Cendrine Genty reçoit dans « Le jour où… » Marianne Vourch, Productrice de l’émission « Histoires de Musique » sur France Musique, Créatrice des Concerts du Mercredi, Auteure de plusieurs livre-CD à l’attention de la jeunesse, Conférencière musicale et Auteure de la série « Le journal intime de… « initiée par Bayard Presse. Réécoutez ici
Ces jolis petits livres font partie d’une série publiée de podcasts de France Musique, écrit par Marianne Vourch, et lus par Denis Podalydès, Nicolas Vaude, Clément Hervieu-Léger.
Ils font cent pages et sont richement illustrés. ils content la vie d’un musicien, écrite à la première personne, comme un journal. C’est un peu léger sur les événements de l’existence, mais donne une teinture rapide en éclairant une œuvre.
Très agréable à lire et orne une bibliothèque dès l’enfance.
Marianne Vourch, Le journal intime de Jean-Sébastien Bach
Marianne Vourch, Le journal intime de Wolfgang Amadeus Mozart
Marianne Vourch, Le journal intime de Frédéric Chopin
Les journaux intimes de Mozart, Chopin et Bach : Un voyage littéraire et musical expérimental
Une expérience littéraire unique
Dans « Cher Cahier, » Philippe Lejeune nous rappelle que la rédaction du journal intime est une pratique culturelle moderne. En lançant un appel dans Le Magazine Littéraire en avril 1988, Philippe Lejeune, spécialiste de la littérature personnelle, a eu la chance de recevoir les témoignages de quarante-sept diaristes – c’est un coup de sonde dans un univers d’écriture méconnu -, quarante-sept personnes qui racontent l’histoire de leur journal, décrivent leurs pratiques, expliquent ce qu’elles en attendent. Marianne Vourch, pourrait être la quarante huitième en élevant cette pratique à un nouveau niveau en imaginant les journaux intimes de trois géants de la musique: Bach, Mozart, et Chopin. À travers son coffret de trois tomes, elle offre une expérience littéraire unique, un voyage musical aux couleurs et illustrations originales, nous dévoilant les secrets de vie et de création de ces compositeurs dans la fiction.
Dialogisme de l’écriture diariste: Voix littéraires en écho
Dans le foisonnement dialogique de l’écriture diariste comme Marianne Vourch nous en offre trois versions pour trois musiciens de renom, des références littéraires se devinent, mettant en lumière le paradoxe de l’immédiateté et du détachement analytique. Henri-Frédéric Amiel, dans son journal intime, exhorte à la réflexion en s’adressant à lui-même à la deuxième personne, soulignant la dualité intrinsèque de cet acte introspectif: “Disséquer son cœur, comme tu le fais, c’est tuer sa vie.” Cette forme de dialogue interne, tout en révélant la vanité du journal intime, dévoile la complexité du rapport du diariste à son propre être.
À la manière de Michel Leiris, le journal intime – tel qu’en ceux de Marianne Vourch – trouve son lyrisme dans cette objectivation de soi. Pour Leiris, la catharsis opère non seulement par la formulation, mais à travers le chant, le « point de tangence du subjectif et de l’objectif. » Cette idée du journal comme chant, évoquée dans une entrée de son propre journal le 8 janvier 1936, suggère que la véritable œuvre du journal intime réside dans cette fusion poétique du moi et de l’extérieur, ce point de convergence où la subjectivité rencontre l’objectivité, faisant ainsi du journal un espace vibrant de lyrisme et de réflexion.
Jean-Sébastien Bach: une vie comme un cour d’eau …
Dans « Le Journal Intime de Jean-Sébastien Bach, » Marianne Vourch nous transporte au bord de la rivière, Bach signifie d’ailleurs rivière en allemand… Jean-Sébastien aime se souvenir de son ancêtre qui jouait du cistre au bord de la rivière. C’est à cet endroit même que la musique des flots se transforme en notes et guide la plume de Bach vers la grâce de Dieu. À la croisée de l’intimité et de la création, cette fiction explore la source d’inspiration du compositeur, révélant un dialogue entre sa vie, ses peines, et les éléments naturels qui l’entourent.
