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Auteur : Guilaine Depis
Paul SUNDERLAND, lecteur exceptionnel de Marie DESJARDINS
Ambassador Hotel, de Marie Desjardins : Rock et Paléolithique
Selon les données de la Tradition Primordiale, le meurtre d’Abel par Caïn correspond à l’ascendant pris par la civilisation de l’agriculture sur celle des chasseurs-cueilleurs, autrement dit le passage de la période dite du Paléolithique à celle dite du Néolithique. Toujours selon la même source, la civilisation d’Abel, paléolithique, se caractérisait par une utilisation de l’espace, étant d’essence nomade, tandis que celle de Caïn, néolithique, sédentaire et agricole, se fondait avant tout sur le temps.
La loi de compensation fait qu’un peuple « spatialisé » produit un art basé sur le temps, le rythme : ce sont les pâtres qui inventèrent la musique, le chant, la poésie. À l’inverse, un peuple fondant son existence sur les saisons, le temps qui passe, celui des semailles et des moissons, produit des réalisations spatiales, architecturales : des agriculteurs du néolithique naquirent les villes. (Sous ce rapport, l’opposition milieu urbain / milieu rural n’est peut-être pas aussi tranchée qu’elle le semble.)
Il est vrai que Marie Desjardins n’aborde pas ces questions dans son roman Ambassador Hotel. Dans ce consistant volume, nous découvrons l’histoire d’un groupe de rock, RIGHT (en majuscules), issu des années soixante et entretenant sa légende jusque dans les premières années du vingt-et-unième siècle. Plutôt que d’écrire l’histoire d’un groupe véritable, Desjardins a volontairement créé un groupe fictif parce que cette solution permet d’explorer sans embarras tous les ressorts, y compris les plus insoupçonnés, d’une carrière artistique inscrite dans une période précise de l’Histoire, et pas n’importe laquelle.
« Il avait l’impression d’être Elvis. C’était divin. Il se foutait complètement d’avoir mal dormi sur le matelas de camping empestant le moisi dans la camionnette, aux côtés de Derek et de Burt, l’un ronflant, l’autre lui ayant grimpé dessus pendant la nuit. » Ces trois phrases sont hautement significatives. L’histoire de RIGHT est d’abord celle de son frontman, Roman Rowan. Nous sommes dans les années soixante, en Grande-Bretagne, là où l’ancien bardisme n’a pas encore épuisé ses feux. De manière assez classique, Rowan est un jeune homme réfractaire au milieu urbain petit-bourgeois au sein duquel il a vu le jour. Influencé par les (déjà) icônes du rock de la décennie précédente, il va chercher un chemin autre que celui déjà formaté par sa famille (bienveillante au demeurant) et la société britannique.
Ainsi débute un cycle assez familier : l’absence de moyens financiers, les concerts chichement rémunérés dans des pubs à droite à gauche, les longs trajets en camionnette pourrie et les turpitudes sexuelles, la fascination pour ceux qui sont en train de réussir à percer, les inventeurs du psychisme pop à l’anglaise, à deux doigts de conquérir l’Occident. Mais ce que Roman Rowan ne sait pas, c’est que pour lui, en quelque sorte, tout est déjà en place de son parcours. Il va se retrouver dans un processus de sélection qu’on pourrait appeler le destin : de parfait inconnu, il deviendra parfait chanteur de rock et cette sorte d’émondation va s’opérer autour de lui et sur lui-même. Un autre terme pour cet affinage, peut-être plus approprié, sera utilisé plus loin.
Du point de vue du protagoniste, un certain nombre d’événements historiques interviennent en sa faveur. Trois seront retenus ici. Le premier est sa rencontre avec Clive, celui qui deviendra son bassiste de prédilection et bien plus : un frère. Le deuxième est sa rencontre avec Bronte Gardner, frontman du groupe Bronteshire qui a déjà connu le succès mais dont l’arrivée de Rowan va marquer la fin. Le troisième est l’assassinat de Robert Kennedy, peu après minuit, le 5 juin 1968.
