Atlantico : Alexandre del Valle interviewe Christian de Moliner sur La Croisade du mal-pensant (Pierre-Guillaume de Roux)

Atlantico : Alexandre del Valle interviewe Christian de Moliner sur La Croisade du mal-pensant (Pierre-Guillaume de Roux)

Alexandre del Valle s’est entretenu cette semaine avec l’essayiste Christian de Moliner pour faire le point sur les polémiques autour de l’islamogauchisme, du massacre antisémite de Sarah Halimi, resté impuni, des dérives néo-racialistes des indigénistes, de la mode croissante de l’islamiquement correct un peu partout en Occident sous prétexte de combattre l’islamophobie, ou de la banalisation du discours anti-blancs sous couvert de lutte contre la racisme ou de « réparations » post-coloniales.  

Ancien professeur en classe préparatoire, Christian de Moliner est un auteur prolifique, dont les recherches, essais et romans ont tous comme fil conducteur l’analyse de nos sociétés occidentales complexées et de plus en plus rongées de l’intérieur par le phénomène de la bien-pensance diversitaire dont le postulat philosophique est que l’Occidental devrait s’auto-détruire ou se déconstruire, comme l’a récemment déclaré Emmanuel Macron dans les médias américains, pour expier ses fautes éternelles. Celles-ci sont en effet imprescriptibles,  transgénérationnelles, et donc impardonnables. Les peuples d’Occident constitueraient en effet la civilisation bourreau par excellence coupable d’avoir asservi et « humilié' » toutes les autres, à commencer par les peuples musulmans ou/et issus des anciennes colonies africaines de la France. De Moliner vient de publier ainsi La croisade du mal pensant, un roman plus qu’en phase avec les événements comme l’affaire des deux professeurs de l’IEP de Grenoble dénoncés comme islamophobes par une affiche; les propos d’Audrey Pulvar « autorisant » les Blancs à assister à des réunions de racisés, mais à la condition qu’ils se taisent… ou encore les propos incroyables du Président Emmanuel Macron sur la nécessité de « déconstruire » notre histoire pour satisfaire les minorités ex-colonisées ou leurs descendants. Il raconte l’histoire d’un prof d’université proche de la retraite qui, un matin, se révolte parce qu’on a distribué un tract demandant la création d’un « espace sans Blancs » (safe space) au sein de l’Université où il travaille… Un phénomène en pleine explosion aux Etats-Unis qui est déjà en train de gagner l’Europe culpabilisée.

Alexandre del Valle :  Avant d’aborder le thème, connexe, de votre roman réaliste, j’aimerais avoir votre opinion concernant les propos d’Emmanuel Macron qui a déclaré, au cours d’un entretien diffusé par la chaîne américaine CBS le 18 avril dernier, des propos sidérant de la part d’un chef d’Etat – censé théoriquement défendre les intérêts et l’identité de son peuple – selon lesquels la France devrait «déconstruire sa propre histoire».

Christian de MOLINER : cette sortie est absolument stupéfiante de la part d’un chef d’État ! Que faudrait-il faire selon lui ? Réécrire l’Histoire de notre pays en ne cessant de demander pardon pour les prétendues horreurs que nous aurions commises ? M. Macron se place dans l’auto-flagellation que décris dans mes livres. La France n’a pas perpétré plus de crimes que ses voisins. Quand on fait les comptes pour les pays que nous avons colonisés, la balance est souvent proche de l’équilibre. Le Bénin était un État esclavagiste voire cannibale jusqu’à sa conquête par la France. L’Algérie qui nous fait tant de reproches a pratiqué l’esclavage de chrétiens jusqu’en 1830. Envisage-t-elle de demander pardon ? Non, bien sûr ! La conquête de l’Algérie a été brutale, mais les atrocités ont été équitablement réparties entre les deux camps comme l’ont été les exactions entre 1954 et 1962. Les horreurs ne sont jamais unilatérales. En outre, quoi que nous fassions, nous serions toujours accusés et les critiques deviendront de plus en violentes et ridicules, comme la sortie d’un ministre algérien qui prétend qu’avant la conquête française tous les Algériens savaient lire, mais que ce taux a chuté, car nous aurions massacré les alphabétisés (donc 100 % de la population !) Il n’y a aucun moyen de nous assurer l’indulgence de nos détracteurs, puisque pour eux nous sommes le mal absolu. En outre, derrière cette posture agressive à notre égard se cache l’espoir d’une indemnisation. Certains médias Algériens ont avancé une note (astronomique) que nous devrions régler. Tout est basé sur l’illusion que la prospérité de la France tient aux territoires qu’elle avait conquis, alors que des pays qui comme la Suisse n’ont jamais eu de colonies sont plus prospères et que nous ; c’est parce que nous étions riches que nous avons pu faire tant de conquêtes. De ce point de vue, je pense que M. Berlusconi – qui a indemnisé en 2008 la Libye pour la sanglante et courte colonisation de la Cyrénaïque et de la Tripolitaine – a rendu un très mauvais service à l’Occident.

