Madeleine Chapsal, téléspectatrice de « Ce soir ou jamais »… a bien lu Antoinette Fouque (le Populaire du 27.11.09)

Dans le Populaire du Centre du 27 novembre 2009, Madeleine Chapsal, qui a regardé l’émission de Frédéric Taddeï mardi 24 novembre, nous en livre ses impressions…

 

Madeleine-Chapsal.jpg QU’EST-CE QU’UNE FEMME ?

 

En ce  mois de novembre, deux dates  ont concerné la condition des femmes. Le 25, la Sainte-Catherine,  fête traditionnelle de la  couture, silencieux métier,   sous-payé,  où l’on trouve normal de cantonner  les femmes.  Le  26 : journée   pour dénoncer le  fait qu’il   meurt une femme  tous les deux jours  sous les coups de son compagnon, d’autres étant estropiées. 

  Ce qui dépasse l’entendement  c’est qu’on n’en soit pas autrement scandalisé et  qu’il y en ait encore pour dire et penser, comme  chez Taddei à la télévision : « L’homme a besoin d’affirmer sa virilité !  »

C’est pour étudier les racines d’une misogynie toujours  active  qu’il faut lire le petite livre consacré à  Antoinette Fouque, la fondatrice du MLF – Mouvement pour la Libération des femmes.

Née en 1936 , à  Marseille, cette femme remarquable, à la fois psychanalyste, philosophe, écrivain, élue au Parlement européen, fondatrice d’une maison d’édition, Les Editions des Femmes et de   librairies en France, n’a cessé d’agir et de réfléchir à la question qu’avait posé Sigmund Freud sans pour autant y répondre : qu’est-ce qu’une femme ?

Antoinette Fouque nous fait faire quelques pas en avant. Déjà en rappelant  qu’il y a deux sexes, ce que cherche à  nier un  féminisme  dont Antoinette se sépare pour parler  de « féminologie » ;   nouvelle science sociale qui se donne pour objet  une « peuplade », les femmes,  dont l’histoire  n’existe qu’en ombre portée de celle des hommes.  

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aflivre.jpgDans « Qui êtes-vous Antoinette Fouque ? » elle dénonce quantité d’abus criminels, l’excision, la lapidation, dont un primordial :    des millions de femmes dans le monde se voient refuser le droit  à l’instruction. Pourtant,  ajoute-t-elle  : « Je  connais des régions de l’âme et du cœur,chez  des êtres ne sachant ni lire ni écrire qui sont d’une richesse bien supérieure à ce qu’on trouve chez de plus instruits. » Cet antiféminisme, chez  nous insidieux,  Fouque en voit le germe dans  le déni masculin d’une réalité  qu’ils prennent pour une infériorité   :  ce sont les femmes qui portent les enfants !  D’où  jalousie :  ils auraient une envie secrète de l’uterus comme nous, d’après Freud, l’envie du pénis…

Bien d’autres idées neuves et bouleversantes se trouvent dans ce petit livre  où parle une femme qui s’est installée d’emblée dans l’altérité . Une façon de vivre et de penser   loin d’être acquise dans nos sociétés,   même par les femmes qui parviennent au pouvoir (casées  par les hommes que cela arrange…).   Or pas de progrès humain possible si l’on n’accepte pas l’idée qu’il existe deux sexes à la fois  différents et égaux :  aucun ne devant être soumis à l’autre !  La misogynie, ultime racisme et colonialisme, dont témoigne violemment la burka…

 

 Qui êtes-vous Antoinette Fouque ?

Entretien avec Christophe Bourseiller

Editions Bourin, 19 euros, 154 pages.

