France 3 Ile de France consacre un reportage à Mâkhi Xenakis (jeudi 20 mai 2010) pour son exposition à l’Espace des Femmes-Antoinette Fouque – Jusqu’au 31 mai

makhi.jpgJeudi 20 mai sur France 3 Ile de France « Elles nous regardent… », exposition de Mâkhi Xenakis à l’Espace des Femmes-Antoinette Fouque, 35 rue Jacob 75006 Paris, jusqu’au 31 mai 2010. (Soirée de lecture de l’oeuvre écrite de l’artiste par la comédienne Dominique Frot jeudi 27 mai à 19 h : invitation pour tous)

Reportage ICI par Geneviève Faure et Pierre-Julien Quiers

 

Marjorie Mitucci vous invite à vister l’exposition de Mâkhi Xenakis à la Galerie des Femmes (Questions de Femmes, 3 mai 2010)

mak.jpgQuestions de Femmes – de lundi 3 mai 2010. Par Marjorie Mitucci

ZOOM SUR…

MÂKHI XENAKIS

« Elles nous regardent… » Galerie Des Femmes, Paris.

 

Aujourd’hui, dans un espace plus intime, à la galerie Des Femmes, à Paris, il est possible de découvrir d’autres de ces étranges et impudiques « créatures ». Sculptures de ciment armé teinté (une couleur si identique à celle de la peau que le (la) visiteur (se) ne peut résister à l’envie très sensuelle de caresser l’œuvre), celles-ci travaillent la « féminité » dans l’événement de la maternité, dans l’événement de la solitude, dans l’événement du dialogue, dans l’événement de la folie.

 

Mâkhi Xenakis, qui vit à Paris, a débuté par la peinture dans les années 80. Après un séjour à New-York où elle fut proche de l’artiste Louise Bourgeois, elle se consacra au dessin et à la sculpture. Dessins masse, travaillés à la gomme, qui oscillent entre le minéral et le floral. Dessins où l’on s’abîme, happé(es) par un mouvement de gouffre. Sculptures qui peuvent se dresser longilignes et solitaires ; sculptures comme celles aujourd’hui présentées qui s’adressent à nous en une demande muette… Qui sommes-nous dans nos silences et nos paroles ?

 

Jusqu’à la fin du mois de mai. 35 rue Jacob, Paris 6ème.

Gilbert Lascault évoque l’exposition de Mâkhi Xenakis (dans La Quinzaine Littéraire, du 1er au 15 mai 2010)

La Quinzaine littéraire du 1er au 15 mai 2010

maternite.jpg Arts – Les légions des soeurs par Gilbert Lascault

Mâkhi Xenakis, Maternité (2009) ciment armé teinté, fibre de verre, fourrure, tissus.

Sans cesse, la créatrice Mâkhi Xenakis (1) travaille. Elle sculpte, elle dessine, elle écrit. Elle invente des formes inattendues. Elle propose des séries d’oeuvres. Elle imagine les légions des soeurs, leurs multitudes, les kyrielles.

 
Exposition Mâkhi Xenakis Elles nous regardent…
Espace des Femmes-Antoinette Fouque
35, rue Jacob, Paris 6ème
8 mars – 30 mai 2010 
Mâkhi Xenakis médite souvent sur le Nombre, sur la féminité plurielle, sur les corps variés, sur leur épanouissement, sur leur densité douce et tendre, sur leur puissance impassible, sur leur force impartiale, sur une souveraineté sereine.
 
Actuellement (de 2007 à 2010), Mâkhi Xenakis sculpte ces êtres féminins étranges, des fétiches occidentaux, des poupées très roses et charnelles. Ce seraient des soeurs voluptueuses, des « Elles ». Mâkhi Xenakis les considère comme « les grandes créatures » et « les petites créatures ». Certaines sont isolées. Quelques-unes se causent, dialoguent, échangent des confidences, des espoirs, des déceptions, des désors ; elles sont peut-être voisines des Causeuses de Camille Claudel. « Deux « créatures » semblent être la mère et sa fille, évidemment plus petite. D’autres « créatures » forment un groupe, une réunion.
 
Ces « créatures » sensibles, sensuelles, séduisantes, ne ressemblent peut-être pas exactement aux femmes de notre terre. Elles viennent peut-être d’un autre astre. Leur peau semble douce, mate, duveteuse, presque soyeuse. Elles n’ont nul bras, de même que Vénus de Milo. Elles n’ont nulle jambe. Elles ont des seins massifs et leurs pointes sont érigées ; elles ont une fente discrète. Elles ont deux pieds (ou deux pattes ?). Leurs cheveux sont rares, légèrement ébouriffés. Elles sont nues. Impudiques ? Je ne sais pas… Elles semblent, quand même, coquettes ; elles portent au cou un ruban de velours pourpre, de même qu’Olympia (1863) de Manet… Les « petites créatures », relativement fragiles peut-être, sont protégées par des globes de verre, comme celles que l’on voyait dans les églises et qui préservaient des reliquaires. Et les « grandes créatures » s’installent sur des coussins épais de velours… Les yeux percés et perçants de ces « créatures » nous regardent, nous observent. Elles nous surveillent. Elles ne nous oublient pas.
 
A d’autres moments, de 1997 à 2004, Mâkhi Xenakis propose des sculptures différentes. Ce sont de longues et hautes figures sveltes, elles aussi féminines. Ces figures n’ont ni bras, ni jambes, ni pieds, ni seins, ni sexe. Au départ, l’artiste moule les têtes en plâtre (avec les trous des yeux, des narines, une bouche suggérée). La tête est portée par une tige filetée (un long cou) ; puis, elle se dresse au sommet d’un corps allongé qui serait une colonne grecque. Ces figures seraient des effigies, des doubles de femmes disparues et de déesses perdues, des formes dressées, des idoles hiératiques, des verticalités. En 2004, Mâkhi Xenakis réalise ces 260 sculptures, destinées provisoirement à la chapelle Saint-Louis de la Salpêtrière et aux jardins de l’hôpital. Ces effigies redoutables s’intitulent, alors, « les Folles d’Enfer », qui bouleversent Mâkhi Xenakis et nous troublent (2).
 
Ce texte de Mâkhi est à la fois un poème, un roman historique de la Salpêtrière et un rassemblement des archives de l’Assistance publique de Paris. Peu à peu, nous découvrons la Salpêtrière comme un lieu de souffrances et de terreur, comme une zone de cris et de supplices, souvent une détention souvent définitive dans la promiscuité et dans la puanteur… Le 14 mai 1657, Louis XIV, le Roi-Soleil, à 19 ans, signe les décrets du grand enfermement. Ce sera la rafle à l’aube. Interviendront les archers du roi qui attrapent tout ce qui arrive : « à la Salpêtrière on prend les femmes mendiantes/mais aussi/de plus en plus/les filles de joie/les folles/les orphelines/les libertines/les protestantes/les paralytiques/les crétines/les juives/les impies/les criminelles/les ivrognes/les mourantes/les sorcières/les mélancoliques/les aveugles/les adultérines/les homosexuelles/les épileptiques/les voleuses/les magiciennes/les convulsionnaires/les séniles/(…) ». La Salpêtrière mêle, entasse, amalgame celles qui sont méprisées et condamnées. La Salpêtrière les confond, les amalgame. Elle les enchaîne par les horaires, par les règlements méticuleux, par les messes, par les travaux sans relâche. Ce sont les cohues et les cohabitations, les foules des folles et des malheureuses.
 

Bien avant les « créatures » d’aujourd’hui, bien avant les effigies-colonnes, Mâkhi Xenakis suggère la féminité par les dessins (1988) ; elle les nommait, alors, les « petites bonnes femmes », solides, accroupies, énergiques… Et en 1992, elle évoque le féminin par les araignées, par la multiplication des pattes qui jaillissent, par celles qui tissent et piègent. Mâkhi aime l’araignée et la redoute ; dans un beau texte (en 2002, à l’Artothèque de Caen), Marie-Laure Bernadac appelle Mâkhi la « Spider-girl »…
Et, sur les murs de l’Espace des Femmes-Antoinette Fouque, les pastels
(2008-2010) de Mâkhi donnent à voir un foisonnement de boucles, de courbes, d’ondulations, la prolifération des cellules, l’exubérance de l’énergie vivace. Se devinent des mèches de cheveux, une colonne vertébrale, un entrelacs d’algues, les tentacules d’un poulpe monstrueux, des vides lumineux, des boucles incertaines, des fentes, des yeux. Se dessinent les forces tantôt centripètes, tantôt centrifuges. Mâkhi Xenakis traduit le mouvant, le fluide, le flottant, les chances de la vie.
 
1. Mâkhi Xenakis est née à Paris. Elle y travaille et crée. Son père était le musicien Ianni Xenakis ; sa mère, Françoise, est journaliste, écrivain.
 
2. Mâkhi Xenakis a publié plusieurs livres aux éditions Actes Sud : Laisser venir les secrets (2008), Les Folles d’enfer de la Salpêtrière (2004), Parfois seule (1999). Et aussi Louise Bourgeois : l’aveugle quittant l’aveugle (1998). A New York, Mâkhi rencontre Louise Bourgeois qui la sauve ; Louise et Mâkhi sont devenues des amies, des soeurs.

Lecture de l’oeuvre de Mâkhi Xenakis par Dominique Frot, jeudi 27 mai à 19 h

Dans le cadre de l’exposition « Elles nous regardent… » prolongée jusqu’au 30 mai 2010, nous vous proposons une Lecture le 27 Mai 2010 à 19 heures, par la comédienne Dominique Frot de deux nouvelles du livre de l’artiste Mâkhi Xenakis : « Laisser venir les secrets » publié aux éditions Actes-Sud. à l’Espace-Galerie des Femmes-Antoinette Fouque, 35 rue Jacob, 75006 Paris.
d frot envoi.jpgDominique Frot, Après une double formation, celle du Conservatoire national d’Art Dramatique de Pariset celle de l’Ecole Normale supérieure Musique de Paris, Dominique Frot a travaillé au théâtre avec Gilles Dao, Luc Bondy, Peter Brook, François Verret, Thomas Ostermeier, Claude Regy, Robert Wilson, Serge Valletti, Hubert Colas, Pascal Rambert, Xavier Marchand, Jean-Claude Fall, François Orsoni…
 
