Dossier Beauvoir du Nouvel Obs (contribution de Aude Lancelin, propos d’Antoinette Fouque, 3 janvier 2008)

Nouvel Observateur du 3 au 9 janvier 2008, dossier Simone de Beauvoir, article de Aude Lancelin

« Queers, libertines, stars du porno, féministes tradi… LA DEUXIEME VIE DU « DEUXIEME SEXE »

La génération MLF discute toujours son héritage. Les pétroleuses d’aujourd’hui découvrent et adorent sa radicalité. Beauvoir revival ?

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« On nous ressort aujourd’hui Beauvoir comme de temps à autre Joe Dassin ou Claude François, observe narquoise Antoinette Fouque qui n’a jamais fait mystère de l’indifférence hostile que lui a toujours inspirée Beauvoir. Les féministes l’ont choisie comme vache sacrée. Un peu comme les amazones de Kadhafi, elles l’entourent de leur vigilance… »

Lorsque la redoutée Antoinette fonde le MLF avec Monique Wittig après Mai 68, Beauvoir leur apparaît déjà inopérante, résolument datée « après-guerre ».

« Sa détestation de la maternité et son discours plein de morgue sur les lesbiennes, c’est tout ce que nous rejetions. Si être féministe c’est vouloir être « un homme comme un autre » comme le voulut en fait Beauvoir, alors non, je ne suis décidément pas féministe ! » Même la lecture des « Mémoires d’une jeune fille rangée » lui laisse un souvenir burlesque. « Tout ça, cette vision du couple libre notamment, me semblait totalement bidon. Au fond, Beauvoir, c’est une normalienne qui toute sa vie n’aura eu de cesse de repasser l’agrégation. Elle n’a jamais été une vraie militante féministe. Beauvoir, c’est la pensée libérale-libertine. Logique à cet égard qu’elle connaisse un regain d’intérêt. »

OCTOBRE 68, création du MLF par Antoinette Fouque, Monique Wittig et Josiane Chanel (Paris Match du 3 au 9 janvier 2008)

BRAVO AUX AUTEURS DE CE DOSSIER D’AVOIR ECRIT LA BONNE DATE DU CREATION DU MLF (OCTOBRE 68), CETTE DATE EST L’UN DES COMBATS TENANT LE PLUS A COEUR D’ANTOINETTE FOUQUE. (mais ils l’ont oubliée……………………………………………………………………… comme cofondatrice ! Gageons qu’il s’agit là d’une étourderie et rendons à César etc)

Paris-Match du 3 au 9 janvier 2008

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DOSSIER DE JEAN-PIERRE BOUYXOU ET PIERRE DELANNOY

OCTOBRE : CREATION DU M.L.F.

Fondé sur le modèle du Women’s Lib américain par la romancière et essayiste Monique Wittig, le M.L.F., le Mouvement de libération des femmes, fait couler beaucoup d’encre. Il faudra compter maintenant avec les féministes, qui veulent la fin du machisme. Les plus jusqu’au-boutistes ne lésinent pas : Valérie Solanas, qui prônait la castration des phallocrates dans son « Scum Manifesto », a tiré le 3 juin un coup de revolver sur Andy Warhol, icône, à ses yeux, du pouvoir mâle.

Cette année, tout a changé entre les hommes et les femmes. La pilule contraceptive, objet de mille controverses depuis plusieurs années (Antoine a fait scandale en 1966 en proposant dans ses « Elucubrations » de la mettre « en vente dans les Monoprix »), est enfin autorisée depuis le 28 décembre 1967. « Transmettre la vie doit être un acte lucide », a admis de Gaulle, en promulguant la loi de « prophylaxie anti-conceptionnelle » proposée par le député Lucien Neuwirth.

La réalité est moins rose. En province, même dans les villes importantes, certains médecins rechignent à prescrire ce cachet diabolique qui, assurément, va transformer toute épouse en bacchante. Et les pharmaciens, quand on leur présente une ordonnance, ont beau jeu d’expliquer qu’ils ne servent que les honnêtes femmes. Il faudra attendre 1969 pour que Marie-Madeleine Dienesch, la très catholique secrétaire d’Etat à l’Action sociale, accepte de signer les premiers décrets pour que la loi Neuwirth soit appliquée. Peu à peu, la pilule va pourtant entrer dans les moeurs et devenir un des facteurs les plus importants de l’émancipation féminine. Elle sera prise en 1970 par 5% des Françaises âgées de 20 à 44 ans, et par 37% en 1978. Elles sont aujourd’hui 60% à l’utiliser (plus de 80% entre 20 et 24 ans), d’autres préférant le stérilet (20%) ou le préservatif (11%). Avec la liberté sexuelle, c’est la liberté tout court que découvrent les jeunes filles. Des rapports nouveaux, fondés sur l’égalité et le partage, s’instaurent entre hommes et femmes. Il ne sera plus incongru pour un mari, un amant, de s’occuper de son enfant ou de prêter la main au ménage.