Le duo inoxydable qu’il va former avec Clive signifie que d’autres musiciens, d’autres candidats seront rejetés. La rencontre avec Gardner a, quant à elle, ceci de très particulier qu’elle est cette fois un cas de gémellité contrariée : Gardner est une sorte de double noir de Rowan. Dire qu’il y a de suite un conflit d’egos entre eux est juste mais on peut aller plus loin. « Gardner », le « jardinier », est en quelque sorte l’agriculteur, le « caïnite » du drame, alors que « Rowan », le « sorbier des oiseleurs », est lui-même la pousse. Il s’en faut de très peu que les deux hommes, bourrés de talent au point d’être habités d’un élément surnaturel, collaborent de manière insigne et bouleversent encore davantage la scène musicale. Toutefois, Gardner se retirera. Un occultiste pourrait dire que ce dernier est un pratiquant de la « voie de la main gauche » tandis que Rowan, solaire, se tient du côté de la « voie droite » (« right », justement).
Rejeté de même, le demi-frère adultérin de Rowan auquel il est fait plus d’une fois allusion mais que nous ne verrons jamais. Le troisième événement, l’assassinat de Robert Kennedy, se produit le jour où le candidat à la primaire démocrate (en vue de la présidentielle américaine) et les membres de RIGHT se trouvent à l’Ambassador Hotel, établissement de Los Angeles qui n’existe plus aujourd’hui. De cette tragédie sortira Shooting at the Hotel, tube dès lors béni et maudit de RIGHT.
Dans cette vie consacrée à la musique, tout est sacrifice et petit à petit, Rowan s’approchera de cette vérité. Lui-même, de « sacrificateur » (femmes lui tombant dans les bras, offrandes-suicides de fans) devient « sacrifié », c’est-à-dire littéralement rendu sacré, délesté de sa condition « profane ». Il ne s’agit pas seulement du fait d’atteindre au cours des concerts des exaltations proches de la transe ; il faut payer de sa personne afin de capter cette sorte de « paléo-énergie » venue du fond des âges, des pâtres-mages. (Presley, un autre crucifié du rock, l’avait compris.) Dans un monde généralement privé d’initiation, de vie intérieure, dans une sphère d’activité où l’argent prime sur beaucoup de choses, Roman Rowan parvient, par étapes successives, à se dessaisir d’entraves égotistes et à élargir ses prestations scéniques au point d’en faire des cérémonies durant lesquelles, comme son patronyme l’indique, il parvient à chanter ce qu’en ésotérisme on appelle la langue des oiseaux, c’est-à-dire la langue du Ciel, des états de conscience supérieurs et des initiés. (En outre, « Roman Rowan » et « rock ‘n’roll » possèdent des sonorités pas excessivement éloignées l’une de l’autre, suggérant peut-être ainsi la nature hypostatique du premier.) Il est remarquable par ailleurs de constater à quel point, au fil des ans, le personnage devient absolument maître de lui-même, notamment face aux représentants de la presse professionnelle. Pas de mensonge, pas d’hypocrisie dans les propos convenus qu’il donne en réponse aux questions (la plupart du temps) sans originalité : c’est que Rowan a développé un aspect « exotérique » destiné au plus grand nombre, y compris ses proches. C’est dans son for intérieur que l’aspect « ésotérique », réservé au petit nombre (mais pressenti par un journaliste en particulier), se développe.
De manière astucieuse, Marie Desjardins a choisi une narration pyramidale : nous suivons à tour de rôle les débuts de Roman Rowan, son ascension dans les années soixante et sa vie dans la période post-hippie. (Le mouvement hippie, le communautarisme psychédélique reçurent deux coups de semonce en 1969 avec les événements du concert d’Altamont et de la Manson Family. Le coup d’arrêt, toutefois, vint en 1973 à l’occasion du premier choc pétrolier.) La première phase est la remarquable peinture de la montée en puissance du rock d’Albion. Les sources d’inspiration artistique y sont parfaitement comprises et restituées par Desjardins (entre autres la filiation fascinante avec le romantisme hugolien et, d’une manière générale, le courant décadentiste de la fin du XIXè siècle, l’influence de la Golden Dawn). La seconde période biographique montre en quelque sorte la gueule de bois après le rêve Peace & Love, les difficultés de cohésion du groupe, les premières usures du temps et les déserts à franchir.
