La délicieuse Maïa Brami a fait sur BscNews, le magazine littéraire et culturel gratuit depuis 2007, des interviews des intervenants à la soirée « Artiste Féminin Singulier » (conférence-débat le 27 octobre 2009 à l’Espace des Femmes-Antoinette Fouque)

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Du désir à la création

Thierry Delcourt

 

(propos recueillis par Maïa Brami (BSCNEWS.FR)

Qu’évoque pour vous le mot « désir » ?

 

Thierry Delcourt : Je le rattache à la dimension du plaisir.

 

De tout temps, la femme a incarné le désir. Pourquoi, selon vous ? Les guérillas Girls ont répondu à cette question : dans les musées, les femmes sont sur les murs, représentées par les oeuvres d’art, mais rares sont les artistes exposées, bien que les choses évoluent. Pour moi, « désir » ne s’associe pas à « femme », mais à la construction de l’amour. Mais une déformation est toujours possible : j’ai passé sept ans en immersion à travailler mes deux livres – « Au risque de l’art » et « Artiste féminin Singulier » (éditions L’Âge d’homme, 2007 et 2009) – et ma déformation est complète : mon désir passe par la rencontre, la compréhension, le regard, l’écoute des artistes… au grand damne de mes proches d’ailleurs ! (rires)

 

D’où vous est venu le désir d’explorer la création féminine ?

 

C’est d’abord une histoire de praticien et de chercheur. En tant que praticien, je me suis demandé comment rester créatif avec chaque patient et comment redonner une possibilité d’ouverture – notamment au désir – aux patients pour qui le monde s’est fermé. Ces interrogations m’ont amené à m’intéresser à l’Art Brut, puis à la création des artistes et ce qu’on en disait. Les réponses apportées par les psychanalystes ou les critiques d’art ne m’ont pas convenu. J’ai donc décidé d’aller à la source, de faire émerger le processus de création à partir d’entretiens approfondis. Ca a été une aventure phénoménale : j’ai découvert des choses, notamment sur le désir, mais aussi sur la construction des représentations, la façon dont elles se réagencent en nous. Dans « Artiste Féminin Singulier », j’ai volontairement laissé de longs entretiens, ils sont d’une telle richesse que, rien qu’avec eux, j’aurais pu faire un livre ! Le premier, avec Lydie Aricks, a duré huit heures, pendant lesquelles elle a fait une sculpture tout en me parlant. Notre échange l’a autant transformée que moi !

 

Vous êtes allé vers le processus créatif, certes, mais féminin…

 

au départ, j’ai envoyé un certain nombre de dossiers à des artistes tout sexes confondus, mais les hommes ont été plus prompts à me répondre et à accepter. Je me suis alors retrouvé avec dix hommes pour deux femmes ! s’est donc posée la question de la création en termes de genres, masculin et féminin. Mais d’emblée, en écrivant le premier livre centré sur des artistes hommes, j’ai conçu le deuxième afin d’essayer de voir s’il y avait une distinction possible, qu
i serait liée à l’Histoire, à la façon dont les femmes sont progressivement reconnues dans l’espace public.

 

Alors, selon vous, la création a t-elle un sexe ?

 

Au moins, à présent on peut poser la question, qui ne se posait pas il y a un siècle, puisque la création avait un sexe, celui de l’universel, de l’homme. L’art de la femme était considéré comme mineur ou « non art ». Bien sûr, il y a eu des exceptions, mais on voit bien comment les pionnières, notamment celles qui ont travaillé le corps – Marina Abramovic ou Annie Sprinkle – ont imposé un sexe à la création. Elles n’en sont pas restées là, mais ce fut une étape indispensable pour dépasser le stéréotype de la muse et d’accéder au rang d’Artiste.

 

Vous avez rencontré quatorze femmes artistes, parmi lesquelles Orlan, la danseuse chorégraphe Carolyn Carlson ou la poète Valérie Rouzeau, laquelle associez-vous au mot « désir » ?

 

Lydie Aricks a signé la couverture. Le tableau s’appelle « Elle, Sémaphore », il s’agit d’un corps paysage, un corps pris dans la mer, avec ce jeu entre les mots « mer » et « mère ». Et pour l’avoir longuement regardée travailler, c’est vraiment le désir à l’état pur qui traverse son corps et qui fait qu’elle en est traversé. Au bout d’un moment, les frontières disparaissent entre elle et la toile. Tout intervient, à la fois son corps gestuel mais aussi son corps physiologique, son corps de désir – elle dit bien que ça part du ventre et elle rattache même le processus à la défécation, ce qui n’est pas évident à dire. Elle racle tous les éléments qui composent notre désir et qui font qu’à un certain moment, on va être poussé, vers la sexualité par exemple, sauf que dans son cas, tout est concentré sur l’acte de création.

 

Comment ce livre vous a t-il changé ?

 

Même si on se dit un peu féministe, on est toujours pris dans des préfigurations, des automatismes. En tant qu’homme, j’ai découvert la complexité du problème qui touche au regard porté sur les femmes dans la société. Il faudra sans doute plusieurs générations et de la détermination, notamment chez les hommes, pour faire évoluer les comportements. En tant que psychiatre psychanalyste, je travaille désormais avec mes patients à partir de leur désir et non de leur souffrance. Il ne s’agit pas de les amener à créer, mais à trouver des leviers, des outils pour produire quelque chose qui va leur donner un plus.

 

Propos recueillis par Maïa Brami

colette.jpgColette Deblé : Je suis du pays de l’Artois et je suis une artésienne parce que la peinture coule de source. Elle jaillit comme ça. Peindre c’est une activité aberrante, alors j’ai écrit un livre, Quelque chose de très doux (éditions POL) où j’exprime mon besoin de m’exprimer, de faire de la peinture, comme la sève qui monte dans les arbres et ça n’arrête pas d’éjaculer partout ! On pourrait croire que c’est un roman porno, mais en fait pas du tout, c’est une réflexion sur la peinture et maintenant, j’ai eu besoin de faire une réflexion sur ce qui reste des femmes et je fais un essai plastique sur la représentation des femmes dans l’histoire de l’art. J’essaie de saisir comment on a les a perçues dans tous les pays, à toutes les époques. C’est un travail qui circule dans le monde entier, qui est sous la forme de petits dessins de 30X40 cm et je peux partir au bout du monde avec toute l’histoire du regard des hommes sur les femmes ! C’est un travail commencé en 1990. … J’essaie de voir comme on a vu et ça passe par le bout de mes doigts et vraiment on sent que les
hommes aiment les femmes, c’est voluptueux – c’est le mot vraiment ! » Propos recueillis par Maïa Brami

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Jean-Pierre Sag (collaborateur de l’ouvrage Penser avec Antoinette Fouque, éditions des femmes, 2008) : Je suis un compagnon de route du MLF, un ami d’Antoinette Fouque, j’ai fait une psychanalyse avec elle, c’est comme ça que je suis devenu psychanalyste par la suite. Je suis un témoin très proche.  J’a participé donc naturellement à ce livre sur la pensée d’Antoinette Fouque avec un certain nombre d’auteurs.

