire collectif, la fellation est le symbole parfait de la soumission. » Gérard Audureau, le président de DNF, confirme. « La cigarette ne fait plus peur aux jeunes. Utiliser le sexe, c’est une manière d’attirer leur attention. Et s’il faut choquer, choquons ! » Familles de France a décidé dès hier de saisir l’ARPP*, le gendarme de la publicité. Problème : l’instance, qui n’a pas de pouvoir répressif, ne pourra que « suggérer » le retrait de la campagne. Seul moyen de l’interdire : porter l’affaire devant la justice. Un pas que personne ne semble encore prêt à franchir.

* Autorité de régulation professionnelle de la publicité.

Gérard Miller interviewe Antoinette Fouque (La Vie du 28.01.10)

INTERVIEW D’ANTOINETTE FOUQUE PAR GERARD MILLER DANS L’HEBDOMADAIRE « LA VIE » DU 28.01.10
Je-ne-suis-pas-feministe.jpgJ’AURAIS DÛ
Par Gérard Miller
Ils sont connus, aimés, souvent puissants, parfois craints. Mais quel regard portent-ils sur eux-mêmes ?
 
Sous le titre « Qui êtes-vous ? Antoinette Fouque », Christophe Bourseiller publie chez Bourin éditeur ses entretiens avec la cofondatrice historique du Mouvement de libération des femmes (MLF), auteure notamment de « Il y a deux sexes » et de « Gravidanza, Féminologie II ».
 
ANTOINETTE FOUQUE
« JE NE SUIS PAS FEMINISTE »
 
De votre mère, qui ne savait ni lire ni écrire, vous évoquez le « génie préalphabétique ». L’expression est belle.
Ma mère a souffert de n’être pas allée à l’école mais, dans le même temps, elle était souverainement intelligente et cultivée. Il y avait chez elle une aisance, une beauté de vie, un épanouissement, une créativité constante qui lui permettaient de produire à partir de cet analphabétisme de la pensée. Et, malgré la modestie de notre place, elle nous inondait de culture, de théâtre, de cinéma.
 
En devenant vous-même mère, vous semblez avoir tout réappris.
J’avais été éduquée à l’école dans un savoir neutre, c’est-à-dire masculin, et je me croyais l’égale des garçons. Avec la grossesse, il m’est apparu qu’on nous avait raconté des histoires et que l’école républicaine, sous prétexte d’universalisme, fabriquait des discriminations. Et puis j’ai accouché d’une fille, dans une société – en 1964 – où c’était encore le fils qui faisait la mère. Alors, je me suis dit : « Mais qu’est-ce qui se passe donc là de hors jeu, de différent, de « marginal ? », et je suis allée dans « l’autre » direction.
 
Parallèlement à ce bouleversement de la grossesse et de la maternité, que vous ont apporté ces deux événements majeurs de votre vie : le mouvement de Mai 68 et votre analyse avec Lacan ?
Avec Mai 68, et alors même que j’avais déjà 32 ans, j’ai redécouvert l’adolescence. Avec Lacan, j’ai connu la passion, l’admiration sans bornes. Je ne comprenais pas tout mais, quand il parlait, ce n’était jamais hermétique, c’était ouvert, cela permettait une compréhension absolument jubilatoire.
 
Ce qui ne vous a pas empêchée de vous insurger contre la théorie freudienne, notamment la « primauté du phallus » !
Je ne sais pas ce que je serais devenue sans la psychanalyse – cela rend d’autant plus insupportable un tel « défaut » dans un objet de passion !
 
Parce que vous êtes à l’origine du Mouvement de libération des femmes, beaucoup s’imaginent que vous êtes féministe.
Je n’ai jamais employé ce mot et je considère même que le féminisme est une idéologie de désexualisation, ce que la finance est à l’industrie ou à la production : une perte du réel, de la matérialité du sens. Aujourd’hui, le terme de lesbienne remplace souvent celui de femme, tout comme le gender remplace le sexe, renvoyant à une sexualité purement sociale. Les femmes sont une espèce en voie de disparition, y compris chez les féministes. Or, pour moi, il s’agit de libérer une femme… dans chaque mère. Liberté, Egalité, Géni(t)alité !
 