Au cinéma, elle vient de terminer le tournage de « L’Ecureuil et la couleuvre », réalisé par Laurent Heyneman, qui sera prochainement diffusé sur France 2 et celui de « Les mains libres » réalisé par Brigitte Sy qui sortira le 16 juin prochain. Elle intervient dans « Le Père de mes enfants » réalisé par Mia Hansen-Love, sur un scénario inspiré de la vie de Humbert Balsan, producteur français. Ce film obtint le prix spécial du jury à la sélection officielle du festival de Cannes 2009. Il sortira prochainement en France, en Allemagne et aux USA. Enfin, sortie le 13 octobre de « elle s’appelait Sarah » réalisation Gilles Paquet-Brener. http://www.dominiquefrot.com/ 
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Mâkhi Xenakis est née à Paris, où elle dessine, sculpte et écrit. En 1987, lors d’un séjour de deux ans à New-York, elle rencontre Louise Bourgeois et publie, en 1998, la première édition du livre, Louise Bourgeois, l’aveugle guidant l’aveugle. Elle expose régulièrement son travail de dessins et de sculptures. Ses autres livres : Parfois seule, Laisser venir les fantômes, Les folles d’enfer de la Salpâtrière et Laisser venir les secrets sont publiés aux éditions Actes Sud. Ses dessins et ses sculptures figurent dans des collections publiques tel que le FNAC, le centre Pompidou, la manufacture de Sèvres, la Bibliothèque nationale de France, le Fond municipal d’art contemporain. Expositions récentes : Collection Florence et Daniel Guerlain, Musée des Beaux-Arts de Besançon, Beautés monstres, musée des Beaux-Arts de Nancy, elles@centrepompidou, Paris. http://www.makhi-xenakis.com/

 

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A propos du livre « Laisser venir les secrets » : Quand Mâkhi Xenakis s’est-elle autorisée à écrire ? On voudrait que ce soit quand Louise Bourgeois lui a donné comme viatique son poème « Ce qui compte, ce n’est pas ma voix, c’est ta voix ». En tous cas, Louise Bourgeois, l’aveugle guidant l’aveugle fut son livre fondateur. Un premier texte, La Petite Fille, ouvre Laisser venir les secrets.. Une petite fille qui veut ici exorciser « sa tête de cheval », qui sait que pour s’échapper de ses terreurs, de ses fantômes, elle devra d’abord se laisser dévorer par eux. Suit Jalousie. Texte violent et brutal d’une femme blessée qui tente d’échapper à la douleur en cernant au plus près la sensation de la jalousie. Depuis Les Folles d’enfer, Mâkhi Xenakis s’est inventé à son propre usage une nouvelle forme d’écriture : une prose scandée
non ponctuée. Dans ces deux textes qualifiés par elle de textes de douleur, Mâkhi Xenakis fait de nouveau entendre la singularité de sa voix dans toute sa plénitude. Des oeuvres graphistes de l’auteur ponctuent le livre et nous dévoilent les liens cachés qui unissent écriture et dessin où peur, vertige et force de vie sont prégnants chez elle depuis toujours. Michel Parfenov, juin 2009.
Xenakis002.jpgA l’occasion de son exposition à la galerie des femmes, Mâkhi Xenakis présente des sculptures récentes, ainsi que plusieurs séries de dessins et de gravures réalisés entre 1988 et 2010. Les livres écrits par Mâkhi Xenakis et édités aux éditions Actes Sud sont également présentés ainsi qu’une vidéo qu’elle a réalisée lors de son travail sur les folles d’enfer de la Salpêtrière en 2004.
 

 

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Texte de la conférence de Mâkhi Xenakis donnée à la Nouvelle Orléans lors d’un symposium sur Joan Mitchell

Texte de la conférence de Mâkhi Xenakis donnée à la Nouvelle Orléans lors d’un symposium sur Joan Mitchell


« IL y est question de création, d’exile, de maternité … aussi de Louise Bourgeois et  … de père…. » M.X.

 

1.jpgJ’aimerais d’abord vous remercier pour ce grand honneur que vous me faites en m’invitant à participer à ce Symposium sur Joan Mitchell aujourd’hui. Je suis à la fois très fière et très impressionnée. Je voudrais m’excuser aussi pour mon mauvais accent et mon pauvre vocabulaire…

 

Je dois dire qu’au départ je croyais avoir été invitée uniquement comme amie artiste de Joan Mitchell. Mais, quand j’ai reçu le programme, j’ai réalisé que j’étais supposée parler pendant une heure !… Je dois dire que mon premier souhait fut de « disparaître dans un silence complet». Comme l’aurait dit Louise Bourgeois dans un livre qu’elle publia en 1947…

 

Et puis, mes proches me dirent que je ne devais pas être inquiète, que ce qui serait intéressant c’est que je donne mon regard justement non pas de spécialiste de l’art abstrait Américain, ce que je ne suis pas, mais plutôt d’amie de Joan, d’artiste avec mes émotions et mes propres critères. Je me suis alors dit que même si ma rencontre avec Joan avait été relativement brève dans le temps, elle fut suffisamment enrichissante et déterminante pour moi pour que je tente de redonner un peu de ce qu’elle m’avait appris avec l’énergie qu’elle m’avait donnée…

 

Peut être que je pouvais essayer de faire réapparaitre aujourd’hui la Joan solaire et unique que j’avais rencontrée. Comme j’avais fait apparaître Louise Bourgeois dans le livre que j’ai écrit sur elle : « The blind leading the blind » en 1998. Et comme j’avais fait également apparaître mon père, dans le livre que j’ai écrit après sa mort : « Laisser venir les fantômes » en 2001.

 

2.jpgParler aujourd’hui de Joan me fait prendre conscience de l’importance que cette rencontre fut pour moi et comme elle fut déterminante dans ma vie future. Trois personnes influèrent de manière capitale ma vie d’artiste. Trois grands artistes qui ont de nombreux points communs.

Le premier fut mon père, le compositeur de musique Iannis Xenakis qui me donna la vie… et qui malgré lui me fit comme l’on dit en Français « tomber dans la marmite de l’art»

 

La seconde fut Louise Bourgeois, que je rencontrais lorsque je vivais à New York en 1987 et 1988. Et qui me sauva la vie… en me donnant l’autorisation de m’accepter et de me construire dans mon art.

 

La troisième fut Joan Mitchell qui me montra le chemin pour m’installer dans ma vie d’adulte femme et artiste en France…

Je vais être amenée à parler d’eux trois, non pas parce que je n’ai pas assez de choses à dire sur Joan… mais parce que j’ai l’impression que si j’utilise ce « fil conducteur » de mes souvenirs entre ces trois artistes, à propos de certaines questions que j’ai abordé avec eux je pourrais peut être m’approcher plus facilement des secrets et de l’universalité de l’art …

 

Ce qui est certain c’est que je crois n’avoir jamais retrouvé chez aucun autre artiste qu’eux trois ce tel charisme, cette telle soif de découverte, cette telle lucidité permanente du temps qui passe…. Cette telle exigence d’authenticité tant pour eux mêmes que pour les autres. Pour l’instant allons vers les paroles de Joan Mitchell quand elle parle de sa peinture.

 

 

 

 

3.jpgQuand elle dit : «  Si une peinture est bonne il n’y a rien à en dire »…

On se dit qu’elle a raison, que le choix d’un mot au détriment d’un autre en réduit souvent déjà le sens et ne montre plus qu’un seul aspect du travail…

Que justement si l’artiste choisit de sculpter de peindre ou d’écrire une musique c’est parce que les mots, le langage ne convenait pas à ce qu’il avait à exprimer.

Alors, que dire de plus sur ses peintures ?….

Elle dit aussi ; « Peindre, c’est une manière de se sentir vivre »

 

« Sentir, exister, vivre, je pense que c’est la même chose, mais la qualité n’est pas la même. Exister c’est la survie, cela ne veut pas nécessairement dire sentir. Vous pouvez dire bonjour et bonsoir. Sentir c’est quelque chose de plus, ce n’est pas simplement survivre.

 

Si on se plonge dans les entretiens qu’elle a eus avec Yves Michaux en 1986 en en 1989, dont ces citations sont extraites,  ou bien dans les films qui ont étés fait sur elle, on constate qu’elle cherche toujours l’authenticité et la simplicité d’une idée. Elle n’est jamais péremptoire ou didactique.

 Souvent, au début des entretiens, elle parle de ses chiens…  qui la regardent peindre, ou pour qui elle dit peindre…

Quand elle est plus en confiance, elle se met à parler de nature, de lacs, de champs, de musique, de poésie, de sensations, de lumières…

Elle dit que quand elle est en train de faire un tableau elle se sent protégée de l’idée du temps qui passe… Pour elle le temps qui s’écoule l’angoisse et lui fait penser à la fin, à l’absence à la mort.

 

 

4.jpgElle dit que c’est pour cette raison qu’elle a choisi la peinture. Pour elle, à part la photographie, toutes les autres formes d’expression artistique, que ce soit la musique, l’écriture, le cinéma, le théâtre… ont un début et une fin. A un moment cela s’arrête, Alors que la peinture est le seul lieu où elle se sent tranquille, heureuse parce que le temps ne s’y écoule pas de la même manière. Elle a l’impression que c’est elle qui contrôle le moment où cela doit s’arrêter et que tant qu’elle ne l’a pas décidé, la mort ne peut pas arriver…

Dans le film que Marion Cajori a fait sur elle juste avant sa mort, C’est impressionnant de voir à quel point Joan est émouvante et juste. Le
moment où
elle parle de Little Joan and Big Joan. Comment juste par les intonations de sa voix, les légers changements de son regard, nous voyons apparaître successivement la grande Joan et la petite Joan…

Avec cette simple image si poétique, elle décrit parfaitement la dualité incontournable dans laquelle l’artiste se retrouve confronté ; D’une part celle de l’artiste dans son atelier, qui doit s’imposer une grande solitude pour aller vers cet inconnu qui ressemble souvent à un gouffre sans fond… Mais qui peut aussi brutalement devenir magique, s’éclaircir et donner quelque chose de vivant. C’est ce dont parle Joan quand elle dit qu’ « elle fait alors de la bicyclette sans les mains »… Mais aussi, l’artiste hors de son atelier qui doit passer du temps à prendre des décisions et à accepter de créer des liens sociaux et professionnels avec le monde extérieur.

Pour Joan Mitchell, L’abstraction n’est pas un style.

« Je veux simplement faire qu’une surface fonctionne. C’est juste une utilisation de l’espace et de la forme, une ambivalence des formes et de l’espace. Le style en peinture a à voir avec les étiquettes. Beaucoup de peintres sont obsédés par la volonté d’inventer quelque chose. Tout ce que je voulais c’était peindre. « J’avais une telle admiration pour les grands peintres. Si tu étudies de prés un Matisse, la manière dont la peinture est posée et la manière dont le blanc est mis. Moi je voulais poser la peinture comme Matisse. J’y ai travaillé dur il y a très longtemps. »

 

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Et c’est vrai que si l’on va dans un musée et qu’au détour d’une salle, on découvre un Joan Mitchell, on peut ressentir la même impression que lorsque l’on se trouve devant un Matisse. Tout à coup le tableau nous attire par sa force, sa lumière mais aussi par son extrême fraicheur… Le tableau semble juste terminé. Contrairement à d’autres artistes, il n’appartient pas à une époque passée, on ne peut pas le dater, il est toujours d’aujourd’hui… La fluidité entre les couleurs, la liberté des touches, l’extrême sensibilité de chaque coup de pinceau nous laisse croire que le tableau respire… qu’il est vivant… et la jubilation nous envahie.