Le lien des femmes entre elles : conversation entre Madeleine Chapsal et Marie-France Hirigoyen, Mardi 20 janvier, 18 h 30, 35 rue Jacob

L’Espace des Femmes-Antoinette Fouque (35 rue Jacob, 75006) vous invite à rencontrer,

mardi 20 janvier, à 18h30,

Madeleine Chapsal, écrivain
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« Méfiez-vous des jeunes filles » (Fayard, 2008)
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 » Un ruisseau de lumière ! « , s’émeut Fanny, cinquante ans, face à Marie-Claire, dix-huit ans, qu’elle n’a pas revue depuis des années.
La jeune fille vient de perdre ses parents et Fanny, sa marraine, décide de la recueillir chez elle. Mais la bienveillante Fanny ne mesure pas le danger ! Car il y a des hommes à la maison : Paul son fils, Julien le fiancé de sa fille, et Alain son mari. Qui pourrait résister à une jeune fille aussi désirable lorsque, le cœur froid, elle joue à séduire et à susciter la jalousie, bien décidée à se venger sur ceux qui l’approchent de la tragédie qu’est pour elle la mort de son père ? Fanny, naïve et jusque-là heureuse en ménage, s’aperçoit un peu tard de ce drame familial qui couve.
Un roman rose et noir sur les dangers de l’amour.

« La femme sans » (Lgf, 1993)
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Un essai sans vraiment de plan, rempli d’humeurs variées, de contradictions aussi entre avantages de la liberté d’être entièrement disponible pour ses amours et difficultés de vivre avec le regard distancié des femmes (et hommes) « avec ». Beaucoup d’interrogations, d’expressions de sentiments doux ou amers, qui devraient aider ceux et celles qui en ont eu (des enfants) comme ceux et celles qui n’en ont pas eu à se rapprocher, à s’estimer, à se soutenir quand il le faut, à se comprendre aussi. Madeleine Chapsal a un style très personnel et son ouvrage relève plus de l’essai que du roman, s’agissant ici de choses vécues comme « femme sans », ainsi que dans nombre de ses autres titres.

« Ce que m’a appris Françoise Dolto » (Fayard, 1994)
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et Marie-France Hirigoyen, psychiatre et psychanalyste
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« Les nouvelles solitudes » (La Découverte, 2007)
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Dans toutes les sociétés développées, la montée de la solitude est devenue un phénomène social majeur. Alors que les interactions entre individus sont permanentes, voire envahissantes, de nombreuses personnes éprouvent un sentiment douloureux d’isolement. Et, en même temps, beaucoup d’autres font le choix de vivre seules. Dans ce livre, la psychanalyste Marie-France Hirigoyen désire montrer que cette réalité est le fruit d’une mutation profonde des rapports hommes/femmes, encore inaboutie. Si les femmes ont enfin obtenu une autonomie nouvelle, dans le travail comme dans la sexualité, cette indépendance n’a pas été encore pleinement intégrée dans les mentalités. D’où une crise des rôles masculin et féminin et une précarisation des liens intimes. On constate un durcissement des relations dans le couple. Reflet aussi du durcissement du monde du travail. Et le surinvestissement dans la relation amoureuse s’accompagne d’une pratique croissante du ‘couple en CDD’. Les périodes de solitude et d’abstinence sexuelle conduisent à un recours accru aux sites de rencontres sur Internet ou aux ‘nouvelles thérapies’, qui se révèlent le plus souvent illusoires. Alors que, explique Marie-France Hirigoyen, la solitude peut apporter énergie et inspiration : à tout âge, la solitude choisie, tout en restant disponible à l’autre, est une source de plénitude, un moyen de sortir de la superficialité d’une société dominée par le narcissisme et le culte de la performance.

« Femmes sous emprise » (Oh éditions et Pocket, 2005)
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En France, chaque année, une femme sur dix est victime de violence dans son couple, trois femmes en meurent tous les quinze jours.

qui dialogueront sur le thème « Le lien des femmes entres elles »

35 rue Jacob

75006 Paris

Madeleine Chapsal, reconnaissante aux éditions Des femmes

Texte de Madeleine Chapsal recopié du catalogue des trente ans des Editions Des femmes :

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Avant que les Editions des femmes soient fondées, écrire « sérieusement » n’était pas accordé aux femmes.
 
