La mère du MLF
Peu de temps après les première réunions en 1968, Antoinette Fouque, qui suit les Séminaires de Jacques Lacan et démarre une analyse
avec le «maître », mène le groupe de réflexion « Psychanalyse et politique » au sein du mouvement. « L’inconscient prend une place énorme
dans l’engagement », estime-t’elle en soulignant que « chacune devait bien se connaître avant de s’engager ». Il s’agissait de « penser en femme d’action et d’agir en femme de pensée ».
C’est précisément cette articulation de l’action et de la pensée, de l’inconscient et de l’histoire qui a fait la spécificité du MLF.
Premier fait marquant dans l’histoire du mouvement : la dépénalisation de l’avortement en 1975. «À cette époque, nous avons compris que le droit des femmes posait des questions éthiques et que nous sortions de l’idée de révolution pour entrer dans la phase de démocratisation», raconte Antoinette Fouque. Loin d’être gagnée, la partie ne faisait que commencer.
« C’est quand les droits sont légaux que les luttes commencent », éclaire la militante qui veut dénoncer la maltraitance des femmes dans le monde.
Antoinette Fouque affirme qu’ « il y a deux sexes », titre de son premier recueil de référence.
Elle crée la féminologie, « un champ qui résulte de la question de la femme à l’intérieur du champ des sciences humaines ». Portant sur la condition féminine et la place des femmes dans notre société, la féminologie signe une rupture.
Dans son dernier ouvrage, Gravidanza-Féminologie II, Antoinette Fouque, qui rend par ailleurs hommage à sa grand-mère italienne – gravidanza signifiant grossesse – poursuit son questionnement sur ce qu’est une femme à travers la question du corps maternel, lieu primordial « d’altérité et d’accueil ».
À l’heure où la crise financière fait des ravages aux quatre coins du globe, Antoinette Fouque suggère « une alternative à la guerre et au profit pour une économie altruiste ». Dans la sphère politique où la représentation féminine fait encore cruellement défaut, la voix des femmes constituerait une chance de faire émerger « une philosophie de l’hospitalité, de l’accueil et de la générosité ».
Emmanuelle Barret