Note d’intention de la photographe Elisa Haberer

18402881_304478329966296_1955355994418478524_n.jpgÉlisa Haberer est une photographe française d’origine coréenne de 39 ans. Etudiante en photographie, elle dédie son travail aux codes de représentation de la photographie de famille et pose la question de la trace et de la narration par l’image. Ces interrogations préfigurent les thématiques constituantes de son travail actuel. Sa photographie est fondamen- talement axée sur les histoires humaines et l’exercice du portrait. En 2009, sa série sur la représentation de soi “Moi, par l’Au- tre” est exposée à Pékin où elle a vécu 7 ans. En 2013, elle tourne son premier film, “My Lucky Bird”. En 2014, de retour en Corée du Sud, elle réalise un projet pho- tographique sur les traces de ses origines qui devient “Les Couleurs des tumuli”. www.elisahaberer.com

Note d’intention : À la genèse du livre “Les Couleurs” des tumuli il y a 3 voyages successifs dans la petite ville de Gyeongju, en Corée du sud, qui est aussi la ville de ma naissance. (août 2015, février 2015, juillet 2015)

L’idée était de trouver une manière pour photographier ce lieu avec le souci de donner à voir les gens et la ville afin de pouvoir créer un récit plus distancié qu’un simple objet autobiographique. Je me suis beaucoup interrogée sur la place à donner et à laisser à cette dimension autobiographique et à la manière de la mettre à distance. Ces interrogations ont accompagné les 3 voyages, elles ont donné lieu à des tentatives de formes et ont fait évolué le propos. Lors de mes passages à Séoul j’ai échangé avec Benjamin Joineau que je connaissais un peu. Ce n’est qu’à la fin de la réalisation de ma maquette de présentation –dont celle du livre diffère peu au finalP que je lui ai fait parvenir mon travail, pour partager avec lui l’objet qui avait été le sujet de nos échanges et non une demande précise d’édition d’un livre. Je ne crois pas que tous les travaux photographiques peuvent trouver une finalité dans la forme du livre. Mais au printemps 2016, Benjamin m’a proposé d’éditer ce portfolio à l’Atelier des Cahiers, il est alors devenu évident que ce projet, qui relevait de quelque chose du journal intime, pouvait trouver dans le livre une forme pour être présenté.

Le texte est venu dans un second temps. Pendant ces trois voyages j’ai échangé 5P6 fois avec Simon Hatab qui lors de notre première rencontre m’a proposé d’échanger sur ce projet photographique en devenir. Il enregistrait mes propos. Propos en lien avec le projet et me posait des questions sur la photographie. J’ignorais ce que nous allions en faire et lui aussi. Nous n’avions pas de projet de livre à ce moment là. Nous ne nous sommes pas vus pendant une année, l’année pendant laquelle je suis revenue de mon troisième voyage et ai travaillé sur la forme à donner au travail photographique. Suite à la proposition de Benjamin Joineau, j’ai informé Simon Hatab de la possibilité de faire un livre. Je lui ai proposé que le texte ait un traitement qui ne soit pas illustratif, redondant par rapport à la photographie, qu’il ne soit pas un accompagnement ou un contrepoint à l’image mais qu’il ait une vraie part en tant que texte à l’intérieur du projet.

Il a accepté. Nous avons repris les entretiens et Simon a commencé parallèelement à écrire en septembre 2017. Il m’envoyait des paragraphes à lire et je lui faisais part de mes impressions. La difficulté était de trouver le ton et surtout la place de l’auteur du texte dans ce dispositif: écrire à partir d’enregistrements sans les trahir tout en ayant un propos. La présence du texte raconté par cette voix extérieure participe du processus de distanciation qui a accompagné la mise en place du travail photographique.