L’hebdo et le 8 mars :
Le 8 mars 1980, sept mille femmes manifestent en rouge à Paris sur le thème « Vive l’indépendance érotique et politique des femmes ! »
En mars 1981, c’est la préparation des « Assemblées des femmes contre la misogynie », le début d’une campagne vaste et prolongée, au cours de laquelle des milliers de femmes remplissent des « cahiers de remontrances » sur leur lieu de travail, auprès de leurs amies.
A partir de novembre 1981, l’hebdo répercute et amplifie la « campagne d’initiative populaire » lancée par le MLF pour que le 8 mars, Journée internationale des femmes, devienne en France fête nationale, jour férié, chômé, payé pour toutes, « de même qu’en 1947 un gouvernement de gauche avait honoré la lutte des travailleurs en reconnaissant le 1er mai comme leur journée de manifestations et de fête ».
L’hebdo participe au recueil des 50 000 signatures et à la mobilisation pour quatre journées de fêtes et de manifestations à Paris, du 5 au 8 mars 1982. Printemps précoce : le 8 mars est un lundi et les douze mille femmes, venues de toute la France et de nombreux pays, sont en grève. Elles manifestent habillées de vert, cortège tonique, chantant, dansant, survolé par des milliers de ballons, après des « Etats Généraux des femmes » à la Sorbonne et un concert au Cirque d’Hiver…
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Historique :
En 1910, Clara Zetkin, s’inspirant des socialistes américaines qui ont célébré un « Women’s day » l’année précédente, propose au deuxième Congrès international des femmes socialistes, à Copenhague, de créer une « Journée internationale des femmes ».
On a longtemps dit que la date du 8 mars avait été choisie pour célébrer une manifestation d’ouvrières violemment réprimée à New York, en 1857.
En 1908 et en 1909, des milliers d’entre elles auraient manifesté plus fortement encore en réclamant « du pain et des roses ». Une certitude : depuis la seconde moitié du XIXème siècle, des ouvrières, aux Etats-Unis et en Europe, manifestent en grand nombre pour leurs droits sociaux, et les débuts du XXème siècle voient s’intensifier l’action pour le droit de vote des femmes.
En 1911, des femmes manifestent en Europe – un 19 mars, date choisie en commémoration de la Révolution allemande de 1848 et de la Commune de Paris.
En 1914 et en 1915, elles se mobilisent contre la guerre.
A Pétrograd, le 8 mars 1917 (23 février selon le calendrier julien), les ouvrières sont nombreuses à réclamer « du pain et la paix », c’est le début de la Révolution russe, la ville se soulève et le tsar doit abdiquer. La tradition est créée.
Avant et après la Seconde Guerre mondiale, dans divers pays du monde, des femmes se rassemblent à cette date pour revendiquer l’égalité et s’insurger contre le colonialisme, le fascisme, le nazisme, l’impérialisme.
Les mouvements de libération réactivent cette journée dans les années 70 et lui donnent une nouvelle portée symbolique.
Désormais, chaque 8 mars, dans le monde, des femmes, indépendantes, se manifestent pour leurs droits sexuels, économiques, politiques, contre les violences et les inégalités. C’est aussi un moment privilégié pour le débat, l’information, l’action politique.
L’ONU suit et adopte en 1977 une résolution qui invite tous les Etats à l’officialiser, comme c’était déjà le cas dans les pays socialistes. La France le fait en 1982, au terme d’une longue campagne, d’un appel à la grève et de manifestations massives.
Dans l’histoire moderne, la Journée internationale des femmes a été marquée, entre mille événements, par la révolte des Iraniennes contre l’obligation du port du voile en 1979 – 50 000 femmes dans la rue à Téhéran tous les jours pendant une semaine ; l’appel du MLF français à la solidarité avec le mouvement naissant en URSS mobilisé pour la liberté des rédactrices du journal « Femmes et Russie » en 1980 ; les Etats généraux des femmes à la Sorbonne en 1989 ; la manifestation de 10 000 personnes à Paris contre les viols massifs et systématiques en ex-Yougoslavie en 1993 ; des manifestations pour la parité et la laïcité en France, contre la pauvreté et les discriminations au Québec, dans les années 2000 ; le lancement de la Charte des femmes pour l’humanité, au Brésil, en 2004…
Et aussi, par des manifestations au Bangladesh contre les agressions à l’acide, au Pakistan contre les « crimes d’honneur », en Turquie pour le respect des droits des femmes (63 manifestantes arrêtées en 2005), en Iran contre la répression des féministes (un millier de femmes violemment dispersées par la police en 2006), au Cameroun contre les mariages précoces et forcés…
Le 8 mars, un rendez-vous annuel avec l’Histoire.