Pourtant, dans les peintures de Joan, au milieu de cette énergie vibrante, souvent, dans un coin du tableau, un orage s’apprête à gronder… Je vais tenter maintenant de la faire réapparaitre telle que je l’ai vue, par quelques souvenirs, quelques instants.

 

6.jpgLa première fois que j’ai rencontré Joan, c’était à l’école des Beaux Arts de Paris. Monique Frydman, une amie peintre commune faisait une présentation de son travail devant des étudiants. Nous étions plusieurs de ses amis à être venus la soutenir. Joan était là. Après la conférence, Nous nous retrouvions un petit groupe autour de Monique à boire un verre dans un café. J’étais assise juste en face de Joan. Nous commencions à discuter puis, Joan, quand elle apprit que j’étais artiste se mis à me poser des tas de questions. Je pensais à ma rencontre avec Louise Bourgeois, quelques années plus tôt à New York et aux questions un peu semblables qu’elle me posait quand je lui disais que j’étais artiste. Je sentais que je devais faire attention à tout ce que je disais…Et puis tout d’un coup je ne sais plus comment, elle comprit que mon père était le musicien. Elle semblait bien connaître ce domaine.

 

A mon grand étonnement et contrairement à la réaction habituelle en France, elle me regarda très intensément avec beaucoup de compassion. Elle me dit que cela devait être terrible d’avoir un père comme celui là, à la fois, à cause de la réaction des autres mais aussi parce qu’il devait avoir une très forte personnalité et que je devais certainement avoir beaucoup de mal à me faire ma propre place… Elle semblait vraiment bouleversée par cette découverte et me dit qu’elle voulait mieux me connaître et découvrir mon travail. Elle avait envie de savoir comment je me débrouillais avec ce grave problème…

J’étais d’autant plus stupéfaite que j’avais appris à éviter de parler de mon père et à ne jamais aborder la question dans ce genre de discussions. Surtout en France et à cette époque là, dans les milieux artistiques, c’était très mal vu d’être l’enfant de quelqu’un de célèbre. Mon père à cette époque était très connu dans les années 70, 80 il faisait figure de « musicien révolutionnaire »…Mais la réaction des gens à mon égard depuis mon enfance étaient plutôt de l’ordre de la suspicion : « Elle est une « fille à papa »… elle doit être snobe… prétentieuse… idiote…. » ou alors les gens s’adressaient à moi, comme « passeuse » d’un message que je devrais transmettre à mon père, ne cherchant pas une seconde à savoir si je voulais bien remplir ce rôle et quel type de personne je pouvais être par ailleurs. Donc j’avais pris l’habitude de mentionner le moins possible mon nom et ne jamais aborder cette question. Et pour la première fois ce soir là, à 35 ans, je rencontrais Joan Mitchell qui en quelques secondes semblait tout comprendre et voulait avoir une conversation normale et intéressante sur ce sujet… Soudain tout devenait simple…

Ce souvenir montre comme Joan, était particulièrement différente et sensible, Comme elle avait ses propres jugements et n’était pas influencée par l’esprit bien pensant ambiant Parisien…

 

8.jpgPeu de temps après, elle vint me rendre visite chez moi. Elle était accompagnée d’un jeune artiste. Après leur avoir fait visiter l’endroit où je vivais, je les emmenais dans mon atelier. Après un moment, ce jeune artiste commença à me dire ce qui était bien et ce qui ne l’était pas dans mon travail. Il se mit avec beaucoup de mots à m’expliquer ce que je devrais laisser de côté et ce vers quoi il fallait mieux que j’aille. Il semblait persuadé de connaître la vérité. J’avais un peu envie de lui dire qu’en fait je m’en fichais de ce qu’il pensait et que j’aurais vraiment préféré entendre les réactions de Joan…

Joan le laissait parler et puis au bout d’un moment elle lui coupa la parole : « Et comment
peux tu être sur que tu as raison quand tu dis ces choses là ? Pourquoi est ce
que tu saurais mieux que Mâkhi ce qu’elle à a faire ? »

« Qu’est ce qui te permet de juger tout ça avec tous ces mots ?… » Notre ami se tut un peu vexé… Alors, elle se leva regarda attentivement tous les dessins accrochés au mur, se mit à me poser des questions, me fit parler un peu puis dit qu’elle se sentait bien dans l’univers de mon travail mais que cela lui était difficile d’expliquer pourquoi. A cette époque mes dessins se transformaient constamment, je faisais des nids qui devenaient des araignées qui devenaient des visages… A un moment, elle me dit : « tu vois, j’aime bien tes têtes et leur regard parce qu’ils me font penser à mes chiens …. » Je ne connaissais pas encore bien la vie de Joan et son attachement à ses chiens mais je fus remplie de joie quand elle me dit ça. C’était pour moi un très grand compliment…

 

7.jpgLa question de ce que l’on dit devant un travail amène à parler de ce que l’on dit aux élèves dans l’éducation artistique en général. Et Joan raconte la même chose, quand, jeune femme voulant être artiste, elle entra dans une école d’art et découvrit les professeurs lui dire « tu dois faire ça, tu ne dois pas faire ça »… Elle raconte alors, tout simplement comment elle partie de l’école, se mit à voir des expositions, à rencontrer des artistes et finalement après avoir découvert leur travail, chercha à rencontrer De Kooning et Kline qui à l’époque n’étaient pas du tout connus. Cette question du parcours qu’un jeune artiste est supposé suivre pour se construire est une question que nous abordions souvent avec Joan. Je crois qu’elle retrouvait certaines similitudes dans nos parcours et dans la relation que nous entretenions avec l’autorité de nos pères… Elle aimait me faire parler de mon enfance et essayait de comprendre pourquoi mes parents ne parvenaient pas à accepter que je devienne moi même une artiste. Déjà petite fille, je passais mon temps à peindre et à dessiner mais mon père avait décidé que je serais une grande mathématicienne. Il refusa que j’aille à l’école des Beaux arts. Il disait que je n’avais qu’à apprendre l’art toute seule que ça n’était pas dans les écoles que l’on pouvait apprendre ce genre de choses. Par contre, étudier les Mathématiques, ça c’était indispensable!… J’ai tenté de faire ce qu’il voula
it… Mais au bout de quelques années, je sentis que je
ne m’étais pas bien construite; j’étais restée dans une peinture trop Française trop Européenne, j’avais besoin de me nourrir d’un art plus libre, plus contemporain…

C’est comme ça que je suis partie avec David à New-York en 1987. Pendant un an, je m’identifiais aux voitures que l’on nettoie avec ces énormes brosses bleues mécaniques totalement déchainées!…. Qu’elle liberté incroyable dans tout cet art que je découvrais enfin… De Kooning, Rothko, Newman… Joan Mitchell.

 

10.jpgPendant un an je détruisais tout ce que je faisais, j’étais dans un état de grande dépression. Et puis, j’ai découvert, le travail de Louise Bourgeois et cela a été un choc énorme.

J’avais l’impression que chaque nouvelle œuvre que je découvrais m’aidait à me reconstituer, à retrouver mon centre de gravité…

J’ai cherché à la rencontrer et c’est comme ça qu’elle m’a effectivement sauvé la vie en acceptant ce que j’étais et en m’aidant à trouver mon chemin… Louise Bourgeois aussi aimait parler de l’enfance et des pères…

Joan et Louise avaient cette même faculté à s’intéresser aux autres, à leur parcours. Toutes deux étaient d’une grande curiosité même pour des sujets qui pouvaient être éloignés de leurs préoccupations. Par exemple, l’une comme l’autre aimaient avoir de longues conversations sur les sciences et la médecine avec David qui est un scientifique. Elles pouvaient toutes les deux être très sociable si elles se sentaient en bonne compagnie mais elles pouvaient aussi interrompre une entrevue brusquement si quelqu’un les énervait.

 

11.jpgQuand nous avons décidé avec David de rentrer en France, en 1989, j’étais très triste de perdre cette véritable amiti
é que j’avais avec Louise… Ce fut un véritable miracle
pour moi de retrouver aussi vite une personne aussi forte et talentueuse que Joan qui acceptait une nouvelle amitié ….

 

14.jpgA 65 elle était toujours très curieuse de rencontrer des nouvelles personnes. Je me souviens qu’après quelques semaines, nous avions vraiment l’impression de faire partie de son groupe d’amis proches. Elle aimait particulièrement les jeunes artistes, particulièrement les jeunes femmes artistes. Joan aimait aussi nous inviter chez elle, à Vétheuil. A cette époque, j’avais l’habitude d’occuper notre fils Ulysse, de deux ans et demi, en lui donnant du papier et des crayons de couleurs. Il passait son temps à recouvrir des feuilles blanches de grands traits colorés et abstraits, on peut dire que cela faisait un peu penser aux dessins de Joan Mitchell…

 

17.jpgJoan semblait très amusée et intéressée par l’activité d’Ulysse, au bout d’un moment, elle se mettait à côté de lui et se mettait à dessiner aussi. Immanquablement, Ulysse au bout d’un moment, voyant les dessins de Joan, lui disait moitié sérieusement moitié en plaisantant : « Mais non, ça n’est pas comme ça que tu dois faire, regardes comme je fais ». Joan n’était pas seulement amusée par la situation, on avait l’impression qu’elle cherchait sérieusement à desceller quelque chose d’important…

 

A quel moment quelques coups de pinceaux ou de crayon deviennent ils de l’art et à quel moment cela reste il un joli dessin d’enfant ?…

 

16.jpgTous les enfants de cet âge dessinent ce genre de dessins avant de se mettre à représenter des personnages ou des animaux. Ces dessins ont en eux une grande liberté, qui sera perdue quelques années plus tard par l’école et les conventions, mais ces dessins n’expriment pas grand chose sur nous même ni sur le monde…

Joan non seulement avait réussi à retrouver cette liberté de l’enfance mais elle était nourrie de toute une vie de réflexions et de travail acharné quotidien… Entre les dessins automatiques de ce petit garçon de deux ans et ceux rayonnants de vie et de maitrise de Joan, une vie entière de création acharnée les séparaient…

 

15.jpgIl y a le travail de maitrise physique, où le corps et la main parviennent de mieux en mieux à exprimer la volonté de l’artiste mais aussi tout le cheminement mental d’un être humain qui découvre son destin et l’inéluctabilité de la mort. Les dessins d’un enfant de deux ans, s’il n’a pas vécu de traumatisme majeur sont dans l’instant de vie pure, dans l’insouciance du futur et donc de la mort. Joan, elle s’en rapprochait de plus en plus, nous sommes en 1992, elle disparaîtra en octobre de cette même année.

Tous les dessins, toutes les toiles réalisés lors de cette dernière année rivalisent chacun en maitrise, en liberté, en énergie et en couleur. Ils ont en eux à la fois, la gravité terrible de la mort et la sensation de ces instants de vie qui bientôt ne seront plus.

Joan parlait de la mort, sentait que sa maladie l’en rapprochait de plus en plus sans pour autant, à part les dernières semaines, savoir qu’elle serait si proche.