 

Antoinette Fouque et le désir :

S’il n’y a qu’une formule qu’on peut retenir d’Antoinette Fouque, c’est le titre de son premier livre : Il y a deux sexes. (Gallimard, 1995). C’est à la fois une évidence, une banalité et une révolution, puisque Freud, Lacan et l’énorme majorité des psychanalystes en restent à la conception phallique de la sexualité, avec un sexe de référence dont les hommes sont possesseurs et que les femmes désirent puisqu’elles ne l’ont pas. Les femmes sont donc dans l’envie du pénis et les hommes en sont fiers et les hommes en tirent leur fierté, d’où une toute puissance du phallus. En deux mots, voilà la mécanique du désir dans cette perspective psychanalytique traditionnelle, qui permet de mieux mesurer l’avancée incroyable de la pensée d’Antoinette Fouque. 

Propos recueillis par Maïa Brami                        

La Ville aux Livres de Creil – Avec Génération MLF, Chantal Chawaf, Benoite Groult et Colette Deblé – Samedi 20 et dimanche 21 novembre 2009

Vendredi 20 et samedi 21 novembre, c’est à l’Espace Culturel La Faïencerie, Allée Nelson 60 100 Creil que vous pourrez rencontrer le collectif Génération MLF, Chantal Chawaf, Benoite Groult, Colette Deblé, toutes auteures des éditions Des femmes-Antoinette Fouque dans un Salon, La Ville aux Livres, ayant décidé de mettre cette année les Femme(s) à l’honneur… Pas trop tôt ! 

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Le programme :

Vendredi 20 novembre, de 18 h à 20 h 30, rendez-vous au Salon du Livre de Creil (Espace cuturel a Faïencerie – Allée Nelson – 60 100 Creil)

SOIRÉE DÉBAT  « Génération MLF 1968-2008 » Avec Antoinette FOUQUE 

à 18h : film de présentation Génération MLF 1968-2008, puis de 19h à 20h30 : débat – (entrée gratuite) sur le livre Génération MLF 1968-2008  (Débat animé par le collectif du livre « Génération MLF 1968-2008 »)

Autour du livre publié par les éditions Des femmes, qui rassemble de nombreux témoignages et documents, fait revivre chacune des quarante années de 1968 à 2008, en rapprochant une chronologie des principaux événements concernant les progrès et obstacles dans les conquêtes des droits des femmes, de l’activité du mouvement de libération des femmes.

Samedi 21 novembre, au Salon du Livre de Creil (Espace Cuturel La Faïencerie – Allée Nelson – 60 100 Creil) tables rondes & débats :

1) de 14 h à 15 h 30 « L’engagement au féminin »

Femmes auteurs, historiennes, juristes, journalistes, artistes…, toujours présentes, en actes et en mots, engagées dans une lutte perpétuelle, celle d’une égalité hommes-femmes, voie unique d’une participation commune à l’humanité.

Avec les invitées du Salon : Laure ADLER, Chantal CHAWAF, Mercedes DEAMBROSIS, Benoite GROULT, Leïla SEBBAR.

 

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2) de 15 h 30 à 17 h « Séverine. Vie et combats d’une frondeuse »

 Séverine, journaliste et écrivaine, est née à Paris en 1855, sous le nom de Caroline Rémy. En 1880, elle rencontre Jules Vallès, député de la Commune, célèbre écrivain, et veut alors devenir journaliste. Elle fonde avec lui, en 1881, le journal le Cri du peuple…

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 A propos du thème : Femme(s)

« Femme(s) »… Pôle d’une humanité dont l’homme est l’autre pôle. Lutte incessante pour l’acceptation de cette simple affirmation, sans laquelle pourtant rien n’est possible, en dehors de laquelle toutes les déchirures, tous les conflits, toutes les injustices ont été et sont encore perpétrés. Pour Elisabeth BADINTER, il faut revenir aux fondamentaux « liberté » et « égalité » si l’on veut vivre en harmonie et non plus les uns contre les autres : « Notre finalité est une meilleure entente entre hommes et femmes. Pour continuer à avancer, il faut admettre que nous avons beaucoup en commun et que l’on peut tout partager ». « Femme(s) »… Dont le combat, loin d’être une guerre, s’attache à faire triompher la force morale. Pour Michelle PERROT : « La construction d’une citoyenne, véritablement démocratique, donc universelle, suppose la participation des femmes. Elle est un enjeu des temps qui viennent. » « Femme(s) »… Génératrices, liens entre les générations et la tradition, fil d’Ariane de la transmission. Mais aussi, femmes poètes, auteurs, artistes, avec l’écoute en partage, le regard sur l’autre comme « un nouvel espoir », mot de Benoîte GROULT. Pour Antoinette FOUQUE, « Procréatrices, mémoire du futur, de mères en filles et de générations en générations, les femmes sont créatrices à leur tour, en nombre et dans tous les domaines. » Leur entrée massive dans l’histoire, par le fait du mouvement des femmes, est « le plus bouleversant des bouleversements. » Et Laure ADLER de dire : « Les livres ne sont pas des objets comme les autres pour les femmes ; depuis l’aube du christianisme jusqu’à aujourd’hui, entre nous et eux, circule un courant chaud, une affinité secrète, une relation étrange et singulière tissée d’interdits, d’appropriations, de réincorporations. »

Laissons-nous alors guider par ces livres et par les débats et tables rondes qui suivront, avec la volonté de les offrir en partage, de les porter en conscience vers un engagement citoyen et solidaire, de les accompagner avec espoir dans la voie d’une nouvelle condition humaine.

Sylviane LEONETTI

Chef de projet de La Ville Aux Livres

Avec Evelyne LE GARREC, auteur, Colette DEBLÉ, artiste peintre, et l’Association « Paroles de Femmes en Picardie » – « L’écrivain comme écrivain public : la voix des femmes par la voix d’une femme écrivain »

Causette, le nouveau magazine « plus féminin du cerveau que du capiton » a déjà interviewé Antoinette Fouque sur son nouveau livre ! (novembre 2009) – Bravo ! Longue et heureuse vie à Causette !

aflivre.jpgCAUSETTE – NOVEMBRE-DECEMBRE 2009
DOSSIER SPECIAL FEMINISME
Je ne suis pas féministe mais…
… ma mère l’a été pour deux
 
UNE FEMME EST UNE FEMME
 
A 73 ans, Antoinette Fouque accuse une vie intense de combats et de prises de position risquées. Editrice et psychanalyste, celle qui fut la cofondatrice du Mouvement de libération des femmes (MLF) continue la lutte. L’esprit vif, elle est là où on ne l’attendait pas. Conservatrice et moderne à la fois, elle se positionne pour la gestation pour autrui et contre la prostitution.
 
