Un amour aveugle et muet – Une passion française et russe (*), de Jean Winiger est l’histoire d’ une errance amoureuse et littéraire dans une Russie dirigée par le « Vieux-Blond » , surnom donné par l’héroïne du livre à Poutine. Un roman traversé par le fantôme de Vassili Grossman.
Quand un homme de théâtre Pierre débarque à Saint-Pétersbourg jouer une pièce inspirée de l’œuvre de Vassili Grossman pour faire passer son message humaniste, il a pour guide Assia, une autre amoureuse de cet auteur longtemps banni. C’est le début d’un voyage à deux dans une Russie dominée par celui que la jeune femme surnomme – au grand dam de Markov, ce mari dont elle s’est séparée et qui monté en grande dans la communication sous Poutine – « le Vieux-Blond », que ce roman nous invite alors.
De fait, Grossman fut longtemps en Russie un de ces auteurs maudits et censurés. Journaliste de guerre sous Staline, passé ensuite à la littérature, Grossman a signé une œuvre marquée par une réflexion sur le pouvoir, la foi, l’identité russe. Juif, il se refuse à sacrifier au credo nationaliste cher au Kremlin et le KGB interdit ses livres à la fin de sa vie en allant même jusqu’à confisquer son manuscrit, avec un détail que rappelle Jean Winiger : ils récupèrent tout, « y compris les rubans de sa machine à écrire » !
Il faudra le courage d’un Andreï Sakharov pour que Vie et destin, son œuvre majeure, soit passée en microfilm en Occident et éditée à l’Ouest. Il faudra attendre ensuite la Perestroïka de Gorbatchev, pour que ce gros livre ne soit enfin autorité en Russie… Or les récits de la bataille de Stalingrad, d’un réalisme effroyable, fascinent d’autant plus Pierre et Assia qu’elle est la petite-fille d’un général qui fut héros de Stalingrad quand Pierre eut, lui, une grand-mère qui résista dans les Glières.
Née à Téhéran, d’un père iranien athée de culture musulmane, Anne Mansouret s’installe en France en 1956 avec sa mère. Pensionnaire à Notre Dame de Verneuil, elle tombe amoureuse de la culture et notamment de la littérature française. Elle réalise des études de droit à la faculté d’Assas et intègre Science Po avant de mener une longue carrière dans la communication de luxe. Aujourd’hui elle se présente aux législatives dans la 1ere circonscription de l’Eure.
Causeur. Comment êtes-vous entrée en politique ?
Anne Mansouret. J’avais des sensibilités qu’on peut qualifier de gauche, ce qui m’a parfois posé des cas de conscience quand j’ai travaillé dans le milieu du luxe où la démesure peut souvent choquer. En 1992, Laurent Fabius m’a proposé de m’engager localement en créant une liste « Entreprendre pour l’emploi » dans l’Eure, en Haute Normandie, où j’habite. J’ai été élue quelques années plus tard conseillère départementale dans l’Eure, et j’ai même été présidente du conseil départemental. Plus tard, en 2004, j’ai été élue au Conseil régional de la Haute Normandie jusqu’en 2015. J’ai ainsi passé une quinzaine d’années d’élue locale dans le groupe PS, PRG et tous les associés du Parti Socialiste.
Quid de la politique nationale ?
Je me suis présentée en 1997 dans la 1ère circonscription de l’Eure où j’habite contre Jean-Louis Debré qui était ministre de l’Intérieur et dix ans plus tard en 2007 contre Bruno Le Maire. Dans les deux campagnes, j’ai été battue au second tour.
Aujourd’hui, vous ne vous revendiquez plus de gauche. Pourquoi?
J’ai été exclue du Parti Socialiste en mai 2012 quand j’ai voulu me représenter avec l’étiquette socialiste, en raison notamment de mon opinion sur l’affaire Strauss-Kahn. Au moment où le scandale a éclaté, la direction du PS a très vite demandé aux élus de défendre la thèse selon laquelle DSK, à l’époque bien placé pour disputer à Nicolas Sarkozy la présidence de la République aux élections de 2012, avait été la victime d’un piège tendu par un adversaire politique. J’ai même reçu des messages texto de Martine Aubry et d’autres disant que les faits rapprochés à DSK étaient invraisemblables. Je ne partageais pas ce point de vue et n’en ai pas fait mystère, sachant pertinemment que cela allait probablement mettre un terme à ma carrière politique. J’ai donc dis ce que j’ai pensé. Autant vous dire que cela a été fatal. Prônant l’assimilation et faisant l’éloge de la laïcité, on m’a alors accusé d’être islamophobe pour légitimer mon éviction du parti. Les orientations qu’ont prises depuis le PS avec les mouvements néo-féministes m’en ont définitivement éloigné.