Est-ce pour cette raison que ses dernières œuvres semblent si vivantes, si libres ? Contrairement à d’autres artistes qui sentant la mort venir se laissent engloutir par elle et laissent leur œuvre s’en absorber. Joan semblait par la vie et la lumière qui émanaient de ses dernières œuvres se battre dans un corps à corps sans merci avec elle. Comme ci, tant qu’elle dessinerait elle tiendrait la mort à distance, elle la déjouerait …

La mort a fini par gagner la partie mais ses œuvres sont là, éclatantes, éternelles et plus vivantes que jamais.

Comment ne pas s’arrêter en silence devant un des derniers tableaux de Joan intitulé, justement « Merci »…

 

der.JPGJ’aimerai reprendre quelques souvenirs croisés sur une question qui me préoccupait beaucoup à cette époque ; la question d’avoir des enfants quand on est une femme artistes…

J’aimerais d’abord revenir sur ce que m’a dit mon père puis sur ce que m’a dit Louise Bourgeois par rapport à cette question. Mon père qui, comme je le disais précédemment a dédié sa vie à la musique me disait toujours, lorsque j’étais petite fille, avec son autorité naturelle… que je devrais rester indépendante, faire des mathématiques, avoir beaucoup d’amants et ne jamais avoir d’enfants…

 

13.jpgIl prônait un modèle d’artiste que l’on retrouvait beaucoup dans sa génération. Mon père est né en 1922. Joan elle est née en 1925. Devenus adultes juste après la guerre, ils durent reconstruire leur vie avec des nouvelles règles, des nouvelles lois et un désir de liberté et d’indépendance impétueux. Surtout chez les jeunes artistes, La notion de famille devenait démodée, caduque. Elle était réservée aux « bourgeois » et le fait de faire des enfants était synonyme de régression et d’aliénation.

Une des premières grandes désobéissances que je fis à mon père quand j’avais 18 ans fut de tomber follement amoureuse d’un jeune homme ; David.

 

J’avais bien sur le droit de coucher avec qui je voulais mais il ne fallait pas que ce soit avec le même… Alors je me suis mise à lui mentir et à m’inventer des tas d’amants. Bien plus tard, au grand désespoir de mon père, je partis vivre avec David à New York pour deux ans. Nous commencions à construire notre vie d’adultes, nous avions une trentaine d’années. David qui ne venait pas d’une famille d’artiste me disait de plus en plus souvent qu’il souhaitait avoir des enfants. Pas un enfant, des enfants…

Et moi, même si je me disais que je n’avais « pas le droit de faire des enfants », je commençais à en avoir de plus en plus envie… A cette époque, Je voyais très souvent Louise Bourgeois dans sa maison de New York. J’avais la chance, de la voir à une période de sa vie où elle était très disponible et où l’on pouvait passer des heures avec elle à discuter de tas de choses passionnantes.

 

 

 

 

 

 

 

 

25.JPGLouise est née en 1911. Elle rencontra Robert Goldwater vers l’âge de 26 ans. Il vivait et travaillait à New York, elle décida de l’épouser et de le suivre. Avant de tout quitter pour partir vivre à New York, et ne parvenant pas à être enceinte, elle adopta un petit orphelin français… Peu de temps après son arrivée elle tomba enceinte de Jean-Louis puis de Alain. C’était très rare à cette époque qu’une femme artiste ait 3 enfants. Un jour, alors que nous parlions toutes les deux depuis des heures, je me lançais et lui posait la question : « est ce possible d’être à la fois une artiste et de faire des enfants ? » Elle me regarda avec grand étonnement, réfléchie puis me dit :

« Bien sur, c’est un don de soi de faire des enfants, cela demande beaucoup de temps beaucoup d’attention, mais jamais mes enfants ne m’ont empêché de travailler. Ca n’est pas ça qui empêche de travailler. Tout ça c’est des chis chis… Bien sur que vous pouvez faire de enfants et continuer de faire votre art…

Alors je lui ai fait confiance et un peu plus tard, Ulysse, notre premier fils est né.

 

18.jpgMaintenant nous arrivons à Joan, Un jour, probablement vers le mois d’avril 1992, nous étions chez elle, nous venions d’apprendre que j’étais de nouveau enceinte. Non pas d’un enfant mais de deux enfants… des jumelles… Je dois reconnaître que je ne savais pas trop quoi penser. Quand nous avons annoncé la nouvelle à Joan, elle semblait très émue, très excitée. C’était surtout l’idée qu’il y ait deux bébés dans mon ventre qui semblait la fasciner le plus…

Au bout d’un moment elle me demanda ce que cela me faisait comme impression. En fait, tout était très confus pour moi, passer de un enfant à trois… et puis là je désobéissait franchement à mon père… Toutes les questions d’organisation du temps, de places…

 

19.jpgJe connaissais la vie de Joan et son choix, comme beaucoup d’artiste femme de cette génération elle avait consacré sa vie entière à son œuvre. J’avais peur qu’elle se désintéresse de moi comme artiste, qu’elle pense que j’allais tout abandonner… j’avais peur qu’elle ne m’aime plus… alors je lui ai répondu que j’étais inquiète, que j’avais peur de ne pas pouvoir continuer à peindre…

Elle a brandit sa canne dans les airs, s’est mise à la faire tournoyer violement et m’a regardée de manière furieuse !! « Comment peux-tu me dire, à moi, une chose pareille !!! Regardes moi, je suis seule, je deviens vieille, je bois et pourquoi ?… juste parce que je suis tombée amoureuse d’un homme qui ne voulait pas d’enfants, qui voulait être le seul dont je m’occupe !!! et moi ?….je voulais me consacrer uniquement à mon art, garder ma grande liberté !….

Et qu’est ce que j’en fais de toute cette grande liberté ?….

 

Une journée c’est énorme, il te suffit de bien travailler 3 ou 4 heures et ça va, ça suffit !! Tu peux accomplir ton œuvre !

Regardes moi, fais tes enfants, profites en, continues ton art et ne m’embête plus avec ces conneries !!

J’ai écouté Joan, je ne me suis plus jamais plainte, j’ai eu mes deux filles et je me suis épanouie dans mon travail et ma vie familiale.

 

20.jpgSi j’attache de l’importance à ces anecdotes et si je me permets de les mettre en avant c’est que je trouve qu’aujourd’hui encore dans le monde de l’art cette question reste trouble ; beaucoup de jeunes femmes artistes encore aujourd’hui suivent sans trop le savoir ce dogme encore puissant. Et bon nombre d’entre elles arrivées à un âge certain se retrouvent dans la même tristesse étonnée. Il n’est bien sur pas question pour moi de dire qu’une femme n’est accomplie que si elle fait aussi un enfant. De nombreux individus (homme ou femme) ont fait ce choix sans le regretter. Je trouve juste qu’une idée préconçue subsiste encore aujourd’hui et que le choix des femmes à ce sujet ne leur appartient pas encore forcément tout à fait.

 

Et ce, contrairement au monde des femmes écrivains, comédiennes ou musiciennes. J’aimerais revenir maintenant sur un autre point commun ; l’exil.

 

Tous 3 étaient des exilés, tous 3 disent avoir souffert de cet exile.

 

21.jpgEt pourtant, n’est ce pas ce déracinement forcé qui leur a permis d’acquérir une telle liberté, une telle indépendance par rapport aux conventions artistiques qui régnaient dans leur domaine.

 

Coupés de leurs racines, éloignés du confort d’être dans un pays familier où l’on parle sa langue maternelle. La bataille nécessaire pour se construire leur donna cette indépendance rare qui leur fit créer un art totalement singulier, unique que l’on reconnaît immédiatement sans hésitation.

 

Ce qui semble d’autant plus paradoxale c’est que pour construire cette œuvre unique et résolument novatrice, c’est en allant chercher leur racines perdues qu’ils l’ont trouvée… Cela dit, ces exils n’avaient pas les mêmes motivations… En ce qui concerne l’homme… il avait du fuir pendant la guerre son pays, parce qu’il était condamné à mort pour des raisons politiques. En ce qui concerne les femmes, elles ont chacune traversé l’océan pour vivre avec l’homme qu’elles aimaient…

En aucun cas ces exiles ne furent décidés de manière stratégique pour leur carrière.

 

22.jpgEn aucun cas ils ne se sont battus pour leur art pour des raisons stratégiques. Juste la nécessite de faire encore et encore une autre œuvre pour se sentir vivant. Mon dernier souvenir avec Joan est un souvenir particulièrement fort et émouvant. Nous nous sommes vues à Vetheuil avant l’été 1992. Mon ventre commençait à bien grossir, elle me demanda de la prévenir dés que mes filles naitrait, elle tenait à venir les voir très vite. L’été se passa et le 1er octobre mes filles naissaient. De la maternité j’appelais Joan qui avait une drôle de voix… Elle me dit qu’elle devait partir à l’hôpital mais que dés qu’elle serait de retour elle viendrait nous voir. Quelques jours plus tard nous apprenions qu’elle était hospitalisée à l’institut Curie et que les choses n’allaient pas bien.

Dés que j’ai pu confier pour quelques heures mes bébés, j’allais la voir à l’hôpital. A ma première visite, elle avait encore de l’énergie, elle parlait beaucoup, s’énervait même encore après les infirmières mais se réjouissait de pouvoir aller voir autant qu’elle le voulait une reproduction d’un tableau de Monet qui était juste dans le couloir devant sa porte…

 

23.jpgUn peu submergée par mes nuits blanches et tous mes bébés… je
ne suis retournée la
voir que quelques jours plus tard.

 

En entrant dans la chambre j’ai compris immédiatement, comme tous les gens qui venaient, que c’était bientôt la fin. Beaucoup de ses amis proches venaient et repartaient en silence, c’était un moment d’une profonde tristesse. Tout semblait suspendu, arrêté…

Longtemps je suis restée imprégnée de ce que j’avais vu en allant la voir à ce moment là ; J’étais stupéfaite de voir à quel point la mort, lorsqu’elle s’approche d’un vivant lui fait prendre les mêmes gestes, les mêmes expressions que ceux d’un nouveau né.

C’est difficile à décrire mais un bébé lorsqu’il vient de naître ne voit pas encore vraiment, il cherche plutôt une présence en dodelinant de la tête, sa bouche est encore comme celle d’un petit poisson, il la tortille et l’ouvre de manière maladroite… ses mains encore un peu recroquevillées s’approchent maladroitement de son visage… toutes ces attitudes, toutes ces images, je les retrouvais chez Joan qui les derniers jours était devenue inconsciente…Comme si la mort et la naissance se rejoignaient .

Comme si pour mourir, il fallait retrouver le corps et les gestes que l’on avait eus au moment de notre propre naissance …

Joan Mitchell la dernière personne qui m’avait aidée à me construire dans ma vie d’artiste disparaissait au moment même où mes deux filles naissaient…

C’est toujours après que l’on prend conscience de l’importance d’une rencontre. Je n’oublierais jamais à quelle point elle m’a nourrie et aidée à me construire, je n’oublierais pas non plus sa disponibilité, sa générosité et son talent.

