Jean Rhys pour « Paris en toutes lettres »

 Soirée Jean Rhys – lue par Bérangère Bonvoisin

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– Jean Rhys (née en 1890) grandit aux Antilles, partagée entre deux cultures, celle de sa mère béké et de son père anglais, au milieu de tensions coloniales qu’elle ressent mais ne comprend pas.

– Elle quitte son île à l’âge de 17 ans pour une pension londonienne. Premier déchirement.

– Pour gagner sa vie, elle devient « chorus girl » dans une comédie musicale.

– Premier amour, première déception cuisante : le gentleman lui verse une pension mensuelle en guise de cadeau de rupture. Suivront des amours difficiles, à la fin douloureuse. « Si je cesse d’écrire, ma vie n’aura été qu’un échec atroce… Je n’aurais pas gagné ma mort ». Voilà ce qui la tient debout dans un quotidien fait de solitude, d’alcool, de pauvreté et de désespoir.

– Paris et Vienne dans les années 20… le Paris bohème qu’elle écrit dans plusieurs de ses livres, dont Rive gauche paru en 1927, recueil de nouvelles qui la fait remarquer par Ford Madox Ford qui devient son amant sous l’œil complice de sa femme. Cette relation servira de trame, plus tard, pour Bonjour minuit.

– Entre 1927 et 1939, elle publie quatre romans : Quai des Grands Augustins (1931), Voyage dans les ténèbres (1934), Bonjour minuit (1939) et Quartet.

– Et puis, silence. Plus rien. À tel point qu’on l’imagine morte. Pourtant, elle écrit. Mais, privée du soutien de Leslie Tilden-Smith, son deuxième mari et agent littéraire, la tâche est plus délicate.

– Une émission de la BBC en 1957 participe à sa redécouverte. Puis La Prisonnière des Sargasses paraît en 1966. Elle aura mis 9 ans à l’écrire. Elle connaît enfin le succès avec lequel viennent honneurs, argent, nouvelles publications de ses livres. En 1968, un nouveau recueil de nouvelles est publié : Les tigres sont plus beaux à voir.

– Deux ans après sa mort, en 1981, Quartet est adapté au cinéma par James Ivory. Sa Correspondance paraît en traduction française en 1987. Consécration tardive pour un immense talent.

Femmes de la rive gauche du 4 au 8 juin : trois soirées et trois expositions

Couv femmes de la rive gauche.jpgFEMMES DE LA RIVE GAUCHE hier et aujourd’hui

à l’occasion du festival littéraire Paris en toutes lettres, (Mairie de Paris, 4-8 juin 2009), l’Espace des Femmes-Antoinette Fouque vous offre trois soirées splendides : jeudi 4 juin, vendredi 5 juin, lundi 8 juin. (cumul de présences autorisé !) Et autant d’expositions (Françoise Gilot donc, photos d’Hiroshima, histoire des éditions Des femmes) au mois de juin (sans restriction non plus !)
Voilà le programme :
1) Jeudi 4 juin à 19 h, l’exquise Alice Butaud a accepté en dernière minute de remplacer Emmanuelle Riva (souci de santé non grave) pour lire Hiroshima mon amour de Marguerite Duras – Et du 4 au 8 juin, Exposition des photos d’Emmanuelle Riva prises à Hiroshima en 1958 – Profitons de sa venue à l’Espace des Femmes pour saluer la nouvelle édition en CD de son livre audio, autrefois en cassettes, Une femme de Sibilla Aleramo. C’est un livre d’autant plus important qu’il fut le premier à être édité par Antoinette Fouque lors de la naissance de sa maison en 1973.
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2) Vendredi 5 juin à 19 h, autour du livre Femmes de la rive gauche de Shari Benstock (des femmes-Antoinette Fouque) qui fait revivre les écrivaines, éditrices, salonnières anglo-saxonnes expatriées à Paris entre 1900 et 1940 : Hilda Doolittle, Jean Rhys, Anaïs Nin, Edith Wharton, Gertrude Stein, Djuna Barnes…
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Bérangère Bonvoisin lit des textes de Jean Rhys
Michèle Goddet lit des textes de Gertrude Stein (et peut-être aussi d’Anaïs Nin)
 
3) Lundi 8 juin à 19 h, autour de la Bibliothèque des Voix :
 – Christine Orban lit N’oublie pas d’être heureuse. Après son enfance au Maroc, l’héroïne change son destin en arrivant à Paris.
 – Emmanuel Pierrat lit Troublé de l’éveil. L’avocat, éditeur et collectionneur ne dort que deux heures par nuit ; à l’heure où Paris éteint ses feux, il commence une vie parallèle.
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Et, à la Mairie de Paris du 3ème : Depuis 35 ans, des femmes éditent… une exposition du 29 mai au 5 juin 2009 – vernissage le mercredi 3 juin à 18 h 30 – 2, rue Eugène Spuller 75003

Jury du Prix Marguerite Duras

Prix Marguerite Duras

Le prix Marguerite Duras consacre alternativement chaque année un des trois domaines suivants : littérature, théâtre et cinéma. Créé par le Conseil Général de Lot-et-Garonne et présidé par Alain Vircondelet (qui est également le fondateur du prix), le jury est composé de quinze personnalités qui ont admiré, joué, aidé, servi ou reconnu l’œuvre de Marguerite Duras. Le prix est remis lors du salon des livres organisé en mai par l’Association Marguerite Duras dans le château de Duras.

