PROGRAMME EVENEMENTS BALUSTRADE FIN MAI DEBUT JUIN 2023

PROGRAMME BALUSTRADE FIN MAI DEBUT JUIN 2023

SIX INVITATIONS A DES EVENEMENTS BALUSTRADE !
AUXQUELS ALLEZ-VOUS PARTICIPER ?
 
1) Mardi 30 mai dès 18h30 : Soirée autour du pop-roman « 1m976 » de Gérald Wittock à la librairie L’Ecailler 101 rue du Théâtre 75015,
2) Mercredi 31 mai à 18h : Pierre Ménat (ancien conseiller Europe de Jacques Chirac) présentera « L’Union européenne et la guerre » devant le mouvement européen des Yvelines. Salle des fêtes du Chesnay, 52 rue de Versailles 78150 Le Chesnay-Rocquencourt
3) Mercredi 31 mai dès 18h30 : Soirée conférence-débat-cocktail « Faut-il avoir peur de ChatGPT? » avec l’ économiste Romain Kroës (« Surchauffe, l’inflation ou l’enflure économiste ») et le romancier Jean-Pierre Noté (« Tantièmes – un monde sanspuss ») (Hôtel La Louisiane 60 rue de Seine 75006 – inscription obligatoire pour le cocktail par sms 06 84 36 31 85),
4) Du 7 au 11 juin le 40ème anniversaire du Marché de la Poésie (plus gros événement mondial d’éditeurs de poésie) placé sous le signe des Caraïbes cette année Place Saint-Sulpice,
5) Samedi 17 juin : Exposition au Cercle des Sources grâce à Balustrade de l’artiste Erik Andler qui présentera ses oeuvres et parlera des NFT au 6 avenue Bonaparte à Antibes chez Dominique Beudin
6) Mardi 20 juin dès 20h : Soirée interactive sur l’assertivité avec le journaliste scénariste de France inter Léo Koesten (« Le Manoir de Kerbroc’h ») qui confrontera sa résilience d’écrivain aveugle aux conseils du coach Didier Barthélémy (Hôtel La Louisiane, 60 rue de Seine 75006)

Contact presse guilaine_depis@yahoo.com 

Damie Chad livre un superbe article sur « 1m976 » de Gérald Wittock dans « Chroniques de pourpre »

Damie Chad livre un superbe article sur « 1m976 » dans « Chroniques de pourpre »

Une belle enveloppe dans la boîte à lettres. Un envoi de Guilaine Depis, attachée de presse (La Balustrade). Un livre paru aux Editions The Melmac Cat. Cat est un mot qui cliquette agréablement aux oreilles des rockers. Sur le tract d’envoi, il est spécifié que le bouquin s’inscrit dans un nouveau courant littéraire le ‘’ pop roman’’.

Le terme roman ne pose point de problème, celui de pop me hérisse quelque peu. Depuis quelques années la merchandisation de la littérature tend à creuser un fossé entre littérature dite ‘’élitiste’’ et la pop culture. Alors que dans les années soixante ce dernier terme désignait une volonté séditieuse d’ouvrir le champ littéraire et musical à des expérimentations éloignées des corsetages académiques, de nos jours le mot pop tend à désigner des œuvres facilement accessibles, pour ne pas dire subalternes, destinées à un public de masse. Ceci dit, ne nous fions pas aux étiquettes.

1M976

GERALD WITTOCK

The Melmac Cat / Avril 2023 )

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Gérald Wittock n’est pas tout à fait un inconnu. Une succincte biographie au dos de la couverture nous apprend qu’il est le descendant direct de Lucien Bonaparte. C’était le fils aîné de sa mère Letizia qui le préféra toujours à Napoléon. Ce détail historial n’est pas donné au hasard. Notre auteur a déjà publié plusieurs romans, notamment La Mutation, qui évoque un monde où les femmes ont pris le pouvoir… l’a aussi fait de la musique, notamment un disque (quatre semaines N°1 en Angleterre) Make Luv sous le nom de Room 5

Couverture pop colorée, un mix manga-Warhol, de Bolo, agréable à regarder, attention un livre musical, chaque chapitre possède son QR code qui renvoie à une vidéo, le choix musical commence bien avec Riders on the storm des Doors, la suite est moins alléchante puisque l’on y trouve jusqu’à Sheila & B. Devotion. Il y a à boire et à ne pas manger dans cette playlist… Que voulez-vous, question Q avec ou sans R les rockers n’aiment que Suzie Q.