Quel regard portez-vous sur le féminisme aujourd’hui ? Pourquoi a t-il mauvaise presse ?
 
Chez qui a t-il mauvaise presse ? Telle femme dit qu’elle n’est pas féministe mais ses actes disent le contraire. Telle autre affirme l’être, et on en est surpris. Il y a un féminisme de masse qui va avec la démocratisation des moeurs. Il s’ignore ou se revendique sur le même point d’affirmation de liberté. Aujourd’hui et pour longtemps encore, être féministe peut faire plaisir, apporter de la liberté, de l’air, de la libido. S’il est le premier stade de la prise de conscience de la domination masculine, alors il est nécessaire. Mais il ne suffit pas, et par certains côtés, il renforce même cette domination.
 
Vous êtes cofondatrice du MLF. La scission au sein du mouvement a t-elle fondamentalement changé les choses ? A quand la réconciliation ?
 
Au départ, en 1968, avec Monique Wittig, nous étions de vraies partenaires pour faire démarrer le MLF, mais nous avions des perspectives différentes. pour elle, femme signifiait aliénation. Il fallait donc se débarrasser de l’identité femme. Lacan disait : « la femme, ça n’existe pas », et mon obsession était : « comment exister ? » L’expérience de la gestation, ce qui fait qu’on est une femme et pas un homme, de mère en fille, m’est apparue la chose principale. Lorsqu’en 1970, le mouvement est devenu plus massif, certaines ont voulu le rebaptiser « mouvement féministe révolutionnaire », faisant voler en éclats les mots « femme » et « libération ». Voilà la scission. Je n’en suis pas l’agent. Elle est venue de cette volonté d’unifier le mouvement sous le label féministe. En 1979, certaines qui se revendiquaient du féminisme et qui ne voulaient plus du MLF sont allées dans les partis. J’ai fait une association pour que le MLF ne disparaisse pas.
 
Vous avez déclaré que les lesbiennes et les gays sont des enfants du MLF…
 
J’ai organisé, dès 1970, la première réunion sur le thème de l’homosexualité, chez moi, rue des Saints-Pères. Nous y étions très nombreuses, et nous avons même vu arriver de Pigalle toutes sortes de jeunes femmes travesties, trans., hétérosexuelles comprises. Le MLF n’était pas pour moi un mouvement lesbien, mais un mouvement homosexué, un espace de solidarité, de culture, pour sortir de l’esclavage. Et il a ouvert le voie à la reconnaissance de l’homosexualité pour les deux sexes. lorsque j’ai rencontré Guy Hocquenghem, il n’osait pas affirmer sa sexualité dans son groupe gauchiste et se sentait discriminé comme homosexuel. Je lui ai expliqué qu’il devait en faire une question politique, un moteur de lutte. Trois mois après, il fondait le FHAR (front homosexuel d’action révolutionnaire).
 
Votre lutte pour la liberté des femmes fait écho à une question éthique cruciale : la gestation pour autrui. On ne vous attendait pas si ouverte sur la question…
 
Là aussi, votre surprise mérite une genèse, une généalogie, pour dire la naissance d’un mouvement de pensée. La gestation était mon motif pour faire le MLF en 1968. Dès l’apparition de la gestation pour autrui, vers 1982, j’ai dit publiquement que la question du statut des « mères porteuses » serait la grande question du XXXIème siècle et que les reconnaître était « un acte de décolonisation de l’utérus » (interview d’Antoinette Fouque, Elle n° 2039, 4 février 1985.) Comme l’avortement pour lequel le MLF s’est fortement mobilisé a été le moment négatif de la gestation, la gestation pour autrui en est le moment affirmatif. Elle fait surgir, après presque quarante ans, ce qui est en cause dans la différence des sexes : cette compétence de gestation propre aux femmes. Comme Marx a levé la censure sur le travail et l’exploitation du prolétariat, le peuple producteur, il y a, avec la gestation pour autrui, levée de forclusion sur qui produit la richesse humaine : les femmes, qui produisent, gestation après gestation, l’humanité. Beaucoup de femmes de gauche se sont élevées contre, d’un point de vue strictement économique. Mais il y aura toujours le monde de l’économie capitaliste et celui de l’économie du don. Le monde de la prostitution de l’utérus, et celui de la gestation qui est l’éthique même. Il y aura toujours une course entre l’asservissement et la libération des femmes. Il faut une reconnaissance de la fonction génésique des femmes pour lutter contre la prostitution sexuelle et utérine.
 
N’est-il pas paradoxal d’être pour les mères porteuses et contre la prostitution ?
 
Je suis née à Marseille, dans le quartier des prostituées. La marraine de mon père, enlevée à 15 ans, fut déportée de Corse vers un bordel en Argentine par son propre frère. Elle a été enfermée les vingt premières années de sa vie. C’est une histoire d’esclavage. Lorsque j’étais députée au Parlement européen, il fallait distinguer la traite des êtres humains et la prostitution « librement consentie ». Certaines prostituées se disaient libres sous la pression de leur proxénète. Je ne crois pas à la prostitution libre.
 
On connaît les divergences entre le féminisme et le Queer, autour du genre. Vous avez écrit Il y a deux sexes. Votre position est-elle en
core tenable ?
 
c’est une position de combat ! Au-delà du gender, qui me paraît être le déploiement d’une humanité adolescente, narcissique, dans le paraître, la posture. Contrairement à Freud, je pense qu’il y a, au-delà de l’adolescence, une génitalité, une activité des femmes avec une compétence propre. Si le sexe de l’homme est symbolisé, la symbolisation du sexe des femmes reste à faire. On peut tout greffer, sauf un utérus. C’est pour cela que des femmes qui veulent devenir des hommes prennent tous les caractères secondaires de la masculinité mais gardent leur utérus pour ne pas perdre la compétence matricielle. Les signes secondaires qui passent avant les signes premiers, ceux du sexe, c’est le frivole qui prend le pas sur la matière. C’est un processus de dématérialisation, la mise en fuite de la matière charnelle, du réel et des deux sexes. Le jeu de genre à l’infini va du travestissement au transgender, mais il ne passe pas la barrière de la génitalité. C’est un jeu. Une forme de nihilisme. Mais le réel de la différence des sexes résiste.
 
Êtes-vous Queer ?
 
