Bernard Méaulle dans L’Hebdo Bourse Plus – grand entretien sur « Un si brûlant secret »

Littérature

Hebdo Bourse Plus n°1188

Yannick URRIEN

Un si brûlant secret.

Bernard Méaulle, ancien patron de presse régionale en Normandie, a dirigé plus d’une quinzaine d’hebdomadaires régionaux avant de revendre le groupe Méaulle à Ouest France. Aujourd’hui, cet ancien éditeur continue de plaider pour la force de l’écrit : « Je suis un fervent avocat et amoureux de l’écrit, en tant que lecteur d’abord, mais aussi qu’en tant qu’auteur. Lire, c’est une façon de devenir plus intelligent, il faut que la lecture soit un moyen de s’épanouir et de progresser. On peut vivre mille vies en lisant des romans. Il est donc très important que la lecture se poursuive, parce que cela permet d’enrichir sa pensée et sa réflexion. »

Bernard Méaulle publie un ouvrage qui s’inspire de faits réels : une femme prend la décision d’avoir une aventure sexuelle différente chaque année et de léguer sa fortune à sa dernière conquête. L’auteur nous raconte l’histoire de ce livre : « J’insère un certain nombre d’événements qui se sont produits dans la vie de différentes femmes et que j’ai placés sous l’identité d’une seule femme. Cependant, il y a 35 ans, le notaire qui a eu l’occasion de formaliser le don en question m’a confié cette histoire abracadabrante sous le sceau du secret. J’ai considéré qu’il y avait une sorte de prescription après 30 ans, car c’était vraiment intéressant. J’ai trouvé que cela avait toute sa place pour terminer un roman. Il faut savoir que cette fillette espagnole a été victime de sévices de la part d’un ami de son père, avec des agressions sexuelles et des tortures, et qu’à partir de 15 ans elle a décidé de quitter le domicile conjugal. D’ailleurs, sa mère s’était enfuie parce qu’elle était aussi frappée par son père. Cette fillette, d’une beauté extraordinaire, va se venger des hommes. Elle part à Barcelone et dans les Baléares. Elle commence à connaître un peu la vie et elle choisit, après une grosse déception avec son compagnon de l’époque, de partir en France qui est à ses yeux un pays de liberté. Elle est embauchée dans le restaurant de Jean-Claude Brialy, à l’île Saint-Louis, et elle fait différentes rencontres. Les rencontres, ce sont des hommes qui se frôlent, certaines rencontres sont parfois des îles au trésor, d’autres sont plus douloureuses. Certaines rencontres permettent de développer une autre existence. Son mari, qui est un agent immobilier très riche, l’initie à une vie très aisée, mais elle développe aussi son appétit pour les hommes. »

Ce livre entend marquer une relation forte entre spiritualité et sexualité : « Il y a un lien entre les deux. Une lectrice m’a écrit qu’elle a été touchée par ce lien entre le sacré et ce côté animal qu’il y a dans l’être humain. Si nous sommes là, c’est parce que deux sexes se sont rencontrés et nous sommes le produit de la rencontre de deux sexes. Or, c’est ce qui provoque la vie. La vie est quelque chose de très simple à fabriquer, mais très difficile à vivre et très compliqué à quitter. J’ai voulu réfléchir sur le sens de l’existence à travers une dimension spirituelle puisque l’héroïne mène des conversations intimes, avec Dieu ou sa conscience, peu importe, mais elle parle avec le ciel, elle marchande avec le ciel comme peuvent le faire un certain nombre de personnes qui réclament des avantages ou des guérisons ». Certes, ce rapprochement entre sexualité et spiritualité peut soulever des contestations, toutefois Bernard Méaulle tient souligner que c’est en faisant l’amour que l’on donne la vie : « J’ai observé dans les écoles catholiques que j’ai fréquentées qu’il y avait ce prêche permanent sur la chasteté et la pureté. À mon avis, l’être humain doit se libérer d’un certain nombre de chaînes pour tenter d’être le moins malheureux possible et, tant que nul ne fait de mal à autrui, on est sur un chemin de liberté et d’accomplissement de soi et du sens de sa vie. La rencontre est aussi une forme d’épanouissement pour chacun car, sans rencontres, l’être humain ne peut pas évoluer. Nous sommes tous le produit de ce que nous rencontrons. Lorsque l’on échange des idées, nous ne sommes jamais les mêmes après une conversation. Cette liberté qui nous est aujourd’hui offerte, sauf dans certains pays, est une chance pour les êtres humains ».

La démarche de Bernard Méaulle peut apparaître comme médiatiquement incorrecte, puisque les croqueuses d’hommes sont en général mal vues : « Ce livre sort des sentiers battus. C’est une histoire qui sort du triangle amoureux entre le mari, l’amant et la femme. C’est un autre registre. J’ai voulu dépasser l’image que l’on peut avoir de ce genre de femmes. Un certain nombre de femmes qui ont eu la chance de naître avec une beauté extraordinaire, comme Marilyn Monroe, Ava Gardner ou Brigitte Bardot, ont été de très grandes amoureuses. La beauté est un cadeau, mais pas toujours, puisque cela détruit un certain nombre de femmes, parce qu’elles sont exploitées par beaucoup d’hommes et elles vivent des fins de vie très douloureuses. Une femme qui est dotée d’une grande beauté va forcément attirer les hommes. À l’inverse, un homme qui aime les femmes et qui a des relations avec beaucoup de femmes est un don Juan, alors qu’une femme qui a des relations avec beaucoup d’hommes est une nymphomane. Donc, il faut faire la part des choses et ne pas culpabiliser le sexe faible pour des comportements d’homme ! »

Bernard Méaulle estime que ce sont la sexualité, la spiritualité et l’échange qui nous permettent de vivre et d’avancer : « La vie est un échange. Il y a des gens qui donnent et des gens qui reçoivent. Le sens de la vie, c’est de donner, mais aussi de recevoir. Il y a des gens qui ne donnent jamais rien. L’homme qui donne son amour reçoit de l’amour et de la tendresse de la part de la femme. Le contact intime permet de créer une fusion. L’être humain change, il n’est pas le même à 20 ans, à 30 ans ou à 60 ans et l’allongement de la durée de la vie a des conséquences. L’idée de tout être humain, c’est de renaître. On sait très bien qu’au bout du chemin il y a la mort, mais renaître c’est aussi avoir plusieurs vies. On peut avoir plusieurs vies en changeant de métier, en changeant de lieu de résidence, mais aussi en changeant de compagne ou de compagnon. Ce n’est pas simplement une question sexuelle, puisque les centres d’intérêt ne sont plus les mêmes et les vacances ne sont plus les mêmes. Il y a une richesse dans la rencontre et dans le changement. La vie est un mouvement perpétuel, le changement est permanent et ce changement oblige l’être humain à s’adapter pour vivre et survivre ».

Cette chronique sur le livre de Bernard Méaulle serait incomplète s’il n’était pas signalé que de nombreuses références au philosophe italien Lanza del Vasto y figurent : « Il est un peu oublié aujourd’hui. Il a écrit un livre formidable en 1950, « Le Pèlerinage aux Sources », après avoir rencontré Gandhi. C’est un visionnaire, puisqu’il préconise tout ce qui est réclamé par un certain nombre de gens qui voient avec effarement la société de consommation menacer l’existence de la planète. Il a créé en France les communautés de l’Arche, où il fallait vivre frugalement et militer pour la paix ».

« Un si brûlant secret » de Bernard Méaulle est publié aux Éditions La Route de la Soie.

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