Colette Deblé par Jean-Luc Chalumeau

debl_cipm_affiche.JPGColette Deblé est née en 1944.  Peintre, elle vit et travaille à Paris. Elle expose de Houston (Texas) à Sanaa (Yemen). Depuis mars 1990, Colette Deblé dessine à partir
de diverses représentations de la femme dans l’histoire de l’art
afin de composer un essai plastique visuel constitué d’une infinité de lavis.

« Depuis vingt-cinq ans, Colette Deblé n’a pas cessé de penser visiblement et de créer des images où les « faces opposées des choses » pouvaient coexister. Aujourd’hui, son œuvre trouve un accomplissement dans la passionnante enquête qu’elle poursuit dans l’histoire de l’art, à la recherche des images de la femme.
Il s’agit, selon ses propres termes, d’une suite de lavis, dessins et peintures (plus de deux mille) dont l’ensemble constitue une sorte d’essai plastique sur la représentation
des femmes dans l’histoire de l’art. Les lavis saisissent une attitude, une posture, un simple geste d’une femme appartenant à une scène peinte, sculptée ou photographiée
provenant de n’importe quelle époque. Ce personnage féminin est en quelque sorte « prélevé » par l’artiste, et la représentation qu’elle en donne ignore le contexte tout en
conservant sa trace fantomatique. »

Le Magazine littéraire spécial Simone de Beauvoir (janvier 2008) – Interview d’Elisabeth Badinter citant Antoinette Fouque

Le Magazine littéraire, janvier 2008 ENTRETIEN AVEC ELISABETH BADINTER Propos recueillis par Perrine Simon-Nahum « Simone de Beauvoir est une héroïne, une conquérante »

(…) En revanche, nous avons notre propre bloc différentialiste avec Luce Irigaray, Antoinette Fouque, les plus radicales, mais aussi Françoise Héritier ou Sylviane Agacinski? Il est extraordinaire de penser qu’à cette époque ce sont Hélène Cixous et Luce Irigaray qui ont incarné le French Feminism en Amérique alors même qu’elles n’étaient pas entendues en France. Libération du 15 avril 1986 publie un article dans lequel Antoinette Fouque, le lendemain de la mort de Simone de Beauvoir, dénonce ses « positions universalistes, égalisatrices, assimilatrices, normalisatrices ». Elle ajoutait « cette mort n’est pas un événement. C’est une péripétie qui va peut-être accélérer l’entrée des femmes dans le XXIème siècle ». C’est dire la violence de ce discours qui célèbre les différences. (…)

+ l’édito

(…) C’est aujourd’hui au tour de Simone de Beauvoir de faire son come-back. Cent ans après sa naissance – le 9 janvier 1908 – un come-back d’outre-tombe ! A travers divers colloques, numéros spéciaux, rééditions, et essais biographiques – dont celui de Danièle Sallenave – cette commémoration sera abondamment célébrée. Beauvoir est sortie de son purgatoire pour devenir une figure prodigieusement présente et vivante. L’Histoire a donné tort à celles qui décrièrent le combat qu’elle mena pour les femmes, lui reprochant de les aliéner au modèle masculin. L’une des grandes prêtresses du MLF, Antoinette Fouque, eut ces mots terribles au lendemain de sa mort : « Cette mort n’est pas un événement. C’est une péripétie qui va peut-être accélérer l’entrée des femmes dans le XXIème siècle. » Jugement fort hâtif dont la virulence est à l’image des attaques subies par Beauvoir tout au long de sa vie. (…)

Françoise Gilot et Antoinette Fouque à La Jolla (Californie)

173x200_394633.jpgTexte recopié du catalogue des trente ans des Editions des femmes :
Au début des années 80, Antoinette Fouque passait une grande partie de l’année à La Jolla en Californie et c’est ainsi que nous nous sommes rencontrées. Sa maison était nichée tout contre le Pacifique et la mienne plus au nord en haut d’une falaise. Un dialogue s’établit et aussi une chaleureuse amitié qui s’enrichissait de la présence de Marie-Claude Grumbach et de mon mari Jonas Salk. C’est ainsi que peu à peu se dessina le projet d’une exposition d’un groupe de mes oeuvres à la Librairie-Galerie Des femmes, rue de Seine à Paris qui eut lieu au printemps 1986. L’exposition accompagnée d’un petit catalogue s’intitulait Anamorphoses et le vernissage qui réunit écrivains et peintres fut très animé.
F.G.