Gardez-vous des regrets de cette vie ininterrompue de combats ?
Prise dans l’urgence d’agir, je sais que j’ai parfois fait preuve d’une certaine violence, qui a pu passer pour du sectarisme ou de l’intolérance, et je le regrette. Comme je regrette de n’avoir pu faire la paix avec tous ceux qui se sont un jour déclarés mes ennemis. Moi, des ennemis, je n’en ai pas.

Laureline Amanieux, superbe lectrice d’Antoinette Fouque (www.agoravox.fr 15.01.10)

« Qui êtes-vous Antoinette Fouque ? » sur Agoravox – Par Laureline Amanieux (15.01.10)

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Antoinette Fouque, voilà une femme qui a consacré sa vie à penser la femme, dans toutes ses dimensions, à additionner ses capacités et non à les soustraire. Qu’une femme puisse réaliser sa vie amoureuse et professionnelle, qu’elle puisse aimer un homme et une femme (Fouque parle même d’homosexualité native pour la femme), qu’elle puisse être mère et continuer à travailler, décider du moment où elle aura un enfant si elle le souhaite, qu’elle prenne la pleine maîtrise de sa force pro-créatrice : c’est tout l’enjeu de son combat depuis plus de quarante ans. 

Que la femme soit surtout un mouvement, celui qui est propre à l’enfantement au sens réel ou symbolique. Antoinette Fouque fait cette superbe proposition de parler d’un génie de l’enfantement comme on parle d’un génie masculin pour telle ou telle invention matérielle ou intellectuelle, car « vous revivez sur le mode actif ce que vous avez vécu passivement ». De fait, les femmes sont des héroïnes aussi en tant que portant un enfant, et l’élevant ; la grossesse est un paradigme de l’éthique pour madame Fouque car la femme accueille alors un autre en soi, sans même connaître son visage, ce qu’elle nomme « l’hospitalité charnelle » qui renouvelle l’humanité. Aussi Antoinette Fouque défend-elle autant le droit à l’avortement que la grossesse choisie, que la gestation pour autrui (GAP), comme don qu’une femme peut faire à une autre femme en portant leur enfant dans un encadrement éthique, sans aucune dimension marchande. Et les femmes possèdent aussi un génie dans les autres domaines.

A aucun moment, la pensée d’Antoinette Fouque n’élimine ou ne réduit les fondamentaux des hommes. En permanence, elle cherche un rééquilibrage qui n’annule pas leur différence, un « contrat humain » de respect et confiance entre hommes et femmes. Par rapport aux courants féministes qui prônent l’indifférenciation sexuelle ou rejettent le matriciel, la particularité d’Antoinette Fouque est de marteler « qu’il y a deux sexes », ce qui définit pour chacun un ensemble de capacités et pour les deux, une complémentarité. 

Bien sûr c’est sur le rôle féminin qu’elle insiste ; c’est celui qui a été limité au cours de l’Histoire et qui l’est encore dans le monde comme en France. Face au littéraire Barthes qui définissait le féminin comme « passif » au psychanalyste Lacan qui considérait qu’ « elle n’existe pas » dans notre champ symbolique, Antoinette Fouque investit tour à tour la pensée et l’inconscient pour y déterminer l’existence d’une femme active. A côté des trois stades libidinaux déterminés par Freud, elle en ajoute un quatrième : celui de la génitalité, la libido creandi, cette puissance d’engendrer propre à la femme. A l’âge où l’écrivain Balzac considérait la femme vieille, « trente ans », Antoinette Fouque choisit de parler de seconde naissance : à 32 ans, elle co-fonde le MLF (Mouvement de Libération des Femmes). 

A une femme représentée par ses seins et ses fesses, sa beauté réelle mais extérieure, des auteurs comme elle pensent plutôt l’intériorité de la femme et valorisent son Vagin et son Utérus.
Eve Ensler, dans le texte théâtral et l’engagement politique, a popularisé le mot « vagin » et créé le mouvement des « guerrières du vagin ». « Les Monologues du Vagin » sont toujours à l’affiche au théâtre Michel à Paris. Antoinette Fouque revendique l’Utérus naturel, contre la recherche scientifique pour créer un utérus artificiel, arrachant ainsi aux femmes leur génie premier et privant l’enfant de la transmission d’inconscient à inconscient. Comme les psychanalystes ont parlé d’envie du pénis chez la petite fille, madame Fouque théorise « l’envie de l’utérus » qui « devrait se transformer en admiration de l’utérus et en gratitude envers son oeuvre ». 