En 2019, mon fils a été atteint d’un cancer grave. Je me suis rapprochée de lui et j’ai découvert que ses valeurs que d’aucuns pourraient qualifier d’extrême droite, auxquelles je n’avais jamais prêté attention, pouvaient résoudre des problèmes actuels. Il m’a incité à réfléchir sur les conséquences calamiteuses de la gestion du PS dans les domaines de la santé et de l’Education nationale. Sortant de là, je me suis prise en pleine gueule la pandémie.
Que pensez-vous justement de la manière dont la crise sanitaire a été gérée ?
J’ai été révoltée par la façon dont s’est comporté le gouvernement et je me suis aperçue brutalement qu’on avait transformé ce pays en une espèce de cocotte-minute qui n’explose pas, uniquement car les gens avaient peur.
Que reprochez-vous précisément au gouvernement ?
De pousser à l’extrême la peur de la pandémie et de foutre la trouille aux Français.
Vous pensez qu’il y avait une stratégie consistant à exagérer le danger pour gouverner par la peur ?
Il n’y a pas eu de complot à l’échelle du pays. Mais je pense qu’à un moment donné, ceux qui nous gouvernent se sont retrouvés face à une décision. Soit ils prenaient le parti qu’ont d’ailleurs pris certains pays comme le Danemark, la Suède, les Pays Bas, c’est-à-dire qu’il s’agissait d’une espèce de grippe un peu différente des autres, mais qu’il n’y avait pas péril dans la demeure. Soit on en rajoutait. Je pense que la culture de gauche de Macron a joué et qu’il a à un moment pris la décision d’en rajouter pour faire peur. Les échéances suivantes étaient alors plus faciles à gérer pour eux du moment où ils incarnaient la protection contre le mal absolu qu’était le Covid.
D’autres pays tels que l’Italie, l’Espagne, les Etats-Unis ou encore Israël ont agi de la même façon…
Je pense que justement, c’est une propension qu’on peut avoir quand on est aux manettes de se dire que plus les gens sont apeurés, moins ils sont conscients des risques véritables, et plus on va pouvoir avoir une influence sur leur comportement.
Et le volet économique, avec la politique de soutien aux petites entreprises ?
Ils ont sorti la planche à billets et tout le monde était content. Mais cela a eu un effet pervers redoutable que nous sommes en train de découvrir. Elon Musk tweetait le 28 mai que les gens avaient été tellement confinés qu’ils avaient perdu l’habitude de se battre et travailler. On les a complètement anesthésiés avec l’argent public facile en échange du port du masque et de l’obéissance. Au deuxième confinement, j’ai envoyé un texto à Bruno Le Maire lui disant « Vous êtes en train d’euthanasier la France ». C’est en train de nous arriver. Beaucoup de gens ont perdu l’habitude de travailler. Les 18-20 ans sont énergiques mais les 25-50 ans sont différents. Vous ne trouvez plus un homme marié de 40 avec des enfants ans qui ne culpabilise pas s’il ne peut faire la sortie d’école…
J’ai découvert la France dans les années 60, quand le mot résistance incarnait son esprit. C’était un pays libre, rebelle, et je me retrouve 50 ans plus tard dans un pays complètement différent. Cela m’a foutu une rage, vous ne pouvez pas imaginer ! Ils ont réussi à abrutir mes compatriotes. Qu’ont-ils fait de ce peuple français qui, à des moments de son histoire, a fait la révolution de la Commune ? J’étais entre Deauville et Trouville à la fin du confinement au mois de mai et on a ouvert une bouteille de rosé sur la plage pour piqueniquer. Eh bien, ils sont venus nous foutre une contravention de 143 euros par personne ! Et personne ne mouftait.
