Interview Hacina Zermane, mai 2007

Le Gonessien, n°120, mai 2007

Solidarité

Portrait

Hacina Zermane, Gonessienne engagée

Hacina Zermane habite le quartier de La Fauconnière. Avec la journaliste Myriam Mascarello, elle vient d’écrire un ouvrage intitulé « Sheh, Bien fait pour toi ! », dans lequel elle dévoile son expérience de femme séropositive confrontée aux préjugés. Rencontre avec cette Gonessienne bavarde, engagée, et débordante de projets.

Bonjour Hacina. Avant de vous installer à Gonesse, vous avez résidé dans d’autres villes de la région parisienne…

En réalité, je me suis installée pour la première fois à Gonesse en 1994, avant d’habiter à Paris puis à Aulnay-sous-Bois. C’est là que j’ai vécu une expérience difficile, en apprenant que mon mari pratiquait la polygamie. Je suis donc revenue à Gonesse en 2002, dans un logement d’urgence. En comparant Gonesse à d’autres villes, je trouve qu’il y a plus de mixité entre les personnes.

Longtemps après avoir appris votre séropositivité, vous avez rencontré Myriam Mascarello, journaliste sur la chaîne France 24. Comment avez-vous pris la décision d’écrire ce livre ensemble ?

Cette rencontre fut idéale, puisque Myriam s’intéressait beaucoup au VIH. Nous avons donc décidé d’écrire ce livre à partir de mon expérience de femme séropositive ayant vécu cette situation, dans un milieu où règne souvent la loi du silence.

En écrivant ce livre, avez-vous redouté la réaction des gens ?

Beaucoup ! Je savais que les « on dit » étaient très présents dans la société. Les gens parlent d’un sujet, le déforment sans jamais oser voir les choses telles qu’elles sont, au grand jour. Mais aujourd’hui, je sais que j’ai eu mille fois raison d’écrire ce livre.

Dans quels buts avez-vous rapporté cette expérience ?

J’ai connu une multitude d’expériences dans ma vie… Je suis aujourd’hui plus forte grâce à cela. Je voudrais que ce livre puisse non seulement aider les malades qui ont du mal à accepter, mais aussi faire comprendre à tout le monde que le SIDA n’est pas un sujet tabou. J’espère aussi que mon livre va passer les frontières et être lu en Afrique du Nord, qu’il va éveiller les consciences.

Quels sont vos autres projets au quotidien ?

Je m’investis au sein de l’association Ikambéré (www.ikambere.com), qui accueille les femmes africaines atteintes par la maladie. J’ai aussi proposé un projet d’association pour réunir les malades de toutes les couleurs, de tous les âges, de toutes les sexualités… Les gens pourraient se retrouver au sein d’un loft pour s’informer, repartir avec des documents et des préservatifs, participer à des initiatives telles que des sorties et des pièces de théâtre.

Justement, durant l’automne 2006, vous avez participé à une initiative originale à Gonesse…

Il s’agit du Festiv’Actions, organisé par l’association ATAic (Atelier Théâtre Aujourd’hui institut coopératif), qui permet aux personnes d’exprimer leurs talents dans différents domaines, artistiques ou non. J’aimerais de nouveau travailler avec son président, Christian Vérité, afin d’élaborer une pièce de théâtre où chaque personne interpellée par le SIDA^pourrait intervenir.

« Sheh, Bien fait pour toi ! » est disponible aux Editions Des femmes, en partenariat avec Sidaction. Préface de Line Renaud. Prix conseillé : 5 E

« Sheh ! Bien fait pour toi ! » de Hacina Zermane & Myriam Mascarello

Sheh ! Bien fait pour toi !
Hacina Zermane et Myriam Mascarello

En partenariat avec Sidaction (ce livre sortira à l’occasion de la journée mondiale de la lutte contre le sida).

Office 16/11/2006

Être maghrébine, musulmane et séropositive : une gageure que Hacina relève depuis bientôt quinze ans. Contaminée par son mari alors qu’elle n’a que dix-neuf ans, Hacina se retrouve atteinte d’une maladie dont elle ne connaît même pas le nom et dont elle ne perçoit, des années durant, aucun symptôme.
Son témoignage est inédit : jamais une jeune femme issue de l’immigration maghrébine n’a osé faire le récit de sa vie avec le sida. Dans son milieu, le sida est une maladie honteuse : un déshonneur pour la famille, une punition divine destinée à celles qui s’écartent du droit chemin. C’est ce qu’on lui répète sans cesse : « Sheh ! » (« Bien fait pour toi ! »).
Il faudra quatorze ans à Hacina pour se dresser contre ces préjugés, se révolter contre ces croyances mortifères. Quatorze ans pour oser rencontrer sa maladie et accepter de la combattre. Ce témoignage est l’histoire de sa renaissance à partir de cette prise de conscience.
Hacina y raconte son enfance, sa révolte adolescente contre une famille aimée mais dévorante, sa rencontre à dix-sept ans avec Baba, musulman mais Malien, père de ses quatre enfants. Elle parle de sa maladie, des inconnus qui l’aident, des proches qui l’accablent, de la découverte du Mali et de la polygamie.
Un récit pudique qui s’adresse à tous ceux qui risquent de mourir deux fois : à cause du virus et à cause du silence.