Les deux voies s’élèvent au fil de la lecture pour converger vers l’apex de la pyramide : l’ultime concert de RIGHT, donné de nos jours. Le groupe, internationalement connu, connaît son apothéose. De la fourgonnette déglinguée des commencements aux avions de ligne tout confort, Rowan sillonne la Terre en bon pâtre qu’il est. Subsistent néanmoins malgré la gloire, la reconnaissance, les souffrances, les interrogations. Quel sens donner à la mort de Robert Kennedy, tremplin non calculé de RIGHT ? Comment ne pas se sentir coupable d’avoir reçu cette chance ? Que penser de la rencontre manquée entre Rowan et la photographe Havana ? C’est pourtant là que la révélation va se faire, à l’occasion d’un incident en apparence anodin. Roman Rowan, l’obscur petit Londonien de quinze ans que le rock fascinait déjà en 1960, en a maintenant soixante-dix et il connaît désormais le véritable couronnement de sa carrière, au milieu d’une foule qui ne remarque rien. Il a toujours été question, en effet, de sacrifice (dans le texte vétérotestamentaire, l’offrande d’Abel, agréée par Dieu, est celle d’un premier-né ; il ne pouvait donc revenir qu’à Roman, premier-né de son père, et pas son demi-frère, de porter la charge sacrificielle) mais c’est à cet instant seulement qu’il le comprend. Comme le sorbier dont il porte le nom, il donne ses fruits à l’automne.
La retraite dorée sera-t-elle toutefois marquée par un désœuvrement délétère débouchant sur la mort ? Imaginons qu’une fois au sommet de la pyramide, nous poursuivions le tracé des deux lignes : un retournement se produit et donne lieu à un évasement, une ouverture. Et en effet, les toutes dernières lignes du roman semblent vérifier le dicton selon lequel le rock ‘n’roll ne mourra jamais. Chassez le sacré par la porte, il revient par la fenêtre. Marie Desjardins, avec brio, nous conte dans Ambassador Hotel le pourquoi et le comment de la chose.
« Un thriller palpitant sur le terrorisme » selon Parutions.com
Sputnik a souhaité interviewer Christian de Moliner
Dans un roman futuriste et prophétique, des nationalistes russes et des islamistes saoudiens tentent de trouver une issue à une guerre civile en France. Comment est-ce possible? Christian de Moliner donne à Sputnik certaines clés pour résoudre cette énigme.
«La guerre civile fait rage en France»: dès le 4e de couverture de ce roman, nous voilà plongés dans le vif du sujet. Si cette phrase peut propulser le lecteur dans la sphère rassurante de l’invraisemblable, une fois que l’on a lu dans le même paragraphe que cette guerre imaginaire «oppose islamistes et nationalistes», on atterrit dans un présent nettement moins hypothétique et l’on perd quelques plumes d’optimise au passage.
Pourtant, la question se pose: pourquoi les Russes sont-ils immédiatement associés au sujet? Christian de Moliner, l’auteur du roman, développe son hypothèse:
«Quand on regarde bien, les nationalistes identitaires en France se tournent de plus en plus vers la Russie. On voit une certaine vénération de la Russie de M. Poutine. J’estime que s’il y a un conflit d’ordre religieux qui éclatait en France, naturellement, les plus extrémistes nationalistes se tourneraient vers la Russie qui serait la protection des chrétiens.»
Une opinion qui risque de semer un doute dans l’esprit du futur lecteur, puisque les fameux nationalistes identitaires ne sont pas forcément plongés dans la chrétienté (encore moins les nationalistes extrémistes). Mais admettons ce parti-pris de l’auteur. Mais dans ce cas, l’héroïne du roman ne devrait-elle pas être une #JeanneDArc, un symbole de l’opposition à l’«envahisseur»? Pourtant, l’héroïne est bien différente de cette image d’Épinal:
«J’ai voulu choisir une fille qui soit de nom arabe et musulmane, mais non croyante, précise à Sputnik l’auteur, par contre, son père est nationaliste. Je pensais que pour l’intrigue du roman, c’était très important.»
