Pablo Daniel Magee, une vie riche en rencontres extraordinaires (ici avec son préfacier Costa-Gavras)

Voici trente ans presque jour pour jour, que l’année 1990 sonnait le glas diplomatique d’une époque. D’un côté, par la chute du régime du Général Pinochet au Chili, dernière dictature d’Amérique latine et parallèlement, par la fin de la guerre froide dans son ensemble symbolisée par la réunification de l’Allemagne, offrant aux archives contemporaines les images du démantèlement du tristement célèbre Checkpoint Charlie, du Prix Nobel de la paix remis à Mikhail Gorbachev, mais aussi de la révélation choquante faite par le premier ministre italien Giulio Andreotti, le 24 Octobre 1990, de l’existence d’une opération top secrète du nom de Gladio, mettant au jour l’implication d’armées secrètes supervisées par l’OTAN dans les attentats terroristes ayant marqué les années sombres de la guerre froide en Europe. Depuis lors, les historiens européens essayent, non sans mal, d’approfondir nos connaissances en la matière. Pour ma part, c’est en Amérique latine que je me suis rendu afin de tenter de décrypter les circonvolutions politiques de la guerre froide au cœur d’un continent tombé entre les griffes du “Condor”. Vous tenez donc aujourd’hui entre vos mains le fruit du cheminement de sept années de vie dédiées à enquêterSept années d’une investigation menée autour de l’opération Condor, suivant les pas et partageant desmoments complices de l’existence du Docteur Martin Almada, premier “lanceur d’alerte” et découvreur des Archives de la Terreur de l’opération Condor, au Paraguay.

 

Pour écrire Opération Condor,je me suis plongé corps et âme dans les abysses d’un continent à fleur de peau et d’un pays en particulier, le Paraguay, où je vis à présent et qui abrite les Archives de la Terreur aujourd’hui classées Mémoire du Monde par l’UNESCO grâce à la ténacité etaux efforts déployés par le Dr. Almada, efforts pour lesquels ce dernier s’est vu remettre lePrix Nobel Alternatif (le même prix décerné à Greta Thunberg récemment et à Edward Snowden avant elle). C’est sur ces mêmes archives et leur sombre toile de fond que prend assise mon travail d’écriture, déroulant le film de vie authentique et encore trop méconnu de la personne de Martin Almada. Depuis la Guerre civile chinoise à l’opération Condor, les composantes que je décris dans cet ouvrage s’imbriquent et se superposent une à une jusqu’à mettre à nu l’impitoyable mécanisme de la guerre froide en Europe comme en Amérique latine. Fidel Castro, Omar Torrijos et le Général Stroessner, sont autant de personnages qui éclairent, pour le lecteur, ce pan encore bien obscur de l’Histoire.

 

Cette investigation m’a conduit à parcourir le monde et rencontrer des personnalités venues d’horizons les plus divers, telles que le frère d’Ernesto Che Guevara, un Che dont j’ai suivi et recomposé les traces éparpillées par le temps d’un passage fugace au Paraguay qui faillit lui coûter la vie. Ainsi, la lecture du chapitre intitulé L’homme à la pipe, a-t-elle inspiré à Juan Martín Guevara le geste spontané de me prendre dans ses bras et me souffler à l’oreille : “Tu as fait un grand travail pour la mémoire de mon frère. Merci, fils”. Mon épopée littéraire m’a également amené à accompagner le Dr. Almada au Vatican pour une brève rencontre avec le Pape François, acteur involontaire ou pas de l’opération Condor ; vers la dignité chaleureuse de Stéphane Hessel ; la bienveillance de Robert Badinter ; la gentillesse de Plantu, qui m’a ouvert ses archives; la froideur latine de Bianca Jagger ; la passion toujours intacte de Costa-Gavras, qui m’a offert la préface de mon ouvrage; la générosité de celles et ceux qui se sont émus de mon projet et m’ont accompagnés ; et l’humilité touchante de tant de victimes de cette triste opération.

