« Jasmine Catou détective » dans Lettres capitales

Jasmine Catou – un Watson félin en plein cœur de Paris

Jasmine Catou, détective est le premier opus d’une série écrite par Christian de Moliner et dédiée à Jasmine, un chat pas comme les autres. L’auteur zigzague avec aisance entre les genres littéraires du polar et du récit fantastique, en mettant en scène cinq événements inattendus de la vie du chat Jasmine Catou et d’Agathe, sa maîtresse, attachée de presse parisienne, habitant dans le quartier germanopratin.

Le charme particulier de ce récit se nourrit du rôle invraisemblable d’enquêtrice douée d’une intelligence et d’une habilité hors du commun de la part de Jasmine qui prend ainsi, à l’aide de la personnification, une place prépondérante dans la construction narrative de ces histoires. Dans une interview que l’auteur nous avait accordée en 20191, il avait dévoilé son intention « de choisir un détective animal, qui pense et qui écrit l’histoire en utilisant « je », tout en restant un félin ». Le lecteur est ainsi prévenu quant au code déictique particulier et captivant permettant à Jasmine d’occuper la première place de l’action, à la fois de narratrice et de personnage principal, et de mettre ainsi en valeur ses capacités intuitives afin de résoudre ces intrigues et de les raconter avec charme. « Je tiens les mêmes raisonnements qu’un humain », précise-t-elle à l’intention des lecteurs au cas où ils en douteraient encore…

Avec assiduité et souci de précision, Jasmine assiste sa maîtresse en l’aidant à dénouer des énigmes invraisemblables, comme, par exemple, des morts inexpliquées, la présence de fantômes dans sa maison ou l’intervention salutaire d’un marabout dans ses relations amoureuses, le décryptage d’un rébus reçu en guise d’invitation au voyage, le mystère du destinataire d’un bouquet de fleurs ou à retrouver des objets perdus dans sa demeure. À travers ces situations mystérieuses vécues par les protagonistes dans chacune de ces histoires, son empathie prend la forme d’une complicité qui va s’avérer encore plus étroite lorsqu’il s’agira de comprendre les états d’âme d’Agathe et deviner ses sentiments, ses peurs et même ses lubies. En fine psychologue, Jasmine sait quand et comment intervenir pour apaiser les angoisses de sa maîtresse ou lui éviter de tomber dans un piège réel et très souvent imaginaire. Elle mérite ainsi le titre de vrai ange gardien félin et arrive même à convaincre de cela Armelle, la sœur de cœur de sa maîtresse.

Pour l’illustrer ces qualités, prenons le cas de la première de ces cinq énigmes décrites par Christian de Moliner, et intitulée « L’éditeur ». Agathe reçoit la visite de plusieurs personnalités du monde de l’édition, un écrivain, un auteur, deux journalistes et un éditeur célèbre. À la fin du déjeuner qu’elle donne en l’honneur de ces gens, et plus précisément au moment du café, l’éditeur meurt subitement après avoir bu la première goutte de ce breuvage servi par la maîtresse de la maison. Les urgences arrivent sur place et le médecin conclut à une mort suspecte par empoisonnement. Dès lors, tous les convives se cherchent un alibi en attendant l’arrivée de la police. La mission de Jasmine Catou est bien entendu de trouver le coupable et sauver Agathe, la maîtresse de la maison, qui, en tant que charmante hôtesse, serait la principale coupable de la mort de son invité. Avec les moyens dont elle dispose (rappelons qu’elle n’a pas le don de la parole) elle dirige les regards vers les objets utilisés pendant le déjeuner pour renvoyer les enquêteurs arrivés sur place vers la source de cet empoisonnement. Arrivera-t-elle à se faire comprendre ? Forcément oui, et brillamment en plus, comme elle le fera à chaque aventure racontée dans ce livre.

Dans la vraie vie, nous avait dit Christian de Moliner dans la même interview, il s’agit de son attachée de presse Guilaine Depis dont la personnalité l’avait inspiré librement, même si, rajoute-t-il avec précaution, il laisse une place prépondérante à son imagination. Nous le savons bien, la littérature joue souvent des tours à la réalité en bénéficiant amplement de sa liberté fictionnelle. C’est aussi le cas de ce recueil qui réussit à imprégner le portrait vivant de ce chat intelligent et attachant à qui il attribue avec tendresse le nom de Watson, l’assistant du grand détective Sherlock Holmes.

Désormais, tout le monde sait que sous l’attitude somnolente sous laquelle les chats se présentent souvent devant nous, ces animaux intelligents et agiles que Jean de la Fontaine décrivit dans son temps, en sauvant ainsi de la catastrophe leur image datant de l’époque du Moyen-Âge, possèdent des qualités exceptionnelles et une intelligence capable à mettre au défi les plus grands enquêteurs de la planète.

En tout cas, en ce qui concerne Jasmine Catou, vous êtes dorénavant prévenus…

Dan Burcea

Christian de Moliner, Jasmine Catou, détective, Éditions du Val, 2019, 110 pages.

1 https://lettrescapitales.com/interview-christian-de-moliner-jai-pris-un-chat-car-un-felin-suscite-naturellement-de-lempathie-chez-les-lecteurs/

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