Un livre gigogne. Ne serait-ce que cet avertissement de l’éditeur, suivie d’une fausse préface d’un ami, remplacée par une fausse interview de l’auteur, un véritable miroir aux alouettes ce roman. Peut-être avant de commencer notre analyse devrions-nous le résumer en quelques lignes afin de ne pas perdre le lecteur. Que se passe-t-il donc dans ce roman ? Toute question simple exige une réponse aussi simple. La voici donc : rien, il ne s’y passe rien du tout. Attention, je n’ai pas dit qu’il ne nous offre que deux cents pages blanches. Encore qu’en fin de volume Gérald Wittock termine ses remerciements par un grand merci à Malevitch et à son carré noir, ce qui tout de suite obscurcit le sujet. Après quoi il ajoute une petite phrase assassine : La littérature défie la censure. Une invitation à lire entre les lignes.

Mais de quoi parle-t-il au juste s’impatientent les lecteurs. Le tract de présentation ne donne pas dans la nuance : annonce tout de go : Thématique de l’autisme. Reste qu’il y a autisme et autisme. Faut-il entendre ce mot comme l’affection dont nombre d’adolescents sont atteints depuis quelques années, ou le comprendre comme une métaphore descriptive du fonctionnement de notre société.

Le roman se déroule à New York au milieu des années-soixante-dix. S’il se passait à Tokyo, au lieu d’user du vocable autiste on emploierait le mot hikikomori, ces adolescents japonais qui s’enferment dans leur chambre à lire des mangas et à jouer aux jeux-vidéo. Mais nous sommes à New York ce qui n’empêche pas Gérald Wittock d’user de l’esthétique du théâtre français classique. Du dix-septième siècle. Un seul lieu : un appartement. Et encore notre héros 1M976 n’a pas le droit de rentrer dans la chambre de sa mère ( voir Letizia ). Ce n’est pas grave, puisque toute l’action se déroule dans un lieu exigu. Pire que les toilettes. Dans sa tête.

Est-ce que Gérald Wittock triche avec la règle de l’unité de temps. Nous avons envie de répondre oui. Nous avons envie de répondre non. Ce n’est pas que nous hésiterions. Nous conseillons nos lecteurs à relire les pages dans lesquelles Paul Valéry rapporte son entretient avec Albert Einstein, tous deux discutent de la notion d’élasticité du temps. C’est un peu comme un élastique : plus vous l’étirez, plus il s’allonge, et pourtant c’est toujours le même élastique. Une fois que vous aurez fini le livre vous aurez tout votre temps pour réfléchir sur la durée effective du récit.

J’ai peur d’effrayer le lecteur, je le rassure tout de suite, aucun temps mort, l’action n’est jamais linéaire, elle comporte de nombreux hauts et de multiples bas. Gérald Wittock est un homme de son temps, si dans Racine et Corneille, Néron et Chimène entrent et sortent stupidement comme tout un chacun par une porte, le roman est pourvu d’un ascenseur. Qui monte et qui descend. Sans jamais faillir. Une fois que vous aurez fini le livre, vous aurez tout votre temps pour savoir si, ou pour savoir combien de fois, 1m976 emprunte l’ascenseur.

Tout ce qui précède procède du cadre conceptuel de ce livre. Si je m’y suis tant soit peu étendu, c’est qu’happé par l’action, entraîné par l’enchaînement des évènements vous risquez comme le poisson prisonnier de son aquarium aux flancs transparents de ne pas vous apercevoir des murs de la prison mentale qui vous claustrophobisent. Soyez vigilants, les indices les plus anodins sont les plus ambigus.

C’est que Gérald Wittock possède un esprit particulièrement retors. Excusez-moi, je me suis trompé d’adverbe, je voulais dire doublement retors. D’abord il se sert d’un truc qui marche toujours. Il vous raconte une histoire loufoque tout en vous assurant que rien n’est plus sérieux que son récit, vous met juste le nez dans le caca de votre époque en vous contant des choses effroyables qui, dieu merci, ne se passent pas par chez nous. Vous êtes prêt à lui épingler sur le veston la Légion d’Honneur du Mec bien, le Mérite Agricole du Citoyen Conscient, la Croix de Guerre de défenseur de la Femme et même de l’Homme. Jusque là tout va bien. La livre est terminé. Eh bien non, Gérald Wittock ne mégote pas, vous rajoute un épilogue. Au cas où vous auriez tout compris, il vous instille le doute. Le ver rongeur. Vous refile le coup de l’explication psychanalytique, autrement dit le coup du miroir qui vous reflète pour que vous réfléchissiez mieux.

