Actualitté interviewe Francis Grembert, lauréat du 89ème Prix Cazes : Une récompense à contre-courant du vacarme

Francis Grembert : un chagrin sous l’écorce, Prix Cazes 2025

En couronnant Les Deux Tilleuls de Francis Grembert pour son 89e anniversaire, le Prix Cazes 2025 honore une œuvre grave, douce et nue. Ce récit pudique sur la perte d’un petit frère, mêlant mémoire rurale et douleur silencieuse, s’impose à rebours des modes comme un bijou d’écriture retenue. Loin des brouhahas littéraires, il murmure, touche et résiste. Un hommage bouleversant au lien fraternel, et un manifeste discret pour une littérature du peu qui dit tout. Par Yves-Alexandre Julien.

Il faut du courage, aujourd’hui, pour écrire un livre aussi silencieux. Et davantage encore pour le distinguer d’un prix. Les Deux Tilleuls de Francis Grembert ne fait pas de bruit. Il n’en a pas besoin. En 112 pages, l’auteur y évoque la mort accidentelle de son petit frère, survenue alors qu’il n’avait que sept ans. Pas d’analyse psychologique, pas de pathos, pas de grands effets.

À la place : le ressassement d’une phrase d’enfance, la mémoire d’un arbre, la survivance d’un lien qui, cinquante ans plus tard, n’a pas fléchi. Le récit, tout entier écrit à hauteur d’enfant, adopte le tempo des battements de cœur — irréguliers, profonds, presque inaudibles, mais vitaux.

Le style, aussi net qu’un bois lisse, surprend par son refus de séduire. Il évoque la langue claire de Bobin, la densité du silence chez Jaccottet, la tendresse rugueuse de Marie-Hélène Lafon. Dans une époque littéraire en quête constante de visibilité, Francis Grembert creuse un sillon discret, rural, fraternel. Il ne cherche pas à guérir ni à sublimer la douleur : il la partage, comme on tend une main sans mots.

Le plus bouleversant, sans doute, est ce que le livre ne dit pas. Il ne parle pas de l’après. Il ne disserte pas sur le deuil. Il ne commente pas. Il convoque. Il fait tenir dans quelques pages l’expérience la plus bouleversante qu’un être humain puisse traverser : perdre un frère — et survivre à l’absence. Il n’y a pas de message, pas de morale, pas de posture. Juste une fidélité. Le livre tient debout par sa fidélité.

À ce titre, Les Deux Tilleuls entre en résonance avec une autre littérature, plus souterraine : celle qui refuse la spectacularisation, le commentaire à chaud, la complaisance. Il redonne sa place au peu, au ténu, au fragment. En cela, il est un acte de résistance littéraire. Un contre-pied au flux numérique, un refus des récits prémâchés. Et c’est précisément pour cela qu’il touche.

Le Prix Cazes, une fidélité à l’écriture de l’intime

Que le Prix Cazes 2025 ait choisi de distinguer un tel texte n’est pas anodin. Créé en 1935 par Marcellin Cazes, fondateur de la Brasserie Lipp, ce prix littéraire singulier fête cette année son 89e anniversaire. Il récompense un roman, une biographie, des mémoires ou un recueil de nouvelles, dans un esprit de fidélité à la littérature de transmission, à la culture partagée et à l’écriture de l’intime.

Le jury, composé de onze personnalités aux sensibilités variées — parmi lesquelles Léa Santamaria (présidente), Claude Guittard (secrétaire général), Mohammed Aïssaoui, Christine Jordis, Nicolas d’Estienne d’Orves, ou encore Gérard de Cortanze — a choisi de distinguer Les Deux Tilleuls parmi une sélection exigeante.

Cette année étaient également en lice : Rien n’est plus grand que la mère des hommes de Diana Filippova (Albin Michel), Un perdant magnifique de Florence Seyvos (L’Olivier), La loi du moins fort de David Ducreux Sincey (Gallimard), Un coup de pied dans la poussière de Baptiste Fillon (Le Bruit du Monde) et Malestroit de Jean de Saint-Chéron (Grasset). Une constellation de livres forts, dont celui de Grembert, par son minimalisme même, a su tirer une force paradoxale.