Wolfgang Amadeus Mozart: Les notes qui dansent dans le vent
« Le Journal Intime de Wolfgang Amadeus Mozart » nous plonge dans les années de formation du jeune prodige. Marianne Vourch donne vie à l’enfant Mozart, transformant en or tout ce qu’il touche. À travers sa plume enchantée, elle nous dévoile ses impatiences, désespoirs, rêves et ambitions. Cette fiction explore le quotidien du compositeur, un récit captivant qui met en lumière les coulisses de sa génialité musicale.
Frédéric Chopin: Les mélodies de l’enfance et de l’exil
« Le Journal Intime de Frédéric Chopin » nous emmène dans l’intimité du jeune virtuose. Marianne Vourch y dévoile la tendresse des mélodies et la puissance des rythmes qui ont marqué son enfance en Pologne. À travers les pages de ce journal imaginaire, Chopin nous livre ses sentiments, son langage musical, devenu plus tard le refuge de l’exilé. Une fiction qui éclaire la vie intérieure d’un compositeur souvent énigmatique.
La plume de Marianne Vourch: Entre fiction et réalité
Marianne Vourch, productrice sur France Musique, a initié la collection de podcasts « Le Journal Intime de… ». Sa plume imaginative donne vie à ces journaux, offrant un regard original sur la vie intérieure de ces compositeurs emblématiques. Sa collection, totalisant près d’1,5 million de téléchargements, témoigne de l’attrait du public pour cette fusion entre fiction musicale et réalité historique.
Journaux imaginaires : un miroir littéraire et musical attendu comme substitut de l’existence et écho de l’incréé
Le journal intime, souvent perçu comme un substitut de l’existence, trouve son incarnation dans les paroles d’Henri-Frédéric Amiel: “Ce journal est un exutoire; ma virilité s’évapore en sueur d’encre” (13 juillet 1860). Marianne Vourch, en créant les journaux intimes de Bach, Mozart et Chopin, offre une perspective unique sur cette tension entre l’acte d’écrire et l’expérience de vivre. Les narrations de Marianne Vourch, loin d’être une simple compensation littéraire, deviennent une exploration poétique des identités musicales et personnelles.
Le journal comme négatif du livre
À l’instar de Michel Leiris, qui voit le journal comme un substitut de l’œuvre littéraire irréalisable, les journaux imaginaires de Marianne Vourch se profilent en tant que négatifs du livre. Le journal, pour Leiris, émerge souvent dans les creux de la créativité littéraire, mais chez Marianne Vourch, il devient un formidable inventeur de la personne littéraire de Bach, Mozart et Chopin. Là où le journal devient un dépôt des tentatives avortées chez Henri-Frédéric Amiel, les écrits de Marianne Vourch révèlent une création foisonnante, capturant les nuances et les aspirations de ces compositeurs.
Célébration de l’inutile et de la tautologie
Bien que certains diaristes, tels qu’Amiel et Gide, questionnent l’utilité du journal, cette inutilité, cette gratuité, devient le corollaire nécessaire du genre diariste. Chez Marianne Vourch, chaque ligne de ses journaux intimes rouvre le texte à son point de surgissement, où la musicalité des mots s’entremêle avec la réflexion profonde des personnages. En incarnant la poétique du journal intime, Marianne Vourch crée un miroir littéraire et musical, explorant le potentiel infini de l’expression personnelle et artistique à travers des journaux imaginaires de compositeurs éternels.