 

24.jpgFrancis Picabia disait : « Pour que vous aimiez quelque chose il faut que vous l’ayez vu et entendu depuis longtemps, tas d’idiots »… Cela se confirme aujourd’hui pour l’œuvre de Joan, plus les années passent plus on voit ses tableaux irradier de vie, de force et de liberté.

Plus les années passent, plus les gens sont nombreux à réaliser à quel point ses œuvres sont majeures. Il est évident que Joan Mitchell comptera parmi les artistes les plus importants de sa génération. Et que ce moment que nous passons ces jours ci en sa compagnie et en compagnie de ses œuvres sont des moments importants et privilégiés…

 

Je vous remercie infiniment de m’avoir fait participer à ce symposium.

 

Je vous remercie. M.X.

Le premier article écrit sur l’exposition, prolongée jusqu’au 30 mai 2010, de Mâkhi Xenakis

Paru jeudi 25 mars 2010 sur le blog d’Alan Argoul http://argoul.blog.lemonde.fr/2010/03/25/makhi-xenakis-elles-nous-regardent/

Qui ? Les femmes, ou plutôt la féminité – façonnée en potier, comme Jéhovah le fit jadis aux commencements du monde. Gouttes de terre rose que le Souffle animera, fera chair. Deux trous pour les yeux, deux trous pour le nez, deux trous pour la bouche, deux seins, deux pieds, deux fentes tout en bas, devant et derrière. La Femme est née sous le signe du deux. Double de l’homme dont elle est côte, double dans le temps avec l’enfant, double en soi. Mais celles de Mâkhi Xenakis n’ont pas de mains, symbole de l’agir, du pouvoir sur les choses : seraient-elles des bites en acte réservées aux mâles ?

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Mâkhi Xenakis a de qui tenir. Fille de Françoise, journaliste et écrivain et du compositeur Iannis, elle est artiste, née à Paris en 1956. Elle sculpte, elle peint, elle écrit. De la sensation aux sentiments et aux idées : les trois étages de l’humain. Elle a étudié l’architecture avec Paul Virilio, créé décors et costumes pour le théâtre. Ses livres sont publiés aux éditions Actes Sud.

makhi-xenakis-elles-vous-regardent-dessin.1269254592.jpgCe qu’elle dessine est accroché aux murs de l’Espace des femmes. Alentour des sculptures et par contraste, les dessins sont précis, ils portent non sur la totalité mais sur le détail. La féminité se fait enveloppante, ensorceleuse, agrippante. L’œil perçoit des entrelacs d’algues ou de poils qui entourent un vortex où il est attiré, saisi de vertige. Ce sont des bouches, des sexes, des grottes. Les cheveux des sirènes marines, les mandibules des goules avides, la prolifération des cils paramécies. Les dessins sont un dedans qui captive votre envie d’explorer, les sculptures un dehors qui vous donnent envie de protéger.

Ce qu’elle sculpte entre 2007 et 2010, ces boules roses en goutte d’huile, bien assises, Mâkhi les appelle des « créatures ». « Inspirées à la fois des déesses archaïques, des femmes ‘impudiques’ de Manet ou de Picasso, des Causeuses de Camille Claudel ou encore de certaines sculptures de Louise Bourgeois. Ces ‘créatures’ se montrent telles qu’elles se ressentent à la fois dans leur fragilité leur vulnérabilité mais aussi leur plénitude, leur animalité, leur étrangeté. » Dit-elle.

Leur présence est forte, surtout lorsque vous visitez l’exposition quand il y a peu de monde. « Elles n’attendent personne pour être. » Elles sont là, vision en triangle à l’oeil, en pyramide au toucher, bien campées sur leur nid et impassibles. Elles sont l’œuf, la terre-mère, la chair qui devient. Guilaine Depis, l’attachée de presse des Femmes, attire judicieusement le regard sur leur surface : elles sont couvertes d’un léger duvet blond, pareil à la vraie peau humaine. Nous sommes loin du marbre antique qui irradie sa lumière depuis l’intérieur. Nous sommes dans le travail de l’artisan et non des dieux. La terre est mate et ne brille pas comme la pierre mais elle n’est pas froide comme elle et si vous pouviez toucher (c’est interdit !), elle apparaîtrait tiède comme la chair. Peau de terre contre peau de pierre, nous sommes au XXIe siècle après, pas au Xe siècle avant. Les dieux n’insufflent plus la vie, à nous de la faire naître.

 

 

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Placides, reposantes, elles vous regardent. Les féminités posées. Sans rien dire par les mots, mais leurs formes et leur couleur disent pour elles. Point de bavardage mais une parole. Point de futile mais du fondamental, du féminin pluriel. Vous vous sentez étrangement apaisé parmi elles. Elles nidifient à plusieurs. Elles ont essaimé parfois sous cloche de verre pour être emportées et adoptées.

Elles sont là, elles vous attendent. Venez les voir !

Exposition présentée du 8 mars au 30 mai 2010 (prolongation d’un mois) du lundi au vendredi de 11h à 19h, le samedi de 13h à 19h, Espace Galerie des Femmes, 35 rue Jacob 75006 Paris

Librairie-espace des Femmes
Le site de Mâkhi Xenakis
Une vidéo de Mâkhi Xenakis

Mâkhi Xenakis évoque son oeuvre sur SavoirChanger.Org (Interviews vidéos de Laureline Amanieux) – 8 mars 2010

vg-coeur-rouge-transparent.jpgCHAUD DEVANT ! SPECIAL COUP DE COEUR !

Le site SAVOIR CHANGER.ORG de LAURELINE AMANIEUX, Auteur d’Essais chez Albin Michel, et docteur es Lettres, nous offre des entretiens inédits avec Mâkhi Xenakis. A consommer sans modération ! 😉

PREMIERE VIDEO : ALLER VERS SON CHEMIN   ICI

xenakislau1.jpg«Je vous appelle parce que… vous êtes la seule personne qui pouvez me sauver la vie. » C’est ce que l’artiste Mâkhi Xenakis déclare à Louise Bourgeois en 1987.

Dans cette première partie, Mâkhi Xenakis revient sur son parcours, de l’architecture avec Paul Virilio aux décors et costumes pour le théâtre, notamment avec Claude Regy. En 1987, titulaire d’une bourse « hors les murs » de la villa Médicis, Mâkhi Xenakis rencontre à New York l’artiste Louise Bourgeois qui devient pour elle un maître et lui apprend à transformer la « petite bonne femme » de ses premiers dessins en un univers de formes mouvantes, arachnéennes, et de femmes plus amples et affirmées.

 

DEUXIEME VIDEO : VERS UNE FEMINITE SOLAIRE   ICI

xenakislau2.jpg« J’ai eu envie de retourner vers cette féminité solaire de la femme telle qu’elle se ressent… dans une complicité avec une autre… puis dans une maternité. »

Après l’exposition des « Folles d’enfer » qui sort de l’oubli ces femmes anonymes maltraitées à l’hôpital La Salpêtrière, l’artiste Mâkhi Xenakis sculpte des femmes épanouies, inspirées par les déesses archaïques pour changer des stéréotypes contemporains de femmes anorexiques, malheureuses, ou effrayantes… afin de nous sentir pleinement vivants.

Liens sur le web :

Le site officiel de l’artiste : http://www.makhi-xenakis.com/fr/default/index/index/2/Site-officiel-de-Makhi-Xenakis.html

Deux vidéos :

 _ Le journaliste Olivier Barrot parle du livre « Laisser venir les fantômes » : http://www.ina.fr/art-et-culture/litterature/video/2099853001/makhi-xenakis-laisser-venir-les http://elles.centrepompidou.fr/blog/?p=52

_ Un extrait du livre « Les folles d’Enfer » lu par 15 voix féminines et des images de l’exposition : http://elles.centrepompidou.fr/blog/?p=52

L’intervenante : Née à Paris en 1956, Mâkhi Xenakis vit et travaille à Paris. Le dessin fait depuis toujours partie de son quotidien, puis la sculpture a pris une place décisive dans son art. Elle est également écrivain. Depuis 1998, elle a publié, aux éditions Actes Sud,  un livre avec Louise Bourgeois, «Louise Bourgeois, l’aveugle guidant l’aveugle», puis « Parfois seule », «Laisser venir les fant
ômes» dans lequel elle raconte ses souvenirs de son père, le compositeur Iannis Xenakis, « Les folles d’enfer de la Salpêtrière » consacré aux femmes enfermées et maltraitées dans cet hôpital pour accompagner l’exposition de sculptures des « folles d’enfer», et enfin « Laisser venir les fantômes».

Du 8 mars au 30 avril 2010, Mâkhi Xenakis expose ses nouvelles sculptures valorisant une féminité solaire à l’Espace des Femmes à Paris (relié aux éditions des Femmes-Antoinette Fouque, 35 rue Jacob) : « Elles nous regardent ».

Brunch littéraire au Dansoir dimanche 14 mars avec Mâkhi et Françoise Xenakis. Bienvenue !

makun.JPGLE DANSOIR – KARINE SAPORTA

Parvis de la Bibliothèque Nationale de France – Site François Mitterrand – entre les tours T3 et T4 – 13ème

Dimanche 14 mars 2010, de 13h à 15h

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BRUNCH LITTERAIRE AU DANSOIR 

 

Semaine de la femme:

« Mère et fille : 1 même nom, 2 parcours »

animé par Jacqueline Zana-Victor

En présence de :

Françoise XENAKIS : journaliste et écrivain, auteur du livre  » J’aurais du épouser Marcel », Editions Anne Carrières

et

Mâkhi XENAKIS : dessins, sculptures, livres

Exposition : « elles nous regardent » du 8 Mars au 30 avril 2010 Espace-Galerie Des femmes-Antoinette Fouque, 35 rue Jacob 75006 Paris www.makhi-xenakis.com

Accès : Entre les tours T3 et T4 de la BnF / Côté Avenue de France, au niveau du cinéma MK2.

Parking : Tolbiac Bibliothèque ou Vincent Auriol

Métro : Ligne 14 et RER C – Bibliothèque F. Mitterrand / Ligne 6 – Quai de la gare

Réservations – Renseignements : Tél.01 48 07 00 17

E-mail dansoir@karinesaporta.com / Site www.ledansoir.saporta-danse.com

Brunch : 12 / Thé ou café et jus de fruits à volonté, viennoiseries, collations thématiques.