Elle appelle à « chercher une transmission symbolique équivalente, paritaire à la symbolisation monothéiste, dieu, père et fils ». Elle la lit à son tour dans les mythes grecs : Zeus qui avale Métis enceinte pour accoucher d’Athéna jusqu’aux religions monothéistes qui éliminent la Terre-mère etc… pour favoriser une création ex-nihilo qui a évacué la femme ou inverser les rôles (Eve naissant de la côte d’Adam…). 

gimbutas.jpgJe sors ici du livre d’entretiens « Qui êtes-vous ? Antoinette Fouque », avec Christophe Bourseiller, pour rappeler ceci. Notre Histoire l’avait oublié mais l’archéologie le redécouvre : abondances de statuettes de femmes qui mettent en valeur le ventre de la grossesse datant de 9000 ans avant J.C., ou de sigles sur les pierres exprimant le V de la vulve, ou d’autres signes associés à la femme comme le serpent symbole d’éternité et de renouvellement, lié à la Terre dont il émerge et dans laquelle il revient, autant d’images symboliquement détournées dans les siècles suivant en imaginaire du mal (cf « Le Langage de la Déesse » de Marija Gimbutas, éditions Des femmes, 2005, que je recommande tout particulièrement)

A chaque époque, les grands mythes de l’humanité sont réécrits : Fouque nous incite à déplacer notre regard aujourd’hui vers la femme. Les courants écologistes en valorisant de nouveau la figure grecque de Gaïa, déesse de la Terre-mère créatrice de vie avant la formation du panthéon dirigé par Zeus, remettent à l’ordre du jour l’image symbolique d’un féminin originel pour nous inciter à modifier nos comportements.

Revenons aux entretiens d’Antoinette Fouque. Faire un détour symbolique par des référents mythologiques, ce n’est pas chercher à développer une croyance nouvelle autour d’une déesse par opposition au dieu masculin des trois religions monothéistes. Antoinette Fouque pense la femme dans la laïcité, en dehors de toute réappropriation par un pouvoir religieux ou politique. La femme peut être la plus grande ennemie d’elle-même, quand elle défend des valeurs qui l’emprisonnent et un pouvoir qui la domestique : la renvoyant à une infériorité de salaire, un manque d’utilité, et à des craintes d’infidélité par exemple. A l’inverse, des hommes appellent à sa pleine libération, et Antoinette Fouque de citer un magistral extrait du poète Rimbaud. La femme est en mouvement vers son accomplissement, et doit rester dans ce mouvement.

Dans ces entretiens, on découvre donc une pensée vaste, audacieuse qui se décline en actions concrètes. Car où symbolise-t-on ? Dans les récits, nos histoires à lire tous les jours comme les grandes histoires que sont les mythes de l’humanité. Alors Antoinette Fouque a créé les éditions des Femmes pour encourager les récits sur les femmes par des femmes, et rendre visible leur art littéraire ; elle a fondé l’espace des Femmes, rue Jacob à Paris, pour
accueillir leur voix, et la première bibliothèque orale de livres-audios rendant la culture dite, accessible à tous (il y aurait plus d’un article à écrire à ce sujet, ne serait-ce que sur la voix de Fanny Ardant lisant Duras…).

Sa force est de lancer surtout toute femme en quête de ses propres pouvoirs intérieurs car être une femme, c’est se battre contre des inégalités, et aussi se rendre plus loin que la lutte : exister pour créer.

Laureline Amanieux

Belgique : Bernard Delattre fait le point sur la Gestation pour autrui (www.lalibre.be, 06.01.10)

gpaa.jpgFrance – Mères porteuses : un obstacle après l’autre

Par Bernard Delattre – Mis en ligne le 06/01/2010

Enième mise en garde contre la légalisation de la gestation pour autrui. Elle émane cette fois de l’Agence de biomédecine. Les partis sont embarrassés.

Correspondant permanent à Paris
 
Tolérée dans les années 80 puis interdite par la loi de 1994 sur le respect du corps humain, la gestation pour autrui (GPA) pourrait bien, en France, être le grand débat éthique de l’année 2010. Un nouvel avis, en tout cas, vient de tomber dans ce dossier délicat, que les politiques tardent à trancher. Alors que, en attendant, 300 à 400 Français recourent chaque année à des mères porteuses. Soit clandestinement en France, soit en se rendant dans les pays étrangers où cette gestation est autorisée – alors qu’elle est passible d’un an de prison et de 15000 euros d’amende dans l’Hexagone.
 