Si le Queer est un jeu et s’il s’agit de lever la censure, nous le faisions depuis longtemps avec Wittig ! Dans les années 70, on s’habillait en homme. Il faudrait être stupide pour ne pas se reconnaître bisexuée. Nous étions libres !
 
Quels sont vos rêves pour les femmes ?
 
Si chacune s’arrime à se demander : « Je suis une femme, est-ce que j’ai le droit d’exister en tant que femme ? » et que la réponse est oui… alors, c’est gagné !
 
Propos recueillis par Agnès Vannouvong
 
A lire : Antoinette fouque, Entretiens avec Christophe Bourseiller, Bourin éditeur, coll., à paraître le 13 novembre 2009.

Françoise Vergier rend présente Antoinette Fouque dans la Revue Aréa (automne-hiver 2009)

1272vergier_merebrune.jpgPRESSE NATIONALE
- “ L’énergie des principes” entretien avec Christine Jean, in « area », 120 femmes s’expriment, féminin pluriel,n°19/20 automne-hiver 2009, p 71, 72, 73, 74, 75, 76, 77.
http://www.francoise-vergier.com/
 
Aréa Revue http://www.areaparis.com/ Entretien avec Christine Jean – Françoise Vergier
L’énergie des principes
La poésie comme règle, le sensible comme moteur et la responsabilité en tout. Les objets de Françoise Vergier sont animés, comme on pourrait le dire d’un fétiche chargé installant avec celui qui regarde une relation de fascination qui le rendrait auteur du monde.
 
(…)
A la question d’Alexis Rafael Krasolowsky :
 – Voyez-vous l’art comme un monde d’hommes ? Louise Bourgeois répondait :
 – Oui, c’est un monde où les hommes et les femmes essaient de satisfaire le pouvoir des hommes.
 – Pensez-vous qu’il y a un style particulier ou une part de style qui soit propre aux femmes ?
 – Pas encore. Avant que cela se produise, les femmes devront avoir oublié leur désir de satisfaire la structure du pouvoir mâle » (février 1971)
Louise Bourgeois disait cela il y a plus de trente ans, que diriez-vous aujourd’hui ?
 
Je lutte contre les valeurs du pouvoir patriarcal et je m’en défends maladroitement. Mon travail cherche à savoir qui je suis en tant que personne humaine et à  dire un sentiment du monde. Les sujets que j’approche sont liés à un principe féminin qui appartient autant aux hommes qu’aux femmes. Rien ne peut arrêter la matérialisation de ma parole, même si je rencontre des barrières, si l’on refuse de voir mon travail pour ce qu’il est : l’indication d’un apaisement réconciliateur. Les femmes sont encore un problème pour une bonne partie des hommes et énormément de femmes trouvent du plaisir à satisfaire la structure du pouvoir mâle. Celles qui réussissent en art et ailleurs sont l’arbre qui cache la forêt. Je suis en accord avec Antoinette Fouque lorsqu’elle dit que la gestation est une blessure narcissique pour l’homme.
L’universalité du mépris et de la dévaluation des femmes, la peur pure et simple du sexe féminin, la crainte de perdre le pouvoir ou le besoin d’asservir les compagnes le démontrent. Notre époque est en régression, mais la vague d’émancipation qui a eu lieu en Occident est irréversible. Lorsque Fabrice Hyber écrit sur un dessin, avant l’an 2000 « le XXIème siècle sera féminin ou ne sera pas » et qu’au premier jour de ce nouveau siècle, il note sur un autre dessin « le XXIème siècle sera féminin », il indique que nous ne pouvons pas ne pas faire un renversement des valeurs qui est vital pour notre humanité. Tout cela rejoint l’écologie nécessaire à notre planète, c’est-à-dire la recherche d’un équilibre respectueux envers tout ce qui compose nos vies de A à Z.

Soirée « Artiste féminin singulier » avec Thierry Delcourt et « ses » artistes, mardi 27 octobre, 18 h 30, 35 rue Jacob

Mardi 27 octobre, à 18 h 30, Antoinette Fouque et Des femmes reçoivent Thierry Delcourt, Colette Deblé, Sylvia Katuszewski et bien d’autres femmes créatrices pour une soirée consacrée au livre Artiste Féminin Singulier de Thierry Delcourt (LÂge d’homme, juin 2009). 22419817_4288451.jpgVous êtes le(la) bienvenu(e) !

Espace des femmes-Antoinette Fouque

 35, rue Jacob – Paris VI – Tél. 01 42 22 60 74

Mardi 27 octobre 2009 – 18 h 30

Antoinette Fouque et Des femmes

reçoivent Thierry Delcourt , Colette Deblé, Sylvia Katuszewski, Catherine Lopes-Curval, ORLAN, Sophie Rocco, Michelle Knoblauch, Milvia Maglione, Catherine Seher, Ruta, Myona Rimoldi-Guichaoua, Virginie Roux-Cassé et d’autres artistes pour une rencontre-débat autour du livre de Thierry Delcourt :

Artiste Féminin Singulier

éd. L’Âge d’Homme, 2009

 

En 2009 et 2010, plusieurs expositions, dont celle du Musée des femmes d’Antoinette Fouque se tenant à l’Espace des Femmes du 8/09 au 17/11 2009, et de nombreux évènements confirment l’évolution remarquable et enfin remarquée de la place des femmes et de leur visibilité dans l’art contemporain. Leur engagement politique, culturel et artistique contribue à cet essor.

 

Copie de Biarritz 131.jpgArtiste Féminin Singulier soulève quelques questions à débattre:

La création a-t-elle un sexe ? Faudrait-il repérer des différences entre femmes et hommes quant à leurs pratiques créatives ? Entre distinction et spécificité, que met en jeu le processus de création au féminin au-delà de la singularité de chaque artiste et de chaque œuvre ?

< span style="font-size: small;"> 

Les artistes Lydie Arickx, Edith Canat de Chizy, Carolyn Carlson, Colette Deblé, Mame Faguèye Bâ, Anta Germaine Gaye, Louise Giamari, Sylvia Katuszewski, Florentine Mulsant, Marylène Negro, ORLAN, Sophie Rocco, Valérie Rouzeau, Agnès Thurnauer etc ont accepté de parler longuement et intimement de leur pratique, de la place qu’elle occupe dans leur vie et des incidences de leur création sur leur être-femme.