Pour le 8 mars, Exposition « Elles nous regardent » de Mâkhi Xénakis – Espace des Femmes-Antoinette Fouque, VERNISSAGE VENDREDI 12 MARS A 18H30

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Antoinette Fouque et

 

 

Mâkhi Xenakis

A l’occasion de son exposition à l’espace galerie des femmes, Mâkhi Xenakis présente des sculptures récentes, les créatures, réalisées entre 2007 et 2010 ainsi que plusieurs séries de dessins et de gravures réalisées entre 1988 et 2010.

seront heureuses de vous accueillir le vendredi 12 Mars à partir de 18h30 au vernissage de l’exposition

elles nous regardent…

dessins, sculptures, livres , vidéo

 

de Mâkhi Xenakis 

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Exposition présentée du 8 mars au 30 avril 2010

du lundi au vendredi de 11h à 19h , le samedi de 13h à 19h

Espace-Galerie des Femmes

35 rue jacob 75006 Paris. Tel : 0142226074 ou 01 42 60 93 76 (Librairie) wwwdesfemmes.fr

photos Mâkhi Xenakis: vues d’atelier, sculptures en ciment, pastels noirs sur papier,2010. 

 

Les dessins : Masses mouvantes vivantes qui prolifèrent parfois sur toute la surface du papier, univers organiques marins ou espaces mentaux qui s’affrontent ou laissent apparaître un vide dans lequel on peut se sentir happé… Les thèmes du regard, de l’araignée, du vertige et des forces de vie apparaissent et disparaissent de manière récurrente.

 

Les sculptures : Après mon travail d’écriture et de sculpture sur les « folles d’enfer » et la question de l’enfermement, mes nouvelles sculptures se tournent de nouveau vers les questions liées à la féminité, à la maternité : Inspirées à la fois des déesses archaïques, des femmes « impudiques » de Manet ou de Picasso, des « causeuses » de Camille Claudel ou encore de certaines sculptures de Louise Bourgeois. Ces « créatures » se montrent telles qu’elles se ressentent à la fois dans leur fragilité leur vulnérabilité mais aussi leur plénitude, leur animalité, leur étrangeté. Mâkhi Xenakis, 2010

 

Ce qui me paraît nouveau dans ce travail, c’est qu’elles ne bavardent pas mais qu’elles se parlent, elles existent les unes par rapport aux autres. Alors qu’elles sont dans une sorte de nudité primaire, elles sont aussi dans la parole, dans celle qui construit. Elles n’attendent personne pour être. C’est aussi une oeuvre sur la construction des femmes par la parole qu’elles ont entre elles…. Je trouve que leur nudité met surtout cela en avant. Catherine Gonnard, 2010.

 

Chemin singulier, personnel, hors des modes et des tendances, mais combien émouvant et courageux. Chaque itinéraire d’artiste lorsqu’il atteint cette authenticité, pour puiser au fond de lui-même et sauter dans le vide, nous apprend quelque chose sur nous-même, sur les forces de vie et de mort à l’œuvre dans tout travail créatif, et nous donne ainsi une leçon d’humanité. » Marie-laure Bernadac , Artothèque de Caen, 2002.

 

Les livres écrits par Mâkhi Xenakis et édités aux éditions Actes-Sud sont également présentés ainsi qu’une vidéo qu’elle a réalisée lors de son travail sur  les folles d’enfer de la Salpêtrière en 2004.

 

mâkhi.JPGBiographie complète:

 

Née à Paris. Vit et travaille à Paris.

Le dessin fait depuis toujours partie de son quotidien. Etudie l’architecture avec Paul Virilio et crée des décors et des costumes pour le théâtre, notamment avec Claude Regy.

En 1987, s’installe à New York pour peindre jusqu’en 1989. Y fait une rencontre décisive avec Louise Bourgeois.

En 1998, publie un livre avec Louise Bourgeois, «Louise Bourgeois, l’aveugle guidant l’aveugle» aux éditions Actes Sud.

En 1999, première exposition de sculptures accompagné du livre « Parfois seule », éd. Actes Sud.

En 2001, expose ses dessins et ses sculptures et publie «Laisser venir les fantômes» éd. Actes Sud.

En 2004, invitée à exposer des sculptures à la Salpêtrière, elle découvre dans les archives de l’assistance publique l’enfer carcéral vécu par des milliers de femmes depuis Louis XIV et publie « Les folles d’enfer de la Salpêtrière ». Elle présente parallèlement un ensemble de 260 sculptures dans la chapelle.

En 2008, publie « Laisser venir les secrets» ed. Actes Sud.

En 2009, est invitée par la manufacture de Sèvres à créer une sculpture en céramique à tirage limité, intitulée « La Pompadour ».

En 2010, est invitée à Présider le Jury du festival international du film sur l’argile et le verre à Montpellier.

 

Prix, bourses

1987 Bourse Villa Médicis hors les murs, section peinture, pour un séjour de 2 ans à New York

1996 prix de gravure Lacourière, Bibliothèque Nationale et Fondation de France.

 

collections publiques et privées (sélection)

FNAC

Centre Pompidou, cabinet d’art graphique

Manufacture nationale de Sèvres

Fonds municipal d’art contemporain de la ville de Paris

Bibliothèque Nationale de Paris

Musée Zadkine

Artothèque, Musée des beaux-arts de Brest

SACEM

Florence et Daniel Guerlain Paris

Antoine de Galbert Paris

Jean et Christina Mairet Paris Berlin

James Cottrell, Joe Lowett New York

Richard Axel New York

Alexander Economakis Athènes

 

expositions personnelles (sélection)

2009 galerie Annie Lagier, Isle sur la Sorgue, galerie Sainte Catherine, Rodez

2008 «Laisser venir les secrets », Le Méjan, Arles

«Continents noirs » galerie Tina Kambani, Athènes

2007 «Dessins, sculptures, vidéo » – Mairie du 13e – Paris

«Dessins » Librairie Bookstorming – Paris

«Continents noirs – dessins, sculptures, vidéo », Ecole d’arts Plastiques de Châtellerault

2006 «Moments artistiques» Paris

«Autour des folles d’enfer» – Sculptures, vidéo – Centre d’art Passerelle, Brest

«Gravures, livres d’artiste» Musée des beaux-arts, Brest

«Dessins » Ecole Supérieure d’Arts, Brest

2005 «Les folles d’enfer de la Salpêtrière, sculptures », jardins de la Salpêtrière. jardins de

Sciences-Po, Paris

«Heures Bleues, sculptures », Evian

2004 «Les folles d’enfer de la Salpêtrière » Chapelle et jardins de la Salpêtrière, Paris

Galerie Suzanne Tarasiève, Paris

2003 «Dessins, sculptures » Artothèque de Caen

2002 «Morceaux, livre d’artiste, pastels, sculptures » Musée Zadkine, Paris

«Laisser venir les fantômes, dessins, sculptures » Hôtel d’Albret, Paris

2000 «Parfois seule » Le Méjan, Arles

1999 «Sculptures, dessins » Galerie Edouard Manet, Gennevilliers

Galerie Alain Le Gaillard, Paris

1993 «Autoportraits » La Box, Bourges

 

expositions collectives (sélection)

2009 « Beautés monstres », Musée des Beaux-Arts de Nancy

« La lutte contre le Sida a 25 ans, les artistes soutiennent AIDE ». espace Azzedine AlaÏa, Paris.

« ART PROTECT » , galerie Yvon Lambert, Paris

15e Biennale de la céramique de Châteauroux

« elles @centrepompidou», centre Georges Pompidou, Paris

« ANIMA ANIMALIA », Biennale de céramique de Châteauroux

« Point à la ligne », château de Servières, Marseille

2008 «nouvel accrochage», collection Florence et Daniel Guerlain, Les Mesnuls

«drawing women», Johyun Gallery, Séoul, Busan

«Salon du dessin», galerie Catherine Putman, Paris

2007 «carte blanche à Dominique Aris » galerie Frédéric Moisan, Paris

«Une sélection de dessins, collection du Centre Pompidou », Musée des BA de Besançon

«Singuliers, pluriels» Galerie Catherine Putman, Paris

2006 «Acquisitions récentes, un choix » centre G. Pompidou », Paris

2005 « Le dessin », Espace d’art contemporain C Lambert, Juvisy sur Orges

« Peintures à histoires ». Musée des beaux-arts de Besançon

2004 « Mauvais genre » Ecole des beaux-arts, de Rouen

2001 Livingstone Gallery, La Haye

2000 « Et tous, ils changent le monde », Frac des Pays de la Loire, Carquefou

1998 « Regards noirs », Bibliothèque Nationale, Paris

1996 Foire de Bâle, Fiac, galerie Pièce unique

1994 «Autoportrait » Centre d’art contemporain, Castres

 

catalogues

2009 2010 Beautés monstres, Claire Stoullig, musée des BA de Nancy.

2009 elles@centrepompidou, musée national d’art moderne

Anima Animalia, 15eme Biennale internationale de céramique, Châteauroux

2008 Airyung Kim «Drawing woman» Johyun Gallery, Séoul, Busan

2007 Marc Partouche «le champs de Mâkhi» éd cardinaux, Ecole d’Art Plastique de Châtellerault

2006 Marion Daniel « Mâkhi Xenakis, donner figure» éd centre d’art Passerelle et ville de Brest

2004 Djamel Meskache « Une nuit d’enfer » et entretiens Mâkhi Xenakis et Jacques Victor Giraud,

Arboretum/Tarabuste Argenton-sur-Creuse

2002 Marie-Laure Bernadac « Mâkhi Xenakis, Spider girl ».

Mona Thomas « Une embrouille au cœur du silence » éd. Artothèque de Caen

1999 Claude Regy « Mâkhi » galerie municipale E Manet, Gennevilliers, Galerie Lucien Durand

Le Gaillard Aide à la première exposition » D.A.P.

1994 Patrick Talbot: « Mâkhi Xenakis, inquiétante étrangeté » éd. Michel Chomarat, Lyon

1993 Louise Bourgeois, Démosthène Davvetas, Catherine Strasser « Mâkhi Xenakis, autoportraits »

école des Beaux Arts Bourges

 

bibliographie (dessins, sculptures, livres)

2009 Elisabeth Couturier, « Les hommes au placard, les femmes au musée », Paris-Match n° 3132

L’art des femmes, elles@centrepompidou, Art Absolument n° 30

Mâkhi Xenakis, lettre à Pascal Amel, Art Absolument n° 27

2008 Julie Martin «Mâkhi Xenakis, sculpteuse de vies », revue Atmosphère n° 124

Claudine Galea «Les orages de Mâkhi », La Marseillaise

Natacha Wolinsky «Louise et Mâkhi, mano a mano, Beaux Arts Magazine

Myriam Bouttoulle «
Dans les pas de Louise », Connaissance des Arts

Guy Duplat «Les secrets de Louise Bourgeois », La libre Belgique

Jean Pierrard «Louise attaque », Le Point.fr

Émilie Bouvard «Cônes et bâtonnets, sculpture sur rétine », non fiction.fr

2007 Philippe Dagen «Mâkhi Xenakis, écorchés vifs et grotesque sauvage », le Monde

France Huser «Mâkhi Xenakis », Le nouvel observateur

2004 Philippe Dagen « Mâkhi Xenakis et les spectres de la Salpêtrière », Le Monde

Myriam Boutoulle « Mâkhi Xenakis, un cri silencieux » Connaissance des arts

Anne Dagbert «Mâkhi Xenakis Les folles d’enfer » Art Press

Sandrine Cabu « Folle Alliée », Libération

Michel Polac « la maison des fadas » Charlie-Hebdo

Anne Diatkine, « Mâkhi Xenakis, follement inspirée», ELLE.

