Madeleine Chapsal, téléspectatrice de « Ce soir ou jamais »… a bien lu Antoinette Fouque (le Populaire du 27.11.09)

Dans le Populaire du Centre du 27 novembre 2009, Madeleine Chapsal, qui a regardé l’émission de Frédéric Taddeï mardi 24 novembre, nous en livre ses impressions…

 

Madeleine-Chapsal.jpg QU’EST-CE QU’UNE FEMME ?

 

En ce  mois de novembre, deux dates  ont concerné la condition des femmes. Le 25, la Sainte-Catherine,  fête traditionnelle de la  couture, silencieux métier,   sous-payé,  où l’on trouve normal de cantonner  les femmes.  Le  26 : journée   pour dénoncer le  fait qu’il   meurt une femme  tous les deux jours  sous les coups de son compagnon, d’autres étant estropiées. 

  Ce qui dépasse l’entendement  c’est qu’on n’en soit pas autrement scandalisé et  qu’il y en ait encore pour dire et penser, comme  chez Taddei à la télévision : « L’homme a besoin d’affirmer sa virilité !  »

C’est pour étudier les racines d’une misogynie toujours  active  qu’il faut lire le petite livre consacré à  Antoinette Fouque, la fondatrice du MLF – Mouvement pour la Libération des femmes.

Née en 1936 , à  Marseille, cette femme remarquable, à la fois psychanalyste, philosophe, écrivain, élue au Parlement européen, fondatrice d’une maison d’édition, Les Editions des Femmes et de   librairies en France, n’a cessé d’agir et de réfléchir à la question qu’avait posé Sigmund Freud sans pour autant y répondre : qu’est-ce qu’une femme ?

Antoinette Fouque nous fait faire quelques pas en avant. Déjà en rappelant  qu’il y a deux sexes, ce que cherche à  nier un  féminisme  dont Antoinette se sépare pour parler  de « féminologie » ;   nouvelle science sociale qui se donne pour objet  une « peuplade », les femmes,  dont l’histoire  n’existe qu’en ombre portée de celle des hommes.  

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aflivre.jpgDans « Qui êtes-vous Antoinette Fouque ? » elle dénonce quantité d’abus criminels, l’excision, la lapidation, dont un primordial :    des millions de femmes dans le monde se voient refuser le droit  à l’instruction. Pourtant,  ajoute-t-elle  : « Je  connais des régions de l’âme et du cœur,chez  des êtres ne sachant ni lire ni écrire qui sont d’une richesse bien supérieure à ce qu’on trouve chez de plus instruits. » Cet antiféminisme, chez  nous insidieux,  Fouque en voit le germe dans  le déni masculin d’une réalité  qu’ils prennent pour une infériorité   :  ce sont les femmes qui portent les enfants !  D’où  jalousie :  ils auraient une envie secrète de l’uterus comme nous, d’après Freud, l’envie du pénis…

Bien d’autres idées neuves et bouleversantes se trouvent dans ce petit livre  où parle une femme qui s’est installée d’emblée dans l’altérité . Une façon de vivre et de penser   loin d’être acquise dans nos sociétés,   même par les femmes qui parviennent au pouvoir (casées  par les hommes que cela arrange…).   Or pas de progrès humain possible si l’on n’accepte pas l’idée qu’il existe deux sexes à la fois  différents et égaux :  aucun ne devant être soumis à l’autre !  La misogynie, ultime racisme et colonialisme, dont témoigne violemment la burka…

 

 Qui êtes-vous Antoinette Fouque ?

Entretien avec Christophe Bourseiller

Editions Bourin, 19 euros, 154 pages.

Dans Le Figaro, Agnès Leclair interroge Antoinette Fouque sur les violences psychologiques dans le couple (26.11.09)

calb12849violence_couple_jpg.jpgLE FIGARO DU 26 NOVEMBRE 2009 – JUSTICE

Par Laurence de Charette et Agnès Leclair

« C’est une avancée considérable, a expliqué hier François Fillon en annonçant la création d’un délit de « violences psychologiques » au sein du couple. La création de ce délit va permettre de prendre en compte les situations les plus sournoises, ces situations qui ne laissent pas de traces à l’oeil nu mais qui mutilent l’être intérieur des victimes. »

L’annonce du premier ministre s’appuie sur une proposition de loi déposée par Dominique Raimbourg (UMP) et Serge Blisko (PS) issue des travaux menés par la mission parlementaire de lutte contre les violences faites aux femmes, un texte qui a reçu l’approbation de Nadine Morano, ministre délégué à la Famille, et le soutien de la garde des Sceaux.