Jusque-là, tout va bien, il est très intelligent de semer la graine du conflit au cœur du personnage principal pour que sa vie intérieure reflète en permanence le conflit extérieur, amplifiée. La connaissance de soi, l’évolution de l’âme du protagoniste sont toujours intéressantes à observer, d’autant plus qu’elle grandit avec le déroulement des évènements. Mais l’auteur en décide autrement:
«J’ai aussi voulu placer quelqu’un qui ne comprend pas vraiment ce qui se passe. Placée au centre de l’intrigue, l’héroïne se rend compte qu’elle est indispensable pour faire un lien entre les différents partis, mais ne comprend absolument pas ce qui se passe. Elle sent qu’elle est manipulée, mais ne sait pas comment. Je voulais y mettre une fille pour que ça soit quelqu’un de fragile.»
Comme l’action du roman se situe dans 20 ans, vers 2038, les choses peuvent encore évoluer. Mais pour l’auteur, il est clair que «cette probable guerre civile se basera sur le fond ethnique et religieux, les deux confondus.» Se voulant être une prophétie du futur, l’histoire de la «Guerre de France» est pourtant solidement ancrée dans le passée, puisque les deux factions de cette guerre civile se sont inspirées d’exemples historiques: le «Front des croyants» fait référence au «Front islamique du salut» (FIS) lors de la guerre civile en Algérie et s’oppose à «L’Armée secrète française», qui est une sorte d’«Organisation de l’armée secrète», (OAS), «ceux qui ont essayé de lutter contre l’abandon de l’Algérie française en 1960», précise l’auteur.
Et les Russes dans cet imbroglio franco-français? Bonne nouvelle pour nos collègues de RT: la chaîne d’information existerait toujours dans 20 ans, puisque l’un de ses journalistes arbore ouvertement sa casquette «médiatique» dans le roman de Christian de Moliner. Pourquoi donner des éléments si concret? Insinuer que c’est juste une couverture? Pas de réponse précise de la part de l’écrivain: «Je ne sais pas si la chaîne existera encore… Le temps que j’écrive mon roman, ils ont changé le nom. Dans l’intrigue, il lui fallait avoir une couverture. Et, dans un ancien temps, beaucoup avaient une couverture de journaliste.» Pour jouer les méchants, devrions-nous ajouter?
Christian de Moliner ne déplace pas par hasard une grande partie de l’action de son livre à Chișinău, capitale moldave, puisque les discussions autour du statut de la Transnistrie reviennent régulièrement dans la presse occidentale, un élément reconnaissable de plus pour assurer le succès du roman. Et cela permet également de «repasser une couche» sur le rôle du réseau prorusse dans le conflit imaginaire français, sans trop s’y avancer:
«Je suis au courant qu’en Moldavie existent deux courants: pro-UE et prorusse, dit Christian de Moliner. Pour l’instant, ce sont les pro-Européens qui sont au pouvoir. Mais l’action se passe dans 20 ans et c’est sciemment que j’ai dit que les « Russes se sentent chez eux en Moldavie », parce que je pense que tôt ou tard l’influence russe va de nouveau s’étendre sur la Moldavie.»
Mais, malgré l’apparition d’agents du GRU, le service de renseignement militaire russe, dont le profil reste flou et quelque peu schématique, le vrai nœud gordien de l’intrigue du roman est étatique. C’est là que réside l’inquiétude de l’auteur, toujours nourrie par les réminiscences historiques de 1958, juste avant le retour du général de Gaulle, quand «le gouvernement était complètement dépassé».
«C’est ce parallèle historique que je prends. La guerre d’Algérie- c’est ce qui risque de se passer en France: la guerre ethnique et religieuse. On a occulté le côté religieux de la guerre d’Algérie, mais qui existait.»
Christian de Moliner n’a peur de rien, ni d’éventuelles critiques, ni des représailles islamistes, puisqu’il a «déjà écrit un livre sur l’Islam et n’a pas été attaqué». Pour lui, il n’y a pas de danger de ce côté-là, «d’autant plus que je présente honnêtement le point de vue islamiste. Je ne juge pas,» se défend l’auteur. Mais cela ne l’empêche pas d’enfoncer le clou:
«La guerre serait telle que le gouvernement serait complètement impuissant.»
