Les fleurs des Editions des femmes (par Catherine Weinzaepflen)

Texte recopié du catalogue des trente ans des Editions Des femmes :
124859423_30e191b53f.jpgCatherine Weinzaepflen
Devant ma fenêtre, les petits cyclamens blancs (jardinière longitudinale) ont été comme revigorés par la neige tombée la nuit dernière. Ciel bleu sur Paris. Le blanc, très blanc, des pétales oblongs s’allie au vert sombre, très sombre, des feuilles. Fragilité et force tout à la fois. Il a dû y avoir des cyclamens en hiver dans la Librairie de la rue des Saints-Pères. Il y avait toujours des fleurs dans cette librairie verte. Façade verte, étagères vertes, fauteuils de rotin verts. Un jardin. Ce lieu en aboutissement d’un travail intense : certaines femmes écrivaient, d’autres fabriquaient les livres, d’autres lisaient. Et toutes faisaient tout. La Librairie Des femmes, un lieu de silence et de rencontre. Avec fleurs. Un lieu protégé pour nous qui avions ensemble le désir de nous sauver.
Je ne mesurais pas alors à quel point mes livres étaient à l’abri de la violence du monde. A l’abri des diktats commerciaux. Cette différence… oui, cela surtout : le droit à la différence. La librairie était un lieu de désir. De vie. Il en reste les livres (on peut toujours les commander, et cela encore est différent : pas de pilon – autodafé communément pratiqué.)
Le travail des Editions Des femmes perdure à travers les livres. Pour ce qui me concerne, ceux que j’ai eu la chance d’inscrire dans ce lieu constituent les fondations de ceux qui ont suivi.
C.W.
 

Antoinette Fouque écrit sur la peintre Catherine Lopes-Curval… (en 2002)

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Texte (extrait) recopié du catalogue des trente ans des Editions des femmes :
 
Catherine Lopes-Curval est née dans la seconde moitié du XXème siècle. La Mise aux Carreaux I, c’est une course aux trésors des signifiants ; c’est une balade dans la mémoire planétaire de l’artiste, et, même geste, cent arrêts sur images aux écrans de nos rêves. Explosion fixe de la beauté.
Autant de richesses ne vont pas, c’est logique, sans produire quelques hasards objectifs, rencontres improbables mais absolument nécessaires. Par hasard, à Beaubourg, la séquence chromatique d’Aurélie Nemours a été accrochée à la suite de plusieurs Hommages au carré d’Albers. Par hasard, au festival de Cannes, le 26 mai 2002, Julie Lopes-Curval, la fille au regard bleu-vert de Catherine, a reçu la Caméra d’or pour son premier long-métrage Bord de mer.
On s’y retrouve. De rencontre en maison, d’hospitalité en passion, d’oeuvre vivante en génération, non sans passeur, de mère en fille, de femme en femme, à l’infini…
à l’occasion d’une donation de la Fondation SCALER au Centre Pompidou, Antoinette Fouque a proposé de retenir les oeuvres de trois femmes artistes : Aurélie Nemours, Geneviève Asse et Catherine Lopes-Curval.
Antoinette Fouque, Boulouris, le 30 mai 2002

« Ainsi soit-elle », premier livre audio de la chère Benoite Groult

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Benoite Groult
Ainsi soit-elle
lu par l’auteur

1 Cassette – 16,50 €
1 CD – 18 €

Née en 1920, à Paris, Benoîte Groult commence à écrire avec sa sœur Flora Journal à quatre mains qui sort en 1963. Elles feront ainsi quatre œuvres ensemble jusqu’en 1985.
En 1972, Benoîte Groult publie un roman, La part des choses, et l’essai Ainsi soit-elle, qui rencontrèrent un très large public.
Dans Ainsi soit-elle, Benoîte Groult analyse “ l’infini servage ” de la femme et lance la première protestation publique contre la pratique de l’excision.
Livre simple et direct pour que tous comprennent.
Livre lucide et courageux où l’humour est aussi une arme de combat, qui se veut toujours positif.
“ Il faut que les femmes crient aujourd’hui. Et que les autres femmes – et les hommes – aient envie d’entendre ce cri. Qui n’est pas un cri de haine, à peine un cri de colère, mais un cri de vie. ”