D.R.
Et la politique vaccinale ?
Je me suis faite vaccinée, car autrement on ne pouvait pas vivre, on devenait paria. Mais à aucun moment, je n’ai eu ce que j’attendais, c’est-à-dire un débat avec des médecins qui prônaient cette politique vaccinale face a des soignants refusant de se faire vacciner. Aucun grand média n’a eu le courage de le faire. C’est donc cet ensemble d’expériences et de constats qui m’ont poussé à me relancer dans la politique nationale en me présentant dans la première circonspection de l’Eure.
Avez-vous une étiquette ?
Je suis sans étiquette. J’ai créé un mouvement qui s’appelle Réagir. J’ai décidé, pour ma conscience personnelle, d’investir mes dernières cartouches pour ranimer mes compatriotes qui sont dans un état de léthargie.
Si vous êtes élue, comment allez-vous vous positionner ?
Je me rattacherai à une formation de droite : soit le Rassemblement national, soit Les Républicains. Mon étiquette politique a toujours été le centre gauche mais je me retrouve aujourd’hui déportée avec des idées que les journalistes et autres observateurs de la vie politique pourraient classer à l’extrême droite. Quand je vois qu’on classe Alain Finkielkraut à l’extrême droite, cela me rassure. Selon moi, ni lui ni même Marine Le Pen ne sont d’extrême droite.
Pourquoi ne pas rejoindre Eric Zemmour ?
Car j’étais sur place, sur le terrain. Marine Le Pen est nettement plus proche des préoccupations des gens que ne pouvait l’être Éric Zemmour. Zemmour nous a proposé un retour en arrière. C’est regrettable car on ne peut pas faire un retour en arrière. Ce n’est pas une solution pour les problèmes d’aujourd’hui.
Quel est votre regard sur l’Union Européenne ?
J’étais européiste avant 1992. Aujourd’hui, je pense que l’extension de l’Europe à des pays de l’ancienne URSS est extrêmement dangereuse. Ou bien il aurait fallu créer une Europe continentale, de l’Atlantique à l’Oural comme disait Charles de Gaulle, et faire une place à la Russie dedans à partir du moment où elle n’était plus communiste. Par ailleurs, on voit bien que la structure politique européenne ne correspond pas à l’identité de certains de ces pays tels que la Hongrie.
Dans une même logique, une Europe de la défense n’a pas plus de sens. L’Europe je l’ai vu naître. Elle avait une vocation : faire la paix entre la France, l’Italie, l’Allemagne, et l’Angleterre. Cela avait une cohérence historique et philosophique. Mais elle arrive de nos jours à avoir une mainmise sur l’identité et la culture politique des peuples, en coupant par exemple les crédits européens à la Hongrie d’Orbán. Cette emprise de la bienpensance agit aussi bien aux Etats-Unis par le biais du parti démocrate et des mouvements essentialistes wokes qu’en Europe avec par exemple la récente nomination à l’Education nationale de Pap Ndiaye.
BFM Crypto, le Club: La Russie semble s’intéresser aux cryptomonnaies pour contourner les sanctions internationales – 30/05
Ce lundi 30 mai, Vincent Boy, analyste technique chez IG, Grégory Raymond, cofondateur et rédacteuren chef de The Big Whale, ainsi que John Karp, co-auteur de « NFT Revolution, Naissance du mouvement Crypto-Art », se sont penchés sur le fait que la Russie semble s’intéresser aux cryptomonnaies pour contourner les sanctions internationales, dans BFM Crypto, le Club dans l’émission BFM Bourse présentée par Étienne Bracq. BFM Bourse est à voir ou écouter du lundi au vendredi sur BFM Business
Chacun a lu dans son enfance L’île au trésor de Robert-Louis Stevenson, ou en a vu l’un des films. Les randonneurs ont sans doute lu Voyage avec un âne dans les Cévennes, du même auteur. Il fait régulièrement des émules, et Didier Guillot est parti sur ses chemins. Oh, il parle peu de Stevenson, juste au détour d’une phrase, l’écrivain écossais est juste une marque, un itinéraire proposé, pas même un guide de vie sauvage ou simplement naturelle.