Michèle Alliot-Marie souhaite en effet s’appuyer sur ce texte, qui devrait être examiné à l’Assemblée au début de l’année prochaine, pour introduire dans le Code pénal la répression des violences psychologiques au sein du couple. Même si la définition exacte de ce nouveau délit est en discussion entre les parlementaires, qui veulent instituer un délit spécifique, et la Chancellerie, qui envisage simplement d’inclure les violences psychologiques au sein de l’ensemble des violences.

L’idée de sanctionner pénalement des violences morales dans la vie intime étend en tout cas considérablement le champ d’intervention de la justice, et suscite le débat. L’USM, principal syndicat de magistrats, se montre sceptique. « La preuve ne sera pas facile à apporter », prévient son secrétaire général, Laurent Bédoué. Dans leurs travaux, les parlementaires se sont inspirés du « harcèlement moral » au travail pour définir la violence psychologique dont pourrait être l’objet un conjoint. Ils visent « des agissements ou des paroles répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de vie de la victime susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité ou d’entraîner une altération de sa santé physique ou mentale » et suggèrent une sanction maximale de trois ans de prison et de 75000 euros d’amende. « Les dossiers de harcèlement au travail ne donnent pas toujours lieu à des poursuites, faute d’éléments constitutifs suffisants », prévient un procureur. Mais les parlementaires, comme la Chancellerie, estiment que les témoignages de proches ainsi que des expertises psychologiques pourront servir de preuve.

« Grenelle des femmes »

Dans la pratique, les magistrats sont déjà confrontés à la violence morale au sein du couple, dans des dossiers de divorce. « Ils se basent sur ces violences morales pour régler par exemple en urgence la séparation physique des époux », explique l’avocate Hélène Poivey-Leclerq. Ils s’appuient sur la loi de 2004, qui a ajouté le « respect» aux obligations entre époux.

Si les associations de lutte contre ces violences ont salué cette avancée, la féministe Antoinette Fouque a, pour sa part, jugé qu’il ne s’agissait que d’ « un morceau du puzzle » et appelle à l’organisation d’un « Grenelle des femmes » .

Auteur d’une enquête sur les maltraitances invisibles, Jean-Baptiste Drouet dénonce enfin une « dérive judiciaire » . « Bien sûr, la manipulation et les pervers existent. Mais créer une loi spécifique revient à ouvrir la boîte de Pandore de la victimisation, souligne-t-il. Dans le couple, lieu des règlements de comptes affectifs et des rancoeurs, tout le monde peut se déclarer victime. »

Macha Séry, du journal Le Monde, a assisté à la grande soirée de lancement du nouveau livre de Eve Ensler, lundi 23 novembre 2009 au Théâtre Michel (compte-rendu dans Le Monde du 26.11.09)

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« Des mots pour agir, contre les violences faites aux femmes : condition féminine, la régression »

Ce florilège de textes a été commandé à des romanciers, des scénaristes et des dramaturges – femmes et hommes au rang desquels Edward Albee et Moises Kaufman – et mis en scène dans le cadre du festival Jusqu’à ce que cesse la violence, qui s’est tenu à New York en 2006. Variant de deux à quatorze pages, ces récits relèvent de souvenirs personnels, de monologues théâtraux ou de la mise en forme de témoignages recueillis en Ouganda, au Soudan ou au Cambodge. Pour cette occasion, des femmes connues ont accepté de dévoiler des traumatismes tus jusque-là. Tel est le cas par exemple de Jody Williams, Prix Nobel de la paix pour son combat contre les mines antipersonnel, qui narre pour la première fois le viol qu’elle a subi au Salvador, il y a vingt ans. Au lieu d’une froide litanie de chiffres et de statistiques, ces mots-là, les phrases d’écrivains, sondent le coeur sensible des choses, l’intimité féminine, bafouée, violée, et les états de souffrance. Davantage que n’importe quel discours, chacune des histoires ici contées rend plus effroyable l’asservissement du corps des femmes.

ensler.jpgLe recueil a été codirigé par Eve Ensler, auteure des Monologues du vagin, pièce militante jouée depuis 1996 dans 130 pays. Pour la fondatrice de l’association V-Day, « l’histoire des femmes, c’est l’histoire de la vie. En parlant de ces violences, nous ne pouvons omettre de parler de racisme et de la domination, de la pauvreté et du patriarcat, des bâtisseurs d’empires et de la guerre, de la sexualité, du désir et de l’imagination. Les mécanismes de la violence détruisent les femmes, ils les contrôlent, les rabaissent et les gardent à leur soi-disant place. » Cet ouvrage ne s’adresse pas seulement aux femmes. Loin s’en faut.


 DES MOTS POUR AGIR, CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES. Sous la direction d’Eve Ensler et Mollie Doyle. Traduit de l’anglais par Samia Touhami. Editions des femmes-Antoinette Fouque, 326 p., 18 €.