 

De par la longueur et l’amplitude de ce parcours d’écriture ainsi que l’histoire et le rayonnement du Dr. Almada, j’ai constaté combien ce livre est attendu par un lectorat latino-américain et européen réparti de part et d’autre de l’Océan Atlantique. En tant qu’auteur, j’ai la conviction que ce livre surprendra. En effet, je me suis efforcé, afin de garder vive l’attention des lecteurs, d’y glisser différents éléments qu’on ne s’attendraitpas à trouver dans un tel ouvrage. On y apprend ainsi l’origine paraguayenne du célèbre boa ayant avalé un éléphant de Saint Exupéry, mais aussi l’origine indigène guarani du football, le Manga Ñembosarai, en passant par un détour chez Pablo Escobar et, bien entendu, toujours les révélations d’archives qui frappent et surprennent. J’ajoute que ma sécurité et celle de ma famille a été menacée à maintes reprises au cours de ce périlleux chemin d’écriture, incitant les autorités françaises au Paraguay à me proposer une protection policière, ce qui sous-entend la pertinence de mon ouvrage. Fondamentalement, je suis mû par la conviction que ma génération a le droit et le devoir de comprendre les problématiques que j’aborde dans cet ouvrage afin de pouvoir changer ses structures de pensée et, ce faisant, évoluer vers un mode de fonctionnement plus pacifique et altruiste, en adéquation avec les impératifs socio-économiques mais aussi et surtout humains et écologiques de notre temps.

Pablo Daniel Magee

Le parcours d’écrivain de Pablo Daniel Magee écrit par lui-même

C’est l’année de mes dix-huit ans, au cours d’une rencontre avec Jorge Semprún, que j’ai fait mon entrée en littérature. Le temps d’une heure de dialogue, l’immense personnage me captiva, depuis les impressions gardées de son expérience dans le camp de concentration Nazi de Buchenwald jusqu’à l’évocation de ses écrits, semant dans mon esprit une graine de lumière de même qu’une curiosité : la lumière de l’espoir humain envers et contre tout et la curiosité de lire. Peu après cette rencontre, je me souviens d’une nuit d’insomnie lors de laquelle je tombai sur l’émission télévisée “Culture et dépendances” présentée par Franz Olivier Giesbert. Ce-dernier y recevait l’écrivain Dan Franck pour la présentation de son livre “Libertad !”, dans lequel il présentait une fresque composée de la vie de grands artistes et intellectuels européens entre 1931 et 1939. Sensibilisé à l’art et son histoire très tôt par un père peintre et une mère photographe, cette intervention m’avait fascinée. “C’est cela que je veux faire.”, avais-je simplement pensé. Mais comment devient-on écrivain ? J’aimais lire, à la folie, même ; j’aimais l’histoire et la politique. J’aimais l’Amérique latine… voilà que j’étais bien avancé ! 

 

Comme un coup du sort, je trouvai dans l’amphithéâtre de philosophie de l’université britannique où je suivis mes études, une professeure ayant travaillé sous la direction d’Henri Kissinger lorsque ce dernier était Secrétaire d’État à la Défense sous la présidence de Richard Nixon. Celle-ci nous raconta un jour sur un ton de confidence, avoir assisté à une réunion lors de laquelle des diplomates américains évaluèrent leur stratégie d’appui à la dictature militaire chilienne du Général Augusto Pinochet, en invoquant la mystérieuse dénomination de“Condor”. Cette révélation me poussa à m’intéresser au sujet. C’est dans cette lancée et un peu par hasard que j’ai rencontré Martin Almada quelques temps plus tard, lors d’une réception organisée chez lui, au Paraguay, où je me trouvais en mission pour une ONG française. Dès- lors que j’eus pris place à ses côtés, lui et moi nous retrouvâmes isolés dans la bulle d’une conversation qui fit de nous des ornithologues d’un soir, fins spécialistes en rapaces andins. Notre échange exalté aurait pu durer jusqu’au petit matin. À son terme, amusé par l’espièglerie de cet hôte singulier et instigateur éclairé, fasciné par son récit de vie, stimulé par mon amour pour ce continent et les mots de Semprun, je venais de trouver mon premier sujet d’écriture :lui.

 

Quelques mois plus tard, au détour fortuit d’une pile d’ouvrages, c’est avec Stéphane Hessel que j’eus le privilège de m’entretenir. Je commençais alors mon voyage vers l’histoire paraguayenne : “C’est un petit pays oublié que le Paraguay. Mais voyez-vous, l’avantage de la mémoire, c’est de renvoyer l’oubli à lui-même !”, me dit-t-il. Lui qui citait dans le texte des centaines d’auteurs et savait par cœur, au sens le plus noble du terme, des milliers de vers, connaissait mieux que quiconque la voie du devoir de mémoire dans laquelle il m’encourageait à m’engager. Cette mémoire, c’est à travers la vie de l’un de ses plus fervents défenseurs que j’ai choisi de la faire vivre. Ce-faisant, j’espère humblement contribuer au processus de compréhension, d’intégration et de quête de justice du peuple paraguayen qui m’a accueilli comme un fils, et plus généralement, des peuples du monde blessés par les griffes de l’impitoyable Condor.