 

Thierry Delcourt est allé à la rencontre de ces femmes artistes en se dégageant autant que faire se peut des a priori. Il les a écoutées attentivement parler de leur acte. de leur oeuvre et du processus de création qui les anime. Ainsi, il est possible de mieux comprendre, au-delà des évidences, le formidable mouvement impulsé par les femmes dans la création artistique contemporaine. Il ne s’agit par pour autant de catégoriser ces artistes dans une spécificité discriminante, même positive. Cette étude permet de tracer, à partir des singularités de chaque artiste, une distinction qui traverse le champ féminin où il est possible de croiser des hommes, de ceux qui ont fait le choix éclairé de quitter des prérogatives aussi aliénantes qu’illusoires en s’exposant au risque de créer Forme, expression, concept, sensibilité, énergie se conjuguent ici avec recherche, déconstruction, subversion, hétérogène, identité questionnée, appropriation …

anniversaire.jpgCette mise en chantier de l’art ouvre un espace de vie et de création passionnant qui tente de préserver un archipel d’humanité dans un monde où l’homme est sa propre crise.

(Michelle Knoblauch, Catherine Lopes-Curval, Milvia Maglione et d’autres non dans le livre seront là aussi)

 

(ci contre : Thierry Delcourt et sa petite fille, Maïa)

 

Table ronde + Vernissage de La Couverture vivante (jeudi 16 octobre, dès 18 h 30)

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Du 12 au 17 octobre 2009, Exposition La Couverture Vivante

Espace Des femmes – 35 rue Jacob – 75006 Paris

Vendredi 16 octobre, table ronde Tisser des liens entre les femmes du monde à 18 h 30, Vernissage à 20 heures

L’Espace Des femmes, un lieu pour la « solidarité absolue » des femmes

La Couverture Vivante est une création collective, composée d’autoportraits sur tissu, confectionnés par des femmes du monde entier afin de véhiculer un message de paix et de préservation du vivant.

Sur proposition de Michèle André, Antoinette Fouque accueille cette oeuvre à l’Espace Des femmes.

La Couverture Vivante, oeuvre commune de femmes, veut favoriser la « conscience citoyenne planétaire». « Le MLF, comme dit Antoinette Fouque, c’est le temps de la ’solidarité absolue’ : tant qu’une femme est esclave, je suis esclave aussi ; ma liberté commence avec celle de l’autre… ».

Quatre interventions et un débat :

 1) L’Espace Des femmes, relais du MLF : une histoire des solidarités. Catherine Guyot, Yvette Orengo ;

 2) Regard historique sur le rapport des femmes au corps et au monde à travers le vêtement. Le retour du « corps contraint » dans les vêtements ? Catherine Join-Dieterlé, ancienne conservatrice du Musée de la mode de la ville de Paris ;

 3) Au coeur des quilts. Autour de ces créations textiles, des femmes nord-américaines se rassemblaient et s’engageaient. Dominique Herbay ;

 4) La Compagnie Entre chien et loup propose un spectacle 2 : un état des lieux sur la condition des femmes vivant dans des pays occidentaux, sur leur implication dans la société civile et leur rapport au féminisme. Camille Perreau, Caroline Vergon.

Contact presse : pour La Couverture Vivante, Carole Menduni, + 33 (0)4 27 68 90 28, +33 (0)6 69 39 02 65 ; pour l’Espace Des femmes, Guilaine Depis, + 33 (0)6.84.36.31.85, guilaine_depis@yahoo.com

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Isabelle Clerc évoque le Musée des femmes dans Santé Yoga du mois d’octobre 2009

yoga.jpgSanté Yoga

Le journal des techniques de bien-être n°99 – Octobre 2009
Billet d’humeur
Entre Elles
Jusqu’en mai 2010, Beaubourg rend hommage aux femmes artistes et à la femme en général ; les femmes exposent à l’Orangerie du Sénat. Et tandis que les Editions des femmes ouvrent un « musée des femmes », le thème du prochain forum de Terre du Ciel (7-9 novembre) est : « les femmes peuvent changer le monde ». Elles sont partout et c’est bien. Mais ne devrait-on pas cesser de mettre un e à écrivain, auteur etc. Maintenant que les chaînes sont brisées ne peut-on exister sans se comparer ni revendiquer ? N’est-ce pas la condition même de toute création ? I.C.
 

La légende de La Couverture Vivante (exposition du 12 au 17 octobre 2009)

La Couverture Vivante

Une légende de demain

gcarrecarbonarenaima.gifIl était une fois un vaste monde aux confins des univers.

La vie s’était installée sous d’innombrables formes dans les immenses paysages de cette terre féconde.

Au fil du temps, une espèce en vint à dominer les autres.

Cette espèce vivante se dénommait elle-même « Etres humains », ce qui signifiait: «Créatures nées de la terre » par opposition aux dieux qui étaient célestes. L’ordre naturel des choses changea d’abord insensiblement puis de plus en plus rapidement.

Les humains soumirent les autres espèces vivantes, adaptèrent l’environnement à leur vision du monde et oublièrent qu’eux aussi venaient de cette terre sur laquelle ils vivaient. Coupés de leur origine terrestre, les humains étaient en train de perdre leur relation à l’invisible, aux forces élémentales d’un monde qu’ils en étaient venus à considérer comme le leur.

Ils se mirent à adorer des objets pour la possession desquels ils étaient prêts à toutes les formes de violence. C’est ainsi qu’ils semèrent la destruction autour d’eux pour alimenter les sacrifices exigés par le culte des « Objets – Machines ». Ils éventrèrent la terre pour lui arracher ses entrailles, ils empoisonnèrent l’eau et l’air, exterminèrent de nombreuses espèces vivantes…

Il arriva un temps où le principe même de vie sur cette terre, autrefois fertile et aimée, se trouva menacé. Cependant les humains emportés par leur frénésie ne voulurent pas comprendre les signes que leur adressa alors la Terre, en tant que matrice de la vie.
L’espèce humaine était alors fort nombreuse, des milliards de bouches avides cherchaient à arracher quelques lambeaux de cette précieuse terre pour en tirer un éphémère profit.

PetCarre09.jpgQuelque part, des femmes commencèrent à murmurer entre elles; elles se rendaient compte que le « Nouvel Ordre » mis en place par le genre humain était dominé par un instinct mortifère.

Elles aussi s’étaient soumises et avaient cru à la domination de l’être humain sur la loi de la Nature, mais elles ne pouvaient plus supporter de voir que les yeux de leurs enfants étaient vides.

Dans le regard des enfants, ces ancêtres du futur, elles avaient lu la condamnation de l’espèce, comme ultime héritage d’une civilisation ayant asservi le Sujet à l’Objet. Elles se souvinrent alors de leur nature magique, elles se rappelèrent qu’autrefois les femmes communiquaient avec les forces de la vie et qu’elles-mêmes en étaient toujours porteuses. D’une mémoire très
ancienne enfouie sous le conditionnement instauré par le « Nouvel Ordre », remontèrent les mythes des Origines.