Cette nouvelle pierre dans le jardin des opposants à la GPA, elle vient d’être jetée par l’Agence de la biomédecine. C’est cet établissement public, agissant notamment dans les domaines de la procréation et de l’embryologie, qui serait amené à encadrer l’activité des mères porteuses si ces dernières étaient un jour reconnues en France. Mais, dans un avis divulgué par le journal catholique « La Croix », cette agence vient de s’exprimer « contre toute modification de la loi ».
 
Selon elle, des « risques d’iniquité » découleront forcément de la définition, « malaisée », de l’infertilité utérine. Il sera « difficile » d’établir des critères toujours incontestables pour l’appréciation des motivations des gestatrices et des parents d’intention. Il ne sera pas simple de fixer « les prérogatives et devoirs des professionnels (de santé) face à des situations de conflit au cours de la grossesse ou de l’accouchement ». Les risques de litiges juridiques seront nombreux. Le législateur n’est donc pas au bout de ses peines s’il veut « rendre applicable dans des conditions éthiques » la GPA. Mieux vaut, dès lors, ne pas se lancer dans ce chantier-là.
 
Ces derniers temps, déjà, quantité d’obstacles sont venus se mettre en travers de la route des partisans de la reconnaissance des mères porteuses.
 
L’Académie de médecine a jugé que ce ne serait « pas un progrès scientifique ». L’Eglise catholique et des associations familiales sont montées au créneau. Le Conseil d’Etat s’est dit défavorable à la légalisation du prêt d’utérus. La jurisprudence française, après avoir oscillé ces dernières années, a fini par trancher en défaveur des mères porteuses : la Cour de cassation a validé l’opposition du parquet à la reconnaissance de bébés nés de la sorte – et donc à l’octroi à ces enfants d’un état civil et de papiers d’identité. Une kyrielle de personnalités de la société civile (de Sylviane Agacinski-Jospin à Marcel Rufo, en passant par Gisèle Halimi, Catherine Dolto ou Boris Cyrulnik) ont pris position contre « l’exploitation des femmes et la promotion du tout génétique ».
 
Mais autant de personnalités (menées par exemple par Elisabeth Badinter, Antoinette Fouque ou Elisabeth Roudinesco) sont de l’avis exactement inverse. Et l’opinion est favorable à la GPA. Selon plusieurs sondages réalisés ces deux dernières années, une majorité de Français approuvent la légalisation des mères porteuses, sont prêts à recourir à cette forme de gestation si elle était autorisée, et trouvent même que les mères porteuses devraient être rémunérées.
 
Résultat de ce gros clivage, la classe politique flotte. Spectaculairement.
En 2008, un groupe de travail du Sénat a prôné la légalisation encadrée (exclusion des couples homosexuels, pas de rémunération de la mère porteuse, etc.) de la GPA. Un groupe de députés a aussitôt fait part de ses réserves. La majorité de droite compte nombre d’opposants résolus à la GPA. Mais la secrétaire d’Etat (UMP) à la Famille, Nadine Morano, veut « un cadre légal, pour limiter les dérives ». Du coup, son parti en est réduit à « considérer qu’il est normal qu’il y ait un débat » sur le sujet. A gauche, si les Verts prônent plutôt la légalisation des mères porteuses, au PS, on trouve autant d’opposants que de partisans. Les premiers redoutent une « marchandisation du corps des femmes ». Les seconds trouvent impératif de mettre fin au « tourisme procréatif » qui envoie à l’étranger – souvent à prix d’or et dans des conditions peu reluisantes – les Français candidats à cette forme de gestation.
 
On n’a donc pas fini d’en parler.

Au Canada ! Yves Gauthier signe un joli papier sur Antoinette Fouque (site www.infoculture.ca, 07.01.10)

Sur le site www.Infoculture.ca http://www.infoculture.ca/?page=6&view=2&numero=12902

afouque.jpgANTOINETTE FOUQUE
Entretiens avec Christophe Bourseiller

2010-01-07

Les entretiens faits par Christophe Bourseiller avec Antoinette Fouque n’ont rien de banal. Le résultat, sous forme de livre, permet aux lecteurs de découvrir une femme à l’intelligence vive, aux idées novatrices et au besoin irrépressible de les traduire en actions structurantes.