Si vous n’avez pas tout compris, je (tout comme l’auteur) ne peux plus rien pour vous.

Ah ! si, pourquoi le héros possède-t-il ce nom bizarre, pas la peine que je vous en fasse une tartine, c’est très bien expliqué dans les toutes premières pages.

Damie Chad.

Benjamin Berton a craqué pour Gérald Wittock dans Sun Burns Out : « 1m976 est un roman surprenant qui, à l’image de sa playlist, passe d’Abba au Doors, en passant par les Beach Boys et Elton John »

Amateurs de romans et musiques psychédéliques dingos, bienvenus. On n’aurait pas misé une pièce sur cet autoproclamé « roman pop » signé par un auteur qu’on ne connaissait pas, Gérald Wittock (ancien producteur et coauteur du tube Make Luv de Room 5 qu’on ne résiste pas à l’envie de placer ci-dessous), descendant de Lucien Bonaparte (ma foi) et fondateur du musée des Arts du Livre et de la Reliure (ma foi bis). 1m976 avait tout du roman foireux mais… pas du tout : ce livre de 200 pages et quelques se dévore avec passion, s’écoute aussi (un peu) et affiche un niveau de fantaisie qu’on avait pas croisé depuis la mort de feu Kurt Vonnegut Jr (c’était en 2007) et la retraite du non moins génial Jim Dodge.

Gérald Wittock évolue (ne nous enflammons pas) un cran en dessous de ces deux-là (il faut des décennies de travail pour domestiquer et organiser une imagination débridée) mais nous sert avec cette aventure loufoque et surréaliste de Teddy Murrey, jeune blanc à demi handicapé qui s’aventure dans le monde après la mort soudaine de sa mère avec laquelle il vivait cloîtré depuis sa naissance, une odyssée formidable, pleine de couleurs (pop donc), d’énergie et de trouvailles. Teddy, qui rappelle les héros naïfs des romans de science-fiction des années 50, courageux, sans doute séduisant, mais aussi totalement imbécile, prend l’ascenseur et en descendra à six ou sept reprises pour être projeté (sans logique apparente) dans des univers divergents et opprimants, futuristes et, pour la plupart, qui en feront une victime traquée ou un révolutionnaire malgré lui. Il rencontre une nana dont il s’amourache 1f675 (dans cette séquence, les humains prennent pour nom leur taille précédée d’un F pour les femmes, d’un M pour les hommes, d’où le titre du bouquin) et il croisera à plusieurs reprises dans le roman sous des formes/visages différents. Teddy s’enfuit, est poursuivi/interrogé par la Police, rencontre le président de la République, fait l’amour, participe ensuite à une version télévisée du jeu The Running Man, chasse à l’homme médiatique inventée en son temps par Stephen King et qui avait donné un chouette film avec Paul Michael Glaser en 1987, et on en passe.

On ne va pas reprendre les péripéties du livre une à une mais celles-ci s’enchaînent à un rythme effréné et qui ne lâche jamais son emprise sur nous. Le style de Wittock est allègre, assez soigné et si la structure de l’ouvrage est lâche, incohérente et finalement plus foutraque qu’il ne le faudrait, le traitement ne nuit jamais à la lecture et à l’efficacité d’ensemble. 1m976 fait forte impression et déroule son programme sans se retourner ni se poser de questions existentielles sur sa crédibilité.

On finit par s’attacher aux personnages et à éprouver une vraie tendresse pour le héros malgré lui, ce qui ne fera qu’amplifier l’émotion qu’on ressentira au moment du retournement final (chut). La lecture est égayée par l’incrustation de QR Codes renvoyant vers des vidéos YouTube et clips qui forment une playlist aussi inégale et surprenante que le livre lui-même et qu’on retrouve en fin d’ouvrage. L’irruption de ces vignettes dans le corps de texte agit comme une cerise hallucinogène sur un cake aux champignons et achève d’ouvrir des espaces dans l’espace pour ajouter au vertige du lecteur. Comme dans tout bon roman beat, de Burroughs (Benway) à Will Self (Busner/Mukhti), le mot de la fin appartient à un docteur (Koschnick) qui nous livre les clés du récit. Gérald Wittock retombe sur ses pattes et nous pas tout à fait, mais la science est sauve à défaut d’être saine.

1m976 est un roman surprenant qui, à l’image de sa playlist, passe d’Abba au Doors, en passant par les Beach Boys et Elton John. La folie n’a jamais été un obstacle à la raison.