Elles découvrirent alors le monde avec un nouveau regard, un regard venu du passé et tourné vers le futur. Et tout leur parut dangereusement absurde. Tant d’ingéniosité et tant d’obstination pour déboucher sur ce paysage saccagé, où la fleur meurt et l’oiseau ne chante plus…

livingblanket4552.jpgElles essayèrent d’alerter autour d’elles, d’autres membres de leur espèce, mais trop occupés à la survivance du plus fort, ils ne levaient plus les yeux de leurs cadrans, écrans, viseurs et autres appendices technologiques sans lesquels ils croyaient sombrer dans le néant. Aveuglés par l’urgence, ils ne discernaient plus l’essentiel.
Elles tinrent alors conseil et décidèrent d’envoyer une messagère consulter l’esprit d’une très ancienne Déesse Mère qui vivait, disait-on, près d’une montagne Sacrée.

La voyageuse parcourut le long chemin qui menait à la dite montagne.

Mais comment s’adresser à la Déesse Mère ? Celle-ci existait-elle vraiment ? Que croire en ces temps troublés ?

Il lui semblait bien par moments sentir des forces obscures agiter son âme mais on lui avait appris, comme aux autres, que l’âme n’existait pas.

Elle s’installa dans le col entre les deux sommets jumeaux qui coiffaient la montagne, alluma un feu, s’assit près des flammes, prépara ses offrandes et attendit.
Quatre nuits passèrent sans que rien ne se produise.

Désespérée, elle alluma le feu pour la cinquième nuit, offrit sa dernière gorgée de vin, son dernier morceau de pain et invoqua la Déesse Mère.

Il y eut un frémissement dans les flammes et son Esprit recueillit ce message :

00013.jpg« C’est la main qui permet à la conscience de s’ouvrir, retrouvez le pouvoir de vos mains.
Un chemin se présentera alors à vous et vous guidera hors des ténèbres qui ont envahi votre monde. »

La messagère retourna vers ses compagnes.Elles s’interrogèrent :

Plus personne ne se servait de ses mains, les machines faisaient tout. Ceux qui étaient en charge de la création étaient des spécialistes désignés par le « Nouvel Ordre », personne d’autre n’était habilité à créer.


La discussion dura longtemps, jusqu’à ce qu’une très vieille femme intervienne :

« Mes filles, cessez de parloter et mettez-vous au travail, je me souviens d’un temps où nous nous servions de nos mains tous les jours, en filant, en tissant, en cousant.
La main est le meilleur outil qui soit. Nous avons toutes des mains,

Filons, cousons, tissons ce qui reste dans nos cœurs et allons l
e montrer au monde. »

C’est ainsi qu’elles se mirent chacune à confectionner UN carré de tissu, dans lequel elles mirent leur foi et leur espérance.

Elles décidèrent de coudre les carrés les uns aux autres.

Bientôt la rumeur se répandit à travers toutes les terres et des carrés de tissus affluèrent de partout comme l’affirmation d’une conscience commune. Assemblés, les carrés de tissus formèrent une immense couverture, la plus grande qui ait jamais existé et les tissus chatoyants racontaient l’élan de vie arraché à la misère de ce monde moribond.
La couverture animée de tant d’espoir et nourrie du pouvoir des mains qui lui avaient donné vie se mit en mouvement.

Les gardiens de la mémoire et de la paix comprirent que partout où « La Couverture Vivante » irait, elle apporterait un élan de vie. Elle irait recouvrir des rivières, envelopper des communautés, protéger des forêts, apporter chaleur et réconfort là où régnaient divisions et indifférence.

PetCarre12.jpgDans son sillage jailliraient de nouvelles alternatives, les êtres humains ayant retrouvé leur pouvoir de création trouveraient des solutions pour nourrir, vêtir, célébrer, éduquer, soigner dans le respect de toutes Formes de vies.

La formidable énergie, mise en place par cette création collective, mettait soudain en évidence une communauté de destins dont la survie était tissée dans l’apparition
d’une conscience universelle.

La couverture était infinie, elle ne cessait de croître, étendard gigantesque de myriades d’êtres humains en chemin vers la joie simple d’ÊTRE.

 

Dimanche 30 août, le thème « L’écriture au féminin » pour le Salon de Gonzague Saint-Bris (à Chanceaux sur Loches, en Touraine) – Plusieurs auteurs des éditions des femmes dédicaceront leurs livres..

Rendez-vous dimanche 30 août à La Forêt des Livres en Touraine… Signature d’écrivains sous les arbres centenaires – Thème de 2009 « L’écriture au féminin » : donc, la maison d’édition d’Antoinette Fouque inévitablement à l’honneur ! Présence de nos auteurs SIMONE VEIL (Présidente du Salon cette année), EMMANUEL PIERRAT (animateur du débat sur l’Afrique à 15 h), IRENE FRAIN, MACHA MERIL, FADELA M’RABET, CATHERINE WEINZAEPFLEN

fouquegonzague.jpgC’est en 1973, cinq ans après avoir cofondé le Mouvement de Libération des Femmes en France, qu’Antoinette Fouque a créé les éditions Des femmes. « Le désir qui a motivé la naissance des éditions Des femmes est davantage politique qu’éditorial : à travers la maison d’édition, c’est la libération des femmes qu’il s’agit de faire avancer. (…) Né-e fille ou garçon, on devient femme ou homme, masculine ou féminin : écrire ne sera donc jamais neutre. Le destin anatomique se marque, se démarque ou se remarque… Pour nous, c’était un pari, un risque pris, que des textes écrits par des femmes fassent travailler la langue, y fassent apparaître, pourquoi pas une différence sexuelle. En aucun cas, il ne s’agissait de déclarer a priori qu’il y avait une écriture de femme. »

vivre.jpgveil.jpgSous la Présidence de Simone Veil de l’Académie française (Vivre l’histoire a été enregistré lu par elle-même pour le catalogue des Voix des éditions Des femmes) 

Simone Veil
Vivre l’Histoire
Entretiens avec Antoinette Fouque
1 Cassette – 16,50 €
1CD 18 €

 » La profession d’avocat que j’avais choisie venait du goût de défendre des idées que je pensais justes et dont je trouvais qu’elles n’étaient pas suffisamment entendues. Au fond, je crois que toute ma vie, je pars en guerre… Ce qui m’importe, c’est la personne humaine, c’est l’homme, c’est la femme, le respect de l’homme et de la femme, de leur liberté, de leur dignité et de leur bonheur ; je ne conçois pas de possibilité de bonheur sans respect de la personnalité. C’est une sorte de combat pour une certaine forme de vie. » Simone Veil

Dans ces entretiens réalisés en novembre 1985 avec Antoinette Fouque, Simone Veil parle de sa vie de femme politique.
Son enfance heureuse et libre, en dépit des difficultés économiques et de la sévère morale paternelle, auprès d’une mère aimée et admirée qui tout au long des années reste une grande figure lumineuse, son adolescence traversée par le Front populaire et tragiquement marquée par le nazisme, sa prise de conscience de sa judéité et du traitement des différences par les totalitarismes l’ont déterminée à s’engager activement dans la politique. Magistrat ou ministre, elle a toujours œuvré contre les abus de pouvoir pour l’instauration d’une loi, bonne en ce qu’elle respecte la dignité de la personne humaine et la liberté individuelle. Libérale, elle dit sa méfiance des idéologies, de l’embrigadement, du jeu politique qui sacrifie trop souvent l’authenticité à l’intrigue pour la prise de pouvoir ; elle dit son goût de la contestation et des joutes d’idées. Elle se montre un témoin attentif des grands bouleversements de notre époque, du mouvement de mai 68 comme des mouvements des femmes.
Une voix de femme se fait entendre qui interpelle le monde politique et témoigne, dans l’attention qu’elle porte aux autres, d’une vie simplement exemplaire..

