Boulevard Voltaire aime aussi « L’agonie de Gutenberg », merci à Christian de Moliner

Livre / L’Agonie de Gutenberg, de François Coupry

Le livre de François Coupry, L’Agonie de Gutenberg, est singulier. Il rassemble 150 petits textes de 3.000 signes chacun, qui sont d’abord parus sur son blog au rythme d’une ou deux par semaine, de 2013 à 2017.

François Coupry est un féroce contempteur de notre époque où les multiples écrans séparent les humains et les murent dans la solitude, où la civilisation du livre (Gutenberg) s’estompe peu à peu et où un nouveau monde balbutie. Avec ses petites saynètes toujours renouvelées, qui sont tantôt poétiques, tantôt philosophiques, tantôt des contes à la Jean de la Fontaine, l’auteur dresse un portrait amusé des tares de notre société. Il met souvent en scène son double, M. Piano, un professeur d’université excentrique dont il se moque allègrement et gentiment en mettant en avant ses défauts et ses inévitables compromissions. Mais il adopte également, d’une manière récurrente, le point de vue d’une souris ou d’une balle de revolver. Avec M. Coupry, tout est possible !

Ces chroniques excentriques tombent juste ou, sinon, du moins contiennent un fond de vérité. Par exemple, un de ses articles explique comment se débarrasser de Daech : ne plus jamais parler des islamistes ! Ceux-ci finiront par ne plus croire en leur existence réelle et rentreront chez eux la tête basse ! C’est, bien entendu, irréaliste et absurde, mais le califat ne prospère-t-il pas parce qu’il est devenu l’ennemi public numéro 1 et que tous les médias le dénoncent ?

Autre remarque qui tombe juste. À l’époque de Franz Kafka, les auteurs à succès écrivaient des histoires d’amour. Kafka n’a pas suivi leur exemple. Il a écrit des contes bizarres qui sont encore connus de nos jours alors que les écrivains classiques les plus célèbres parmi ses contemporains sont, pour la plupart, tombés dans l’oubli. Les canons qui décident de la beauté et de l’intérêt d’une œuvre changent suivant les époques mais, surtout, plus un livre est original, plus il a de chance de s’imposer et de charmer les différentes générations qui se succèdent.

Si vous aimez les histoires carrées et logiques, les situations plutôt conventionnelles, n’ouvrez pas le livre de M. Coupry. Mais si vous avez un esprit ouvert et curieux, si vous appréciez d’être bousculé hors de vos certitudes, si vous cherchez une logique différente, si vous êtes fan de Franz Kafka, n’hésitez pas à vous procurer ce gros livre car, alors, vous êtes sûr de passer un bon moment !

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