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Présidents d’honneur :
Jean Mascolo (fils de Marguerite Duras)
Laurent Terzieff (comédien, écrivain)
Michaël Lonsdale (comédien, écrivain)
Catherine Sellers (comédienne, écrivain)
Président du Prix et juré : Alain Vircondelet (universitaire et écrivain)
Secrétaire du Prix et juré : Claire Deluca
Jurés :
François Barat (cinéaste et écrivain)
Jérôme Beaujour (écrivain et cinéaste)
Fabienne Bergeron (chargée de la culture, Mairie de Trouville)
Chantal Chawaf (écrivain)
Michèle Ponticq (Présidente de l’Association Marguerite Duras)
Viviane Forrester (écrivain, membre du Prix Fémina)
Macha Méril (comédienne et écrivain)
Daniel Mesguich (comédien et écrivain, directeur du Conservatoire National d’Art dramatique)
Dominique Noguez (écrivain, Prix Fémina)
Patrick Poivre d’Arvor (journaliste, écrivain)
Michelle Porte (cinéaste)
Raphael Sorin (écrivain, éditeur)
 

Jury du Prix Marguerite Audoux

Créé en 1997, le prix Marguerite Audoux récompense les auteurs de langue française, dont le style ou la personnalité sont proches de ceux de la romancière Marguerite Audoux, prix Fémina 1910.

Une année sur deux, la remise des prix s’effectue dans le Cher, département d’origine de Marguerite Audoux.

documentaudoux.jpgAlain Rafesthain, Président du Conseil Général du Cher, Président du jury

Geneviève d’Aubuisson, arrière petite-nièce de Marguerite Audoux, vice-présidente du jury

Marie Desplechin, romancière, lauréate du Prix Médicis (essai)

Pierrette Fleutiaux, romancière, lauréate du Prix Fémina

Anne-Marie Garat, romancière, lauréate du Prix Fémina

Benoite Groult, romancière, membre du jury du Prix Fémina

Bernard-Marie Garreau, agrégé de lettres modernes, docteur es lettres, maître de conférences à Bourges

Marc Lambron, agrégé de lettres, lauréat du Prix fémina

Raymond Pinoteau, réalisateur de films

Jean-Yves Ribault, archiviste-paléographe, ancien directeur des archives départementales du Cher et des services d’archives de Paris et de la région Île de France 

Coline Serreau se réfère à Antoinette Fouque dans Nouvelles Clés (juin-août 2009)

col2.jpgRésister – nouvelles clés juin-août 09
Propos recueillis par Patrice van Eersel
 
La grande colère de Coline Serreau
 
Toute la presse a parlé du grand documentaire écologique en six parties que prépare la réalisatrice la moins conformiste de France. Mais sans nous dire de quelle énorme indignation elle est partie – que son reportage autour du monde n’a fait que confirmer.
Selon elle, à peu près partout, les femmes continuent à subir l’inégalité, l’oppression et, pire que tout, la non reconnaissance du rôle créateur de leur ventre. Telle serait la cause n°1 de nos problèmes : le matricide, qui nie l’utérus et l’humus. Vous pensiez que la lutte des femmes était finie ?
 
Coline Serreau, dont nous avons adoré les fictions utopistes – La Belle Verte, La Crise, Saint-Jacques… La Mecque – est partie filmer toutes sortes d’acteurs de la mouvance des « rebelles de l’humus », de Pierre Rabhi à Nicolas Hulot, de l’Indienne Vandana Shiva au Marocain Hassan Zaoual, des savants libertaires aux paysans sans terre. On les verra à l’écran, cet hiver, dans une série de six documentaires-manifestes : La Terre vue de la terre – Solutions locales pour un désordre global. La réalisatrice se trouve en plein dérushage de ses 150 heures de tournage, au moment où nous débarquons chez elle pour lui demander en quoi elle croit, au fond.
 
Quels sont vos critères, pour trier le meilleur de toutes les images que vous avez tournées ?
Aujourd’hui, toute la journée, j’ai décrypté ma longue interview de la philosophe Antoinette Fouque, figure mythique du MLF et fondatrice de la Librairie des Femmes. J’adhère entièrement à ce qu’elle dit sur le meurtre du vivant. La terre et l’utérus, c’est le même mot. Mater, matière, utérus, terre, tout ça a la même racine. L’humus, l’humanisme, l’humilité, voilà mes critères. Les progressistes, dont je me suis longtemps sentie proche, n’ont jamais voulu voir le fond du problème : la relation entre la terre et l’utérus. Aujourd’hui, si les écologistes ne comprennent pas que l’urgence n°1 est l’arrêt du matricide, ils échoueront comme les autres. (…) L’interview fait plusieurs pages….
 