L’Oeil de la poupée de Irina Ionesco, aux éditions Des femmes

UN GRAND MERCI à Dominique-Emmanuel Blanchard, qui m’accorde le droit de reproduire ici la photo personnelle qu’il a faite de Irina Ionesco.
irina-ionesco-3nb.jpgTexte de Irina Ionesco écrit pour le catalogue des trente ans des Editions Des femmes :
Au commencement était la femme, ce précepte personnel a forgé mon destin. De l’homme j’ai eu peu de connaissance tout au long de mon étrange enfance. Ce sont les femmes qui m’ont bercée, ce sont elles qui m’ont nourrie, soignée. La première que j’ai connue, la plus prodigieuse de toutes les femmes, Virginie Elisabeth, ma grand-mère, ainsi que le rêve de Margot, ma mère, seront pour toujours la source de toute inspiration et ma vie consacrée au regard a choisi naturellement comme idéalité la femme. Les années passant, la femme seule a été le choix et le sujet de mon travail de photographe.
 
Dans les années 70, l’existence soudaine des Editions Des femmes avec en tête Antoinette Fouque m’avait subjuguée. A l’époque je lisais avec ardeur Le Torchon Brûle, un journal révolutionnaire qu’Antoinette animait. Et c’est en toute certitude que le texte qui par moi fut écrit se trouvait destiné à être envoyé aux Editions Des femmes. J’ignorais que j’allais faire partie d’un mouvement de recommencement et que mon livre allait bénéficier de la réouverture officielle des éditions qui avaient cessé de publier quelques années durant. Je suis heureuse d’avoir rejoint ainsi le sens d’un rêve et je remercie Antoinette d’avoir aimé mon bouquin.
I.I.

L’Oeil de la poupée de Irina Ionesco – Auteur : Irina Ionesco  

  • Editeur : Des Femmes
  • Parution : 18/03/2004
  • Nombre de pages : 204
  • Dimensions : 21.00 x 13.50 x 1.60

Résumé :

La voix monocorde de Manie scandait le temps. Isa éprouvait une réelle incrédulité à écouter cette transe d’aveux funestes que sa grand-mère exprimait enfin. Les mots s’égrainaient. Ses paroles, nimbées d’un son lugubre, ne frappaient pas encore l’entendement d’Isa. Cependant elle commençait à découvrir le sens d’un drame, assurément antique, dont elle aurait été le sujet et la cause. Ce qu’elle venait d’entendre à propos de leur vie à eux – cette trilogie maudite, le temps d’un blasphème dont elle aurait été le fruit – déchirait l’épaisseur d’un voile noir composé de mille strates. Une lumière terrible éclairait son interminable questionnement. I.I.

A propos de l’auteur :

Irina Ionesco est née à Paris en 1935. Photographe inspirée et célèbre, elle poursuit depuis plus de trente ans une oeuvre singulière et baroque dans laquelle les femmes se trouvent au centre d’un incroyable théâtre issu des réalités. L’oeil de la poupée est le premier volet de son autobiographie.

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Ravissante et désarticulée

Irina  Ionesco   Marie  Desjardins   L’Oeil de la poupée
Editions des Femmes / Antoinette Fouque
 2004 /  2.29 € –  15 ffr. / 204 pages
ISBN : 2-7210-0485-9
FORMAT : 14×21 cm

Avec le premier volet de son autobiographie, la photographe Irina Ionesco nous livre un ouvrage minutieusement ciselé. De sorte
qu’il est naturel qu’au travers des pages devenues translucides à force d’innocence, l’oeil du lecteur se prenne progressivement à scruter l’échafaudage de perles et de papiers dorés, de regards fugitifs et d’impressions passagères, qu’une petite fille devenue grande reconstruit nostalgiquement.

Nonchalante et volontaire, la figure l’Irina se dissout dans un nuage d’étoiles. Elle est désormais Isa, une enfant capable de se mettre en scène. Ce changement de prénom reflète avec justesse le dilemme du réel et du fictif qui tourmente Irina : aujourd’hui encore, l’auteure pour se raconter, s’invente, de la même manière que son personnage, dès ses premières années, n’est parvenu à vivre que grâce à l’image. C’est en effet l’histoire d’une danseuse qui deviendra photographe, d’une égérie artiste, d’une amoureuse de la beauté. Placée sous le signe du spectacle depuis sa naissance, Isa doit paraître pour être, sans pour autant que cela soit synonyme de superficialité. Rien de plus profond que le culte du style auquel elle s’adonne, et les silhouettes fantomatiques de son père violoniste et de sa mère trapéziste, croisées de temps à autre, auront sans doute contribué (malgré le caractère très intermittent de leur présence dans la vie de leur fille) à développer chez elle une soif de perfection et l’espoir d’un absolu esthétique jamais atteint.

