La Cause littéraire a bien lu Valérie Fauchet, Bravo à Marjorie Rafécas Poeydomenge

Une voyante passe aux aveux, Entretiens avec Marie-Noëlle Dompé, Valérie Fauchet (par Marjorie Rafécas Poeydomenge)

Ecrit par Marjorie Rafécas-Poeydomenge 06.11.19 dans La Une Livres, Critiques, Les Livres, Essais

Une voyante passe aux aveux, Entretiens avec Marie-Noëlle Dompé, Valérie Fauchet, Editions Ipanema, octobre 2019, 233 pages, 17,90 €

Une voyante passe aux aveux, Entretiens avec Marie-Noëlle Dompé, Valérie Fauchet (par Marjorie Rafécas Poeydomenge)

Il existe, malheureusement, des dons que l’on subit. Certaines personnes possèdent en effet le don de « pré-voir ». Contrairement aux surdoués, les dons de voyance sont jugés douteux et sont ignorés par la science. Pourtant ces personnes « voyantes » n’ont pas décidé d’avoir ces « flashs », ils s’imposent à eux. Comment faire alors pour ne plus voir ?

Dans ce livre Une voyante passe aux aveux, le témoignage de Valérie Fauchet est troublant, sa vie ressemble à un roman fantastique. Pour donner du coffre à ses expériences, et prouver qu’elle n’a pas peur d’être titillée par l’exigence de preuves factuelles, l’auteure a eu la bonne idée d’être interviewée par une magistrate, Marie-Noëlle Dompé. La voyance au tribunal ? Oui, mais il ne s’agit pas pour autant d’un procès. Cette magistrate, aguerrie à l’impartialité, a joué le rôle de l’investigatrice bienveillante pour comprendre comment se manifeste cette méga intuition chez notre voyante peu commune. La voyance apparaît alors sous un autre jour, plutôt comme une hypersensibilité insoutenable. Comme une faille qui attire la lumière d’un flash.

Les gens dotés d’une hypersensibilité sont plus facilement fatigués, car ils absorbent énormément les émotions des autres, voire des objets… Car pour Valérie Fauchet, même les objets portent une histoire. La foule est pour elle tel un vampire, elle l’épuise. Ces phénomènes de clairvoyance sont provoqués par des émotions très fortes. Etymologiquement, émotion veut dire « dérangement ». Les artistes peuvent eux aussi d’ailleurs avoir cette sensibilité médiumnique. Comme le souligne justement l’auteure, les artistes sont « chacun dans leur genre » des mediums, et pourtant personne ne les craint. Car leur don se manifeste dans une expression artistique, un don qui heureusement est reconnu par nos sociétés.

Son témoignage est à certains moments poignant. On est saisi de compassion lorsqu’elle explique qu’elle a découvert son don, en pressentant, 8 jours avant, les futurs attouchements de son instituteur… Mais personne ne s’en alerte. Malgré cet épisode douloureux, sa vie ressemble aussi à un conte de fée. Elle voit par exemple des Elfes dans le jardin de sa maison de Rennes. Un peu comme dans les légendes celtes, elle vit des jours enchantés sur l’île aux moines, île dotée d’une énergie très particulière. Les artistes, et en particulier les poètes, sont ses amis. Elle a par exemple le plaisir d’échanger sur l’onirisme et la poésie avec le peintre brésilien Cicero Dias, ami de Paul Eluard, ouvert à la médiumnité. Après sa période bretonne enchanteresse, elle a le coup de foudre pour un appartement rue de Tournon à Paris, qu’elle transforme en cabinet de curiosités. Une vraie vie de bohême s’ouvre alors à elle. Elle apprend alors qu’une célèbre voyante, Mademoiselle Lenormand, habitait dans cet appartement et qu’elle recevait régulièrement Joséphine de Beauharnais. En somme, une jolie coïncidence.