Débat sur la création des femmes (à partir du livre de Thierry Delcourt)

deble_01.jpgEXTRAIT D’ARTISTE FEMININ SINGULIER (Thierry Delcourt)

………….Entre-deux chairs native

Antoinette Fouque, psychanalyste et militante en bute à une théorisation, osons dire terrorisation, freudienne et lacanienne du tout phallique et de la fonction paternelle comme références unaires du symbolique, en tant que ce système fonde l’existence des femmes et des hommes, tenta une révolution de ce symbolique pour y introduire la dimension du lien natif homosexué à la mère pour la petite fille, « terre native » qui résonne avec l’al/ternative ou alter/native de soi que tente et dont parle Agnès Thurnauer. Antoinette Fouque dit : « Le plus souvent, cette terre native est simplement forclose en une espèce de retrait, de chambre noire, d’ombre qui fait que les femmes ont peur d’elles-mêmes, peur de leur autre, qui est leur semblable et en même temps de la différence. »[i] Et donc, elle veut lever cette forclusion du corps de la mère et en désigner la fonction symbolique. Elle ajoute : « Cette homosexualité des femmes, native, c’est la première chambre à soi, d’où élaborer une langue, une pensée, un corps, une vie à soi : narcissisme, oui, mais topique, dynamique a- et post-phallique ; homosexualité structurante, vitale pour le devenir femme ; homosexualité qui n’a rien ou pas grand-chose à faire avec le lesbianisme, qui, lui, désigne une homosexualité de type secondaire, construite sur une identification au père. » Lors d’une interview télévisée, Antoinette Fouque précise : « Il y a une homosexualité primaire qui n’est pas de l’ordre de l’homosexualité telle qu’on l’entend. Le premier corps d’amour pour la fille et pour le garçon, c’est une femme. Si la fille ne retrouve pas à un moment de sa vie ce premier amour, elle est amputée d’une partie d’elle-même. Il m’est même arrivé de penser que si une fille ne retrouve pas cet amour charnel pour sa mère, elle ne pourra pas aimer un homme. Elle n’aura pas traversé tout le champ de potentialités de son corps même… »[ii] Doit-on maintenir ce terme d’homosexualité qui prête à confusion mais qui donne tout de même la dimension d’intense intimité comme une condition pour ouvrir à ce champ symbolique maternel ?

deble_02.jpgJe propose, en le rapprochant de l’entre-deux femmes comme construction d’une identité non phallo-centrée, le terme d’entre-deux chairs native. Cette intimité active tant du côté de la mère que de l’enfant, fille ou garçon, y compris durant son séjour dans le ventre maternel, va de l’allaitement jusqu’aux caresses réciproques, de la comptine au regard-fusion, de l’infra-verbal aux premiers mots qui méritent l’expression de langue maternelle pénétrant le corps dans une vibration jouissive… tout cela supposant, bien sûr, que la souffrance et le refus n’envahissent pas la mère, ni qu’un père ou une institution comme l’ordre des sœurs sainte-Clotilde ou autre barbarie, imposent leur violence ou la rigidité d’un système qui vise à éduquer et à soumettre dans la forclusion du corps charnel et désirant.

Cette construction originaire devient ensuite ce que nous avons étudié supra comme construction de l’originaire actualisée dans le rêve ou la création. Elle reste inconsciente mais toujours opérante dans le moindre acte ou la moindre perception d’un être non coupé de cette origine. Nombre de ‘baby blues’ suivant l’accouchement gagneraient à être considérés à l’aune de ce symbolique maternel forclos. Je me souviens d’une patiente ayant très tôt perdu sa mère et vécu ensuite une situation de maltraitance sournoise de la part d’une belle-mère ; n’ayant pu avoir d’enfant, stérilité mystérieuse, cette patiente a enfin osé une adoption dont elle était ravie : ravie car heureuse mais soudainement dérobée, comme le sol s’était dérobé sous le corps défait de Lol V. Stein, à l’arrivée de sa fille et lorsque celle-ci, cherchant le contact, l’appela maman. Elle s’effondra alors dans l’incapacité psychique à répondre à cet appel convoquant sa chair, même si elle savait encore assurer le quotidien de l’enfant. Il lui fallait d’abord entendre son propre appel et repeupler ses premiers instants avec sa mère de la chaleur d’un contact brutalement perdu, cette terre native dont elle fut amputée ; et même si une psychanalyse avait depuis longtemps revisité ces premiers instants, ce n’est que de les vivre qui pouvait opérer une réelle ouverture à l’entre-deux chairs native.

 



[i]  Fouque Antoinette  Il y a deux sexes,  Ed. Gallimard  1995

[ii]  Fouque Antoinette interview France 5 du 10/10/08 réalisée par Julie Bertuccelli