La perception du réel se révèle donc fondamentalement différente de la grille d’analyse ordinaire d’un lecteur adulte et « normal », c’est-à-dire inséré dans un monde utilitariste et consumériste. En ce sens il est nécessaire, pour entrer dans l’univers magique d’Isa, de se laisser envoûter, sans être désarçonné par l’apparente désarticulation du récit. Les phrases sont courtes, et, comme les mosaïques anciennes, juxtaposées sans un ciment unificateur : c’est à l’observateur de retrouver en lui des échos du passé pour obtenir une vue d’ensemble. Mais c’est à ce prix que chacune de ces énonciations peut être considérée comme une saisie immédiate d’instants réels, absolument pure, sans artifice.

Pas plus que dans son écriture, le compromis ne semble dans la nature d’Isa; aussi, elle n’admet pas la trahison, et qu’elle entre dans une relation, elle s’y donne sans retenue aucune, se livre en victime offerte : des années durant elle a déposé devant sa poupée, sans oser la toucher, ce qu’elle trouvait de plus précieux, guettant de muets commentaires dans l’oeil brillant de celle-ci. Mais quand elle a dû la quitter, la prenant pour la deuxième fois de sa vie dans ses bras, elle l’a immolée par le feu… De même lorsqu’elle décide d’adopter une pose esthétique ou de choisir un homme, elle le fait sans à-peu-près, et les oublie de la même manière. Isa ne se sauve de l’égoïsme que grâce à l’esthétique : son absence aux autres n’a d’égale que sa douleur de ne pas arriver au but qu’elle s’est fixé, et l’indifférence n’est pas chez elle une faute, mais la condition sine qua non de sa recherche tâtonnante.

Dans sa quête d’absolu, Isa ne peut trouver de compagnons de route, et cette jeune fille grandie sans parents, indépendante parce qu’abandonnée de fait, au seuil de sa vie d’adulte, n’a trouvé de véritable compréhension que dans le regard de verre de sa poupée. Isa se laisse porter par la vie, se contentant de donner de temps à autre une ferme impulsion, au hasard de ses désirs. Son caractère exceptionnel vient de son refus de s’incliner face à la nécessité de choisir rationnellement, et de grandir. Et Irina Ionesco a su nous ouvrir une fenêtre sur cette dérive, qu’on quitte avec l’impression douloureuse de retrouver la banalité du réel. Mais n’est-ce pas à chacun d’entre nous de reconstruire son propre rêve?

Aurore Lesage
( Mis en ligne le 11/08/2004 )

La correspondance de Madame du Deffand et Voltaire (un travail de Isabelle et Jean-Louis Vissière)

vissiere.jpgQuand nous avons publié, aux Editions Des femmes, des lettres de Madame du Deffand ou des articles de Madame de Girardin, il s’agissait de personnalités connues et appréciées – même si leurs oeuvres ne figuraient dans aucun catalogue de librairie. Le cas de Madame de Charrière est tout à fait différent. (…)
 
Nous avons été éblouis par la qualité des textes : il y avait là un témoignage d’une richesse exceptionnelle sur la Révolution française. Comme la commémoration de 1789 approchait, nous avons pensé qu’il fallait commencer par là. Avec le soutien des associations néerlandaise et suisse, nous avons publié, sous le titre Isabelle de Charrière, une aristocrate révolutionnaire, un volume qui a été salué par la critique. Dans Le Nouvel Observateur, Mona Ozouf lui consacrait une page, illustrée d’un portrait de l’écrivaine.
 
Lors du grand colloque de Toulouse sur les femmes et la Révolution, Isabelle de Charrière a fait l’objet de diverses communications, mais surtout sa pièce L’Emigré a été mise en scène sous forme de lecture à plusieurs voix.
(…) Depuis 1989, Isabelle de Charrière a conquis le statut d’écrivain à part entière et même d’écrivain classique. Ses romans, sa correspondance avec Constant d’Hermenches et Benjamin Constant ont été réédités, si bien qu’elle intéresse maintenant les universités françaises et américaines. Il existe plusieurs thèses sur elle. Nous saisissons volontiers l’occasion de rappeler que les Editions Des femmes ont été, ici, à l’origine d’une véritable résurrection.
 