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DEBAT AVEC EMMANUEL PIERRAT : 228581031.jpg15h00, Au bûcher du Château de Chanceaux, le débat sur les cultures africaines animé par Emmanuel PIERRAT (aussi de la Bibliothèque des Voix des éditions Des femmes), avec Alain MABANCKOU, Prix Renaudot et Alain GORDON-GENTIL, suivi de la projection du film : « Dans la Forêt de l’Ecrit, la Culture Gabonaise » de Maïna LE CHERBONNIER et Serge DEVILLERS.

Résumé de son livre audio Troublé de l’éveil : « Quand je cherche à dater mes premières nuits blanches, je dois remonter à l’école primaire, à Pantin, en Seine-Saint-Denis. Cela fait moins d’une semaine que Marie-Claude, l’institutrice en charge de ma classe de CD a commencé de nous enseigner la lecture. J’ai dévoré en quelques jours tout le manuel, exhortant ma mère à m’apprendre les lettres de l’alphabet que j’ignorais encore, avançant d’un bon trimestre en une petite quinzaine.
A présent, les livres sont les compagnons obligés de toutes mes nuits. Mais je me suis longtemps demandé, comme de l’oeuf et de la poule, s’ils étaient la conséquence ou la cause de mon trouble. »
Emmanuel Pierrat – Extraits – 1 CD – 74 mn –

frain.jpgIrène Frain et Macha Méril dédicaceront également leurs livres audio aux éditions Des femmes…

Au royaume des femmes lu par l’auteure – 1 CD MP3 27 €

Le dernier roman d’Irène Frain s’appuie sur une histoire vraie, celle de Joseph Francis Rock, illustre figure de la science botanique américaine et de la revue National Geographic. Irène Frain a mené l’enquête sur de ce personnage, autodidacte de génie, explorateur passionné, dont la quête principale commença dans les années 1920. Parcourant la Chine et le Tibet, il est intrigué par le récit d’un voyageur et par de vieux textes impériaux faisant état de l’existence d’une montagne plus haute que l’Everest, la montagne Amnyé Machen, au Tibet. Celle-ci abriterait une étrange tribu matriarcale, ultime vestige du peuple des amazones… le « Royaume des Femmes », dirigé par la « Reine des Femmes ».

Cette quête devient pour Rock une véritable obsession… mais s’achève par un échec. Il doit faire demi-tour à 50 m du but, et comprend que le Royaume des Femmes a sans doute été détruit. La Reine des Femmes existe-t-elle encore ? N’est-ce pas plutôt un personnage mythique ? Pourquoi cette quête prend-elle tant d’importance pour Rock ? Le talent de l’enquêtrice et celui de la romancière se conjuguent pour rendre cette histoire passionnante : le mystère, c’est tout autant ce royaume mystérieux que le personnage lui-même. A la quête de Rock s’ajoute alors celle de la romancière, qui nous fait découvrir un personnage fascinant.

Irène Frain est née en Bretagne en 1950. Tout d’abord professeur de lettres au lycée, puis à la Sorbonne, elle se consacre exclusivement à l’écriture depuis son roman Le Nabab (1982). Marquée par son origine bretonne, et par ailleurs passionnée par l’Asie, elle est l’auteure d’une vingtaine de livres.

190642531.jpgUn jour, je suis morte Macha Méril Lu par l’auteure – Extraits – 1 CD – 18 € Office 11/09/2008

« Un jour, je suis morte. J’ai eu du mal à m’en remettre. Je ne m’en remets pas, en vérité. »

Le roman Macha Méril commence par cette révélation inattendue. Sous le masque de la comédienne, femme épanouie, « apparente, rigolante, fornicante », se cache une blessure profonde. Rendue stérile par un avortement bâclé dans sa jeunesse, sa tentative de maternité se soldera par une fausse couche. Errant entre passé et avenir, l’actrice nous livre son ressenti, sans pathos mais avec émotion et courage. Le récit dévoile cette part d’ombre qui la hante, cette sensation douloureuse et obsédante de perte. Une vie passée entre être et non-être, un être-à-demi… puisque pour Macha Méril le destin d’une femme, son accomplissement et sa seule vérité est d’être mère. Sacralisant l’enfantement, qu’elle ne connaîtra jamais, elle évoque cette épreuve.

La confession d’une femme qui met une incroyable énergie à défendre une cause qui transcende l’individu : « Alors tous les enfants de la Terre seront mes enfants, j’aurais gagné sur ma mort prématurée. » Un écrit intense et pudique, subjectif et sincère.

Macha Méril est née en 1940 à Rabat au Maroc. Très vite repérée par le cinéma, son premier rôle important arrive en 1960 avec La Main chaude de Gérard Oury. Elle tourne ensuite dans Une femme mariée de Godard, qui la fait connaître dans le monde entier. De nombreux cinéastes européens la sollicitent, Buñuel, Pialat, Dario Argento, Claude Lelouch… En 2005, elle reçoit le Prix « Reconnaissance des cinéphiles ». Se dédiant aussi à l’écriture, elle a publié avec succès plusieurs roman, dont Biographie d’un sexe ordinaire (Albin Michel, 2003) ou Les Mots des hommes (Albin Michel, 2005).

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 Fadéla M’Rabet et Catherine Weinzaepflen représenteront les auteurs papier des éditions Des femmes…

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Fadéla M’Rabet, née à Skikda (Algérie), a été l’une des premières féministes dans son pays. La Femme algérienne et Les Algériennes (1965 et 1967, Maspero) l’ont fait connaître. Elle a publié depuis L’Algérie des illusions (1972, Robert Laffont), Une enfance singulière (2003, Balland), et Une femme d’ici et d’ailleurs (2005, Éditions de l’Aube).
Docteure en biologie, elle a été maître de conférences – praticienne des hôpitaux à Broussais-Hôtel-Dieu.