Il ne vous reste plus qu’à lire l’ouvrage paru aux Éditions Pierre Guillaume de Roux et à juger par vous-même s’il s’agit d’un «thriller mené à cent à l’heure», comme le mentionne sa notice promotionnelle, d’une sombre prophétie ou encore d’un roman d’espionnage… ce qui risque d’être le plus alléchant pour le lecteur français, par ces temps où l’actualité ramène tous les jours son lot de spéculations sur les agents de l’ombre.
Boulevard Voltaire met en lumière « La Guerre de France » par une interview
Livre : La Guerre de France, de Christian de Moliner
Christian de Moliner, les lecteurs de Boulevard Voltairevous connaissent bien à travers vos chroniques, notamment économiques, et vous venez de publier, chez Pierre-Guillaume de Roux, un roman, La Guerre de France, dans lequel vous racontez la guerre civile entre islamistes et nationalistes qui déchirerait notre pays en 20… en quelle année, selon vous ?
Selon moi, elle a déjà commencé. L’attentat du Bataclan marque le début de cette guerre civile ethnique et religieuse. Les événements que je décris se déroulent entre 2035 et 2040. Dans mon récit, la crise actuelle s’est amplifiée. Aux attentats d’extrémistes musulmans se rajoutent des représailles sanglantes de nationalistes. Ceux-ci assassinent des civils musulmans dans la rue. J’ai pris pour modèle la guerre d’Algérie où, au sein de chaque communauté, des terroristes s’efforçaient de tuer le maximum d’innocents appartenant à l’autre camp.
La question de la partition de notre territoire est évidemment au cœur de votre roman. Annoncez-vous la fin de la France ?
Quelle France ? Celle qui a existé jusqu’en 1970 et qui n’évoluait que très lentement est morte en quatre décennies. Il y a peu de rapports entre notre pays actuel et celui de Charles de Gaulle. Le Général serait horrifié, sans doute, s’il revenait à la vie, mais nous ne pourrons jamais retourner en arrière, sauf si une dictature sanglante se mettait en place et ordonnait des expulsions massives. Je redoute une telle dérive, car le prix humain à payer serait alors terrifiant.
Mon thriller décrit une des solutions possibles : donner l’indépendance aux enclaves musulmanes en échange de la création d’une zone autonome où aucun fidèle du prophète n’aurait le droit de résider. Un début de séparation ethnique qui permettrait de « préserver » la France de toujours dans une fraction de l’Hexagone. Mais cette solution est raciste et elle ne serait acceptable que dans le cas où, comme dans mon livre, la France est en plein chaos.
L’idéal, bien sûr, serait l’intégration des musulmans dans un modèle laïque, où les communautés coexisteraient sans tensions et où aucun culte ne serait privilégié. Cette « fusion » harmonieuse semble malheureusement impossible et les fidèles rigoristes (un tiers des musulmans) s’éloignent de plus en plus de leurs compatriotes athées, chrétiens et juifs ou même des croyants modérés.
Autre solution : une soumission à la Houellebecq. Dans ce scénario, nous finirions par donner les clés du pouvoir aux musulmans (pourtant minoritaires), qui nous « octroieraient » un statut de dhimmitude. Malheureusement, la politique actuelle favorise cette option, car nous réagissons de plus en plus mollement aux empiétements de l’islam dans la vie courante. Dans ce cas, nous assisterions à la fin définitive de la France. Nous devrions même, en principe, changer de nom, car la nouvelle entité n’aurait plus rien à voir avec l’ancienne.
Cette guerre civile est-elle encore évitable ? Si oui, comment ?
Le nombre de musulmans ne cesse d’augmenter. En face, les nationalistes se renforcent d’année en année. Ils rejetteront de plus en plus l’islam (au point de frôler le racisme) et pourraient être tentés par la lutte armée, surtout si les attentats sanglants reprennent. Et il suffit, parfois, d’une atrocité pour basculer en quelques jours dans l’horreur. Le FLN, en 1955, était sur la défensive et le mouvement indépendantiste s’essoufflait. Le conflit était de basse intensité. Les massacres effroyables de femmes et d’enfants européens à Philippeville ont entraîné des représailles sans nuances qui ont révolté la majorité des musulmans algériens : ils sont passé du côté du FLN. Enfin, le pire n’est jamais sûr.
