Natalie Mei

Exposition de broderies de Natalie Mei 

« Le fil et la main », « les tapis minuscules » et « autres fils de la pensée »

à la Galerie Des femmes-Antoinette Fouque, 35 rue Jacob, 75006 Paris
du 3 juin (vernissage dès 18 h 30) au 31 juillet 2010
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Caresses_print.jpgPrésentation de Natalie Mei

 

NATALIE MEI

Née le 17 octobre 1948

Diplômée de l’Université de Vincennes, en philosophie et sociologie.

Restauratrice de tableaux depuis 1980.

Première exposition de dessins à l’encre de Chine, en 1978, au Centre Buref, La Défense 2, avec Christian Vallerin et Thomas Stern.

Deuxième exposition en 1989, de portraits, collages et travaux sur papier, à la galerie de Dona Levy à Paris.

Collaboratrice et area revue)s(, des premiers jours de la création de la revue, jusqu’en 2009.

Six livres faits de textes et d’entretiens, avec des artistes, Claude Yvel, Christian Sabas, Hervé Half, Marianne Le Vexier, Benjamin Lévêque, Bruno Durieux.

Troisième exposition de broderies à l’Espace des femmes-Antoinette Fouque, 35 rue Jacob à Paris en juin et juillet 2010.

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Skoura, le Haut-Atlas marocain 1948-1952

Les étendues fictives, premier souvenir

…De la terrasse de la casbah, j’ai vu un homme s’éloigner. L’air brûlant traversait son corps, en dessinait les contours. Son vêtement flottant disparaissait dans le paysage. Au-delà de la perspective, je tendais les bras vers lui. Un son proche, sourd et strident m’affolait. Derrière les murs de la maison, des femmes chantaient et dansaient l’houache, balançaient leurs corps et leurs visages encerclés de bijoux d’argent.

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Sana_web.jpgCasablanca 1953-1957 Cendrillons. Taffetas, soieries, dentelles et broderies. Nos jeunes mères créent des robes merveilleuses, sous la direction de l’une d’entre elles, créatrice de haute-couture.

Corse 1976-Paris 1978

 

 

Les infinis minuscules, que d’alvéoles dans les encres et les mères de Chine !

La dessinatrice mise à nu par sa quasiment épouse même

Je suis donc sa future, songeait-elle, ignorant qu’elle s’était quelque part prise au pied de la lettre et que, future, elle le resterait toujours. Médusée, il lui fallut pourtant reconnaître assez vite qu’elle ondoyait et girait entre deux eaux autour d’un commandement émanant directement du Grand Agitateur des Flots. Ce commandement, en forme de tourbillon vertigineux, n’énonçait rien – le Grand Agitateur des Flots négligeait la parole – mais il rayonnait d’une lumière suffisamment aveuglante pour conférer à toute présence, fût-elle passionnée et dense, une consistance opaline.

En deça des banquises, la petite marquise. Peut-on crier terre quand lèvres, gorge, langue et dents n’engendrent qu’évanescentes échappées de bulles, chenilles cristallines, bousculades d’éboulis miriphiques et diaphanes, vermine transparent et sans suite – à peine éclose, déjà usée et disparue ? Toujours promise, la reine mère automatique de l’aphasie amoureuse fait pulluler le silence de l’onde qui gonfle et soulève la corolle blanche de la robe nuptiale. L’engouffrement sous elle du courant liquide la métamorphose à contre temps ; dénudée jusqu’au ventre, la voici papillon puis encapuchonnée de la taille aux cheveux, semblable à celle qui garantit, immense et blême, la fécondité des termites.

Entre-deux_web.jpg

« Que d’alvéoles sans larve ! », s’exclame, sidérée l’étoile des mers de Chine. « Bois l’encre pesante de nos seiches, armes-toi de l’acier des grands axes, hérisses et métallises les canules innombrables de ta longue chevelure, tu gagneras la chance de te désengloutir… »

 

 

De sa nacelle, la demoiselle déploie vers la terre le faisceau de tiges souples et creuses qui orne désormais sa tête. Un foisonnement trouble, identique au frisson, parcourt le système quand l’encre s’écoule dans chacune des seringues qui tracent toutes ensemble des cercles et des lignes, aux dimensions multiples. Mais gardez-vous de convoler ou de solliciter la caresse, même passagère, d’une telle chevelure. Ces aiguilles refoulantes peuvent choisir d’aspirer : en matière de globules, elles ne laissent que les blancs.

On dit pourtant qu’au sol ils ont, depuis longtemps, secoué l’arbre ancien. Le goût du sang leur revient parfois à la bouche, qu’ils parlent ou qu’ils se taisent. Mais d’aimables taureaux leur ont enseigné l’art de l’esquive. Nul mammifère n’ignore en effet que la danseuse doit, fût-ce à coup de cornes, se trouver pour danser, délivrée du diamant.