En revisitant les conventions du journal intime à travers l’objectif fictionnel, Marianne Vourch nous invite à explorer les tréfonds de l’âme musicale de Bach, Mozart et Chopin. Ces journaux imaginaires, entre réalité historique et créativité littéraire, élargissent notre compréhension de ces génies musicaux. Le coffret « Le Journal Intime de… » devient ainsi une porte d’entrée captivante vers un univers où la musique et la fiction s’entrelacent.
À travers la plume inventive de Marianne Vourch, les journaux intimes de Bach, Mozart et Chopin prennent vie, tissant une toile complexe entre l’expression littéraire et la création musicale. Dans cette exploration des identités, Marianne Vourch transcende la dichotomie entre l’acte d’écrire et celui de vivre, offrant une symphonie littéraire et musicale où la personnalité de ces compositeurs s’épanouit.
Ces récits loin d’être de simples substituts de l’existence, deviennent des pièces maîtresses d’une création littéraire et musicale entrelacée. À l’image du journal en tant que négatif du livre, ces journaux intimes sont des inventaires fascinants des vies intérieures de Bach, Mozart et Chopin. L’inutile et la tautologie, interrogés par certains diaristes, se muent chez Marianne Vourch en une célébration de la richesse poétique, de l’expression personnelle et artistique.
En miroir des dialogues littéraires explorant le journal intime, Marianne Vourch insuffle une nouvelle vie à ce genre, le transformant : littérature et musique se reflètent mutuellement. À travers ses créations, elle élargit la portée du journal intime en lui conférant une dimension musicale, révélant ainsi une harmonie singulière entre les mots et les notes. Les journaux intimes que nous propose Marianne Vourch sont sans nul doute un hymne à l’intersection de la création littéraire et musicale, ouvrant une porte sur un univers où les compositeurs éclairent, de manière poignante dans des récits de vie, l’essence même de l’âme créatrice à la fois consciente et fabuleusement irrationnelle.
Photo de couverture @Radio France / Christophe Abramowitz
Souvenirs souvenirs – 20 chansons françaises au piano un « objet » musical de Abdel Rahman El Bacha
Quel livre enchanteur ! Son format « 33 tours » est à ravir. En outre, il relève du propos inattendu d’ouvrir une porte sur la musique par le piano ; manière de transmettre les classiques de la chanson française à la faveur d’œuvres populaires qui ont résisté au temps. Abdel Rahman El Bacha invite à la (re)découverte des classiques oubliés. La mer de Charles Trenet… Trois petites notes de musique interprétées par Yves Montand… Mon amant de Saint-Jean immortalisé par Lucienne Delyle… La complainte de la butte dont Mouloudji a fait un standard… Frehel et sa Java bleue mise en musique par Vincent Scotto… et tant d’autres, parmi lesquels les trois « B » : Barbara, Brassens, Brel ; mais aussi Aznavour, Piaf, Duteil, tous sont dans… Souvenirs Souvenirs… Vingt doubles pages, chacune sujette à une chanson mythique avec son texte intégral et un extrait de la partition piano à écouter sur le CD en support. Au-delà d’un formidable cadeau (à faire ou se faire) Souvenirs Souvenirs est un merveilleux objet de collection qui prend naturellement place sur une table de salon ou la tablette d’un piano… éventuellement dans une bibliothèque, aussi, tout est possible quand c’est beau…
Souvenirs souvenirs – 20 chansons françaises au piano, un livre musical d’Abdel Rahman El Bacha aux éditions Villanelle, 46 pages couleur au format 33 tours, incluant 20 partitions et un CD – 24 €
Voilà un cadeau qui va contenter à la fois les amoureux de la chanson française, les pianistes en herbe, et les fans de karaoké : un livre disque de vingt chansons, avec paroles et partitions, dans lequel Abdel Raman El Bacha donne à entendre Barbara, Trenet, Brel, Brassens, avec la voix de son piano. Abdel Rahman El Bacha est un immense pianiste classique, qui a grandi à Beyrouth : là-bas, c’est grâce à la radio qu’il a connu ces chansons françaises entrées dans son coeur. De Piaf à Brel, en passant par Azanavour, Barbara et Montand, Abdel Rahman El Bacha sublime ces chansons avec ses nouveaux arrangements, dont certaines sonnent vraiment classique, à l’image de cette tarentelle d’Yves Duteil, dans la lignée des autres célèbres tarentelles de Rossini ou Chopin.