Mais est-il judicieux d’être marié à une voyante ? On sourit lorsqu’elle relate que son don n’était pas un cadeau pour son ex-mari, car elle visualisait toutes ses maîtresses, et ce, même à distance… Son mari ne pouvait pas cultiver de jardin secret. Ce qui peut donner l’impression encombrante et obsessionnelle d’être tout le temps espionné…

La voyance souffre aujourd’hui d’une image délétère, elle est perçue comme la misère de tous les espoirs déçus. Elle est souvent l’appât facile de charlatans qui exploitent le mal-être des personnes insatisfaites de leur présent. Cette voyance « bas de gamme » et payante est à l’opposé du « connais-toi toi-même ». On gagne souvent plus de temps à chercher à comprendre l’origine de ses désirs, que de tenter de les assouvir à tout prix. Malgré le charlatanisme qui entoure ce don qui défie les lois spatio-temporelles, la « vraie » voyance ou la médiumnité sont une forme d’intuition. Elles échappent certes à l’intelligence logique, mais appréhendent le monde autrement. Einstein soutenait que « le mental intuitif est un don sacré et le mental rationnel est un serviteur fidèle. Nous avons créé une société qui honore le serviteur fidèle et a oublié le don ». Notre occident est si rationnel qu’il barre la route à l’intuition. La voyance peut être perçue comme une alchimie des émotions qui nous livre une autre clé d’interprétation de la réalité. A travers son témoignage, l’auteure a cherché à « desorcelliser » la voyance.

Même quand une personne a des « flashs », ces images restent toujours interprétables. Valérie Fauchet insiste sur le fait qu’il n’y a pas de vérité absolue, même sur le passé. Sa voyance est la possibilité « d’offrir un autre regard ». La façon de vivre l’évènement prédit est elle-aussi subjective. Par conséquent, attention à l’hubris : ne jamais prédire des choses de façon catégorique. Le doute cartésien doit être la règle, même dans ce domaine de l’intuition. La médiumnité reste un mystère et n’obéit à aucune loi.

Cet ouvrage souhaite offrir une vision moins matérialiste du monde dans lequel nous vivons. Valérie Fauchet a parfois l’impression d’être à la fois sur terre et dans l’au-delà. C’est dur de vivre cette dualité, c’est comme le destin de mélusine, mi-femme mi-serpent, ce type de femmes dérange… Notre monde continue de refuser la complexité.

Marjorie Rafécas-Poeydomenge

Valérie Fauchet, née en 1968, après des études de Lettres modernes à la Faculté de Rennes, a écrit de nombreux textes de chansons pour des artistes de renom. Il s’agit de son premier témoignage sur sa médiumnité.

A propos du rédacteur

Marjorie Rafécas-PoeydomengeMarjorie Rafécas PoeydomengePassionnée de philosophie et des sciences humaines, l’auteur publie régulièrement des articles sur son blog Philing Good, l’anti-burnout des idées (http://www.wmaker.net/philobalade). Quelques années auparavant, elle a également participé à l’aventure des cafés philo, de Socrate & co, le magazine (hélas disparu) de l’actualité vue par les philosophes et du Vilain petit canard. Elle est l’auteur de l’ouvrage « Descartes n’était pas Vierge ».

« Sortir ici et ailleurs » vante les mérites du roman « Camille » de Thierry Caillat

Encore un ouvrage sur Camille Claudel, mais qui n’est pas une biographie.

 

Un roman plutôt, qui refuse le sempiternel mélodrame de la pauvre Camille vampirisée par le méchant Rodin.
Camille est en effet une vraie fille de son temps, contrainte et dominée, famille, société, manque d’argent ; mais elle est douée pour l’art, source de libération, de liberté peut être… Dur, dur, d’être artiste quand on ne peut être que femme au foyer ou génitrice par obligation..