Votre héroïne porte un patronyme arabe et est née d’un père européen. Est-ce qu’au fond, votre livre ne pose pas à la fois la question de l’identité individuelle, familiale et celle de l’identité nationale ?
Si ! Djamila est entièrement « assimilée ». Quand on le lui demande, elle ne peut même pas dire si elle est musulmane ou athée. Elle est française à la mode Zemmour, même si son prénom est arabe. Elle n’adhère, en fait, à aucun culte, comme beaucoup de nos compatriotes dont les ancêtres étaient chrétiens ou juifs. L’identité nationale représente nos valeurs communes : respect de la loi, celui de toutes les religions sans exclusive, de la démocratie, du droit de vote. Mais elle se heurte frontalement avec l’islam des intégristes.
Et pour conclure ?
« La guerre de France » est inévitable et a déjà commencé. Elle est actuellement assoupie, mais elle risque de reprendre à tout moment et de s’aggraver, et j’ai donné les diverses façons d’y mettre fin. Cela dit, mon roman est avant tout un thriller que j’ai essayé de rendre palpitant et j’espère que je ferai passer un bon moment à mes lecteurs !
Propos recueillis par Georges Michel
Service littéraire trouve le roman de Christian de Moliner très bon
« Un roman envoûtant » selon Argoul pour « Ambassador Hotel »
Marie Desjardins, Ambassador Hotel
Marie Desjardins, auteur francophone nord-américaine, a publié plusieurs biographies et des écrits sur le jazz et la musique populaire (Sylvie-Johnny love story, Vic Vogel histoire de jazz). Elle se lance avec ce roman dans la carrière mythique d’un groupe de rock inventé, RIGHT, dont le nom est formé par les premières lettres de chaque homme du groupe (aucune femme). Outre le talent de chacun, Clive à la guitare basse, John puis Lincoln à la batterie, Bronte puis Mick au piano, c’est bien la voix de Roman, le chanteur, qui emporte tout. Il est le personnage principal, le héros, la star du rock.
Le dessin de couverture reproduit son portrait donné à la fin du livre, p.546, lorsqu’il était au tout début de sa vingtaine : « lors du concert spécial qu’il avait donné à Londres en 1968 pour souligner la sortie de [l’album] Right There, torse nu, pectoraux saillants, micro brandi devant sa bouche démesurément ouverte – une vraie gueule. »Curieusement, le puritanisme nord-américain qui monte censure les tétons, même des hommes. Or, l’auteur le montre, le rock est né dans les milieux populaires anglais des années 1960, Roman à Twickenham, et avait pour objectif de faire éclater le carcan rigide de conventions et de pudibonderie de la très petite bourgeoisie victorienne confite en macération religieuse. Le torse nu était de rigueur, sur scène et ailleurs, garçons comme filles, et les rock stars n’hésitaient pas à déambuler entièrement nus dans leurs loges ou autour des villas louées pour enregistrer les albums.
Le torse nu, montrer ses muscles, était le symbole viril du mâle qui s’affirmait, de l’artiste contre les valeurs du négoce et de l’abrutissement industriel, un appel sexuel et un symbole d’énergie. Car il y avait de la vie dans le rock, bien plus qu’aujourd’hui dans le rap ! Le bruit, le rythme, le cri, étaient autant que les inventions, les mélodies et les paroles, porteurs de sens. Il s’agissait de fusionner le temps d’un concert, de laisser entrevoir une autre vie, de porter le public dans un état que la société banale ne pouvait provoquer – sauf en guerre, peut-être.