« Souvenirs, souvenirs » : 20 chansons françaises au piano, aux éditions Villanelle. 24€.
Mozart voit publier son Journal intime aux Éditions Villanelle, en fait écrit par Marianne Vourch, qui en avait produit une série de sept épisodes sur France Musique au cours de l’année 2023. L’autrice est un personnage intournable de la scène classique française et elle le prouve une fois de plus en s’adressant magnifiquement à nos enfants. Par Margaux Catalayoud.
À l’antenne, le texte est lu par le comédien Nicolas Vaude d’une voix qui ravit autant les grands que les plus petits.
Une lecture naïve
La lecture par un adulte de ce supposé journal intime peut être naïve, elle s’adresse à un jeune enfant précédé d’une personne un peu plus savante. En effet, même si la plume figure celle d’un candide, certains mots viendront pimenter le langage d’un enfant d’aujourd’hui.
Le lexique du jeune prodige engage à définir ce que sont les Dolomites, l’émail ou encore l’étourneau. Heureusement, des illustrations bienvenues ponctuent le journal intime de Mozart qui pourrait aussi bien être un carnet de voyage à la première personne !
Une leçon de vie
Cette autobiographie à l’apparence un peu anodine ne relate pas simplement la naissance et la gloire en devenir de l’enfant miraculeux à l’oreille absolue. Les différents voyages de son adolescence menés dans les Cours prestigieuses de Paris, de Vienne ou encore de Londres, sont autant un apprentissage géo-social qu’un continuum éducatif purement musical.
Wolfgang Amadeus se montre, se gonfle de l’admiration qu’on lui voue mais s’épuise aussi. Aux difficultés qui marqueront sa vie tels que le deuil, le manque d’argent, les incompréhensions, s’ajoute la santé fragile que le film de Milos Forman avait bien représenté en 1984. Plus encore, le réalisateur avait mis l’accent sur le caractère maniaque du compositeur, ce qui ne manque pas d’apparaître çà et là dans le récit de Marine Vourch.
La leçon de vie qu’il nous faut surtout tirer réside dans le tournant impulsé par la censure du prince-archevêque Colloredo qui, indirectement, le chasse de Salzbourg – sa ville natale – : davantage d’espaces sont nécessaires aux mouvements de sa créativité grandiose et Colloredo n’est pas à la hauteur de cette exigence artistique, cantonné qu’il est à son goût incapable de nouveauté.
La beauté est simple
Malgré la facilité de cette courte biographie, la grandeur de la musique de Mozart ne passe pas inaperçue. La beauté est simple et il ne fait aucun doute que Mozart vivait comme il composait, l’autrice fait dire à l’enfant : « […] Comme un petit oiseau vient picorer des graines pour les mettre dans son nid, je picorais des sons pour garnir le nid de mes futures compositions. »
Marianne Vourch n’hésite pas à lui donner la densité qui saura piquer la curiosité d’un enfant et enchanter tout lecteur sensible pour qui ces mots déclenchent une symphonie : « Le silence faisait résonner le son de la clarinette dans mes songes. J’entendais en moi sa couleur joyeuse de nostalgie. » Pourvu que chacun tende vers cette synesthésie !
En résumé, il n’y a pas meilleure éducation musicale : l’enfant s’amuse, le parent révise et, ensemble, ils jouent « à mettre le ton comme quand le Monsieur de la radio » interprète le texte de Marianne Vourch, qui nous transmet sa passion pour la musique qui élève l’âme.
Cet ouvrage s’inscrit dans un coffret du journal intime de Bach, Mozart, Chopin.