Cofondatrice du MLF en 1968, psychanalyste, députée européenne et éditrice, Antoinette Fouque a dédié sa vie tout entière à la condition féminine… créatrice des «Editions des Femmes», cette femme de renommée internationale dévoile sa perception de la condition féminine. « Notre MLF voulait la révolution culturelle et la révolution sexuelle » nous dit Antoinette Fouque.

Elle a été de tous les combats pour la femme depuis les derniers quarante ans. Mentionnons ses luttes contre l’excision, pour le droit à l’avortement, contre la violence conjugale ou la liberté d’expression. Antoinette Fouque croit fermement et est intimement persuadée que les femmes sont le principal moteur pour faire avancer la justice et la démocratie dans le monde.

La femme, cette créatrice de vie humaine, possède des valeurs intrinsèques qui lui sont propres. C’est pourquoi elle a souhaité dès le début de sa réflexion joindre la psychanalyse à la politique. Car selon Antoinette Fouque, il faut bien se connaître avant de revendiquer des changements qui nous concernent. Elle place la procréation au centre de tout. Cette revendication ne laisse personne indifférent. « Le XXI ème siècle sera génital ou ne sera pas ».

Cofondatrice du Mouvement de Libération des Femmes, pionnière d’un certain « féminisme », Antoinette Fouque est aujourd’hui une théoricienne inclassable. On sait que le mouvement des femmes se divise depuis l’origine en deux branches. La première privilégie le social et milite pour les droits des femmes. La seconde est plus philosophique. Elle s’interroge : qu’est-ce qu’une femme ? C’est tout le travail d’Antoinette Fouque. En quoi consiste l’être-femme ? Très critique à l’égard du féminisme, Antoinette Fouque place notamment la maternité au cœur de la féminité et en tire toutes les conséquences même les plus anticonformistes.

Voilà une lecture qui fera du bien à tous ceux et celles qui profiteront de l’occasion pour mieux connaître cette femme d’entre les femmes, une géante parmi les géants. À lire absolument.

www.bourin-editeur.fr

Par Yves Gauthier

Christelle Guibert interviewe Antoinette Fouque sur le masculinisme (Ouest-France, 5 janvier 2010)

 Ouest-France (5 janvier 2010) Le masculinisme, ou la revanche de la ‘virilité’ mardi 05 janvier 2010

mec.JPGAprès des années de lutte pour les droits des femmes, la prochaine décennie verra-t-elle exploser le « masculinisme » ? Ce mouvement, né pour promouvoir « la cause des hommes », s’oppose au féminisme et lui reproche d’avoir instauré un « matriarcat déstabilisant ». Il est particulièrement actif aux États-Unis et en Grande-Bretagne, où il est mené par le groupe Fathers for Justice (F4J sur Internet) : des pères qui, au départ, se battaient pour que les gardes d’enfants soient plus égalitairement accordées, en cas de divorce.

Le mouvement est très virulent au Québec. Il a refait parler de lui en décembre, vingt ans après le drame de l’école Polytechnique, à Montréal : quatorze femmes tuées par un homme qui avait hurlé « Je hais les féministes » en tirant. Une journaliste de Radio Canada a révélé qu’un site Internet masculiniste érigeait ce tueur en héros, quelques jours avant la commémoration. Un cas extrême.

En France, le mouvement semble beaucoup moins structuré. Antoinette Fouque, la cofondatrice du MLF, observe cependant l’émergence de « quelques ténors d’un virilisme à la française ».

« Un machisme new age »

Le jour où une femme est devenue pilote de ligne, en 2000, ils ont donné de la voix pour dénoncer la féminisation des professions (La cause des hommes de Patrick Guillot, Vers la féminisation d’Alain Soral), pour reprocher aux mères d’élever leurs fils avec des valeurs trop féminines, et aux sportifs d’adopter une esthétique homosexuelle en posant nus pour un calendrier.

Face à cette « perte du modèle masculin », certains prônent le retour de la virilité. Dont le journaliste Éric Zemmour, auteur d’un livre intitulé Le premier sexe. Il est cité dans le documentaire La domination masculine, sorti à la fin de l’année au cinéma, mais il a contre-attaqué, en indiquant que ses « propos avaient été déformés » par le réalisateur.