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Fadela M’Rabet
Le chat aux yeux d’or

Une illusion algérienne
12 € – 2006

« Elle avait un œil couleur de nuit profonde, mystérieuse, insondable et un autre d’encre violette. Le regard de celle qui toute sa vie essaya d’imaginer le visage de sa mère disparue après sa naissance. Cette mère dont la voix lui parvenait à travers le liquide amniotique. Celle dont les battements de cœur lui étaient restitués par les bruits d’une cascade.
Je n’oublierai jamais le visage de Nana près d’une cascade. Elle était dans une bulle et son visage n’était plus que lumière. Elle entendait le cœur de sa mère, elle entendait sa voix, mais son visage lui restera à jamais inconnu. »
F. M’R.

 

 

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Catherine Weinzaepflen a publié ses premiers livres aux Éditions Des femmes, Isocelles (1977) et La Farnésine, jardins (1978). Romancière et poète, elle est également l’auteure, entre autres, de Portrait et un rêve (Prix France Culture 1983), L’Ampleur du monde, Totem (Flammarion), Ismaëla (Atelier des Brisants), Les Mains dans le jaune absent (Éditions du Scorff). En 2006, elle a reçu le prix Brantôme pour son roman Orpiment (Des femmes-Antoinette Fouque). La première version du texte Am See, intitulé La Parole nomade, a été mise en onde sur France Culture en 1980. Am See a été publié pour la première fois en 1985 (Flammarion).

temps.jpgLe temps du tableau
15 € – 2008

« …je me rappelle Elizabeth Bishop
qui avala, enfant, une pièce de 5 cents
(cadeau inopiné) pour la garder
il faudrait
avaler sans les digérer
les moments de temps
qui frisent l’éternité
et dans le jour blafard du lendemain
se dire que le temps du tableau
est toujours mêlé… »
C.W.

Am See (réédition de 2007) – couv.gifCamille et Dominique entretiennent une correspondance à propos du choix d’un lieu de villégiature pour une possible rencontre. Dans leurs lettres les deux personnages confient leurs états d’âme et racontent les paysages dans lesquels ils vivent. Evitant les accords d’adjectifs ou de participes passés, l’auteure prend soin de ne pas lever l’ambiguïté des prénoms.

Présentation de l’éditeur
Am See « Au-dessus de la porte d’entrée du café d’où je t’écris, l’image d’un immense paquebot dans un cadre en loupe. Tu vois où je veux en venir… Qu’importe alors sa destination. Bien sûr, tu peux mettre en place une palmeraie sur sol de sable blanc, des perroquets voletant d’un arbre à l’autre et le doux ressac d’une mer calme. Mais là n’est pas l’essentiel pour moi. L’odeur de la haute mer, un irrepérable horizon pour une croisière qui n’en finit pas et le sillage du bateau comme seule preuve du déplacement : autant d’éléments pour me convenir. »

Orpiment, la plénitude de vivre par Elaine Audet (15 juin 2006) sur Sisyphe.org : orp.jpgOrpiment est un très beau roman sur le cheminement artistique et humain de la peintre italienne du XVIIe siècle, Artemesia Genstileschi, ressuscitée de l’oubli, il y a une vingtaine d’années, par des féministes dont Germaine Greer dans The Obstacle Race (1979). On connaissait davantage la tragédie de son viol par un peintre, ami de son père, que son exigeante recherche picturale.

 Si l’impression d’être au cœur de la vie d’Artemesia est si saisissante, c’est que Catherine Weinzaepflen travaille la matière du roman comme Artemesia devait travailler les couleurs, la matière, la lumière. D’entrée de jeu, on pénètre au cœur des multiples aspects de la vie de l’artiste, de sa quête d’absolu et de sa volonté de créer une vision personnelle et inédite du monde. Une vision de femme.

L’auteure nous fait voir le parcours d’Artemesia qui veut tout conjuguer et réussir, à la fois sa vie de mère, d’amante, d’amie, de femme libre et son œuvre. Elle devra faire le deuil douloureux d’un amour partagé parce que Gaspare, un architecte sensible avec qui elle croit avoir trouvé le bonheur et l’harmonie, ne peut supporter de ne pas être l’unique objet de sa passion, de ne pas la posséder entièrement. Lorsqu’elle lui dit qu’elle ira vivre à Naples, où elle pourra gagner l’argent qui lui est nécessaire pour elle, ses deux filles et leur fidèle gardienne, Daria, il lui demande de l’épouser afin de ne plus avoir de soucis de ce genre. « Combien de fois t’ai-je expliqué que j’essaie de vivre une autre vie que celle toute tracée des femmes – les vies que les hommes leur tracent ? » tente-t-elle de lui faire comprendre. Peine perdue, car Gaspare ne peut admettre qu’elle ait son mot à dire dans le choix du lieu où ils vont vivre !

À la fin de sa vie, elle écrit à Mira, une écrivaine, avec qui elle partage les plaisirs uniques de l’amitié, ses joies, ses pensées, ses doutes, ses espoirs : « j’ai peint des femmes majoritairement. J’ai décliné les Judiths, les Cléopâtres, les Lucrèces, les Suzannes, les Bethsabées…, peignant des femmes courageuses (c’est une pensée toute récente ça aussi) alors que mes commanditaires n’y cherchaient que « la femme » dans une obsession esthétique ».

L’écriture est sensuelle, rigoureuse, intense, et se déploie avec bonheur tant dans les portraits d’ensemble que dans l’intimité et le moindre détail de la composition. La description minutieuse de la conception des œuvres est inoubliable, l’écriture captant la profondeur du regard, le rapport des couleurs, de la lumière et des
formes, la texture de la peinture, le mouvement généreux du bras et de la pensée. « Je mettrai au poignet de Judith le bracelet de maman que je n’ai jamais pu me résoudre à porter, les hexagones d’or incrustés de jade forment un motif parfait. Et la robe sera jaune, décolletée. Pour les lignes de force, le rouge. Un tissu rouge sur lui, les taches de sang sur sa robe à elle. »

Tout nous semble réel dans cette fiction, le grain de la peau, les personnages, les paysages, la présence de la mer, la poussière du sol. La beauté nous frappe de plein fouet en même temps qu’Artemesia ainsi que le désir omniprésent de donner un sens à sa vie à une époque où les femmes avaient si peu de chances de se réaliser pleinement. L’auteure a su relever ici le dur défi d’écrire comme on peint. Un livre qui donne l’envie irrépressible de revoir toute l’œuvre de Gentileschi.

* orpiment : Sulfure naturel d’arsenic, jaune vif, utilisé en peinture.

Catherine Weinzaepflen, Orpiment, Paris, Des femmes, 2006.