Alexandre del Valle : Quelle est votre réaction à un autre scandale, encore plus grave, celui de la récente décision de la Cour de cassation, de ne pas juger et de considérer comme irresponsable le meurtrier barbare de Sarah Halimi, le franco-malien Kobili Traoré, qui a séquestré, frappé durant une heure, puis défenestré le sexagénaire française en hurlant « Allah Ouakbar » puis en la traitant de sale juive et en appuyant son crime – digne des pires massacres jihadistes – d’allusions aux passages du Coran appelant à tuer les juifs.

Christian de MOLINER : je ne peux que souligner, comme beaucoup d’autres avant moi, la contradiction de la jurisprudence : pour un accident de la route, fumer du haschich est un acte aggravant, avoir bu de l’alcool avant de tuer un chien n’amène aucune indulgence bien au contraire. Mais fumer du cannabis avant de jeter dans le vide une vieille dame juive exonère de toute poursuite le criminel ! On voit mal quels principes de droit sous-tendent la décision de la Cour de Cassation. Si commettre un crime ou un délit commis lors « d’une bouffée délirante » permet d’échapper au jugement, dans ce cas-là, la « folie » est provoquée par la consommation d’un produit illicite. Tant que le meurtrier est détenu en hôpital psychiatrique, il subit quand même une forme de sanction. Mais s’il venait à être rapidement libéré, l’injustice serait totale. 

Alexandre del Valle :  Dans un registre ubuesque finalement proche, quelle est votre analyse du phénomène des Black Lives Matter, que vous semblez bien connaître, sachant que la demi-douzaine de « Blancs » américains opposés aux manif violentes des BLM qui ont été tué par ces derniers n’ont jamais fait la une des médias US et même occidentaux ?

Christian de MOLINER : qu’on sanctionne un policier qui dépasse les bornes ou pire assassine de sang-froid un suspect lors d’une interpellation est normal ; les forces de l’ordre ne doivent bénéficier d’aucune impunité s’ils n’appliquent pas les consignes réglementaires. Mais à mes yeux Black Lives Matter va beaucoup trop loin. Ce mouvement a déclenché une violence que par idéologie on n’a pas voulu réprimer alors qu’elle était illégitime. Des conseillers municipaux de Seattle ont été jusqu’à prétendre qu’il n’y avait pas lieu de poursuivre un Noir s’il s’emparait d’un bien dont il était dépourvu. C’est évidemment la porte ouverte à tous les excès, à la destruction de la propriété privée et au retour à la loi du plus fort. Je suis également effrayé par le nouveau maccarthysme provoqué par ce mouvement. Il faut le dire franchement : les États-Unis sont en train de devenir un pays fasciste, un état où il est interdit d’être conservateur, où la moitié de la population est privée d’une partie de ses droits ! Des professeurs d’université sont contraints à la démission, pour avoir fait des remarques de bon sens, des personnes perdent leur travail pour avoir exprimé une opinion considérée comme « dissidente » (trop à droite !) sur les réseaux sociaux.

Alexandre del Valle: Justement, à propos des réseaux sociaux, comment analysez-vous le bannissement de l’ex-président américain Donald Trump des réseaux sociaux, après avoir été diabolisé et ostracisé par l’ensemble de l’Establishment américain et occidental?

Christian de Moliner: Le bannissement de Donald Trump de Twitter est, quoiqu’on dise, un déni grave de démocratie. Des entreprises privées n’ont pas à décider qui a le droit de s’exprimer ou pas, ce rôle est dévolu à la justice d’un pays et uniquement à celle-ci. Que peu de conseillers de Donald Trump aient retrouvé un travail du fait des menaces de boycott contre les entreprises qui se risqueraient à les embaucher est d’ailleurs plus que préoccupant. Les listes de proscription sont toujours malsaines et sont surtout le signe d’une démocratie malade et moribonde. La cancel culture, le mouvement woke sont, en dépit des intentions de leurs promoteurs, par essence totalitaires et antidémocratiques. De quel droit peut-on décider d’effacer du débat public une opinion qui déplaît ? Le summum du ridicule a été atteint quand d’obscurs sycophantes ont décidé que J.K Rolling n’était plus l’auteur d’Harry Potter parce qu’elle s’était demandé comment appeler des femmes ayant des règles ! Elle aurait donc commis un tel crime que les livres qu’elle avait écrits devaient lui être retirés. Du délire à l’état pur, que personne ou presque n’a souligné. 