Antoinette Fouque analyse l’origine de ce nouvel élan de virilité : « Toute révolution connaît sa contre-révolution. C’est ce que vit le féminisme. L’Américaine Susan Falludi a appelé ce phénomène ‘Backlash’, le retour du bâton. » Selon l’intellectuelle, « il faut absolument barrer la porte à ce machisme new age », puisque l’égalité des sexes est loin d’être acquise : « On n’observe pas de régression, mais un frein à la progression. Je rappelle que les femmes produisent les deux-tiers de la richesse mondiale et n’en possèdent que 2 %. »

Elle demande même d’urgence un « Grenelle mondial des femmes », en 2010.

Christelle GUIBERT.

Têtu annonce les deux livres phares d’Antoinette Fouque de cet hiver ! (comme auteure et comme éditrice !) (janvier 2010)

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af.jpg TÊTU NEWS – Jan 2010

Mémento
Après L’Imparfaite, revue sociologique érotique décloisonnée des étudiants de Sciences-Po Paris, voilà Monstre, une revue « gay » qui revitalise un adjectif qui n’était plus assez transgressif, devant les très à la mode bobo ou queer. C’est « justement cela qui laisse le champ libre à sa réactivation », dixit les fondateurs de Monstre. * Aux éditions Bourin : Qui êtes-vous Antoinette Fouque ? Interviewée par Christophe Bourseiller, elle expose sa pensée phare, qui place la procréation au coeur de l’éthique et de la libido des femmes. A méditer… * Fouque encore, avec, aux éditions Des femmes « Des mots pour agir contre les violences faites aux femmes. Souvenirs, Monologues, Pamphlets et Prières », édition augmentée des Monologues du Vagin, sous la direction d’Eve Ensler et de Mollie Doyle.

La Quinzaine se remémore son numéro 85… Avec Antoinette Fouque ! (16 au 31 décembre 2009)

antoinette_fouque.jpgLA QUINZAINE LITTERAIRE 16/31 Déc. 09 – biMensuel

Il y a 40 ans dans La Quinzaine
 
Sur le site de La Quinzaine littéraire
 
Le numéro 85 du 16 décembre 1969 vient d’être mis en ligne.
 
Au sommaire :
Les livres de La Quinzaine : Bonjour minuit, Les tigres sont plus beaux à voir de Jean Rhys sont chroniqués par Diane Fernandez ; « Soljenitsyne, la Russie, l’exil » d’Yves Léger fait le point sur la situation de l’écrivain dissident. A la rubrique Romans français, Jean Wagner parle de Tentative de visite à une base étrangère de Raphaël Pividal et de Portrait de l’enfant de Louis Calaferte, Joseph Guglielmi chronique Le Carnaval de Jean-Claude Montel, Marie-Claude Jalard Brancula de Roger Curel. Suivent ensuite les romans étrangers : Fiorella de Carlo Cassola par Antoinette Fouque-Grugnardi Blanche-Neige de Donald Barthelme par Serge Fauchereau, Les Oeuvres d’Eustace de James Purdy par Alain Clerval, Infantilia de Lars Gyllensten par Claude Bonnefoy ; à la rubrique Livres cadeaux : « Les meilleurs livres pour enfants » par Simone Lamblin, « Les meilleurs livres d’art de l’année » par Jean Selz. Louis Marin rend compte de l’exposition Klee et le visible. En Histoire : le monde que nous avons perdu de Peter Laslett par Philippe Aries ; en Philosophie : Maurice Merleau-Ponty La Prose du monde par Anne Fabre-Luce ; Gilbert Lascault rend compte du numéro 39 de la revue L’Arc consacré à Michel Butor ; Rachid Boudjedra chronique Andreï Roublev de Tarkovsky ; Gilles Sandier célèbre l’Open Theater de New-York ; George Perec poursuit son feuilleton W.

Le magazine « Nouveau consommateur » évoque l’oeuvre de Coline Serreau, nourrie par la pensée d’Antoinette Fouque (déc 09-jan 10)

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Déc 09 – jan 10 bimestriel

Le magazine de la consommation responsable. Nouveau Consommateur.