Le tilleul comme totem, le frère comme trace, le temps comme matière mémorielle

« Je n’ai pas besoin de penser à toi » : cette phrase, répétée comme une comptine rituelle, irrigue le récit. C’est le talisman de l’enfant endeuillé qui refuse que l’oubli ait le dernier mot. Le tilleul, cet arbre de cour d’école planté le jour du drame, devient alors le centre symbolique de la mémoire : enraciné, silencieux, survivant. C’est à la fois le tombeau et le sanctuaire du lien perdu. Loin de toute affectation lyrique, Francis Grembert touche à l’universel par la précision du détail. Il écrit comme on taille dans le vif, sans bavure, sans décor.

Cette manière de faire parler la nature, sans animisme ni mièvrerie, évoque parfois Julien Gracq ou Pierre Michon dans leurs récits de terroir habités par le deuil et le sacré. Grembert, lui, y ajoute une tonalité d’enfance, une fragilité assumée, qui confère à son livre une humanité poignante. Ce n’est pas un tombeau littéraire : c’est une veillée. Une fraternité d’ombre et de lumière.

À l’inverse d’une société contemporaine obsédée par l’instantanéité, Les Deux Tilleuls se construit sur une autre logique temporelle. « Écrire, c’est essayer de trouver un autre temps », affirme Grembert. Le deuil, ici, ne s’inscrit pas dans un processus linéaire de guérison. Il est un tissage patient entre l’enfance et l’âge adulte, entre l’immédiateté du traumatisme et la lente remontée du souvenir. Le livre est né sur le temps long, au fil de décennies de maturation intérieure. Il n’est ni une confession ni une catharsis, mais une sorte de veille fraternelle, où l’auteur se fait « gardien du souvenir ».

Ce mystère du temps retrouvé résonne avec les textes de Proust, bien sûr, mais aussi avec les méditations de Pierre Bergounioux ou les proses silencieuses de Marie-Hélène Lafon. Chez Grembert, la ruralité n’est pas un décor. Elle est matrice, espace mental, lieu de l’empreinte. La nature ne console pas, mais elle témoigne. Elle accueille la mémoire comme elle accueille la lumière. Le titre lui-même, Les Deux Tilleuls, condense cette fusion entre le végétal et l’humain, entre le paysage et la perte.

Une écriture de l’épure et de l’essentiel

Le premier vertige de ce livre naît de sa brièveté. Une centaine de pages pour dire l’indicible : la perte, à sept ans, d’un petit frère fauché par une voiture. Une vie fauchée à quatre ans et demi. Et pourtant, quelle ampleur intérieure. Francis Grembert revendique l’économie de moyens : « La forme s’est imposée au fil de l’écriture. Dire les choses par petites touches, sans les commenter ou tenter de les analyser. »

Cette pudeur, qui semble relever du classicisme français le plus rigoureux, confère au texte une intensité sourde, comme un chuchotement obstiné qui traverse les décennies. On pense à Bobin, à Jaccottet, à Modiano même, dans leur manière de faire résonner le silence entre les mots.

Le détail y devient monde. Une pierre, un arbre, une phrase répétée comme un mantra d’enfant : « Je n’ai pas besoin de penser à toi… » Cette répétition rituelle agit comme un contre-sort face à l’absence. L’auteur évoque « des rituels intimes, associés à la nature, pour conjurer l’absence ». Rien de solennel, mais une magie de l’enfance : celle où l’on croit encore qu’on peut, par la parole, faire revenir les morts. Grembert ne surjoue jamais la douleur. Il ne l’explique pas. Il la scande. Et cela suffit.

À l’heure du numérique, de la disruption permanente et de la communication virale, un tel livre apparaît comme un contre-pouvoir. C’est une digue dressée face à la dissolution de l’attention, à l’effacement de la lenteur, à la dégradation du langage. Les Deux Tilleuls est un livre qui ne se consomme pas : il se garde, comme une photographie ancienne ou un secret transmis à voix basse. Il exige une lecture « difficile, mais lumineuse », — autrement dit, une lecture adulte.

La réflexion n’est pas neuve : elle irrigue depuis des années les travaux sur la littérature à l’ère numérique. Mais ce livre en offre une mise en œuvre sensible, incarnée. Il rappelle que l’écriture est encore capable, malgré tout, de suspendre le monde, de créer un espace de recueillement, un temps pour soi. Il nous dit que la littérature n’a pas à rivaliser avec les algorithmes : elle a juste à être là, intacte, quand tout s’effondre.