Les filles ne s’y trompaient pas, qui tombaient amoureuses, s’enflammaient comme des groupies, n’hésitaient pas à tailler pipe sur pipe aux proches techniciens pour accéder aux coulisses et voir de près ou même toucher l’idole qui allait chanter. Roman profite d’un temps de soliste pour saisir une groupie qui cherche à se hisser sur la scène, l’entraîner dans les coulisses et la baiser tout de go (p.234). Aujourd’hui, les aigries diraient qu’il la viole, mais la fille était consentante, ô combien ; elle comme d’autres ont gardé longtemps des étoiles dans les yeux et des frissonnements dans le con d’avoir été baisées par un demi-dieu. Notre auteur reste muette sur les désirs des garçons pour leur semblable, cela ne semble pas être socialement correct au Canada aujourd’hui, même si elle a cette phrase ambigüe lors d’un déplacement à 17 ans de Roman avec deux potes, pour faire de la musique à Londres : « Il avait l’impression d’être Elvis. C’était divin. Il se foutait complètement d’avoir mal dormi sur le matelas de camping empestant le moisi dans la camionnette, aux côtés de Derek et de Burt, l’un ronflant, l’autre lui ayant grimpé dessus pendant la nuit » p.42.
Né en 1945, Roman Rowan au curieux nom dont les lettres m et w constituent comme les deux mandibules d’une mâchoire narcissique, a 15 ans en 1960. Il baise à 14 ans, lâche le lycée qui l’emmerde, envoie du « cause toujours » à sa mère qui veut régenter son adolescence, constitue un groupe de rock dans un garage avec deux potes et donne des représentations à 17 ans. Mais c’est le 5 juin 1968 que son groupe va enfin émerger, à l’Ambassador Hotel, rasé depuis, où Bob Kennedy se fait descendre par un taré. La chanson produite à chaud dans l’effarement et l’émotion, Shooting at the Hotel, deviendra célèbre, reprise en boucle sur les radios durant des années. L’un meurt pour l’humanité, l’autre chante pour l’humanité, ainsi se passe le flambeau, dans le hasard et la chance.
A 69 ans, pour ses derniers concerts dans le monde, Roman Rowan revient sur sa vie mouvementée et s’interroge : qu’en a-t-il fait ? Il a créé du lien, comme on dit aujourd’hui ; il a remué les foules, a enchanté des générations, a baisé des centaines de filles ravies ; mais un Mexicain s’est tué devant la scène, une fille s’est suicidée de désespoir – les dieux sont dangereux. Il a eu trois épouses – la première était une pute – et une fille, niaisement prénommée Chance. Mais la femme qui l’a le plus marqué, outre sa mère Eirin, fut une cubaine exilée, Havana. L’auteur ne se foule pas pour choisir les noms : Clive venant de Guernesey s’appelle Hélier comme la capitale de l’île, la cubaine comme La Havane… Havana a vu Roman lorsqu’elle avait 6 ans à l’Ambassador Hotel, ce fameux jour où… Elle a pris une photo au Kodak instamatic que lui avait offert sa grand-mère, et Roman lui a fait un grand sourire comme s’il la comprenait. Quarante ans plus tard, elle a repris contact pour faire un livre de photos sur cet homme, mais elle était trop réaliste et fouillait trop profond dans les intimités – Roman effrayé a pris ses distances. Pourtant, c’est peut-être elle qui a le mieux compris la solitude du chanteur de fond.
Ce pavé romanesque, c’est du lourd – 660 g, j’ai pesé. Il est obèse à l’américaine et aurait été plus séduisant un brin svelte, plus dynamique une fois musclé le texte, telle l’image donnée du héros. Il est construit en quatre parties : la première alternant les débuts dans les années 60 et la fin en 2014 ; la seconde faisant témoigner divers acteurs ; la troisième reprenant des moments-clés ; la quatrième contant les derniers concerts. Subsistent, pour les Européens, des anglicismes curieux comme « performer » pour offrir une représentation, « inspirante » qui ne veut rien dire et « publiciser » pour en faire la publicité. Ou encore « la » Nikon pour désigner « l’appareil photo » Nikon (donc au masculin), « le » party pour une partie (genre boum) ou « la »passe pour le passe (partout) destiné à entrer quelque part, confusion vite pornographique si l’on se laisse dire. Je reste dubitatif aussi sur « le corps éthérique » p.18 et « le système ambiophonique » p.277 qui sonnent plus furieusement globish que français.