Amateurs de romans et musiques psychédéliques dingos, bienvenus. On n’aurait pas misé une pièce sur cet autoproclamé « roman pop » signé par un auteur qu’on ne connaissait pas, Gérald Wittock (ancien producteur et coauteur du tube Make Luv de Room 5 qu’on ne résiste pas à l’envie de placer ci-dessous), descendant de Lucien Bonaparte (ma foi) et fondateur du musée des Arts du Livre et de la Reliure (ma foi bis). 1m976 avait tout du roman foireux mais… pas du tout : ce livre de 200 pages et quelques se dévore avec passion, s’écoute aussi (un peu) et affiche un niveau de fantaisie qu’on avait pas croisé depuis la mort de feu Kurt Vonnegut Jr (c’était en 2007) et la retraite du non moins génial Jim Dodge.

Gérald Wittock évolue (ne nous enflammons pas) un cran en dessous de ces deux-là (il faut des décennies de travail pour domestiquer et organiser une imagination débridée) mais nous sert avec cette aventure loufoque et surréaliste de Teddy Murrey, jeune blanc à demi handicapé qui s’aventure dans le monde après la mort soudaine de sa mère avec laquelle il vivait cloîtré depuis sa naissance, une odyssée formidable, pleine de couleurs (pop donc), d’énergie et de trouvailles. Teddy, qui rappelle les héros naïfs des romans de science-fiction des années 50, courageux, sans doute séduisant, mais aussi totalement imbécile, prend l’ascenseur et en descendra à six ou sept reprises pour être projeté (sans logique apparente) dans des univers divergents et opprimants, futuristes et, pour la plupart, qui en feront une victime traquée ou un révolutionnaire malgré lui. Il rencontre une nana dont il s’amourache 1f675 (dans cette séquence, les humains prennent pour nom leur taille précédée d’un F pour les femmes, d’un M pour les hommes, d’où le titre du bouquin) et il croisera à plusieurs reprises dans le roman sous des formes/visages différents. Teddy s’enfuit, est poursuivi/interrogé par la Police, rencontre le président de la République, fait l’amour, participe ensuite à une version télévisée du jeu The Running Man, chasse à l’homme médiatique inventée en son temps par Stephen King et qui avait donné un chouette film avec Paul Michael Glaser en 1987, et on en passe.

On ne va pas reprendre les péripéties du livre une à une mais celles-ci s’enchaînent à un rythme effréné et qui ne lâche jamais son emprise sur nous. Le style de Wittock est allègre, assez soigné et si la structure de l’ouvrage est lâche, incohérente et finalement plus foutraque qu’il ne le faudrait, le traitement ne nuit jamais à la lecture et à l’efficacité d’ensemble. 1m976 fait forte impression et déroule son programme sans se retourner ni se poser de questions existentielles sur sa crédibilité.

On finit par s’attacher aux personnages et à éprouver une vraie tendresse pour le héros malgré lui, ce qui ne fera qu’amplifier l’émotion qu’on ressentira au moment du retournement final (chut). La lecture est égayée par l’incrustation de QR Codes renvoyant vers des vidéos YouTube et clips qui forment une playlist aussi inégale et surprenante que le livre lui-même et qu’on retrouve en fin d’ouvrage. L’irruption de ces vignettes dans le corps de texte agit comme une cerise hallucinogène sur un cake aux champignons et achève d’ouvrir des espaces dans l’espace pour ajouter au vertige du lecteur. Comme dans tout bon roman beat, de Burroughs (Benway) à Will Self (Busner/Mukhti), le mot de la fin appartient à un docteur (Koschnick) qui nous livre les clés du récit. Gérald Wittock retombe sur ses pattes et nous pas tout à fait, mais la science est sauve à défaut d’être saine.

1m976 est un roman surprenant qui, à l’image de sa playlist, passe d’Abba au Doors, en passant par les Beach Boys et Elton John. La folie n’a jamais été un obstacle à la raison.

« 1m976 » de Grald Wittock, « un bon divertissement » pour Argoul

Gérald Wittock, 1m976

Ce roman est meilleur que le précédent et premier : on s’améliore en faisant. Il est plus organisé, bien que délirant, mais marrant. Naming et zapping ont été écartés sans ménagement pour raconter une histoire. Elle se lit au galop, au rythme (and blues) de cet auteur belge cosmopolite et multiculti fan de mots et de musique. Car ce roman ne serait pas original s’il n’y avait, entrelacées entre les chapitres, des « chansons » à écouter par scan du code barre placé judicieusement sur la page. Ça fait « pop ! » comme le champagne, ça pétille, d’où le nom de pop roman.

