L’âge moyen d’apprentissage de la lecture en Bretagne est de 5/6 ans. Pour autant, l’illettrisme ne s’améliore pas, dans la mesure où il reste stable, c’est à dire relatif à un échec scolaire manifestement difficile à endiguer. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce constat, dont celle d’un apprentissage trop fragile sujet à des méthodes inadaptées. Benjamin Stevens est orthophoniste, créateur et auteur de la méthode APILI, construite sur les fondamentaux syllabiques grâce auxquels nos parents et grands-parents ont appris à lire et à écrire avec la promptitude que l’on connaît.
Une douloureuse réalité sociale
Une personne illettrée ne maîtrise ni la lecture ni l’écriture, bien qu’elle ait été scolarisée ; on la distingue d’une personne analphabète n’ayant, elle, jamais appris à lire ni à écrire sa langue maternelle. Illettrisme et analphabétisme nomment donc la situation des ceux qui ne possèdent pas les compétences de base pour être autonomes dans les situations simples de la vie courante et, de fait, sont exposés à un risque d’exclusion sociale. Ces gens osent rarement évoquer leur méconnaissance, surtout en ce début de XXIe siècle où chacun est censé lire et écrire couramment pour avoir fréquenté l’école. Une douloureuse réalité sociale, puisqu’environ 16% * des adultes âgés de 18 à 65 ans éprouvent des difficultés dans les domaines fondamentaux de l’écrit et de la lecture, entendu qu’une partie d’entre eux seulement a reçu un enseignement scolaire. Ceux qui n’ont jamais été scolarisées (il y en a) ou les immigrés dont la langue étrangère n’est pas le français, ne sont pas qualifiés d’illettrés, c’est alors que l’on parle d’analphabétisme. En conséquence, le taux d’illettrisme à proprement parler s’élève à 7% de la population.
Sempiternelle question de la meilleur méthode pour apprendre à lire
La première des méthodes d’apprentissage de la lecture et de l’écriture est aussi la plus connue parce que la plus ancienne et la plus utilisée, il s’agit de la méthode syllabique couramment appelée « b.a. – ba ». Elle consiste à identifier les lettres présentes dans un mot pour les associer en syllabes. L’élève commence par apprendre l’alphabet afin de regrouper chaque lettre avec une autre en formation de syllabes qu’il peut ensuite identifier dans des mots simple et courts, puis davantage complexes et longs au fil du temps. La seconde technique s’appelle la méthode globale. Le nom à lui seul suscite bien des polémiques. A l’inverse du concept syllabique, cette méthode intellectualise l’initiation en s’appuyant sur l’idée que l’élève perçoit d’abord ce qui lui fait sens : l’apprentissage des mots se fait par bloc sans passer celui des lettres ni des syllabes.
La méthode globale fut adoptée par certains enseignants « progressistes » des années 1970 avant d’être abandonnée au regard d’une inefficacité patente. Entre les deux, existe la méthode mixte actuellement utilisée, sorte de combinaison plus ou moins hybride entre l’efficacité séculaire de la première et la vanité « révolutionnaire » de la seconde. Les enfants apprennent le « code alphabétique » (combinaison des lettres et des syllabes) pour déchiffrer les mots et lisent en parallèle des phrases et des petits textes afin d’en saisir le sens. L’ancien ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer – prédécesseur de Pap Ndiaye –, avait jeté un pavé dans la marre en préconisant que l’apprentissage de la lecture doit s’appuyer « sur une pédagogie explicite, de type syllabique, et non pas sur la méthode globale » dont il est désormais attesté qu’elle est moins efficiente.
Sur l’apprentissage de la lecture
La méthode syllabique APILI associe les sons aux gestes… Montre ton nez avec ton index et dit « n »…. Un pari surprenant, mais pas tant que cela, car il a été prouvé que la mnémotechnique par le geste fonctionne chez l’enfant comme chez l’adulte. L’intelligence implique une mémoire efficace, aussi bien pour apprendre à l’école que dans la vie de tous les jours. Benjamin Stevens a construit sa pédagogie sur un développement de l’attention et de la motivation par l’humour. Chaque lettre, chaque son, chaque mot, est envisagé comme étant un des neurones de la lecture, un peu comme chaque note et chaque accord forment les neurones élémentaires du solfège et de la musique.
Ainsi peut-on résumer la méthode APILI « comme celle qui apprend à lire pour écrire, en même temps qu’elle enseigne l’écriture pour mieux apprendre à lire ». Elle est, pour cette raison, complétée par un cahier d’écriture indispensable, dans la mesure où l’impasse sur la graphie manuscrite serait un non-sens pour toute personne apprenant à lire le français qui n’est pas une langue phonétique, c’est-à-dire qu’elle ne s’écrit pas comme elle se prononce, contrairement, par exemple, à l’italien. Ultime livre de cette triangularité éducative, un cahier de 24 textes humoristiques présentés selon un code couleurs explicite et progressif. Une méthode complète en trois parties utilisables comme « passeport » scolaire durant les vacances, et comme complément éducatif durant l’année scolaire. À la fois accessible aux enfants, aux parents, mais aussi aux adultes qui souhaitent apprendre à lire. Bref ! Intelligent. Efficace. Épatant. On espère la version bretonne le plus vite possible…
* Tous les chiffres de cet article sont ceux de l’Insee.
Romain d’H. LAND
© Août 2023 – Bretagne Actuelle
Méthode Apili de Benjamin Stevens
Apprendre à lire grâce à l’humour aux éditions Liberté.
Méthode syllabique – 176 pages couleurs – 25,90 €
Cahier d’écriture – 80 pages couleurs – 15,90 €
Cahier de lecture – 60 pages couleurs – 16,90 €