Coline Serreau
« La vie ne tient que par la réciprocité, la solidarité, l’entraide, le don… ».
ColineMouansSartoux2La grande cinéaste et la réalisatrice des grands films comme « Trois hommes et un couffin », « La crise » et d’autres succès nous livre une réflexion sur l’exigence d’une écologie populaire, féministe et solidaire. Coline Serreau, une femme à entendre, et une femme à voir, à travers les images des mondes en luttes qu’elle nous offre. Par Nathalie Calmé ( Extrait d’article Nouveau Consommateur N° 32 Décembre 2009)

Certains le pensent et le disent : l’écologie risque de perdre sa capacité subversive, de voir dissoudre ses potentialités d’émancipation, de constater que sa contribution à la résolution de la crise socio-environnementale planétaire est déviée ou minimisée… Analyses et propos sévères ? Il est pourtant vrai que l’inflation de l’adjectif « durable », utilisé pour qualifier à peu près tout, devrait nous faire réfléchir… Il semble que les grands médias, les grandes entreprises et les décideurs convergent pour segmenter la dite crise, la décomposer de telle façon que nous ne soyons plus en présence que d’une addition de « petites » crises, isolées les unes des autres : crise financière, crise du climat, crise agricole, crise du pouvoir d’achat, crise alimentaire… Celles et ceux qui ont à cœur de participer au long et difficile combat pour l’intérêt général, le bien commun et la sauvegarde de notre habitat qu’est la Terre, savent que ces crises sont les divers aspects d’un unique « désordre global ». Ils savent aussi que des solutions, concrètes et singulières, existent pour en sortir. C’est dans cet esprit que la réalisatrice Coline Serreau nous propose son nouveau film : La terre vue de la terre. Solutions locales pour un désordre global Ce film, qui sortira en une série de six documentaires, s’inscrit, philosophiquement, dans la même lignée que La Belle Verte, qui fut, en son temps, un vrai déclic et un déclencheur de la conscience écologique. L’idée commune ? Le rapport que l’humain entretient avec la terre qu’il habite est fondateur de son identité ; il est aussi le signe de son devenir. Lorsque ce rapport est malmené, quand la terre est meurtrie, c’est l’humanité même de l’humain qui est mutilée. Mais le nouveau film de Coline Serreau n’entend pas seulement décrire cette crise, il veut montrer que d’autres choix, théoriques et concrets, peuvent être mis en pratique. A travers des entretiens avec des penseurs et praticiens – de l’agrobiologiste Pierre Rabhi à l’économiste Hassan Zaoual, de l’écologiste Vandana Shiva au philosophe Patrick Viveret…-, La terre vue de la terre. Solutions locales pour un désordre global ouvre le champ des possibles !

Une écologie d’enfance

ColineBelleVerteBonOn ne dira jamais à quel point la fibre sociale, humaniste et écologiste de Coline Serreaun’est pas une « mode » passagère, à la différence de beaucoup de personnes qui verdissent leur discours, à cause de l’air du temps. Cette fibre remonte à son enfance et à sa jeunesse. Coline Serreau me racontait l’importance jouée par un groupe particulier de femmes dans l’éveil de sa conscience. Ces femmes animaient l’Ecole de Beauvallon, dans la Drôme. « C’est par le biais de ma famille que j’ai vécu dans ce lieu, trois ans durant. Ma tante, Simone Monnier, était l’une des responsables de cette maison qui accueillait des enfants en difficulté. L’Ecole de Beauvallon avait été fondée en 1929 par Catherine Kraftt et Marguerite Soubeyran. J’appelais Marguerite «  mamie ». Toutes ces femmes étaient extraordinaires. Marguerite Soubeyran avait étudié les grandes pédagogies nouvelles, comme celles de Piaget, Montessori et Steiner. Elles étaient aussi en faveur des médecines naturelles. J’ai acquis beaucoup de connaissances sur la santé et l’écologie dans ce cadre-là. Nous vivions dans la nature. Cette expérience m’a apporté la certitude qu’une vie plus humaine, intelligente, simple, fraternelle, naturelle était possible. » Aujourd’hui, cette éducation laisse encore son empreinte. Au détour de la conversation, elle résume : « Vivre dans la simplicité volontaire, se réapproprier notre autonomie est notre plus grande arme. C’est retrouver la liberté et le pouvoir sur nos vies. »