L’auteur, la cinquantaine, ouvrier devenu juriste à force de cours du soir pour s’en sortir, sortir de soi et de ses brisures d’enfance, a voulu prendre un bol d’air, faire une pause, retrouver une nostalgie : celle de son grand frère Daniel, mort à 23 ans volontairement parce qu’inadapté à l’existence, probablement bipolaire. Didier nous raconte, au fil du chemin, le bonheur d’être grand frère, le seul bonheur du sien. Lui, le petit, se sentait aimé, admiré, protégé, élevé. Dans de belles pages il dit avec pudeur ces moments que la marche lui remémore, la promenade dans les chemins avec l’aîné, la pêche à la rivière, les jeux d’eau, les insectes sur la peau, et toujours ce sentiment d’être là parce qu’un autre qui vous aime est à côté. Il lui a appris à rêver puis, à 13 ans, l’a laissé.
Pour le reste, quelques anecdotes sur les bobos des cuisses et des pieds, la soif et la fatigue, les gîtes et les bistros, les vieux de rencontre ou l’Anglais alcoolo, l’ex-routarde pieds nus qui accumule les plats de terroir par bonheur de donner à manger, la randonneuse qui se targue de ne voyager qu’avec deux slips, le jeune homme généreux de sa bouteille d’eau mais qui canne dans les montées. Un zeste d’humour, beaucoup d’empathie pour les arbres, les roches, la forêt.
Des phrases ciselées avec l’amour du travail bien fait, les mots ajustés en marqueterie, peu d’épanchements et de lyrisme mais les sauts et gambades d’un esprit au fil d’un chemin. Juste un pas de côté.
Dans un essai, Sept idées libérales pour redresser notre économie, éditions L’Harmattan, 2022, militant pour une « vraie » économie libérale pour la France, l’auteur et économiste expose un certain nombre d’idées originales et iconoclastes faciles à mettre en œuvre.
Marc Alpozzo : On dit de Macron qu’il est un « libéral », à mon avis à tort. Dans une tribune du FigaroVox, vous affirmez justement que « sa fascination pour la dette trahit qu’il n’a jamais été libéral »[1]. Pouvez-vous éclairer nos lecteurs ?
François de Coincy : La liberté c’est le souci de l’indépendance et cela vaut particulièrement en matière économique. Au niveau du pays, à chaque accroissement de dette, nous dépendons un peu plus de nos créanciers et le choix des possibles diminuent.
Emmanuel Macron fait partie des gens qui croient que l’argent règle tout et peu lui importe la manière dont on s’en procure.
Autant l’endettement est utile lorsqu’il finance des projets dont les retombées futures permettront d’en rembourser les échéances, autant il devient un corset insupportable lorsqu’il permet le déficit public.
Autant l’impôt qui paie les dépenses publiques est un processus clair entre l’Etat et les citoyens, autant l’endettement est un palliatif antidémocratique permettant de faire des dépenses sans conséquences apparentes pour les citoyens.
Emmanuel Macron n’a effectivement rien d’un libéral : Il dirige en disant « ne vous inquiétez pas je m’occupe de tout » et c’est ce qu’il fait : à crédit. Cela expliquerait sa fascination apparente pour l’argent magique qui lui évite tous les désagréments de la cruelle réalité, celle qui l’obligerait à demander aux citoyens de fournir des efforts.
M. A. : Votre essai s’intitule Sept idées libérales pour redresser notre économie (L’Harmattan, 2021). Ce serait bien trop long de les reprendre toutes ici, mais quelle serait l’idée phare qui nous sortirait de la crise économique actuelle, selon vous ?
F. C. : La crise économique n’est pas actuelle, elle est permanente depuis des dizaines d’années et malheureusement je ne pense pas qu’une seule mesure puisse nous sortir de la crise en dehors de la mise en œuvre du principe libéral de responsabilité individuelle.
La mesure phare des idées que je propose me semble être le système monétaire libre pour deux raisons :
D’une part c’est la dérive de l’argent gratuit de la BCE qui permet le laxisme budgétaire qui nous amène devant un mur de dettes.
D’autre part, c’est le système monétaire dirigé actuel qui génère les crises financières qui déstabilisent l’économie. L’inflation constatée aujourd’hui n’est que le résultat des montagnes de liquidités émises par la Banque Centrale.