I. et J.-L. V.
 
 
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Madame du Deffand et Voltaire

Voici, pour la première fois réunies, les lettres qu’échangèrent de 1759 à 1778, la marquise du Deffand et Voltaire, ces amis de longue date, ces deux grandes figures du scepticisme et de la liberté d’esprit. Voltaire s’y montre un vieillard faussement modeste,  » mort et enterré entre les Alpes et le Mont Jura « . et la Marquise de conclure en faveur de  » l’immortalité de l’âme « , en voyant ce mort si vivant !… Un échange épistolaire éblouissant, plein de saveur, d’élégance, de facétie, de vie.

Cher Voltaire
Edition de Isabelle et Jean-Louis Vissière
575 p. – 22 € – 1987 Réédition 2007
 » Je ne vous ai envoyé Madame, aucune de ces bagatelles dont vous daignez vous amuser un moment. J’ai rompu avec le genre humain pendant plus de six semaines ; je me suis enterré dans mon imagination ; ensuite sont venus les ouvrages de campagne, et puis la fièvre. Moyennant tout ce beau régime vous n’avez rien eu ; et probablement n’aurez rien de quelque temps. Il faudra seulement me faire écrire, madame veut s’amuser, elle se porte bien, elle est en train, elle est de bonne humeur, elle ordonne qu’on lui envoie quelques rogations ; et alors on fera partir quelque paquet scientifique ou comique, ou philosophique, ou historique, ou poétique, selon l’espèce d’amusement que voudra madame, à condition qu’elle le jettera au feu dès qu’elle se le sera fait lire. « 
Voltaire
 » … Savez-vous ce qui vous arrivera si vous ne m’écrivez pas ? Je vous tiendrai pour mort et je ferai dire des messes pour le repos de votre âme dans tous les couvents de jésuites ; je vous ferai louer, célébrer, canoniser… Vous êtes le plus ingrat et le plus indigne des hommes si vous ne répondez point à l’amitié que j’ai pour vous, et si vous ne vous faites pas une obligation et un plaisir d’avoir soin de mon amusement. « 
Marquise du Deffand

Texte d’Anne-Marie Planeix dans le catalogue des trente ans des Editions Des femmes

La vigilance de ma mère m’accompagne et m’étonne depuis toujours. Je me dis, dans les mots d’aujourd’hui, qu’il en va d’une véritable préoccupation « paritaire ». Pour elle, le monde humain est constitué d’hommes et de femmes et, là où les femmes manquent, sont rendues invisibles ou niées, que ce soit par violence manifeste ou… (pseudo) courtoise, il y a amputation et trahison. Nous, ses filles, savions que nous existions « à part égale », de fait et de droit, et qu’il fallait par une sorte de devoir l’affirmer. Mais sa vigilance n’était pas et n’est toujours pas seulement défensive, elle est reconnaissance quasi-immédiate de l’événement « précieux » pour une femme. Cet événement a été la création par Antoinette Fouque du MLF et celle de la maison d’Editions Des femmes.
A l’époque, fidèle aux « idéaux » de 68 que j’essayais d’appliquer dans mon travail par exemple (j’enseignais la philosophie), et bien convaincue de la nécessité d’un « mouvement de libération », je n’arrivais pas cependant à sortir d’une sorte de bonne volonté abstraite. Je ne savais pas où m’adresser… Et c’est ma mère la première qui, avec une joie irrésistible, m’a fait lire, et offert des textes publiés par ces éditions, et qui m’a parlé d’Antoinette Fouque. Si bien que lorsqu’en 1975 à l’occasion d’un forum des livres organisé à Grenoble, j’ai rencontré des femmes du MLF travaillant à la maison d’Edition Des femmes ce fut comme un rendez-vous déjà préparé, attendu et espéré. Cette « arrivée » au mouvement se trouve ainsi pour moi indéfectiblement liée à ma mère et à son enthousiasme.
 
A.M.P.