Une récompense à contre-courant du vacarme

L’attribution du Prix Cazes 2025 à ce récit intérieur n’est pas un simple hommage. C’est un geste fort. Comme le souligne Claude Guittard, secrétaire général du prix, « le Jury a été très sensible au style tout en retenue, et à l’hommage bouleversant à l’amour fraternel raconté dans cet ouvrage ». Dans un monde saturé de récits clinquants et d’opérations de marketing littéraire, Les Deux Tilleuls s’impose par sa discrétion. Il ne cherche pas à séduire. Il offre. Et cette offrande, silencieuse, touche au plus profond.

Ce n’est pas un hasard si ce texte s’inscrit dans la tradition d’un prix qui refuse les « coups littéraires ». Dans une époque où la littérature doit souvent crier pour se faire entendre, le Prix Cazes distingue ici une œuvre qui murmure — et qui, dans ce murmure, dit l’essentiel. Une fidélité rare à « une certaine idée de la culture française », comme le rappelle Guittard, entre transmission, résistance au flux et célébration du lien.

Une voix à suivre, un prix fidèle à sa vocation

Francis Grembert poursuit avec ce quatrième opus une œuvre cohérente et sans bruit. On lui connaissait déjà Ma dernière moisson (Le cherche midi éditeur en 1994), Elsie, Mairi et Dorothie, Les dames de Petvyses (2018 aux éditions de la mémoire) et enfin Petite éloge de l’alouette (chez Arlea en 2023).

Tous disaient déjà son attention au monde rural, au silence, à la mémoire. Mais Les Deux Tilleuls va plus loin : il touche à l’intime, et par là, à l’universel. Il fait ce que seule la littérature peut faire : élever le chagrin à la dignité du mythe. Raconter l’amour fraternel non par effusion, mais par dépôt, par retour.

Le Prix Cazes, fidèle à sa tradition depuis 1935, prouve une fois de plus qu’il ne cède pas à la tentation du clinquant. Il récompense un livre qui n’est pas un événement, mais une trace. Pas un cri, mais une empreinte. Pas un produit, mais un geste. En honorant Les Deux Tilleuls, il rappelle que la littérature n’a pas besoin d’exploser pour éclairer. Parfois, elle suffit à faire revivre un frère disparu, sous un tilleul, quelque part en France.

Crédits photo : Yves-Alexandre Julien – ActuaLitté CC BY SA 2.0

Saisons de culture était au Prix Cazes 2025

Prix Cazes Brasserie Lipp 2025

Par Mylène Vignon

Un parterre impressionnant d’auteurs prestigieux, de journalistes et de personnalités germanopratines, était présent le mardi 6 mai 2025 pour honorer le célèbre prix littéraire décerné chaque année à la Brasserie Lipp à Saint-Germain-des-Prés.

Fondé en 1935 par Marcelin Cazes, le Prix Cazes récompense chaque année un auteur, pour un roman, un essai, une biographie, des mémoires ou des nouvelles.

Présentation du jury  :

Léa Santamaria (Présidente)

Claude Guittard (secrétaire général)

Mohamed Essaoui

Gautier Batistella

Mathilde Brezet

Marie Charrel

Gérard de Cortanze

Nicolas d’Estienne d’Orves

Christine Jordis

Eric Roussel

Le prix cette année 2025 a été décerné à Francis Grembert, pour son roman Les deux tilleuls (Arlea). Une histoire très sensible, explique l’auteur, qui a la suite d’une longue gestation, s’est inscrite dans la lignée des meilleurs romans de l’année.

Merci à Guilaine Depis et à sa flamboyante Balustrade, pour cette belle manifestation littéraire et pour l’accueil chaleureux réservé à notre média Saisons de Culture, abondamment représenté lors de cette soirée.