Il y a une double erreur dans la mission confiée à la BCE
D’une part on lui donne le soin de réguler l’inflation : Dans l’inflation il y a deux éléments, la dépréciation monétaire et l’augmentation propre des prix. Si la dépréciation monétaire était inexistante, il ne resterait que l’augmentation propre du prix des produits contre laquelle cela n’a aucun sens d’essayer de lutter : On voit mal comment la Banque Centrale pourrait lutter contre une augmentation des prix du pétrole décidés par les pays exportateurs. Quant à la dépréciation propre de la valeur de la monnaie, elle résulte en général des manipulations effectuées par la Banque Centrale elle-même en pesant sur la masse monétaire ou le taux d’intérêt.
D’autre part on lui demande de favoriser la croissance. C’est également une mission impossible, le système monétaire n’est qu’un système comptable d’écritures de dettes et de créances et seule l’économie réelle peut avoir un impact sur la croissance.
Ce ne devrait plus être la banque centrale qui détermine arbitrairement les taux d’intérêt ni les masses monétaires, mais elle devrait créer et réguler un marché libre des dettes et créances dont ressortirait les taux d’intérêt.
La seule mission de la BCE devrait être de garantir l’intégrité du système monétaire. Si cette idée était adoptée, cela éviterait les crises financières, certains enrichissements sans causes du système financier privé, mais surtout les déficits excessifs des Etats.
Ainsi notre pays ne pourrait résoudre ses problèmes qu’en agissant sur l’économie réelle c’est-à-dire tout simplement par le travail.
M. A. : Vos idées pour un programme plus libéral sont simples mais aussi iconoclastes. Par exemple, pour l’Éducation nationale, dont les résultats PISA sont assez inquiétants, vous préconisez de « confier l’Éducation nationale aux régions ». Vous déterrez le face-à face jacobins-girondins, qui relève d’une vieille histoire française. Pourtant, vous reconnaissez-vous-même que ce qui va mal à l’école, ce n’est pas la centralisation de l’école, mais bien l’idéologie socialiste du « bac pour tous ». Comment cette « vraie décentralisation » comme vous l’appelez, permettra-t-elle de relever le niveau ?
F. C. : L’Éducation Nationale est dans la situation de l’entreprise monopolistique qui devient de moins en moins performante au fil du temps parce rien ne vient la remettre en cause. On n’y peut contester une décision, on n’y peut prendre d’initiatives, tout vient d’en haut, d’une Direction elle-même ligotée par ses propres agents.
Si chaque Région prend en charge toute la politique de l’Education sur son territoire, ses élus auront aura à cœur d’avoir les meilleurs résultats par rapport aux autres. La concurrence jouera non en termes monétaires mais en termes de réputation. Les régions pourront avoir des approches différentes au niveau des programmes, des qualités professorales ou des organisations mais elles auront toujours à l’esprit qu’elles seront comparées aux autres. Avec une telle émulation, il y aura une dynamique pour promouvoir les meilleurs professeurs et les meilleures méthodes d’enseignement. Les idéologies seront abandonnées car les parents et les élèves privilégieront l’efficacité en demandant aux établissements moins performants d’adopter les méthodes des meilleurs.
C’est à partir de cette diversité d’initiatives différentes que pourra se développer l’excellence à partir d’une ou deux régions puis communiquées aux autres. Je ne prône aucun système d’éducation, je propose la liberté qui permet aux meilleurs systèmes d’enseignement d’émerger et de supplanter progressivement les autres.
M. A. : Vous abordez la réforme des retraites, qui sera le gros dossier du nouveau quinquennat de Macron, et qui augure déjà de nombreux désordres sociaux. Que pensez-vous de la retraite à 65 ans, et que préconisez-vous plutôt ?
F. C. : On fait une fixation sur l’âge de départ en retraite qui ne devrait pas être l’objet du débat, mais un paramètre laissé à l’appréciation de chacun. Pour cela il faudrait clarifier le sujet entre ce qui relève de la responsabilité individuelle, les cotisations de retraite, et ce qui relève de la solidarité collective, l’impôt finançant le minimum vieillesse.