Texte de Yolande Papetti-Tisseron dans le catalogue des trente ans des éditions Des femmes

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Texte de Yolande Papetti-Tisseron publié dans le catalogue des trente ans des Editions Des femmes :
En l’an 2005 il existera encore des fourmis travailleuses, des cigales friandes et chanteuses de divers plaisirs.
Mais un « roc » est là, souvent loin de Paris : Antoinette Fouque. Toujours très intègre, me semble t-il, pour ses choix. Telle une abeille, elle gère sa jeune et petite équipe : l’une fait ceci, l’autre fait cela, la troisième fait d’autres choses. Une activité de femmes mais… Lorsque je suis présente – contente – dans ce lieu, je m’amuse sérieusement.
 
Ne serait-ce pas la grande glycine violette dans la cour, une beauté présente.
 
Bref, cette atmosphère m’a conduite à quitter d’autres éditeurs « douteux » ou pervers peut-être et je suis revenue aux Editions Des femmes.
 
Le nouveau look des livres avec une forme de liberté et beaucoup d’esthétisme m’ont séduite à nouveau.
Alors telle une souris je me suis glissée dans ce gruyère pour y trouver les trous d’autres idées. Le psychisme vole tel un cerf-volant avec le corps. Jacques Derrida, Françoise Sagan sont venus me faire un léger clin d’oeil…
Personnellement, je ne peux qu’apprécier la ponctualité, la présence et l’éthique de cette « maison » que sont les Editions Des femmes, sinon je n’écrirais pas ce que je dis.
Alors, à quand mon autre manuscrit chez vous ? Allez Yolande Papetti-Tisseron au travail ! Cela me fait penser au psychanalyste Pierre Fédida qui avait évoqué quant à mon choix d’être psychanalyste ce beau mot : « métier ». Inspiration à suivre…
Y.P.-T.
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Des étoffes à la peau de Yolande Papetti-Tisseron
 » Le langage peut être défaillant pour exprimer le manque : manque de bras, de mains, de mots, de corps maternel. Manque éprouvé vraiment ou simplement à peine esquissé et dont le deuil reste interminable. Manque d’amour. Et les étoffes arrivent, intermédiaires réparateurs plus ou moins doux et douillets entre la mère et l’enfant, entre celle qui aurait pu donner et celui qui aurait eu à recevoir en tant qu’enfant… «  Y.P.T.

Yolande Papetti-Tisseron est psychanalyste et formatrice de travailleurs sociaux. Elle est aussi peintre et expose régulièrement à Paris depuis 1999. Elle a préfacé les écrits de Bertha Pappenheim, Le Travail de Sysiphe (Des femmes-Antoinette Fouque, 1986). Elle est l’auteur de Du deuil à la réparation, également réédité en 2004.

Stefan Zweig, lu par Fanny Ardant

Fanny Ardant lit
La Peur
de Stefan Zweig

Coffret 2 Cassettes – 25,50 €
Coffret 2 CD – 27 €La peur.jpg

 » Lorsque Irène, sortant de l’appartement de son amant, descendit l’escalier, de nouveau une peur subite et irraisonnée s’empara d’elle. Une toupie noire tournoya devant ses yeux, ses genoux s’ankylosèrent et elle fut obligée de vite se cramponner à la rampe pour ne pas tomber brusquement la tête en avant…
Quand elle s’en retournait chez elle, un nouveau frisson mystérieux la parcourait auquel se mêlaient confusément le remords de sa faute et la folle crainte que dans la rue n’importe qui pût lire sur son visage d’où elle venait et répondre à son trouble par un sourire insolent. Déjà les dernières minutes auprès de son amant étaient empoisonnées par l’appréhension de ce qui l’attendait. Quand elle était prête à s’en aller ses mains tremblaient de nervosité, elle n’écoutait plus que distraitement ce qu’il lui disait et repoussait hâtivement ses
effusions. Partir, tout en elle ne voulait plus que partir, quitter cet appartement, cette maison, sortir de cette aventure pour rentrer dans son paisible monde bourgeois. Puis venaient les ultimes paroles qui cherchaient en vain à la calmer, et que, dans son agitation, elle n’entendait plus. Et c’était enfin cette seconde où elle écoutait derrière la porte, pour savoir si personne ne montait ou ne descendait l’escalier. Dehors l’attendait déjà la peur, impatiente de l’empoigner et qui lui comprimait si impérieusement le cœur que dès les premières marches elle était essouflée. « 

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Irène est en proie au trouble le plus intense. Un trouble fait de désir et de crainte du désir, d’élan et de remords. Elle a le sentiment de trahir et redoute qu’une femme ne la trahisse. Déchirée entre son amant et son mari, elle ment, se cache, balbutie, s’évanouit.