L’histoire est celle d’un garçon de 15 ans vivant dans le Bronx à New York dans ces années 1970 mythiques – car elles sont la jeunesse de l’auteur. On y découvre l’informatique et les jeux vidéo, la baise torride et simple (avec des filles), le délire psychédélique de la Grosse pomme bouillonnante de mafias et de gangs ethniques, le fantasme de nourrir la planète avec de la chair humaine, l’orgueil égoïste des ultra libertariens qui n’ont jamais cessé de dominer l’Amérique, le racisme ordinaire bien ancré, les sectes sexuelles et pédo à la Moon, le jean en velours côtelé et la chemise en polyester – mais l’auteur ne semble pas se souvenir que, dans les années 70, tous les sous-vêtements (petits-bourgeois, prudes et engonçant) étaient bannis : pas plus de « caleçon » sous le jean, que de soutif sous le tee-shirt ou encore de chaussettes (les tongs étaient de rigueur). Colonisé de mœurs et ébloui par l’aura des États-Unis, l’auteur célèbre aussi le sempiternel Coca qui rendra obèse et abrégera l’espérance de vie yankee plus que les armes en vente libre. Il adore détailler minutieusement les caractéristiques de l’ordinateur IBM dernier cri de l’époque, le M16 de précision, les puissantes Transam V8 et les énormes camions chromés au museau de chacal. Il en jubile.

Teddy est trop intelligent pour aller à l’école et sa mère possessive le garde à l’appartement. Il ne sort pas et s’évade en créant des algorithmes pour animer un gros serpent dans un jeu vidéo, travail pour lequel il est payé. Longiligne et pâle, il a la maniaquerie et l’agoraphobie de l’autiste, probablement Asperger. Le réel et le trip s’emmêlent comme les pattes de la Panthère rose. L’ascenseur est la clé qui le fait basculer d’un monde à l’autre. Le groom, qui ressemble au gamin belge Spirou des BD, semble le passeur d’un monde à l’autre. Il se révélera… mais je vous laisse le découvrir. Pop manga, il y a de l’action et des images. Malgré un « avertissement », une dédicace et une (fausse) préface – le tout destiné à des journalistes pressés qui ne lisent jamais les livres dont ils causent, le reste se lit avec plaisir. Ce n’est pas l’œuvre du siècle (peut-être la prochaine fois ?) mais un bon divertissement.

Gérald Wittock, 1m976 – pop roman, 2023, The Melmac Cat, 215 pages, €14,00

Attachée de presse BALUSTRADE : Guilaine Depis, 06 84 36 31 85 guilaine_depis@yahoo.com

Comment mieux accompagner son enfant autiste ? Gérald Wittock face à Marie-Ange de Montesquieu

Avec Gérald Wittock, auteur-compositeur. En 1992, il démissionne de son poste de cadre dans une multinationale et crée sa maison d’édition et de production audiovisuelle. Il est père d’un enfant autiste et auteur d’un pop roman « 1 m 976 – autisme, musique, New-York » (The Melmac Cat, 2023),

Barbara Donville, psychothérapeute, qui a longtemps exercé dans la thérapie parentale des enfants autistes. Elle se consacre désormais à ses travaux de recherche. Sa pensée, à la fois originale et pragmatique, en a fait une contributrice reconnue dans l’univers de cette pathologie. Elle a elle-même un enfant autiste, pour lequel elle a développé une méthode,

Peggy-Loup Garbal, installée à La Réunion depuis plus de quinze ans. Auteure, conteuse et journaliste, elle se consacre aujourd’hui exclusivement à l’écriture ; son premier roman est « Vengeresses » (Ed. Philippe Rey, 2023)

Et Sophie Vinziers, traductrice et interprète, qui a travaillé pour des organismes internationaux dont l’Unesco et la Commission européenne. Elle raconte son parcours dans « Comment j’ai sauvé mon enfant autiste ?» (Odile Jacob, 2023)

Stéphanie Janicot (« Disco Queen ») et Gérald Wittock (premier pop-roman « 1M976 ») dissertent du pouvoir de la musique et de la légèreté pour apaiser les maux et la vie

Les années disco, les années bonheur ?