L’équilibre du système de cotisation retraite par répartition ne doit pas être calculée sur une année, mais sur longue période de telle sorte que les déficits ou excédents d’une année ne soit qu’une dette ou créance du système qui doit s’éteindre naturellement. Il est évidement absurde de faire la répartition en fonction du solde annuel et non en fonction des sommes cotisées dans le passé. Il faut qu’en moyenne lorsqu’on prend sa retraite, le montant des pensions à recevoir compte tenu de l’espérance de vie, soit égal aux cotisations payées dans les années précédentes. Ce n’est aujourd’hui pas le cas : les cotisations payées sont inférieures aux retraites à percevoir.
Une fois ce principe posé, c’est à chacun de déterminer librement quand il veut prendre sa retraite, une fois qu’il a atteint au moins le minimum vieillesse. Les métiers générant une usure physique ou intellectuelle prématurée doivent faire l’objet d’une sur-cotisation à la charge des entreprises.
Il y a par ailleurs une solidarité nationale envers ceux qui n’ont pu se constituer une retraite suffisante qui ne relève pas des cotisations retraites et qui doit être assurée par l’impôt
Il y a donc une clarification à faire sur ce qui relève des cotisations afin de laisser à chacun la responsabilité des modalités de sa retraite et ce qui relève de la solidarité qui doit être définie par la représentation nationale.
M. A. : En réalité le libéralisme économique dans votre livre ressemble plutôt à un libéralisme mâtiné d’interventionnisme de l’État, n’est-ce pas ? À la fois une libéralisation du marché monétaire, une régionalisation de l’Éducation nationale, et une régulation plus étatiste qu’idéologique, voire apocalyptique de l’écologie. Alors pourquoi pensez-vous que le libéralisme fasse tant peur à la France ?
F. C. : L’intervention publique est essentielle pour mettre en œuvre les règles qui permettent ou favorisent la liberté, notamment économique, mais l’Etat doit s’en tenir à cette mission et laisser les acteurs opérer librement. A titre exceptionnel, il intervient évidemment en cas de défaillance du système.
Le libéralisme est mal compris des Français qui l’assimilent à tort au laisser-faire. Beaucoup de « libéraux » eux-mêmes n’ont pas compris que la liberté n’est pas un état naturel et que c’est au contraire une création humaine qui nécessite des règles.
La démagogie démocratique pousse les candidats au Pouvoir à offrir à leurs électeurs une assistance de plus en plus grande. On a atteint des sommets lors des dernières élections lorsque le Président Macron a multiplié les chèques électoraux payés par la dette, obligeant ses concurrents à faire de la surenchère.
Après tous ces cadeaux populistes, la raison libérale qui demande à chacun de prendre en main son destin est évidemment inaudible.
La question se posera lorsqu’arrivera la fin de l’argent magique : Emmanuel Macron pourra-t-il prolonger sa martingale monétaire durant cinq ans ou devra-t-il manger son chapeau comme quand, il y a quarante ans, François Mitterrand dut abandonner les mirages socialistes ?
Propos recueillis par Marc Alpozzo Philosophe, essayiste Auteur de Seuls. Éloge de la rencontre, Les Belles Lettres
François de Coincy, Sept idées libérales pour redresser notre économie, éditions L’Harmattan, 2022.
François de Coincy, né en 1945 (75 ans) : 2020 – auteur d’un livre d’économie : « Mozart s’est-il contenté de naître ? » ; 1977 – 2018 PDG de la Compagnie de Chemins de Fer Départementaux. Redressement de la société et transformation en holding solide et diversifié ; 1976 – 2000 Création et développement d’un groupe immobilier en association avec un ami ; 1970 – 1976 Groupe Hachette (diverses fonctions gestion finance) ; 1970 Diplomé ESC.
[1] « La fascination d’Emmanuel Macron pour la dette trahit le fait qu’il n’a jamais été un libéral» : (Publié le 30/11/2020 à 21:18, mis à jour le 01/12/2020 à 14:30) : https://www.lefigaro.fr/vox/economie/la-fascination-d-emmanuel-macron-pour-la-dette-trahit-le-fait-qu-il-n-a-jamais-ete-un-liberal-20201130?fbclid=IwAR0gcmKw1sJ5FVqCXqYHtjS8cKqDpKSArrFT6T1NYEdQgA-HC9Pl6GX5LT0