Elle rencontre Auguste Rodin, elle apprend auprès de lui mais doit rester dans son ombre, les femmes rappelons-le, peinent à être plus qu’objets de luxe ou meubles !
La Belle Epoque (?), affreuse illusion pour la femme qui ne veut pas être cocotte ! Heureusement Camille est douée pour cet art difficile, costaud, qu’est la sculpture, et ses mains parlent pour elle. Elle peut s’échapper…

Car Camille existe en-dehors de Rodin : elle a une famille, une vie, des amies avec qui elle voyage… en Angleterre.
Auguste l’a pourtant formée, aidée, séduite et peut-être un peu aimée. Puis laissée quand… il la suit de loin, lui fournit un peu de travail.
Puis dans la solitude du travail, sa vie se vide.
Mais elle est vivante Camille, et douloureuse, et attachante. Elle souffre et nous fait souffrir au travers du courant de sympathie qui s’est instauré entre Thierry Caillat et elle. Et nous.

L’auteur
Thierry Caillat est un passionné de musique classique, d’architecture et d’urbanisme mais il a fini par céder aux muses de l’écriture et cela donne le roman Camille.
Inscrit dans un atelier, il s’est initié aux gestes de la sculpture, aux sensations des mains, des doigts, à la force des bras qui font l’œuvre.
Camille le roman traverse son regard et notre temps même s’il souffre au travers de son personnage, à cause de cette soi-disant Belle Epoque qui tient les femmes en laisse.

Un livre qui nous fait aimer notre temps bousculé qui donne enfin la parole aux femmes… et plus de liberté à l’art.
Jacqueline Aimar

Camille
Thierry Caillat
Edition L’Harmattan
251 pages
isbn 978-2-343-17648-2

ForumOpera a repéré « La Défense d’aimer »

Liebesverbot à Bayreuth par Laurent Bury

Non, ne vous y trompez pas : ce n’est pas de sitôt que l’un des premiers essais lyriques de Wagner aura le droit d’être représenté à Bayreuth. Sous le titre La Défense d’aimer, le roman que Domitille Marbeau Funck-Brentano fait paraître aux éditions L’Harmattan (qui a aussi sa collection de fiction, on ne le sait pas toujours) retrace l’éphémère idylle de l’auteure avec un séduisant individu qu’elle s’amuse à surnommer Fasolt, idylle qui se noue entre les différents soirs d’un cycle du Ring donné sur la verte colline en 1978. Après avoir obtenu des places pour la fameuse Tétralogie du centenaire (il est ici et là question de la production signée Patrice Chéreau, et notamment du « jeu d’une folle sensualité » qu’il exige des chanteurs), la narratrice se rend à Bayreuth où elle succombe vite au charme d’un individu volage, s’embarquant dans une passion forcément sans lendemain. Peut-être plus que par ses liens finalement assez ténus avec le spectacle wagnérien, le livre pourra intriguer lecteur par son côté roman à clef : l’auteure est accompagnée en Allemagne par un chef d’orchestre prénommé Jean-Claude, et le mystérieux Fasolt étant un romancier français qui, sous son nom de plume, s’était notamment penché sur le cas de Floria Tosca. Si l’on ajoute que ce court récit est dédié « à la mémoire de Jean-Pierre A. », on comprendra à quel jeu il permet de s’amuser.

Domitille Mabeau Funck-Brentano, La Défense d’aimer, préface de Jean-Claude Casadesus. L’Harmattan, juin 2019, 15,50 euros. ISBN : 978-2-343-17461-7

Pour France Net Infos, « Les Conquérants d’Aton » est « une lecture voluptueuse à la poésie ensorcelante »