Au 30ème anniversaire de la fin officielle de la guerre froide, l’occasion de revenir sur la manière dont la guerre froide a frappé le continent sud-américain.

Le 3 Octobre 1990, soit 30 ans presque jour pour jour avant la sortie du livre « Opération Condor » de Pablo Daniel Magee, la réunification officielle de l’Allemagne qui marque la fin de la guerre froide dans le monde a lieu.

Or, l’Opération Condor symbolise l’incarnation de la guerre froide en Amérique latine. Les archives de l’Opération Condor découvertes par le personnage principal du livre retracent cette guerre froide sur le continent depuis sa naissance jusqu’à la chute du dictateur paraguayen le 3 Février 89, juste avant la chute du mur de Berlin et donc la réunification de l’Allemagne. 

 

Rappel historique sur la réunification de l’Allemagne

La date du 3 octobre 1990 marque la disparition officielle de la RDA et la réunification de l’Allemagne. Moins d’un an après la chute du mur, le 9 novembre 1989, contre toute attente, le rêve est devenu réalité. Divisée depuis quarante ans en deux états antagonistes, la RFA et la RDA,  l’Allemagne a retrouvé une unité politique et territoriale qui symbolise la fin de la guerre froide et le reflux du communisme. Le mouvement a été favorisé par l’émigration massive des Allemands de l’Est vers l’Ouest au début de l’année en raison du marasme économique régnant en RDA. Berlin est également consacrée « capitale de l’Allemagne » et le 3 octobre, « jour de l’unité allemande », devient le jour de la Fête nationale.

« Opération Condor, Un homme face à la terreur en Amérique Latine » (sur Martin ALMADA) un livre de Pablo Daniel MAGEE aux éditions Saint-Simon (parution 1er octobre 2020)

Opération Condor
Un homme face à la terreur en Amérique Latine

Pablo Daniel Magee

Parution : 1er octobre 2020 aux éditions Saint-Simon
Prix : 22,00 €

 Contact presse pour le recevoir / interviewer l’auteur : guilaine_depis@yahoo.com 06 84 36 31 85

L’Opération Condor relate l’incroyable épopée du professeur et avocat Martin Almada, depuis son enfance misérable dans les terres arides du Chaco paraguayen des années 1930 jusqu’à sa découverte, en 1992, de cinq tonnes de documents TOP SECRET, les fameuses archives de la Terreur, révélant l’existence d’une des plus grandes conspirations du xxe siècle.

Le plan Condor, déclenché en novembre 1975, instituait un pacte secret de coopération criminelle anticommuniste et contre-révolutionnaire entre les dictatures du Chili, de l’Argentine, du Brésil, de la Bolivie, de l’Uruguay et du Paraguay, avec le concours de la CIA et orchestré par le controversé Henry Kissinger, prix Nobel de la Paix 1973… On estime le nombre de victimes à un demi-million de personnes sur le continent sud-américain.

En 1978, après mille jours de torture dans les geôles paraguayennes du sanguinaire général Stroessner pour « crime de terrorisme intellectuel », Martin Almada réussit son évasion des griffes du Condor vers le Panama, puis vers la France, qui lui accorde l’asile. Pendant dix ans il travaille au sein de l’Unesco et il va, à son tour, traquer le Condor.

Suivant les traces de ce personnage hors du commun et ses rencontres avec le pape François, Stéphane Hessel, Costa-Gavras, Daniel Balavoine ou encore Pierre Rabhi, Pablo Daniel Magee nous plonge au coeur des rouages géopolitiques de cette machination sur fond de Guerre froide.

Après une enquête obstinée menée depuis son exil, Martin Almada est devenu un symbole de la lutte pour la justice. Il est considéré aujourd’hui comme le premier des lanceurs d’alerte. En 1997, Jacques Chirac lui remet la médaille des Droits de l’homme et, en 2002, il reçoit le prix Nobel Alternatif. Pourtant, comme Martin Almada ne cesse de le rappeler au vu des événements actuels en Amérique latine, « Le Condor vole toujours ».

Pablo Daniel Magee, journaliste et écrivain français, est né le 22 avril 1985 à Paris. Il étudie les sciences politiques, la littérature, la philosophie et le journalisme à l’université londonienne de Greenwich. En 2012, il s’installe au Paraguay, où il commence à enquêter sur le Dr Martin Almada et le plan Condor.