Juin 1978 Thomas Stern

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Paris 1982

Court-métrage « Le théâtre de Salomé »

Mise en scène et réalisation Natalie Mei, Déa Villarreal, Bernard Henriot.

Découverte de l’Amérique – 1985

…Rien, absolument rien ne nous sépare. Derrière cette façade d’indifférence, peut-être suis-je un monstre de tendresse et elle un monstre de sensualité ? Ou l’inverse. Qui sait ? Ceci s’achèvera peut-être dans un autre monde, ou dans une vie antérieure, par une orgie ou un délicieux chaos sentimental. Mais pour l’instant nous sommes plutôt Tristan et Yseult, entre nous Dieu a placé une épée en signe de chasteté.

Etant partie dix heures avant, elle en sort déjà du côté de l’Islande. Ainsi, en ce moment même, l’espace géographique d’une nuit nous sépare. Bien d’autres nuits nous ont séparés, qui n’avaient rien de géographique. Cette dernière séparation nocturne par les fuseaux horaires, elle, heureusement, est poétique et rachète les autres. Cette nuit-là, fut la dernière, nous l’avons réussie. Jean.

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< span style="font-size: small;">Paris 1989 – galerie de Dona Levy

Portraits de papiers collés de… Arthur Rimbaud, Fernando Pessoa, Samuel Beckett, Delphine Seyrig, Van Gogh, Malévitch et… d’autres…

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Paris 1990-1991-1992

Les espaces intérieurs monochromes

Commandes de grand format, trois couleurs

Traversée de la mer rouge

L’être aimé dans le bleu

La maison en feu

…La vieille dame disait, le Rouge perdure, le Jaune évolue, le Vert disparaît. Assise sur la margelle d’un puits, coiffée d’un chapeau de paille, habillée d’une robe grise d’écolière, ô nolches, ô nolches, chantait-elle…

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Texte de Dona Levy, 14 mai 1992

L’âme animale aime le lin

La liane et le matin

Aime le lit et la taie

Le miel et le lait

Le malt et la mie

L’amante en a manie

 

Même l’amie et la lie

A l’Italie la Mei

Ni ment, n’imite

Ni mante ni natale

Latine

 

En mai

L’an mil le lien

A l’intime amant

Mâtiné malien-anamite

Il lit l’âme en ta main

Laminant, minant

Lame en main

Le malin, l’âne

Ta mine nie le mal

Tel le mien, tel le mien

Animé, la mâle

Entâme net la mâne

Natalie, ne te lie,

 

Anti-mite matinale

A la lente mite alitée

Aimant la laine

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Paris 1993

Autres portraits de papier et exercices de disparition, dans les blancs.

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Paris 2001-2003

Textes

… « une femme doit restaurer un inédit de Blanchot. Une peinture, un texte, des pierres précieuses incrustées dans la toile. Elle lave le tout. Le texte s’efface. La peinture disparaît. Le papier est devenu glacé, vierge…

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Reminiscences_web.jpgParis 2008-2009-2010

Le fil et la main.

Les tapis minuscules et autres fils de la pensée

Mes tableaux brodés sont tels de petits jardins clos dans lesquels, au fil des sentiments, au fil de la pensée, je brode à la main, point par point, du centre à la périphérie, de la périphérie au centre, les lignes et les courbes, les arabesques qui dessinent mes paysages mentaux, allusions à des lieux d’apparition, lieux de méditation active.

Comment faut-il faire advenir ce qui peut rester invisible ?

J’ai adopté le travail à la main, du fil et de l’aiguille, parce qu’il oblige à la lenteur, la patience, la réserve, le silence.

Recluse entre mes quatre murs, je scrute par la fenêtre le
s ouvertures de l’immeuble qui me fait face et suis les envolées de mouettes parisiennes entre le canal et la gare de l’Est…

Recluse entre les quatre murs de Jeanne que j’accompagne depuis quatre ans, en son très grand âge, jusqu’à son dernier sourire qu’elle m’a esquissé en mai…

Je choisis les couleurs des fils qui s’enrouleront en points les uns dans les autres pour former les dessins qui me sortiront de l’obscurité d’où l’on vient et feront découvrir les joies qui nous donnent vie.

Je recherche assidûment ce qui peut m’ouvrir à la réflexion, sans précipitation.

L’utilisation que je fais librement du fil et de l’aiguille, sans machine, rejoint sans doute chez moi un goût certain pour le paradoxe qui me semble nécessaire et vital en cette époque si agitée.