Prix littéraires : Le 89ème Prix Cazes sera remis début mai à la Brasserie Lipp

Le 89ème Prix Cazes sera décerné le *** mai 2025. (Brasserie Lipp)

Version PDF 

***date communiquée aux journalistes manifestant leur intérêt pour couvrir l’événement

contact presse : guilaine_depis@yahoo.com 06 84 36 31 85

La sélection de 2025

89emePrix Cazes Brasserie Lipp

En sélection

– Rien n’est plus grand que la mère des hommes de Diana FILIPPOVA (Albin Michel)
 
Un perdant magnifique de Florence SEYVOS (L’Olivier)
 
– Les deux tilleuls de Francis GREMBERT (Arléa)
 
– La loi du moins fort de David DUCREUX SINCEY (Gallimard)
 
– Un coup de pied dans la poussière de Baptiste FILLON (Le bruit du monde)
 
– Malestroit de Jean de SAINT-CHÉRON (Grasset)
 

Le jury

Fondé en 1935 par Marcellin Cazes, le Prix Cazes récompense un auteur pour un roman, un essai, une biographie, des mémoires ou recueils de nouvelles.

Il est décerné cette année par un jury composé de :

Léa SANTAMARIA (Présidente), Gérard de CORTANZE, Mohammed AISSAOUI, Eric ROUSSEL, Christine JORDIS, Nicolas d’ESTIENNE D’ORVES, Mathilde BREZET, Gautier BATTISTELLA, Marie CHARREL, Claude GUITTARD (secrétaire général)

1935-2019 L’histoire du PRIX CAZES

Le Prix Cazes est l’une des plus anciennes distinctions littéraires. Cette récompense, créée à l’initiative de Marcelin Cazes, continue, au fil des décennies, à révéler des auteurs prometteurs. Comme il avait une clientèle très “intellectuelle”, Marcelin Cazes eut l’idée en 1935 de créer un prix littéraire qu’il décernait chaque année au mois de mars et qu’il dotait à l’origine d’une somme de deux mille cinq cents francs.

Le jury, composé de douze membres et présidé par André Salmon, se réunissait à midi, votait, puis était invité à déjeuner par la Brasserie Lipp ainsi que le lauréat – “qui n’était jamais introuvable ni même bien loin”- et quelques courriéristes littéraires.

En 1935, la première année, le prix fut attribué à une compagnie théâtrale, Le Rideau de Paris de Jean Marchat et Marcel Herrand, deux jeunes comédiens metteurs en scène. Les lauréats suivants, véritables écrivains, devinrent souvent des auteurs à succès.

En effet, le prix Cazes servait à l’époque de “tremplin” car plusieurs lauréats obtinrent par la suite le prix Goncourt, le prix Femina ou Interallié.

En quelques années, le prix Cazes est devenu “l’événement littéraire du printemps” (contrairement aux autres grands prix, remis à la rentrée) qui mobilisait le monde littéraire et journalistique parisien.

L’ année 1950 devait marquer l’histoire du prix. En effet, cette année-là, Marcelin Cazes décida de décerner le prix qui porte son nom dans sa maison natale de Laguiole. Il organisa pour cela un voyage en car au départ de Saint Germain des Prés, le 24 mai 1950, avec à son bord 35 journalistes, courriéristes, membres du jury et amis. Un périple, sûrement plus gastronomique que littéraire, qui dura 5 jours et couronna le lauréat Marcel Schneider pour son roman Le Chasseur vert.

Depuis 1950, le Prix Cazes, toujours décerné chaque année au mois de mars, a couronné le talent de nombreux auteurs pour leurs romans, essais, biographies, mémoires ou recueils de nouvelles : de Solange Fasquelle (1961) à Jean Claude Lamy (2003), en passant par Michel de Grèce (1970), José-Luis de Villalonga (1971), François de Closets (1974), Cavanna (1979), Olivier Todd (1981), Edgar Faure (1983), Jean Paul Aron (1985), Jean Marin (1995), Jean-Paul Enthoven (1997), Clémence de Bieville (1998), Shan Sa (2001), Gérard de Cortanze (2002), Béatrice Commengé (2004), Françoise Hamel(2005), Emmanuelle Loyer (2006) ou Richard Millet (2007), pour ne citer qu’eux…

En 2018, le 83e Prix Cazes a été décerné à Régis Wargnier pour son roman Les prix d’excellence (Éditions Grasset)

En 2019, le 84e Prix Cazes a été décerné à Louis-Henri de La Rochefoucauld pour son roman La prophétie de John Lennon (Éditions Stock).