 Philip KAYNE, romancier égyptologue, nous propose une duologie envoûtante,« Les conquérants d’Aton »,tomes 1 et 2 parus aux Editions Baudelaire en juin 2019.
Arrivée au terme de ma lecture de « La part de vérité », je ne résiste pas à l’envie de vous citer la dédicace qui a accompagné ce livre :« Les secrets inouis de l’Egypte pour ceux qui savent les découvrir. » Quel bel hommage à ce livre captivant, véritable invitation à la ballade intellectuelle et spirituelle …… « En ces temps reculés, le sacré imprégnait la vie quotidienne des Egyptiens, habitués à s’en remettre aux divinités ancestrales », préface Roger Sabbah, expert incontestable, égyptologue et archéologue qui lit  l’hébreu biblique, connaît l’araméen et dévoile le sens caché des hiéroglyphes égyptiens.La XVIII ème dynastie représente sans doute la quintessence de la civilisation pharaonique, le roman de Philip Kayne s’y glisse avec volupté, tant il est empreint de  « la douceur du matin, la caresse du vent, les joies de l’amour, de victoire ou de détresse. » Le règne de Amenhotep III bat son plein, sa grande épouse royale, Tiy lui donnera sept enfants dont Khétarâ qui deviendra le quatrième Amenhotep, futur Akhenaton. 

Ce même Khétarâ accompagne le futur héritier, son frère Thoutmosis à une chasse au lion dont le but est de rapporter à leur père la fameuse crinière  … Cette chasse scellera le destin de Khétarâ car Thoutmosis sera blessé et décèdera peu après.

Plus tard, nous sommes en 1358 avant J.C., le futur Akhenaton(celui qui est bénéfique pour Aton) ceint la double Couronne dans la cité de Thèbes. A ses côtés se tient non seulement sa mère, la reine Tiy mais surtout la divine Néfertiti son épouse appelée Sahrâ dans l’intimité.

Un couple magique et légendaire qui va régner sur l’Egypte pendant une vingtaine d’années. Le nouveau pharaon va privilégier le culte du disque solaire Aton. Peut-être lassé par le conservatisme des prêtres d’Amon, il impose Aton comme seul dieu. Il s’oppose principalement au grand prêtre Aânen, son oncle qui le traite volontiers d’hérétique « l’idéologie que prône le prince royal met en péril la cohésion de notre Terre, son existence même ».

Malgré tout le jeune souverain va progressivement imposer une religion que certains qualifient d‘ hénothéiste et d’autres de premier monothéisme exclusif.

C’est pendant l’expédition de Nubie que le jeune Khétarâ va commencer a s’intéresser à l’art nouveau « les formes de l’art classique sont figées, steréotypées ; des images flatteuses qui ne véhiculent aucun sentiment (…) ». L’art amarnien, moins rigide et surtout non conventionnel est né.

Entre guerres, conflits religieux, intrigues et polémiques houleuses, Philip Kayne sait mêler harmonieusement réalité historique et intuition de romancier. Explorateur méticuleux de l’histoire égyptienne, il nous révèle par exemple que pour récompenser le dévouement de son beau-père Aÿ, Pharaon nommera le mont Horebmontagne d’Aÿ, le Sinaÿ …

… Et puis aussi … « le peuple Elu faisait partie de la prophétie »« Yurusalem »… « Nous appellerons cette terre AïSaRâAl ».(Israël: traduit de l’égyptien ancien par Messod et Roger Sabbah).

On s’immerge avec délice dans cette lecture voluptueuse à la poésie ensorcelante, bercée par la sourde mélopée d’Akhenaton à la gloire de sa bien-aimée …

… « Elle était mon Orient et mon Occident, l’ardent baiser du printemps, la douce caresse de l’automne. Que me reste-t-il ? Les montagnes peuvent s’écrouler, les fleuves se tarir … ma vie n’est plus qu’un désert ».

Magnifique …

Dominique IWAN

Dominique IWAN :  Parallèlement à une vie professionnelle tournée vers le monde des matériaux polymères et un bref passage dans la sphère publicitaire en tant que maquettiste, ma vie a été guidée par deux passions, l’écriture (un livre que je suis sur le point de terminer … je me mettrai ensuite en quête d’un éditeur … des nouvelles pour enfants, et la sculpture avec la création d’un blog en 2014  » entre Ciel Ether « . Je collabore au site www.francenetinfos.com depuis près de 4 ans, particulièrement dans le domaine littéraire, avec déjà l’écriture de près de 80 chroniques.