Myriam Boutoulle, «Mâkhi Xenakis, totems intimistes», Connaissance des arts

2002 Philippe Dagen «Mâkhi Xenakis, plongée dans la mémoire» portrait, Le Monde

Josyane Savigneau, «Iannis Xenakis, un père» Le Monde des livres

France Huser «Laisser venir les fantômes» le Nouvel Observateur

Emmanuel Daydé « Laisser venir les fantômes », Hôtel d’Albret

2001 Anne Dagbert, site Internet galerie face à l’art

1998 Pierre Wat «Mâkhi Xenakis, jusqu’à épuisement», le Journal des Estampes

 

 

livres d’artiste

2009 « la légende d’Eer » texte de Platon, livre d’artiste.

2007 «Les mots des autres» nouvelle de Jean Frémon, éditions M Nitabah

2005 «Le regard du père», texte Mâkhi Xenakis, dessins Dominique le tricoteur éd. Centre Vendôme

2004 «Vingt-quatre heures pour toujours», dessin Mâkhi Xenakis, texte O Elytis, éd. l’ échoppe

2002 «Morceaux »,30 pastels originaux Mâkhi Xenakis, texte Jean Frémon, éd. L’échoppe

1997 «Jusqu’à épuisement », gravures Mâkhi Xenakis et étudiants, éditions Ecole des B A de Nancy

1996 «Parole montante », gravures Mâkhi Xenakis, texte Jamel Eddine Bencheikh éd.Tarabuste

1993 « Terre lumineuse », gravures Mâkhi Xenakis, texte D Davvetas, éd. Michel Chomarat

 

éditions

2008 «Laisser venir les secrets», éditions Actes Sud

«Louise Bourgeois, l’aveugle guidant l’aveugle» réédition Actes Sud / galerie Lelong

2004 «Les folles d’enfer de la Salpêtrière», éditions Actes Sud

«La petite fille» éditions Tarabuste

2002 «Laisser venir les fantômes» éditions Actes Sud

1999 «Parfois seule» éditions Actes Sud

1998 «Louise Bourgeois, l’aveugle guidant l’aveugle» éditions Actes Sud / galerie Lelong

 

lien Actes Sud : http://www.actes-sud.fr/ficheisbn.php?isbn=9782742751488

 

médias

2009 Pour l’exposition elle@centrepompidou

France-Inter, « l’humeur vagabonde », Kathleen Evin

2008 Pour le livre «Laisser venir les secrets»

France Musique, « Entre les mots », François Castang

Pour le livre« Louise Bourgeois, l’aveugle guidant l’aveugle »

ARTE, «le journal de la culture », Christophe Brunela

TSF, «coup de projecteur », Thierry Parret

France-Inter, « l’humeur vagabonde, Kathleen Evin

2005 Hommage à Jean-Pierre Pincemin

France-culture, « les nuits magnétiques», Marion Daniel

 

Pour le livre et l‘exposition «les folles d’enfer de la Salpêtrière » :

2009 http://elles.centrepompidou.fr/blog/?p=52

http://www.artabsolument.com/fr/default/movie/detail/ID/2/Makhi-Xenakis–Video—Les-folles-d-enfer-de-la-Salpetriere.html

2006 www.lemurdanslemiroir.fr/

2004 ARTE, « Métropolis», Pierre-André Boutang

France culture, « tout arrive », Marc Voinchet

France 2, « un livre, un jour », Monique Atlan

France Inter, «charivari », Michel Polac

France-Info, Patrick Pesnot

 

Conférences

2009 Cycle de promenade elle@centrepompidou, samedi 26 septembre ; elles.centrepompidou.fr/#336EBB

2008 « Un autre regard sur Camille Claudel », Visite de l’exposition par Mâkhi Xenakis, musée Rodin.

2006 Colloque organisé par la ville de Brest sur la santé mentale, conférence sur « Les folles d’enfer ».

2004 « Les folles d’enfer », hôpital de la Salpêtrière.

« Etranger à soi même » par Mâkhi Xenakis, colloque organisé par La pensée du Midi, Arles.

Texte intégrale consultable sur : http://www.lapenseedemidi.org/revues/revue14/articles/xenakis.pdf

 

adaptations théâtrales des «folles d’enfer »

2008 mise en scène Geneviève Robin, théâtre du Rodour, Morlaix

Théâtre Jean Villard Montpellier

2007 mise en scène Anne Dimitriadis au théâtre MC 93 de Bobigny, avec Nathalie Richard,

Julie-Marie Parmentier, Jérôme Derre

mise en scène Vivette Pons, La menuiserie, Rodez

mise en scène, 2006 -mise en scène Geneviève Robin par la compagnie Paris-Atlantique,

centre d’art Passerelle, Brest.

compagnie Passacaille, Lyon

 

bibliographie (théâtre)

pour le spectacle monté par Anne Dimitriadis au théâtre MC 93 de Bobigny :

2007 Georges Banu «La Salpêtrière, capitale de la douleur» Art press

Michelle Servin «Théâtres au long cours» Les temps modernes

Mathilde de la Bardonnie « pour l’honneur des sorcières» Libération

Elia Marder «le souvenir des folles», rue 89

Didier Mereuze «Le cri des gens déraisonnables» La Croix

Gilles Costaz «Follement tragique» Politis

«Hell or haven for society’s refuse» Paris Update

L L « les folles d’enfer de la Salpêtrière», L’express

Manuel Piolat « Des femmes que l’on ne voulait pas voir » La Terrasse

Joël Plantet « La folie sur la scène et gravée sur un plancher », Lien social

Evelyne Sellés-Fischer «théâtre folles à lier», Historia

Armelle Héliot, «enfermement du style», Le Figaro

Annie Chennieux «Les folles d’enfer », le JDD

«Même si le théâtre ce n’est pas votre truc », Paris.Première

Aurélie Clonrozier «Trois personnages en quête d’histoire’ , Croque madame

Perrine Le Querrec «les folles d’enfer », Etat-critique.co

Lionel labosse «les folles d’enfer»,www.alter-sexualité.com

Julien Rameaunot, www.pariscap.com :émissions

pour le spectacle monté par Geneviève Robin à Brest :

2008 «Le Télégramme», Sophie Prévost, Ouest France

2006 «Les loges de la folie», Le Télégramme

«Des femmes racontent les folles de la Salpêtrière », Ouest France

 

radio pour le spectacle à Bobigny :

Pascal Paradou, « culture vive », RFI

Joëlle Gayot, «sur scène », France Culture

 

rencontres: «Regards croisés sur la Salpêtrière »

Au théâtre de Bobigny, animée par Laure Adler avec la participation de Geneviève Fresse

Gérard Wacjman, Anne Dimitriadis et Mâkhi Xenakis

 

création de décors et de costumes

2004 « l’ombre de l’âne » opéra de Richard Strauss, mise en scène René Koering, opéra

de Montpellier

1987 «Triptyque» mise en scène Dido Likoudis, Centre Georges Pompidou

1986 «Enfant et Roi» mise en scène Jérôme Abenheimer, musée des Arts décoratifs

1985 «Cassandre» mise en scène Dido Likoudis, Café de la danse

1984 «Passagio» opéra de Luciano Berio, mise en scène Claude Regy, théâtre du Châtelet

1983 «Sombre Printemps» texte d’Unica Zurn, mise en scène Jérôme Abenheimer, piscine Deligny

1983 «Les soldats» pièce de Jacob Lenz, mise en scène Claude Regy, théâtre de la Bastille

 

site : www.makhi-xenakis.com

 

Images en haute définition et libres de droit disponibles pour la presse sur demande

contact Guilaine Depis : 06 84 36 31 85 :

  

SCULPTURES :

 

Elles nous regardent, vue d’atelier, 2010

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Elles nous regardent, détail sculpture, 2009

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Elles nous regardent, maternité, 2009

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Elles nous regardent, conversation, détail, 2009

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Pastel noir sur papier canson, 130 x 150 cm, 2009

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Pastel noir sur papier canson, 50 x 64  cm, 2009

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Pastel noir sur papier canson, 50 x 64 cm, 2010

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Pastel rose sur papier canson, 50 x 64 cm, 2009

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Publication, Presse,

 

dessins, sculptures (extraits):

  

Beautés monstres, musée des Beaux Arts de Nancy, 2009, 2010.

Claire Stoullig.

Catalogue ;
Mâkhi Xenakis, grandes créatures, ciment armé teinté.

 

La rencontre avec Louise Bourgeois, pendant son séjour à la Villa Médicis « hors les murs» à New York, qui aboutira à la publication du livre Louise Bourgeois. L’aveugle guidant l’aveugle, marque un tournant décisif dans la démarche de Mâkhi Xenakis. De retour à Paris, délaissant le travail de p
einture pour le dessin, elle se consacre peu à peu également à la sculpture et fait surgir des silhouettes de plâtre cannelées, au cou plus ou moins long, chargées d’une présence féminine évidente et forte. Rassemblées dans l’enceinte de l’hôpital de La Salpêtrière, à Paris, en 2004, les Folles d’enfer exprimeront très violemment inquiétudes, souffrances et affolements par leur regard absent: les yeux sont brutalement constitués de deux trous dans une boule de matière blanche. Ces fantômes de visages, qui traitent inévitablement de la question de l’enfermement, vont évoluer vers de nouvelles sculptures et aborder plus directement la féminité et la maternité. Les silhouettes filiformes grossissent allègrement, en laissant déborder une chair en excès faite d’une matière poreuse rose et ocre dont l’effet trouble et disgracieux, voire monstrueux, est distrait ou faussement adouci par des colifichets poilus noirs. Inspirées à la fois des déesses préhistoriques ou archaïques, des femmes « impudiques» de Manet, de Rodin ou de Picasso, des personnages monstrueux de Francis Bacon ou encore de certaines sculptures de Louise Bourgeois, ces « créatures » se montrent telles qu’elles se ressentent à la fois dans leur fragilité, leur vulnérabilité, mais aussi leur plénitude, leur animalité, leur étrangeté ». Ainsi, ces symboles de féminité par excellence, ou par outrance, qui évoquent Les Monstres endormis de Soudbinine (cal 26, p. 166-167) et leur font écho aujourd’hui, se jouent à merveille de la dualité beauté/monstre.

 

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LE MONDE Mardi 18 septembre 2007.

 

Mâkhi Xenakis, écorchés vifs et grotesque sauvage

 

PHILIPPE DAGEN

 

Les œuvres récentes de Mâkhi Xenakis sont terriblement vivantes. Ses dessins

au fusain accueillent jusqu’à leurs bords l’invasion proliférante des cellules qui s’organisent en chaînes et gonflent à en crever. Ses pastels sont de fomes rondes ou ovale, colorés de toutes les nuances du pourpre au rose. Des écorchés sans doute. mais de quels êtres? Des yeux et des orifices s’ouvrent dans la chair, le long de plis et de fentes.