En 2020 Alexandre Postel a reçu le 85ème Prix Cazes pour Un automne de Flaubert (Gallimard)

En 2022, Mathilde Brézet (Le Grand Monde de Proust, Grasset) et Gautier Battistella (Chef, Grasset) ont tous les deux été récompensés du 86ème Prix Cazes

En 2023, Marie Charrel a reçu le 87ème Prix Cazes pour Les Mangeurs de nuit (éditions de l’Observatoire)

En 2024, Nathan Devers a reçu le Prix Cazes pour Penser contre soi-même (Albin Michel)

Un lieu chargé d’histoire

La Brasserie Lipp

Fondée sous l’enseigne “Brasserie des bords de Rhin” en 1880 par un alsacien du nom de Léonard Lipp, la Brasserie fut reprise en 1920 par la famille Cazes, d’origine auvergnate.

A cette époque, il s’agit d’un petit établissement d’une dizaine de tables seulement, mais le succès grandissant de la désormais Brasserie Lipp pousse Marcelin Cazes à s’agrandir rapidement.

Les trois clientèles de Lipp

En 1926, la Brasserie passe donc de 10 à 90 tables pour accueillir dès lors les “trois clientèles de Lipp” que Marcelin Cazes décrit dans son livre 50 ans de Lipp (éditions La Jeune Parque) : “à midi, des hommes d’affaires, des commerçants du quartier qui voulaient déjeuner dans un endroit calme et sérieux ; de cinq heures à huit heures, des écrivains, libraires, éditeurs, magistrats, artistes qui se réunissent pour bavarder ou se délasser de leurs travaux devant des demis ou des apéritifs : et le soir, le tout Paris.”

À cette époque, la Brasserie Lipp a déjà une solide réputation littéraire, fréquentée notamment par Verlaine et la dernière bohème du Quartier Latin. Au fil des ans, Marcelin Cazes, figure emblématique de la Brasserie, en fit le point de chute de grands noms qui ont marqué la littérature française : Malraux, Gide, Saint Exupery, Proust, Camus

La Brasserie sera même classée “lieu de mémoire” par le Ministère de la Culture plusieurs années plus tard.

Un lieu hors du temps

Derrière cette façade en acajou verni, se cache donc une maison plus que centenaire, reprise progressivement depuis 1990 par la famille Bertrand qui se fait un devoir de perpétuer la tradition, profondément marqué par ses racines auvergnates. Pour preuve, la Brasserie Lipp abrite aujourd’hui encore tout le monde politique, journalistique, littéraire et artistique que compte Paris. Vous pourrez y croiser le regard de Scarlett Johansson, Jack Nicholson, Sophia Coppola, mais aussi Azzedine Alaïa, Jean- PaulGaultier, Jean-PaulBelmondo, Benjamin Biolay ou Sting…

En effet, tous apprécient ce lieu chargé d’histoire où le temps semble s’être arrêté depuis bien longtemps.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nicolas d’Estienne d’Orves membre du jury du Prix Cazes couronnant Nathan Devers répond à Marc Alpozzo

Nicolas d’Estienne d’Orves : « Le Prix Cazes couronne des auteurs jeunes et prometteurs »

Le mercredi 10 avril 2024 a eu lieu la remise du Prix Cazes, à la Brasserie Lipp, Boulevard Saint Germain, Paris. Ce fut le 88e anniversaire de ce prix très prestigieux, fondé en 1935 par Marcelin Cazes. Et c’est l’écrivain et philosophe Nathan Devers qui a été récompensé pour son livre Penser contre soi-même (Albin Michel, 2024). L’occasion d’interroger un membre du jury, qui n’est autre que l’écrivain Nicolas d’Estienne d’Orves.

Entreprendre – Nicolas d’Estienne d’Orves : « Le Prix Cazes couronne des auteurs jeunes et prometteurs »

Quelle est l’originalité du Prix Cazes ?

Nicolas d’Estienne d’Orves : Le Prix Cazes fait partie de ces prix littéraires germanopratins intimement liés au quartier et à la vie parisienne, comme celui des Deux Magots et celui, beaucoup plus récent, du Café de Flore. Marcellin Cazes créa ce prix en 1935, afin de couronner un auteur jeune et prometteur (ce qui n’a pas toujours été le cas, bien entendu, tout autant pour la jeunesse que les promesses) et le prix n’a jamais cessé d’être remis depuis. Son originalité tient peut-être en ce qu’il ne fait pas partie des poids-lourds de la rentrée littéraire de septembre, puisqu’il est remis au printemps. Ce qui laisse à son jury une forme de liberté. Sans compter que ce même jury est avant tout composé de gens qui ont plaisir à ripailler ensemble dans l’un des plus jolis cadres de Paris.