Entretien avec Stéphanie Janicot et Gérald Wittock

On dit souvent que ce n’était pas mieux avant. Avant, pourtant, c’était les années 1970 et 1980, qui font toujours rêver la jeunesse d’aujourd’hui. Années auxquelles l’on fait immanquablement référence lorsqu’on souhaite parler d’une époque festive et heureuse. Années rock, punk, disco. Années folles. Celles des cinquantenaires d’aujourd’hui, en soif de légèreté et d’ivresse. Pour en parler, j’ai réuni deux écrivains, qui ont publié simultanément, un roman sur la fin des années 1970, Stéphanie Janicot, Disco Queen (Albin Michel, 2023), et un roman nous contant le New York de la fin des années 1970, Gérald Wittock, 1m976 (The Melmac Cat, 2023). Nous avons voulu savoir ce qu’il était réellement de cette époque.

Marc Alpozzo : Vous publiez deux romans, Disco Queen (Albin Michel, 2023) pour vous, Stéphanie Janicot, et 1m976 (The Melmac Cat, 2023) pour vous, Gérald Wittock. Ce sont donc deux romans qui portent sur la période disco de la fin des années 1970, même si l’histoire en ce qui concerne Disco Queen se passe aujourd’hui.

Stéphanie Janicot : Les tubes que je cite dans mon roman datent de la fin des années 1970, mais l’histoire centrale de mon personnage se situe aujourd’hui, en 2020.

Gérald Wittock : C’est vrai, on fait référence à une époque et un même style musical. Dans le roman de Stéphanie, on retrouve KC & The Sunshine Band, Donna Summer, Abba… alors que l’histoire de Soizik se passe en France. Et ces mêmes artistes colorent les pages de mon pop roman puisque 1m976 se déroule dans le Bronx en 1976.

M. A. :  Alors, il s’avère que pour des raisons d’histoire familiale, je vivais à New York en 1976, non pas dans le Bronx, mais à Manhattan, Uptown, cela dit, je me souviens bien de l’ambiance, que j’ai parfaitement retrouvée dans votre roman, Gérald. La question que je me suis toutefois posée, c’est pourquoi ce titre ?

G. W. : D’abord 1m976 pourrait être un numéro de matricule. Ou aussi le premier jour du mois 9 de l’année 76, parce que le héros Teddy fait un blocage sur le 1er septembre 1976. Ou bien également, il indique les étages dans un ascenseur : le premier étage, le middle floor, le neuvième, le septième étage ou le sixième, puisqu’on voyage non seulement en musique mais encore en ascenseur.

Gérald Wittock, Stéphanie Janicot et Marc Alpozzo

M. A. : Je vois deux choses qui vous rejoignent : d’abord, la nostalgie d’un passé révolu, qui n’est autre que notre jeunesse, donc d’une période relevant de la légèreté, des paillettes, une époque festive, qui paraissait plus insouciante que la nôtre, et puis un goût très pointu pour la musique appartenant à la période des années 1970 et 1980.

G. W. : Ce qui m’a plu dans Disco Queen, c’est la façon avec laquelle le personnage de Stéphanie va faire face à la maladie, la leucémie, et le fait de la traiter avec tellement de légèreté, notamment en ayant recours à la musique, le disco, m’a fait penser à la manière que j’ai adoptée pour faire face à l’autisme, aux problèmes qu’un jeune adolescent peut rencontrer dans la société actuelle. Moi aussi, j’ai souhaité l’aborder de façon légère.

S. J. : C’est en effet ce que l’on a en commun, deux pathologies graves, que l’on arrive à traiter par le biais de la musique.

G. W. : Sans compter que nos héros ne se prennent pas au sérieux. Si l’on n’est pas responsable des guerres, des tragédies, on est responsable de ce que l’on va vivre à notre échelle. C’est d’ailleurs ce que Stéphanie montre très bien. Il y a un livre dans nos livres, au point que la frontière dans nos récits, entre le réel et l’imaginaire, est ténue.

S. J. : Disons que la forme dit quelque chose du fond, en l’occurrence : l’histoire que l’on se raconte peut influencer le réel. Concrètement, Soizic, coincée dans sa chambre d’hôpital, est en train d’écrire, et ses filles se saisissent de ce qu’elle écrit, pour réaliser le rêve de leur mère. C’est ce que je pense en général : si l’on se raconte les choses de manière légère, on va les voir de manière légère. Ce n’est pas un livre sur le disco, mais sur la légèreté. Qui dit âge dit perte de santé, de personnes proches, et donc, on a tout intérêt à s’alléger, sinon l’on veut franchir les obstacles et ne pas s’écraser avec la vie.