Ces originalités et ce poids n’empêchent pas le roman de Marie Desjardins d’envoûter. Il fait revivre une époque révolue, celle de la jeunesse de beaucoup. Il montre surtout combien « le sexe » que l’on reproche à mai 68 et à ses suites comptait moins que l’énergie, et que le partage fusionnel comptait plus que l’éclatement individuel. Deux façons de voir le monde que nous avons perdues, régressant à la pudibonderie effarouchée et à l’égoïsme sacré. Pour comprendre ce changement du monde, je vous recommande vivement ce gros roman d’époque.
Marie Desjardins, Ambassador Hotel – La mort d’un Kennedy, la naissance d’une rock star, 2018, Editions du CRAM (Canada), 593 pages, €19.00 e-book Kindle €12.99
Une entrevue avec l’auteur sur YouTube
Attachée de presse Guilaine Depis, 06 84 36 31 8
Le grand Pierre Monastier, sévère sur le livre de Pascuito, trouve « Ambassador Hotel » indéniablement réussi.
Aurélia Gantier, écrivain mais aussi femme engagée et belle personne
Aurélia Gantier – Les Volponi, Genèse tunisienne
Aurélia Gantier, co-Fondatrice, Vice-Présidente & Trésorière Bénévole du Women’s WorldWide Web (www.W4.org) et co-Fondatrice & Directrice Adjointe Bénévole du Women’s Worldwide Web (WWW.W4.org), prend très tôt conscience par son histoire familiale personnelle de la difficulté d’être une femme.
Cette militante resplendissante et passionnée des droits de l’Homme en général et des droits de la femme en particulier voue une admiration sans borne aux femmes de sa lignée auxquelles elle rend hommage dans une saga en trois tomes : les Volponi.
Moteur de sa création littéraire comme de ses combats politiques humanistes, l’héritage familial de l’auteure trouve avec cette saga trouve une véritable sublimation dans ce récit qui rend ses aînées éternelles. Elles inspirent fortement des personnages de roman.
Servi par une écriture remarquable, le premier tome de cette saga centrée autour du personnage de Crocefissa (un vieux prénom sicilien, littéralement « Crucifiée », tout un programme !) recèle de toutes une mine d’informations considérables sur le statut des femmes siciliennes de Tunis, emblématique de celui de tant de femmes dans le monde victimes au mieux du machisme, au pire de violences de la part des hommes – parfois encore de nos jours.
La richesse des « Volponi » réside tant dans le plaisir de lecture du roman que dans le témoignage historique de ce que subissaient les femmes d’autrefois (et de toujours ?).
Certains passages délicieusement érotiques, comme scène de la perte de virginité de l’héroïne, décrits avec la précision d’un scalpel, sonnent authentiques et chauds.
Mais les Volponi, ce sont surtout une myriade de personnages tous plus attachants et denses les une que les autres, qui dévoilent au fil des pages autant de nouvelles facettes de leurs personnalités. Ils évoluent en prenant toujours davantage de densité au fil du roman jusqu’à incarner parfaitement tels les personnages de Molière des types humains.
Aurélia Gantier signe avec ce premier roman le début de sa « Comédie humaine », nous embarque avec grâce au pays de ses origines et nous accueille parmi les siens.
Profession spectacle rapproche Christian de Moliner de Claire Bauchart
AU RIVAGE DES MOTS : ÉLÉONORE DE MONCHY, CLAIRE BAUCHART ET CHRISTIAN DE MOLINER
(…) Dans La Guerre de France, Christian de Moliner se lance dans un roman d’anticipation : la guerre civile fait rage en France entre islamistes et nationalistes, au rythme d’attentats réguliers et sanglants. Un sommet est organisé en Moldavie pour faire taire les armes. En marge des négociations officielles, tout juste bonnes à donner le change aux journalistes, des échanges ont lieu entre les deux parties, menés (contre son gré) par une jeune femme, Djamila Loufi, musulmane par sa mère et – ce qu’elle apprend dans les premières pages – fille du leader nationaliste. (…) Lire la totalité de l’article sur le site ici : https://profession-spectacle.net/au-rivage-des-mots-eleonore-de-monchy-claire-bauchart-et-christian-de-moliner/