Quel est le lauréat le plus prestigieux du prix Cazes ?

Il faut s’entendre sur la définition du prestige. Disons que le Cazes a été lancé en 1935 en couronnant non point un livre mais une troupe de théâtre, la Compagnie Le Rideau de Paris, qui était dirigée par le couple Marcel Herrand et Jean Marchat, lesquels vivaient ensemble à la ville comme à la scène. Ce qui, en 1935, n’était pas si fréquent.

Qui sont les membres du prix Cazes ?

Mohammed Aissaoui, Eric Roussel, Christine Jordis, Gautier Battistella, Mathilde Brézet, Marie Charrel, Carole Martinez, Gérard de Cortanze, Léa Santamaria, le président Joel Schmidt et bien entendu le grand chambellan Claude Guittard.

Comment ce jury est-il composé ?

 Il est composé de gens de lettres : écrivains, journalistes, historiens, romanciers, libraires… Et, dans les cas de Gautier Battistella, Mathilde Brézet, Marie Charrel, Gérard de Cortanze et moi, d’anciens lauréats cooptés après avoir reçu le prix.

Comment se passe les choix des livres ?

 De façons très naturelles : il y a une sorte de débroussaillage effectué par les membres du jury qui sont ls plus au fait des nouveautés littéraires (en l’occurrence les journalistes ainsi notre chère libraire Léa Santamaria). Puis on lit, on cause, on débat, on élague, on vote, on revote, on re-revote etc.

Est-ce que vous primez des auteurs de petites maisons ?

La maison d’édition n’est pas forcément un critère. En 2016 nous avons couronné  Dominique Paravel pour un livre publié chez Serge Safran. Mais il est vrai que, dans l’ensemble, nous avons souvent primé les « grosses » maisons (mais ce n’est pas un hasard si elles sont, et restent,  de grosses maisons, après tout…)

Vous avez primé l’écrivain et philosophe Nathan Devers cette année. Pourquoi ?

Parce qu’il correspondait en bien des points aux critères du prix : jeune, pas encore primé, original dans son ton et son propos etc. Certes, il s’agit d’un essai et non d’un roman, mais le Cazes ne se concentre par que sur les œuvres de fiction. Nathan Devers est sans nul doute un auteur qui va compter dans les années à venir, et son Prix Cazes sera probablement le premier d’une longue liste de récompenses littéraires.

Propos recueillis par Marc Alpozzo

Remise du 88ème Prix Cazes à la Brasserie Lipp (seulement pour ceux ayant un carton en papier)

Pour télécharger la version pdf de l’argumentaire du 88ème Prix Cazes, merci de cliquer  ICI 

Pour télécharger la version pdf de l’argumentaire du 88ème Prix Cazes, merci de cliquer  ICI 

Remise du 88ème Prix Cazes le 10 avril 2024 de 18h30 à 20h30 
lors d’un cocktail à la Brasserie Lipp 151 boulevard Saint-Germain 75 006 Paris 
 
où ne seront admis que les journalistes pouvant présenter le carton en papier. 
(merci de penser à réclamer le vôtre à Guilaine Depis par sms 06 84 36 31 85)
“l’événement littéraire du printemps” 
Le Prix Cazes est l’une des plus anciennes distinctions littéraires. Cette récompense, créée à l’initiative de Marcelin Cazes en 1935, continue, au fil des décennies, à révéler des auteurs prometteurs. 

En sélection pour le 88ème Prix Cazes-Brasserie Lipp :

J’ai pêché, pêché dans le plaisir d’Abnousse Shalmani (Grasset)

L’homme aux mille visages de Sonia Kronlund (Grasset)


Penser contre soi-même de Nathan Devers (Albin Michel)

Le ciel t’attend de Jean Gregor (Robert Laffont)

Le ciel en sa fureur d’Adeline Fleury (L’Observatoire)

Les monuments de Paris de Violaine Huisman (Gallimard)

Odette Froyard en trois façons d’Isabelle Monnin (Gallimard)

Corps de ferme d’Agnès de Claireville (Harper Collins)