M. A. : Vous ne répondez pas tout à fait à ma question. Vos deux romans se passent dans les années 1970, et le vôtre Gérald, puisqu’il se déroule à New York, dans une mégalopole vraiment dangereuse à l’époque, marque bien cette lourdeur, pourtant, on se souvient de cette époque avec plaisir, et même sous l’angle d’une forme rare d’insouciance, celle des années où tout était possible, ce qui tranche d’ailleurs avec la légèreté de celui de Stéphanie, dans un début de siècle qui se déroule sur une tonalité plus grave, et dans lequel, à la fin, lorsque John Travolta arrive, alors qu’on ne sait plus trop si c’est le rêve ou la réalité. Ces années-là passent aujourd’hui pour des années insouciantes et festives, et en même temps, c’était des années dures, avec la drogue qui était déjà bien présente chez les jeunes, la prostitution, les armes aussi, je me souviens qu’à New York, les écoles primaires publiques avaient des portiques de sécurité à l’entrée pour vérifier que les élèves ne viennent pas avec des armes en classe. Est-ce que le disco n’a pas été créé pour sublimer cette réalité morbide, et retrouver un peu de légèreté dans la musique et les corps qui dansent ?

S. J. : Pour répondre à la première partie de votre question, cette idée du rêve à la fin du roman, vous n’êtes pas le premier à me le dire. Pour autant, je ne sais pas, je ne pense pas avoir voulu que ce ne soit qu’un rêve. Mais c’est au lecteur de décider du sens du livre. En lisant la fin du roman de Gérald, j’ai pensé que votre personnage avait vraiment cet âge adulte, et qu’il n’était pas sorti de chez lui pendant 40 ans. Du coup, la mère avait vraiment vieilli, avait fini par mourir, tandis que lui se voit encore comme un ado, parce qu’il a été enfermé à 16 ans. Vous expliquez que c’est une pathologie qui l’a fait vieillir très vite, d’un coup dans l’ascenseur, alors que moi, je l’ai vécu comme un autiste qui aurait passé une existence recluse, sortant de sa chambre à un âge avancé. Je trouvais ça assez joli. Pour la deuxième partie de votre question, vous avez raison, en 1973, on vivait deux situations en même temps. Il y a eu le premier choc pétrolier, alors que la société était sur le mode de cette émancipation progressive. En France, la liberté commence après mai 1968, le rock devient la musique dominante. Puis le disco se crée à l’image de cette société de consommation, contre le rock qui se prend un peu au sérieux, mais aussi contre le choc pétrolier, la crise annoncée, et la semaine de travail. Saturday Night Fever en parle très bien. On bosse toute la semaine, mais les vendredis et samedis, on met ses habits de lumière et on va danser. C’est donc l’attitude disco, le disco spirit ! On met ses habits de lumière, et tout à coup on devient quelqu’un d’autre, c’est-à-dire qu’on décide que ce quelqu’un d’autre est festif et léger. D’ailleurs au départ, je voulais appeler mon roman « Toi aussi, tu peux être une disco Queen », en référence à cela précisément. Si tout le monde peut l’être, c’est parce que c’est avant tout un état d’esprit. C’est cet état d’esprit que j’ai cherché parce que, dans ma vie, tout était comme ça un peu lourdingue. Pour tenter de devenir légère, j’ai écrit ce livre.

 G. W. : J’ai longtemps été dans le monde de la musique, et je suis d’accord avec Stéphanie lorsqu’elle dit que le disco est arrivé pour donner une claque au rock. Mais il faut s’imaginer qu’il y a eu la guerre du Vietnam et qu’aux États-Unis, toute une génération était contre cette guerre inutile, sinon pour l’industrie de l’armement et l’industrie lourde, et elle avait besoin de retrouver du rêve. Les États-Unis sont aussi le seul pays qui a fait usage de la bombe atomique, alors qu’ils se proclament défenseurs de la paix. Ce n’est donc pas un hasard si la guerre du Vietnam a insufflé chez les jeunes musiciens cette envie de rester vivants. Et si le livre de Stéphanie débute avec Staying alive des Bee Gees, mon Teddy, pour la première fois amoureux, veut crier « Staying alive », alors qu’on ne sait pas s’il rêve d’amour ou de Goldorak, si ça se passe dans sa tête ou dans la réalité, mais il souhaite vraiment « rester vivant ». Si Stéphanie et moi avons choisi le disco, je crois que c’est pour passer ce message. En tant qu’écrivains, on ne peut que relayer cette rage de vivre. Je ne pense pas que l’on puisse l’expliquer, on essaye tout simplement de la raconter.

S. J. : C’est en effet, un signe de résistance. Gloria Gaynor chantait à l’époque I will survive, il y avait également Born to be aliveStaying alive, c’est tout de même une musique qui manifeste une forme de sublimation de la vie, de soi, d’une envie de prendre l’ascendance sur nos destins.