Dès que nous pouvions tenir une plume, nous étions en charge de la correspondance – à nous de transmettre les nouvelles au reste de la famille quand internet, le portable n’existaient pas mais que les liens du sang continuaient de s’imposer.
 
Nous étions également affectées aux comptes, de la maison, du commerce familial, aussi à faire répéter leurs devoirs aux enfants, toutes activités qui demandent de l’écriture – une écriture sage et normalisée.
 
Mais pour ce qui est de l’expression littéraire proprement dite, si elle existait chez certaines, elle était vouée au secret, à la clandestinité, réservée non sans danger à la rédaction d’un journal intime…
 
J’en ai couvert des cahiers entiers, prudemment enfouis dans mes tiroirs. Quand survinrent quelques « ovnis » : Sagan, Mallet-Jorris… De jeunes amazones qui dès leur premier essai ont renversé la donne : les femmes aussi pouvaient écrire, être publiées, avoir du succès, choquer, en somme écrire « comme des hommes ».
 
Mais pouvaient-elles encore écrire « comme des femmes » ?
Ce sont les Editions Des femmes qui nous l’ont révélé. Je me souviens de ma stupéfaction enthousiaste lorsque j’ai découvert les premiers textes publiés par Antoinette Fouque et son équipe : des fragments de sensibilité, d’émotion, des cris, des aveux, de l’impudeur… Tout ce que j’écrivais dans ùmon journal et que je croyais non montrable sortait ainsi au grand jour !
 
Tout ce qui jusque-là me paraissait devoir être refusé par n’importe quel éditeur tant je le jugeais moi-même scandaleux et informe – inutile donc de le leur présenter Rappelons-nous qu’il n’y avait alors que des hommes à la tête des maisons d’édition.
 
Or c’était ces textes mêmes, certains inachevés comme leurs auteurs alors brimées, que les Editions Des femmes approuvaient, admiraient, encourageaient, imprimaient et tant pis si, au début, elles ne les vendaient guère.
Ces audacieuses avaient un but, un objectif qui relevait de la mission : mettre en plein jour l’être féminin dans sa complétude et sa splendeur.
Car écrire et se voir publier est ce qui permet le plus d’accéder à sa propre vérité et à son identité. Afin par la suite de communiquer, partager ce que l’on est avec autrui.
Une réalisation d’autant plus puissante que l’entreprise était collective : nous prenions conscience, chacune dans notre coin, que nous n’étions pas seules à oser penser, écrire de la sorte, c’est-à-dire au féminin. Sur les rayons des bibliothèques, à la vitrine des Editions Des femmes, nous nous découvrions nombreuses à éprouver des sentiments réprouvés, à désirer l’inadmissible, à vouloir ce que nous imaginions être impossible, une autre façon d’exister et d’aimer pour les femmes.
Avec l’espoir commun de sortir de la souffrance parfois atroce de la vie étouffée qui nous était imposée par un système qu’on pouvait qualifier de « macho ».
C’est ainsi, grâce aux Editions Des femmes, que beaucoup d’entre nous ont pu se convaincre qu’elles n’étaient pas des folles – mais des écrivains.
Le temps a passé. Jamais nous ne remercierons assez ces femmes qui ont consacré la plus grande part de leur vie à ouvrir les prisons dans lesquelles croupissaient encore le coeur, l’esprit et le talent de tant de femmes.
Aujourd’hui, lorsqu’elles y sont déterminées, les femmes ont une bien plus grande possibilité de s’affirmer dans tous les domaines. Quoique le combat ne doive pas se relâcher – il prend souvent des formes sournoises – , nous voici en marche accélérée vers la justice, c’est-à-dire vers la parité.
Et si nous ne publions pas toutes aux Editions Des femmes, nous devons toutes savoir à quel point cette entreprise a contribué contre vents et marées à nous permettre d’empoigner l’arme capitale pour la liberté de chacun et de tous : d’évidence, c’est l’écriture.
Merci à toutes.
M.C.