Lorsque paraît en France La peur, en 1935, Stefan Zweig étonne par son art subtil d’explorer les sentiments qu’éprouve une femme, au plus près de leur réalité psychique corporelle. Cette nouvelle est une sorte de prélude aux romans La confusion des sentiments, Amok, Vingt-quatre heures de la vie d’une femme, où il déploiera le même talent.

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« Du deuil à la réparation » de Yolande Papetti-Tisseron

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Du deuil à la réparation

“Anna O” restituée à Bertha Pappenheim : naissance d’une vocation sociale.
145 p. – 16€ – 1986- 2004

Comment le désir d’aider naît-il chez une femme et comment ce désir détermine-t-il son engagement dans une activité ou une profession sociale ou paramédicale.
Freud et Breuer, les pionniers de la psychanalyse auraient pu tenter, dès le premier ouvrage de psychanalyse paru en 1895, d’approcher cette question avec Anna O, la première patiente des Études sur l’hystérie. Car Anna O était Bertha Pappenheim, une des grandes figures du service social allemand.
A l’opposé de la psychanalyse qui se construira sur la théorie des fantasmes, Anna O- Bertha Pappenheim connaît le poids, dans la vie, des traumatismes réels, notamment des deuils et des séparations. A partir d’Anna O enfin restituée à Bertha Pappenheim, Yolande Tisseron élargit sa réflexion aux motivations du don de soi et de l’engagement social chez les femmes : comment se fabrique une vocation sociale ? Quel rôle y joue le souci qu’éprouve l’enfant pour les préoccupations de ses parents ? Pourquoi la dépression chez les femmes mobilise-t-elle si souvent le désir de donner et d’aider ? Dans ce déchiffrage, la proximité des femmes avec la naissance et le rôle qu’elles ont joué dans les rituels de la mort apparaissent les prédisposer à une sensibilité particulière en ce qui concerne le deuil et le don.
Au-delà de ce champ social, subsiste l’interrogation fondamentale qu’arpente une femme, inlassablement, sur elle-même et sur ses géniteurs. D’une filiation à l’autre, Yolande Tisseron unit ici le parcours d’Anna O, première femme patiente de la psychanalyse, à celui de toute femme-assistante, axée sur la réparation des autres.

Yolande Papetti-Tisseron est psychanalyste et formatrice de travailleurs sociaux.Elle est aussi peintre et expose à Paris depuis 1999. Elle a préfacé les écrits de Bertha Pappenheim Le Travail de Sysiphe.

Bertha Pappenheim est la célèbre « Anna O. » dont Joseph Breuer écrivait en 1907 : « Le cas d’Anna O., cellule germinale de toute la psychanalyse… »

Bertha Pappenheim fut aussi assistante sociale, et dirigea à partir de 1895 l’orphelinat juif de Francfort.

Pionnière active et persévérante, préoccupée de réparation, elle écrivit entre 1911 et 1912 « Le Travail de Sisyphe ». La protection des femmes et des jeunes filles, la question de la traite des blanches, l’organisation sanitaire et sociale dans la communauté juive de Francfort, le sionisme, constituent la trame de ce courrier régulier et quotidien.

***
Du même auteur
Des étoffes à la peau

La « Jane Eyre » de toutes les adolescentes, disponible en livre audio (Avec la voix de Fanny Ardant)

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Fanny Ardant lit
Jane Eyre
de Charlotte Brontë
Coffret 2 Cassettes – 25,50 €
Coffret 3 CD – 32 €

C’est en 1847 que Charlotte, l’aînée des trois sœurs Brontë, publia Jane Eyre. Son succès fut immédiat et immense. La petite orpheline, privée d’affection, élevée dans une institution pour adolescentes pauvres, entrant comme gouvernante au château de Thornfield, est en effet une des figures les plus fascinantes du roman romantique. Et Rochester, qu’elle aime et dont le destin la sépare, est sombre, sarcastique, le double du héros né de l’imagination de la sœur cadette, Emily, dans Les hauts de Hurlevent.

L’amour et l’indépendance de la jeune fille, les préséances sociales et les revanches sur le passé, l’attirance pour les idéaux généreux, les messages de la passion triomphant du temps et de l’espace, les flammes de la folie, tels sont quelques-uns des thèmes qui se détachent sur un fond d’observation à la Dickens et qui sont emportés par un grand souffle romanesque.