Alexandre del Valle: Avez-vous écrit votre ouvrage très récemment afin de coller à l’actualité récente des débats houleux autour de l’indigénisme, des réunions non-mixtes antiracistes interdites aux Blancs, des BLM, de l’islamo-gauchisme ou encore du projet de financement de la grande mosquée de Strasbourg du mouvement islamiste turc Milli Görüs par la municipalité écolo (EEVL) ?

Christian de MOLINER : pas du tout. J’ai conçu l’intrigue en février 2020 et j’ai affiné le style pendant plusieurs mois. Il était prêt en mai 2020. Mon éditeur, le regretté Pierre-Guillaume de Roux, ayant rencontré quelques difficultés techniques, mon roman n’est sorti qu’en février 2021. Je l’avais écrit en me basant sur quelques incidents qui s’étaient déjà déroulés, sur le désir de safe space de nombre de « racisés ». Quand en juin 2020, j’ai donné à lire mon roman à un ami, celui-ci a traité d’invraisemblable, voire de caricatural, le sujet paraissant alors tellement loin selon lui de la réalité. Or nous avons vu avec l’explosion du mouvement Black Lives Matter, l’affaire de Grenoble et les propos de Mme Pulvar combien mon sujet d’écriture était en fait fort actuel.

Alexandre del Valle : le héros de votre roman, pas du tout en phase avec le politiquement correct, Samuel Meiersohn, est-il en fait votre double littéraire ?

Christian de MOLINER : il partage avec moi des goûts communs, notamment celui de l’Histoire et des croisades (bien que j’ai été professeur de mathématiques en CPGE). Nous avons le même auteur préféré, le brillant René Grousset et son excellente « histoire des croisades et du royaume franc de Jérusalem ». Mais ces emprunts sont limités. L’existence de Samuel Meiersohn diverge nettement de la mienne. En parallèle de la lutte contre les racialistes, j’ai voulu dresser le portrait d’un homme désabusé, proche de la retraite qui s’interroge sur sa vie et ne lui trouve aucun sens.

Alexandre del Valle : Samuel Meiersohn a des mots très forts pour (dis)qualifier cette demande de safe space sans blancs ; il la compare aux exigences des nazis qui interdisaient certaines zones aux Juifs ainsi qu’à l’apartheid de l’Afrique du Sud. N’est-ce pas un peu excessif ? Validez-vous l’idée de comparer au fascisme et même au nazisme le politiquement correct radical des « néo-racisés » et autres minorités tyranniques?

Christian de MOLINER : je ne peux que paraphraser le tract que mon personnage principal distribue devant sa faculté : Il y a soixante-quatorze ans, un état raciste a capitulé sans conditions. Un procès s’est tenu pour purger le monde de cette horreur, pour que plus jamais on ne sépare les hommes et les femmes suivant leur origine. Cette leçon est désormais perdue. Des militants veulent créer une zone d’où seraient exclus ceux qui n’auraient pas la bonne couleur de peau au nom d’un évanescent privilège blanc qu’il faudrait combattre. Dites non à ce nouveau racisme. On a beau se cacher derrière des grands mots d’égalité, de victimisation, écarter quelqu’un parce qu’il est Blanc est un acte raciste et affirmer qu’une telle exclusion se justifie parce que les Blancs seraient des privilégiés ou, pire, parce qu’ils seraient d’abominables racistes même s’ils pensent ne pas l’être est encore plus raciste, car on attribue à une « race » un défaut que tous ses membres auraient systématiquement. Ce dénigrement va très loin : en Australie ou aux États-Unis, des écoles ont demandé à des enfants blancs de s’excuser pour ce qu’aurait fait leur ethnie aux Noirs, de la même façon qu’en Union Soviétique ou des descendants de « bourgeois » devaient s’excuser pour leurs origines non prolétaires. Or personne ou presque ne proteste contre ces dérives dans les médias.

