« Agissez sur vos émotions par la parole » avec Thierry Paulmier

La notion d’intelligence émotionnelle est relativement récente : elle est conceptualisée au début des années 1990 par deux psychologues des émotions, Peter Salovey et John Mayer. Ils la définissent ainsi : c’est « un ensemble de compétences supposées contribuer à l’évaluation et à l’expression précises de l’émotion en soi chez les autres ». Alors qu’elles en avaient été prudemment tenues à distance, les émotions commencent à être prises en compte dans nos vies professionnelles. Dans son ouvrage « Homo emoticus », Thierry Paulmier montre tout l’intérêt que nous avons à accorder plus d’importance à nos émotions et à celles des autres, au lieu de chercher à bien les verrouiller. Alors que nous avons parfois l’impression d’être débordés par nos émotions, il montre comment nous pouvons agir sur notre état émotionnel, et celui d’autrui, notamment par la parole :

« L’action sur la parole offre un autre moyen de contrôle puissant sur ses propres émotions et d’influence sur celles d’autrui, car cette dernière constitue un vecteur privilégié des émotions. Les paroles positives activent des émotions positives tandis que les paroles négatives activent des émotions négatives. Pour reprendre l’exemple donné précédemment, les compliments de son manager sur son travail stimulent la gratitude et la joie, alors que les critiques font ressentir de la tristesse et de la colère.

Pour agir sur ses émotions via la parole, la plus ancienne technique consiste à se parler à soi-même. Dans le langage courant, on la désigne sous le nom de « méthode Coué », en référence à la méthode d’autosuggestion ou d’autohypnose par la parole développée par Émile Coué. Il la définissait comme « l’implantation d’une idée en soi-même par soi-même ». elle agit sur le plan émotionnel comme une prophétie auto réalisatrice : les paroles prononcées ont un effet d’entraînement ou de refrènement émotionnel.

Les paroles ont le pouvoir de déclencher à la fois chez son interlocuteur et chez soi-même des émotions positives. Par exemple, les compliments que l’on adresse à un ami qui annonce une bonne nouvelle, tels que « Je suis content pour toi » ou « Je te félicite », agissent sur soi comme une incitation à la joie. Même si on ne les pense pas – parce que l’on ressent de l’envie -, le simple fait de les prononcer nous influence : on commence à les penser sincèrement et donc à se réjouir. Les paroles exercent ici simultanément un effet d’entraînement à la joie et de refrènement de l’envie. En outre, les paroles prononcées exercent aussi un effet moral : elles engagent la raison et la volonté à se mettre en conformité avec elles pour ne pas se percevoir comme un menteur ou un hypocrite.

Les paroles peuvent aussi refréner les émotions négatives. Par exemple, lorsque l’on est énervé vis-à-vis de quelqu’un et que l’on dit : « Je ne veux pas me mettre en colère contre toi », on s’adresse d’abord cette parole à soi-même. Cela signifie que l’on ressent déjà de la colère, mais que l’on essaie, par ses paroles, de la dissiper, de l’exorciser. Un tel procédé se révèle efficace. En disant : « Je ne veux pas me mettre en colère contre toi », on parvient à maîtriser sa colère. La verbalisation du refus de l’émotion agit sur elle pour le refréner. Autre exemple, si l’on dit à quelqu’un qui essaie de nous intimider : « Je n’ai pas peur de toi, tu ne me fais pas peur », cette parole diminue la peur. Il y a autosuggestion : « ce que je dis est ce que je ressens. »

La parole adressée par autrui a le même effet sur ses émotions. Il est possible d’affirmer : « J’entends donc je ressens » ou « Ce que j’entends est ce que je ressens ». Par exemple, des paroles d’encouragement reçues peuvent dissiper la peur. Lorsqu’un proche dit : « Ne t’inquiète pas, tout va bien se passer, tu es en sécurité avec moi, je suis là », la peur diminue. A l’inverse, des paroles d’insulte comme celles prononcées par le défenseur italien Materazzi à Zidane lors de la finale de la Coupe du monde de football en 2006 provoquent instantanément la colère. Les explications de Zidane pour justifier son geste – il lui a donné un coup de tête – vérifient l’adage évoqué précédemment : « Ce que j’entends est ce que je ressens. »

Nous sommes généralement vigilants aux discours que nous tenons à voix haute, aux mots que nous employons dans nos conversations, en revanche, nous n’apportons pas cette même attention au discours intérieur que nous nous tenons. Il a pourtant une influence considérable sur notre état émotionnel. Comment pouvez-vous davantage y prêter attention et faire de ce discours intérieur un allié ? Entraînez-vous à vous parler de façon positive, il vous sera plus facile, une fois dans un état d’esprit positif, de faire preuve de cette même attention vis-à-vis de vos interlocuteurs !

Un honnête divertissement

Le meurtrier et le couvent

par François Cardinali

Pour son huitième roman, Maurice Daccord a opté pour un polar. Tantum ergo (*) conduit deux pèlerins pas classiques à traquer un tueur en série. Une histoire sans prétention qui peut détendre…
La couverture du polar

Tantum ergo, c’est l’histoire d’une série de meurtres. Des crimes pas banals… Un tueur découpe des femmes les unes après les autres puis disparaît. L’assassin ne laisse derrière lui que trois petits cercles de cendre et signe ses crimes du nom d’un célèbre cantique latin : Tantum ergo. Hasard ? Presque toutes les victimes sont les clientes (ou patientes) d’Eddy Baccardi, qui vient de créer un cabinet d’aide psychologique pour s’en sortir. Eddy a constaté que personne ne pense à ceux qui, le divorce passé, continuent de s’entre-déchirer. Pour se tirer de case chômage, il fait profession d’écouter : femmes et hommes divorcés, ou en instance de… Rapidement sa clientèle grossit. La petite boutique des divorces pourra-t-elle continuer à prospérer si le tueur décime sa clientèle ? Le Commandant Crevette est chargé de traquer l’assassin. C’est ainsi qu’il fait la connaissance d’Eddy. Le duo va mener l’enquête…

Maurice Daccord s’amuse revendiquant le patronage de Maigret et San Antonio dans ce polar où le commandant chargé de l’enquête porte déjà un nom qui prête à sourire : Crevette, cela ne fait pas sérieux sur une carte de visite. Quant à Eddy Bacarrdi – plus porté sur le whisky que sur le rhum- ce n’est pas le plus fin limier dans le domaine de la psychologie, même si son bagout permet de lui gagner une clientèle.

Et si les détails du crime sordides – les victimes ont un crucifix enfoncé dans le sexe – laissent présager un tueur des plus sadiques, le duo n’est pas au bout de ses surprises quand une cliente de Monsieur Eddy découvre derrière son bureau un poster du château Hautval, devenu un monastère au siècle dernier et qu’elle connaît bien. « Vous vous souvenez du film « Le Nom de la rose », Eddy Baccardi acquiesce, et bine vous y êtes ! Au féminin. Passe encore des nonnes cloîtrées qui ne voient jamais personne ou presque, mais le pire ce sont les jeunes filles dans le pensionnat. Vous parlez d’une adolescence » lui explique alors sa cliente.

Un lieu qui très vite semble au cœur de l’affaire et conduit le duo, adepte de certains jeux de mots improbables, sur la piste d’un ancien accident d’avion à l’autre bout du monde et sur une histoire d’amour qui a bien mal tourné… Mais, avant de percer le mystère, il faudra convaincre la mère supérieure du couvent de leur ouvrir la porte de son monastère.

(…) e polar se joue tranquillement des codes classiques du genre et offre un honnête divertissement. (…)

(*) Ed. L’Harmattan