J U R Y
Léa SANTAMARIA, Gérard de CORTANZE, Mohammed AISSAOUI, Eric ROUSSEL, Joël SCHMIDT (Président), Christine JORDIS, Nicolas d’ESTIENNE D’ORVES, Carole MARTINEZ, Mathilde BREZET, Gautier BATTISTELLA, Marie CHARREL, Claude GUITTARD (Secrétaire Général)
Contact presse guilaine_depis@yahoo.com 06 84 36 31 85

Interview de Léa Santamaria, libraire et membre du jury du Prix Cazes Brasserie Lipp

Littérature : le prestigieux Prix Cazes est décerné à Marie Charrel

Marie Charrel, lauréate du 87è Prix Cazes pour son roman « Les Mangeurs de nuit » aux éditions de l’Observatoire.

Le jeudi 6 avril 2023 aura lieu la remise du Prix Cazes, à la Brasserie Lipp, Boulevard Saint Germain, à Paris. Ce sera le 87e anniversaire de ce prix très prestigieux, fondé en 1935 par Marcelin Cazes. L’occasion d’interroger Léa Santamaria, membre du jury et libraire.

Marc Alpozzo : Quelle est l’originalité du Prix Cazes ?

Léa Santamaria : Le Prix Cazes a été créé en 1934 par le patron de la Brasserie Lipp, Marcelin Cazes. Il avait une clientèle intellectuelle, et il appréciait la littérature. Il s’est donc dit qu’il allait créer un prix littéraire qui allait sortir du lot, donc qui ne se baserait pas sur les auteurs qui paraissent en septembre comme tous les autres prix, il s’occuperait plutôt de la rentrée de janvier, et donc c’est devenu l’événement du prix de printemps à Saint Germain des Près. C’est aussi un des plus anciens prix de la place Saint Germain, il n’y avait pas encore le prix Flore, ni le prix des Deux Magots. Les trois premiers prix ont été décernés par un Jury anonyme, qui se réunissait toute la nuit précèdent l’arrivée du printemps, au premier étage de la brasserie, et qui débattait autour d’une table bien garnie, repas que l’on imagine bien arrosé.

Le Prix était annoncé le premier jour du printemps.

M. A. : Quel est le lauréat le plus prestigieux du prix Cazes ?

L. S. : Il est difficile de donner un seul nom tant la liste des lauréats est remarquable, mais on peut citer Joël Schmidt pour ‘’Lutèce’’, François Cavanna pour ‘’ Les Ritals’’ ou Françoise Hamel pour ‘’ Fille de France’’.

M. A. : Pourquoi ont-ils choisi une libraire ?

L. S. : Mohammed Aissaoui, qui fait partie du jury, souhaitait choisir une libraire en remplacement d’une personne qui n’était plus en état de venir aux réunions. Il pensait à une libraire car les libraires disait-il analysent vraiment tout. C’est alors que Nicolas d’Estienne d’Orves qui est mon ami pense à moi. En plus, habitant dans le quartier, ça leur a semblé logique de me choisir. En plus j’avais un lien avec l’actualité et les auteurs. J’ai donc fait un déjeuner avec les membres du jury et j’ai été cooptée en 2015.

M. A. : Comment ce jury est-il composé ?

L. S. : Il y a douze membres du jury. Nos deux derniers sont des lauréats du prix. Cependant, Carole Martinez n’a jamais eu le prix Cazes mais elle est rentrée comme auteur et amie. Pour intégrer le jury, il faut tout de même obtenir l’unanimité des membres.

Nous avons eu au sein du Jury des écrivains prestigieux, je pense à Georges Emmanuel Clancier, qui fut présent avec nous jusqu’à ses 102 ans, Solange Fasquelle qui avait obtenu le Prix en 1961et intégrée le Jury jusqu’à son décès en 2016, ou encore Olivier Séchan, lauréat en 1946.

M. A. : Comment se passe le choix des livres ?

L. S. : Ça se passe globalement plutôt bien. Il y a nettement moins de pressions qu’avec le Goncourt, certes chacun défend son avis, mais ça se passe dans la bonne humeur. Il faut dire qu’il y a plus de prix littéraires aujourd’hui en France que de marques de fromage par exemple. Et parfois, il me semble qu’il y a plus d’écrivains que de lecteurs. Donc, le fil conducteur de notre sélection, commence par un rendez-vous en décembre, avec assez peu de services de presse, avec des listes de parutions, ou des auteurs que l’on a envie de défendre. Puis de janvier à mars, nous nous retrouvons chaque mois, a la Brasserie, pour affiner notre sélection au cours de débats très animés, et toujours selon la tradition, autour d’un repas festif.