Alexandre del Valle : quelle est votre interprétation de la haine racialiste et des nouveaux antiracistes. Pourquoi cette banalisation de la haine anti-occidentale et cette mode de dénonciation de l’Homme blanc ?

Christian de MOLINER : la haine antiblanc existe depuis longtemps, au moins aux États-Unis. Elle est une conséquence des émeutes raciales des années 1968 et de la revendication exprimée dans les années 1970 d’un état noir séparé. On retrouve des traces de cette haine dans des livres de science-fiction comme « Tous à Zanzibar » de John Brunner. Des auteurs ont été jusqu’à imaginer une enclave noire à Détroit, prospère grâce à l’automobile, et qui n’accepterait que les personnes ayant un pourcentage suffisant de sang noir, pourcentage qui ne cesse d’augmenter au fil du temps. Cette entité séparée aurait été dirigée caricaturalement par « le grand noir ». On voit donc que le mouvement actuel a des racines idéologiques lointaines ; or contrairement aux positions défendues par Martin Luther King ou par Nelson Mandela, le but de BLM n’est pas vraiment une réconciliation des races, mais la vengeance et l’abaissement des Blancs. On se rapproche presque du slogan « un colon, une balle » des extrémistes zoulous. Les élucubrations anti-blancs existent donc depuis longtemps, mais ce qui a changé depuis les années 1960 est le regard porté sur elles par la grande majorité des médias. Ceux-ci ont pris fait et cause pour BLM et appuient la moindre de leurs revendications mêmes les plus ridicules, sans recul, sans jugement. Ils jugent inadmissibles les critiques même de bon sens contre BLM tandis que les journalistes Blancs s’auto-incriminent et battent leur coulpe. On retrouve l’attitude des Soviétiques pendant les grandes purges qui admettaient sans sourciller les pires horreurs pour ne pas discréditer leur parti. Les médias ont transformé des idées autrefois marginales, racistes comme il en existe depuis le Néolithique dans toutes les communautés humaines, en des vérités incontournables. La haine anti-blanc ne prospère que parce que des journalistes (blancs) lui font un large écho. S’auto-flageller, se repentir pour ce qu’on est une tendance lourde chez l’humain. Peut-être est-ce une façon d’éloigner de soi le mauvais sort ?

Alexandre del Valle : La dédicace de votre livre à votre petite fille fait réfléchir…: « À Louise Dumont-de-Moliner, ma petite-fille, en espérant qu’elle vivra toute son existence dans une France ouverte, réellement démocratique où toutes les opinions, quelles qu’elles soient, de droite comme de gauche, seront autorisées.

Christian de MOLINER : oui j’ai voulu souligner le danger qui pèse sur notre société : j’ai vraiment peur qu’elle ne devienne hémiplégique, qu’être conservateur ne soit plus autorisé à l’avenir, qu’une sorte de ministère de la vérité ne se mette en place. On a déjà un avant-goût avec les fausses nouvelles traquées par les décodeurs partisans des médias. On décrète que certaines informations sont intrinsèquement fausses, on sermonne ceux qui leur accordent du crédit. On déclare qu’il existe une réalité intangible. Ainsi, on s’est moqué pendant des années des théories liées au Grand Remplacement, avant de concéder que la France s’était créolisée et que ceux qui parlaient de grand Remplacement avaient raison. De même les grands esprits de gauche nient l’insécurité et assurent, encore ces derniers mois par la bouche du Garde des sceaux, qu’elle n’était qu’un fantasme. Le résultat de ces dénis de réalité est une perte de confiance dans les médias, quels qu’ils soient. Si le Front National est aux portes du pouvoir, c’est en grande partie à cause de tous ces mensonges.

Alexandre del Valle : Finissons avec votre passionnant roman. votre héros obtient-il gain de cause ?

Christian de MOLINER : je laisse au lecteur le soin de le découvrir. En tout cas, il se bat jusqu’au bout, sans saisir les multiples perches qu’on lui tend. Le président de l’Université pourtant son ami et qui en privé défend les mêmes positions que lui, ne le soutiendra pas publiquement. Il cherchera juste à lui éviter une sanction trop sévère. Au vu des différentes affaires qui ont éclaté (Grenoble, Paty,…), c’est malheureusement la réaction de l’administration : s’écraser devant les exigences d’une minorité revendicatrice.

« La croisade du mal-pensant » de Christian de MOLINER, 196 pages, paru aux éditions Pierre-Guillaume de Roux 14 €

Peut être commandé sur les sites d’Amazon et de la Fnac et dans les librairies par l’intermédiaire de Cyberscribe.

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