Ecoféminisme

Cette articulation entre la résistance contemporaine des femmes entre le patriarcat qu’elles subissent, aux quatre coins du monde, y compris en Occident, et le souci de la terre, est l’un des axes structurants de la pensée et de l’action de Coline Serreau. Dans son documentaire, deux personnes mettent le doigt sur ce lien, Antoinette Fouque, figure mythique du MLF, et Vandana Shiva, figure majeure de l’écoféminisme en Inde et dans le monde. Dans un entretien accordé à Patrice Van Eersel, la réalisatrice soulignait avec force : « La terre et l’utérus, c’est le même mot. Mater, matière, utérus, terre, tout ça a la même racine. L’humus, l’humanisme, l’humilité… Les progressistes, dont je me suis longtemps sentie proche, n’ont jamais voulu voir le fond du problème : la relation entre la terre et l’utérus […] Ce que nous appelons « civilisation » repose sur l’écrasement de la puissance créatrice des mères. Si nous ne remontons pas jusque-là, nous ne réparerons rien. Le ventre et le sexe des femmes, autrement dit le lieu d’o
ù sort le vivant, n’est pas respecté. Il est considéré comme « rien » et non comme une entité intelligente. Sa fonction est vitale, mais elle est évacuée de tout respect, de tout comptage, elle n’existe pas dans l’ordre de ce que les humains appellent « création ». Si vous acceptez ce meurtre et sa symbolique, tous les crimes deviennent possibles. »

Comprendre le fonctionnement du capitalisme

Le substantif « intelligence » et le verbe « comprendre » reviennent souvent dans la parole de Coline Serreau. L’écologie et le sens aigü de la justice sociale ne peuvent se satisfaire d’une approche qui ne serait qu’émotionnelle ou sentimentale. L’affect doit se lier à la pensée la plus exigeante. Dans son parcours de vie, au coeur de sa jeunesse, dans les années 1960, la rencontre avec Karl Marx a été décisive : « Le Marxisme m’a expliqué le fonctionnement de la société à travers le principe de la lutte entre les classes sociales, les règles de l’économie capitaliste, ainsi que les leviers par lesquels il serait possible de la faire changer. Et justement, Marx m’a permis de le comprendre, à travers son analyse intelligente du progrès, de la société, de l’organisation des classes sociales. Si nous n’avons pas cette grille d’analyse, nous ne comprendrons pas comment le monde fonctionne. C’est un peu comme si nous voulions faire des études de physique sans jamais avoir fait auparavant des études de mathématiques. » C’est très certainement ce souci de l’analyse de structures qui lui fait dire que l’on ne devrait pas tout « individualiser ». Le tout est plus que la somme de ses parties, nous enseigne la pensée écologique (cf. Edgar Morin), et la société est plus que la somme des individus qui la composent. Il nous faut donc entrelacer le personnel et le collectif et refuser un développement personnel qui ne se concentrerait que sur la seule… personne ! : « Il nous faut retrouver, chacun d’entre nous, dans nos individualités, un sens à notre vie. Mais c’est ensemble que nous nous en sortirons. La vie ne tient que par la réciprocité, la solidarité, l’entraide, le don… » C’est pourquoi Coline Serreau dénonce, avec raison, cette écologie asociale, apolitique, axée uniquement sur les changements de comportement et oublieuse de la critique nécessaire et vitale du système capitaliste : « Il faut arrêter de culpabiliser les gens. Ils ont leurs problèmes de vie quotidienne : leurs factures à payer, le chômage, les maladies… Ce ne sont pas eux qui sont directement coupables. Les gens vivent comme ils peuvent leur petite vie. Je veux simplement leur dire que lorsque tout va aller très mal, il existera des solutions, des alternatives ». Coline Serreau, une femme à entendre, et une femme à voir, à travers les images des mondes en luttes qu’elle nous offre. »

 Nathalie Calmé est journaliste et écrivain. Elle anime l’Association pour la Diversité Active et la Solidarité Internationale(ADIVASI).

Couv__NC32A lire la suite dans NC 32 ( Décembre 2009)

 Aller plus loin :

* Serreau, Coline (2009) Le jeûne. Un choix de « simplicité volontaire » In Desbrosses Philippe et Calmé Nathalie (sous la direction de), Médecines et Alimentation du futur Santé et modes de vie (143-148) Paris – Le Courrier du Livre

* Serreau, Coline (2009) La grande colère de Coline Serreau. Entretien avec Patrice van Eersel. Nouvelles Clés, 62, Juin-Août, 42-45

* Serreau, Coline (2009) La Terre vue de la terre. L’image au service des peuples et de la terre. Entretien avec Nathalie Calmé. Alliance, 20, Février-Avril, 16-20.