On en aurait peur si Mâkhi Xenakis n’avait l’audace de disposer autour des pastels des dentelles noires, des plumes de boas ou des cols de fausse fourrure. L’effroyable bascule vers un grotesque sauvage qui fait songer à Louise Bourgeois. La parenté est déclarée: Mâkhi, fille du compositeur lannis Xenakis, a rencontré la terrible Louise à New-York en 1987, rencontre qu’elle tient pour décisive. Non qu’elle l’imite. Mais elle pousse aussi loin l’exploration des profondeurs intimes, sans hésiter devant la transgression.

Ses plus récentes sculptures en sont la preuve. D’un rose vif, parées de plumets, elles exaltent la féminité et la fécondité sous forme de fétiches d’une stupéfiante joyeuse puissance.

 

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LE NOUVEL OBSERVATEUR, septembre 2007.

Mâkhi Xenakis

 

France Huser

D’étranges sculptures, des petites créatures » dit Mâkhi Xenakis sont réalisées en résine et en pâte à modeler, mais la peinture à l’huile donne à leur nudité l’éclat des chairs de Renoir et de Manet. Ludiques, parodiques, elles semblent se moquer de leur coquetterie, des colliers ou des voilettes dont elles se parent . Leurs seins gonflés évoquent encore les déesse de la fécondité. Elles parlent explique l’artiste «  de l’intimité de la vulnérabilité, du désir » Provocantes, elles ne font pourtant que se montrer « telles qu’elles se ressentent&n
bsp;» De grands pastels explorent encore toute la vibrance des rose-mauve et des parme-violet. D’autres jouant d’échelles diverses n’utilisent plus que le fusain noir et la gomme pour une lancinante enveloppante répétition d’un même motif- l’œil ? Le regard ou les ondoiements de la mer, l’infini de ses mystères et la peur que doit vaincre toujours l’artiste.

 

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Livres, théâtre (extraits):

 

La Marseillaise, 2008.

 

Les orages de Mâkhi ,  « Laisser venir les secrets:’, Mâkhi Xenakis, Actes Sud.

 

ClAUDINE GALEA

 

La petite fille qui ouvre le livre de Mâkhi Xenakis est une enfant intranquille, habitée par des peurs, entourée d’adultes qui ne la rassurent pas. Alors elle dessine et, plus tard, elle sculpte, tentant d’ordonner l’effroi et de donner figure humaine aux monstres qui l’assaillent. L’adulte du second texte de ce livre bref et nerveux est prise dans l’étau de la jalousie. Mère et épouse d’un homme qui en préfère une autre. La chose est banale, mais Mâkhi Xenakis s’emploie par la tension extrême d’une écriture délivrée en saccades a en renouveler l’insupportable, et la nécessité de le dire encore et encore. Bègue et borgne est l’amour, et quand les yeux sont dessillés, le corps entier se soulève. De cette révolte condamnée par avance, reste à célébrer l’outrage.

Mâkhi Xenakis a de la langue, du rythme, et une foi inentamée en la parole amoureuse.

La fréquentation de l’œuvre de Louise Bourgeois, dont elle a tiré un très bel ouvrage* et celle des Folles de la Salpètrière** libèrent chez cette artiste hypersensible un fort potentiel de rébellion devant l’ordre des choses, qu’il soit intime, sentimental ou social.

L’enfermement (carcéral, psychiatrique ou névrotique), produit chez cette artiste – qui est d’abord dessinatrice et sculptrice -, une réaction paroxystique qu’elle contient dans son travail de créatrice. La façon de composer ses textes en témoigne. Ni ponctuation ni paragraphes. Un continuum de mots et de phrases qui chevauchent le blanc, le scandent

 et le consument. Rapprocher l’écriture de la parole, c’est a dire de sa mise en corps et en voix, semble le but recherché.

Dans ce nouvel opus, dessins d’enfant, pastels et gravures accompagnent le douloureux et fier oratorio d’une fillette puis d’une femme qui choisissent de vivre â fond les blessures pour renaître, ainsi que surgissent de la terre ou – du ciment les figures sculptées, droites et dures que Mâkhi invente.

 

« Louise Bourgeois, l’aveugle guidant l’aveugle » (1998), « Parfois seule » (1999), « Les Folles d’enfer » (2004), et aussi « Laisser venir les fantômes » (2001)

 

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Connaissance des arts, été 2008.

 

Louise et Mâkhi, mano a mano Louise Bourgeois, l’aveugle guidant l’aveugle, re-éditons actes sud/galerie Lelong, 2008.

 

Natacha Wolinsky

 

Un livre tient parfois à un fil. Téléphonique? Conversations transatlantiques entre deux artistes: Louise Bourgeois à New York, Mâkhi Xenakis à Paris. L’aînée, depuis l’atelier américain, propulse la cadette dans le labyrinthe de sa mémoire, la dépêche sur les lieux de l’enfance Parisienne. Au 174 boulevard Saint Germain, l’ancienne galerie de tapisserie des parents Bourgeois est devenue librairie. À Choisy-le-Roi, la maison de famille a disparu. Dans les couloirs du lycée Fénelon, Maki Xenakis découvre une monumentale statue d’Œdipe aveugle, guidé par sa fille Antigone. La boîte de Pand
ore est ouverte. Mâkhi avance en aveugle, guidée par Louise la voyante. De conversations en jeux de piste, les mythologies de l’enfance éclairent les mystères du geste créatif. Livre-clé donc, qui propage le goût su secret, n’explique rien mais laisse tout deviner des strates géologiques d’une vie faite œuvre.

 

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Le Monde, mai 2002,

 

Yannis Xenakis, un père, Laisser venir les fantômes, éditions actes sud 2002.

 

Josyane Savigneau

 

L’évocation émouvante d’une enfance auprès du grand compositeur, mort en 2001.

 

C’est un livre de deuil et c’est tout le contraire. Un texte émouvant, parce qu’il n’est pas triste, refuse la déploration et accepte de « laisser venir les fantômes (…) laisser venir les secrets ». Mâkhi Xenakis est plasticienne, elle expose en ce moment, à Paris, à l’hôtel d’Albret. Cette femme de 43 ans est la fille de Yannis Xenakis, grand compositeur du XXsiècle. La mort de son père, en février 2001, l’a ramenée vers son enfance parisienne au milieu du siècle dernier, quand on ne parlait pas de pub, mais de réclame et que l’une d’elles, fameuse, pour un apéritif, était «Dubo-Dubon-Dubonnet ». La petite Mâkhi la chantait en montant. Pourquoi Mâkhi? A cause d’une certaine Andromaque, mais surtout, lui dit son père, parce que c’est « le mot grec qui signifie bataille» …

Mâkhi vivait entre deux mondes qu’elle évoque magnifiquement, avec son regard de peintre. Un pied dans le XIXsiècle, un autre dans la modernité. En bas, chez « Tata-gros pièces en enfilades, parquets cirés qui grincent» domaine de la peinture; au quatrième étage, «chez nous, moi et mes parents », « les murs sont peints en blanc, certains sont en couleur, un en or, comme les icônes byzantines ( … ). Tout est conçu par lui» – univers du silence et de la musique. La boussole, la force qui domine tout, c’est la figure du père, sur laquelle veille sans cesse la tendresse attentive de la mère. « Lui, sa silhouette, grande, mince. Il bouge dans l’appartement comme un félin, sans bruit ( … ). Ce regard absolu parce qu’il n’ y a qu’un œil à regarder, avec qui entrer en liaison ( … ). C’est à cause d’un éclat d’obus, pendant la résistance en Grèce, en 1947. » Il faudra attendre vingt-sept ans pour que la condamnation à mort soit levée et que Mâkhi aille avec son père en Grèce, retrouver la famille. De lui, il reste, pour tous, une œuvre immense, mais pour Mâkhi – et désormais pour ses lecteurs -, des étés inoubliables, dans un endroit isolé, en Corse, près de cette Méditerranée où «il est enfoui ».

 

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THEATRE

 

Art Press, sept 2007.

 

 La Salpêtrière, capitale de la douleur.

 

Georges Banu,

 

J’ai été à la Salpêtrière … pour suivre, il y a plus d’un quart de siècle, le célèbre Faust mis en scène par le metteur en scène que la France découvrait alors, Klaus Mikael GrÜber. J’ai erré dans les couloirs de la chapelle, je me suis assis sur des lits d’hôpital, j’ai accompagné l’homme à la valise et à l’imperméable froissé qu’était Faust… tandis qu’un immense sac de boxe se vidait, telle une clepsydre géante, de tout son sable. Et durant le voyage qui n’avait pas pensé là bas à Charcot et à ses célèbres séances de thérapie par hypnose auxquelles étaient soumises les malades hystériques exposées à des assistances éblouies par la théâtralité de ces performances? Freud y a été, Stanislavski aussi: psychanalyse et mise en scène apparaissent en même temps et leurs fondateurs ont également suivi les expériences du maître de la Salpêtrière. Mais avec Charcot s’achevait le terrible cycle de l’enfermement qui avait débuté sous le règne de Louis XIV qui, à 17 ans, signa le décret de fondation de la terrible maison. Mâkhi Xenakis s’engage sur le chemin de la Salpêtrière et, à partir des registres de l’Assistance publique, elle en retrace les avatars. Elle découvre, en descendant le temps, que derrière la notoriété européenne de Charcot se cachent des victimes et des sanctions qui font de la Salpêtrière l’équivalent d’un goulag français. En entendant son texte, Les folles d’enfer de la Salpêtrière, (ed. Actes Sud) la violence du traitement infligé à des êtres mentalement malades ébranle le spectateur qui, de son fauteuil à Bobigny, entend la suite infinie de ce catalogue des malheurs. Séquestration, sanctions, envoi au Canada pour peupler les territoires colonisés: la Salpêtrière se trouve au carrefour de l’asile et de la prison. Ils finissent par se confondre.

Mâkhi Xenakis réagit en artiste et, tout en s’appuyant sur des archives ou des relevés cliniques, elle propose un texte où, faits concrets et écriture s’enlacent au point de fournir un matériau scénique particulièrement original. Ici l’histoire de la folie et des mesures qu’elle a engendrées sert d’assise à une parole de l’exaspération lyrique dont la première vertu est son rythme, rythme qui scande les phrases et dirige le récit inébranlable sur l’exclusion et les mesures que la société française met en place. Mais, ne l’oublions pas, Mâkhi Xenakis est également une artiste plastique imaginant les sculptures des femmes réduites à l’essentiel et qui, ensemble, forment le choeur de la douleur réuni sous la voûte de la chapelle tristement célèbre.

Silence, on détruit! Et ces statues, ainsi rassemblées, témoignent de la panique extrême qui s’empare des « folles d’enfer Il face au destin qui leur est imparti. Dans leurs yeux, c’est cette crainte qui se lit.