« une vraie gouaille dans l’écriture de Maurice Daccord, proche de celle du Frédéric Dard »

Tantum ergo, quand Gendarmerie et Police ne font qu’un

D’un côté le commandant de gendarmerie Crevette qui accepte de travailler dans la police (le rapprochement de ces deux corps de l’état est encore proche de la science-fiction en France, mais n’est-ce pas dans le sens de l’histoire. Ce qui est certain pour un puriste comme moi en ce qui concerne la police et la procédure judiciaire, c’est que Maurice Daccord ne fait aucune erreur à ces niveaux et que même ce commandant a toute sa place dans un service de police de province normal).

De l’autre Baccardi un gratte-papier dans une compagnie d’assurances qui à la veille de la retraite décide de monter un cabinet d’écoute pour personnes délaissées (à son domicile, la cuisine servant de salle d’attente). Pas un cabinet de psychothérapie, non, d’écoute, il soigne avant tout par l’écoute, par le silence, tout au plus peut il partager son expérience de ses nombreux divorces et il sait faire montre d’empathie. Il a une vraie éthique (qu’il invente étant le seul à exercer ce métier) : ne jamais prendre les coordonnées de ses patient(e)s, il ne vérifie même pas si le prénom donné est le bon.

Dans cette ville de province, le commandant Crevette se voit obligé sur une série de meurtres assez ignobles : des femmes sont assassinées, éventrées, un crucifix enfoncé dans leur vagin et les mots Tantum Ergoscarifiés sur leur ventre.

Tantum ergo, un hymne des vêpres Pange linguacomposé par Saint Thomas d’Aquin et qui depuis le XIX siécle fait partie de la liturgie catholique pour la célébration du Saint Sacrement. Une grande partie des victimes s’avèrent être des clientes de Baccardi. Il devient le premier suspect, mais à force de repas et d’apéritifs, les deux hommes apprennent à se connaître et finissent par collaborer. 

Leurs investigations les amènent dans un monastère isolé qui, bien des années avant, servait de pension pour jeunes filles de bonne famille. Quel secret renferme ses murs épais ? Et si tout cela n’était autre qu’une vengeance longuement mûrie ? Et si le vrai n’était pas si évident qu’il en ait l’air ?

Quand j’ai lu ce roman policier de Maurice Daccord publié chez L’Harmattan, j’ai pensé à un autre que je venais juste de finir : L’écrivain public de Dan Fesperman paru dans la collection grands détectives aux éditions 10/18. Le même principe, deux personnages que rien ne devrait réunir et qui collaborent ensemble pour résoudre un meurtre. La similitude s’achève à ce niveau.

Il y a une vraie gouaille dans l’écriture de Maurice Daccord, proche de celle du Frédéric Dard, celui des premiers romans policier essentiellement. Ces deux héros sont sympathiques, avec leurs blessures, leurs cicatrices, leurs pudeurs. Un peu d’argot, mais toujours à bon escient, qui rend dialogues et texte très vivants, naturels. 

Un roman policier très classique, mais que l’on lit toujours avec grand plaisir.

Emile Cougut

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