M. A. : Est-ce que vous primez des auteurs de petites maisons ?

L. S. : Oui, par exemple en 2015, on a remis le prix à Dominique Paravel pur ‘’Giratoire’’ qui sortait un livre chez Serge Safran. Tout le monde avait aimé le livre.

M. A. : Est-ce que le livre se vend encore ?

L. S. : Les livres de développement personnel font partie des grosses ventes, même si ça ne se passe pas chez moi, puisque je suis dans le 6e, un quartier assez littéraire, avec une clientèle exigeante. Moi, je vends encore bien. Mais il y a trop de livres, même pour nous, pour défricher. On a donc intérêt à vendre beaucoup de livres, mais c’est difficile. Moi, je suis obligée aujourd’hui de faire une partie de papeterie. Mais il y aura toujours des gens qui aimeront des livres. Il faut toutefois qu’ils aillent chez leur libraire et non sur Amazon.

Propos recueillis par Marc Alpozzo

Léa Santamaria, gérante de la librairie-Papeterie 18, rue Le Verrier 75006 Paris et membre du jury du Prix Cazes remis à la Brasserie Lipp 151 boulevard Saint-Germain 75 006 Paris.

Le 87ème lauréat : Marie Charrel, recevra son prix jeudi 6 avril 2023 pour son roman « Les Mangeurs de nuit » aux éditions de l’Observatoire.

Marie Charrel avec Les mangeurs de nuit de  (L’Observatoire) est la lauréate du 87ème Prix Cazes.

Marie Charrel avec Les mangeurs de nuit de  (L’Observatoire) est la lauréate du 87ème Prix Cazes.
Elle a été élue au premier tour.
Son Prix lui sera remis jeudi 6 avril 2023 à 12h15 à la Brasserie Lipp 151 boulevard Saint-Germain 75 006 Paris
(inscriptions au cocktail pour les journalistes par sms en précisant le nom du média et l’adresse postale pour recevoir le carton en papier obligatoire pour accéder au cocktail au 06 84 36 31 85.)
Contact Presse pour le Prix Cazes : guilaine_depis@yahoo.com 

Première sélection du 10 janvier 2023 – 87ème Prix Cazes Brasserie Lipp

PRIX CAZES – BRASSERIE LIPP
Première sélection du 10 janvier 2023
L’autre nom du bonheur était français – Shumona Sinha (Gallimard)
Mes fragiles – Jérôme Garcin (Gallimard)
Avalanche – Raphaël Haroche (Gallimard)
L’ancien calendrier d’un amour – Andreï Makine (Grasset)
Les ombres blanches – Dominique Fortier (Grasset)
Le bureau d’éclaircissement des destins – Gaëlle Nohant (Grasset)
Un vrai dépaysement – Clément Bénech (Flammarion)
Fille en colère sur un banc de pierre – Véronique Ovaldé (Flammarion)
Est-ce ainsi que les hommes vivent ? – Patrick Besson (Albin Michel)
Dossier Trocchi – Christophe Bourseiller (Table ronde)
Les mangeurs de nuit – Marie Charrel (L’Observatoire)
Une archive – Mathieu Lindon (P.O.L.)
Par la racine – Gérald Tenenbaum (Cohen&Cohen)
La Beauté du geste – Yves Bichet (Le Pommier)
L’Invention de l’histoire – Jean-Claude Lalumière (Le Rocher)
Staline a bu la mer – Fabien Vinçon (Anne Carrière)
Varlam – Michael Prazan (Rivages)
Ce prix, fondé par Marcellin CAZES, est d’un montant de 4 000 € ainsi que d’une table ouverte à la Brasserie LIPP de 800 €.
Il est attribué, au mois de novembre de chaque année, à un écrivain choisi par le jury composé de :
J U R Y
Léa SANTAMARIA
Gérard de CORTANZE
Mohammed AISSAOUI
Eric ROUSSEL
Joël SCHMIDT (Président)
Christine JORDIS
Nicolas d’ESTIENNE D’ORVES
Carole MARTINEZ
Mathilde BREZET
Gautier BATTISTELLA
Claude GUITTARD (Secrétaire Général)