M. A. : Je vous résume : le disco, parce que c’est une manière d’aller vers la légèreté dans un monde tragique. Est-ce bien cela ? D’autant qu’on est de plus en plus dans une société où l’on se questionne, notamment les jeunes, avec le féminisme, la transidentité, l’indigénisme, etc. Ils se questionnent sur leur place dans la société, ils se posent des questions à propos des discriminations, des problèmes d’identité. 

S. J. : En effet. Mais j’ai aussi choisi le disco, parce qu’en ce qui concerne ma génération, lorsqu’il s’agit de faire des fêtes, on choisit le disco, ou la musique des années 80, disons jusqu’à 1985-1986. C’est la musique de notre jeunesse. Tout le monde va vers la musique de sa jeunesse. Ma mère le faisait beaucoup. Par exemple le rock’ n’ roll, parce qu’elle l’avait vécu dans sa jeunesse, ou le jazz des boites de Saint Germain des Près, etc. Toutefois, aujourd’hui, les jeunes aussi adorent le disco parce que c’est beaucoup plus festif que la musique électronique. J’ai reçu récemment le message d’une étudiante qui voulait m’interviewer pour sa thèse sur le disco. Elle m’a confirmé que sa génération adore le disco. C’est donc une musique inégalée. Au moins pour faire ressentir la joie d’une soirée. Ce n’est pas l’Alpha et l’Oméga de la musique, certes, non. C’est même à la limite du kitch et du mauvais goût, mais il n’empêche que pour faire la fête, c’est parfait. Vous dites que les jeunes se questionnent, vous avez raison, mais n’oubliez pas que dans les années 1970, les jeunes se questionnaient aussi beaucoup, ils étaient très militants, très engagés. Le monde est pesant sans doute, mais pas plus qu’en 1940, au XVIIème siècle, ou à n’importe quelle époque. En revanche, que l’on résiste à un discours ambiant par de la fête, c’est déjà ce qui était cherché par cette musique dans les années 70. Et c’est en ce sens, que l’on peut dire qu’ils voulaient résister à leur semaine de labeur, de lourdeur. D’ailleurs, on dit souvent que la jeunesse est insouciante, je ne le crois pas. J’étais par exemple beaucoup plus sombre à 20 ans qu’aujourd’hui. Parce qu’à 20 ans, on a peur de ne pas réussir sa vie, de ne pas pouvoir faire ce que l’on a envie de faire, de ne pas pouvoir écrire tous les livres, avoir des enfants… Cette peur est pesante. En vieillissant, on atteint des âges où la légèreté devient possible, parce que les grands enjeux sont derrière nous. C’est un des privilèges de l’âge. Et si l’on sent la société comme bien plus dure qu’avant, c’est peut-être parce qu’on a moins envie d’être engagés dans cette dureté.

  G. W. : C’est vrai que ce n’est pas pire qu’avant, mais plutôt différent. Je crois que l’homme s’est toujours posé les mêmes questions. D’ailleurs, la philosophie n’existerait pas si l’on avait trouvé les réponses aux grandes interrogations existentielles. Stéphanie aborde dans son roman la transidentité de manière très légère. Sans se poser de questions. L’homosexualité aussi, y est racontée de manière toute simple. Tout est dédramatisé, naturel, et ça fait du bien. Dans les années 70, avec les mouvements hippies, où la sexualité était complètement libérée, au sens d’une vie sexuelle libre, l’on pouvait s’aimer en hétéro comme en homo, sur fond de musique en stéréo ou en mono, sans les limites d’âge que l’on s’impose aujourd’hui. C’était alors un monde différent, mais qui faisait face aux mêmes problèmes humains, encore et toujours d’actualité.

Ce qui me chagrine dans la nouvelle génération des années double vingt (2020), c’est que l’on utilise « la norme » en l’imposant de manière dogmatique. On doit obligatoirement rentrer dans telle ou telle catégorie. Ainsi, on empêche les êtres humains de vivre leur vie pleinement. Aussi, à travers la légèreté et le rêve, ainsi qu’en laissant vivre les personnages d’un roman, nous allons bien au-delà de toutes ces castes qui nous castrent. L’apprentissage de la vie, ce n’est pas de mettre des gens dans des cases ou de tirer des conclusions hâtives, mais de regarder nos vies avec amour, attention, et de laisser à chacun le droit de s’exprimer.

Propos recueillis par Marc Alpozzo