Macha Séry

La délicieuse Maïa Brami a fait sur BscNews, le magazine littéraire et culturel gratuit depuis 2007, des interviews des intervenants à la soirée « Artiste Féminin Singulier » (conférence-débat le 27 octobre 2009 à l’Espace des Femmes-Antoinette Fouque)

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Du désir à la création

Thierry Delcourt

 

(propos recueillis par Maïa Brami (BSCNEWS.FR)

Qu’évoque pour vous le mot « désir » ?

 

Thierry Delcourt : Je le rattache à la dimension du plaisir.

 

De tout temps, la femme a incarné le désir. Pourquoi, selon vous ? Les guérillas Girls ont répondu à cette question : dans les musées, les femmes sont sur les murs, représentées par les oeuvres d’art, mais rares sont les artistes exposées, bien que les choses évoluent. Pour moi, « désir » ne s’associe pas à « femme », mais à la construction de l’amour. Mais une déformation est toujours possible : j’ai passé sept ans en immersion à travailler mes deux livres – « Au risque de l’art » et « Artiste féminin Singulier » (éditions L’Âge d’homme, 2007 et 2009) – et ma déformation est complète : mon désir passe par la rencontre, la compréhension, le regard, l’écoute des artistes… au grand damne de mes proches d’ailleurs ! (rires)

 

D’où vous est venu le désir d’explorer la création féminine ?

 

C’est d’abord une histoire de praticien et de chercheur. En tant que praticien, je me suis demandé comment rester créatif avec chaque patient et comment redonner une possibilité d’ouverture – notamment au désir – aux patients pour qui le monde s’est fermé. Ces interrogations m’ont amené à m’intéresser à l’Art Brut, puis à la création des artistes et ce qu’on en disait. Les réponses apportées par les psychanalystes ou les critiques d’art ne m’ont pas convenu. J’ai donc décidé d’aller à la source, de faire émerger le processus de création à partir d’entretiens approfondis. Ca a été une aventure phénoménale : j’ai découvert des choses, notamment sur le désir, mais aussi sur la construction des représentations, la façon dont elles se réagencent en nous. Dans « Artiste Féminin Singulier », j’ai volontairement laissé de longs entretiens, ils sont d’une telle richesse que, rien qu’avec eux, j’aurais pu faire un livre ! Le premier, avec Lydie Aricks, a duré huit heures, pendant lesquelles elle a fait une sculpture tout en me parlant. Notre échange l’a autant transformée que moi !

 

Vous êtes allé vers le processus créatif, certes, mais féminin…

 

au départ, j’ai envoyé un certain nombre de dossiers à des artistes tout sexes confondus, mais les hommes ont été plus prompts à me répondre et à accepter. Je me suis alors retrouvé avec dix hommes pour deux femmes ! s’est donc posée la question de la création en termes de genres, masculin et féminin. Mais d’emblée, en écrivant le premier livre centré sur des artistes hommes, j’ai conçu le deuxième afin d’essayer de voir s’il y avait une distinction possible, qu
i serait liée à l’Histoire, à la façon dont les femmes sont progressivement reconnues dans l’espace public.

 

Alors, selon vous, la création a t-elle un sexe ?

 

Au moins, à présent on peut poser la question, qui ne se posait pas il y a un siècle, puisque la création avait un sexe, celui de l’universel, de l’homme. L’art de la femme était considéré comme mineur ou « non art ». Bien sûr, il y a eu des exceptions, mais on voit bien comment les pionnières, notamment celles qui ont travaillé le corps – Marina Abramovic ou Annie Sprinkle – ont imposé un sexe à la création. Elles n’en sont pas restées là, mais ce fut une étape indispensable pour dépasser le stéréotype de la muse et d’accéder au rang d’Artiste.

 

Vous avez rencontré quatorze femmes artistes, parmi lesquelles Orlan, la danseuse chorégraphe Carolyn Carlson ou la poète Valérie Rouzeau, laquelle associez-vous au mot « désir » ?

 

Lydie Aricks a signé la couverture. Le tableau s’appelle « Elle, Sémaphore », il s’agit d’un corps paysage, un corps pris dans la mer, avec ce jeu entre les mots « mer » et « mère ». Et pour l’avoir longuement regardée travailler, c’est vraiment le désir à l’état pur qui traverse son corps et qui fait qu’elle en est traversé. Au bout d’un moment, les frontières disparaissent entre elle et la toile. Tout intervient, à la fois son corps gestuel mais aussi son corps physiologique, son corps de désir – elle dit bien que ça part du ventre et elle rattache même le processus à la défécation, ce qui n’est pas évident à dire. Elle racle tous les éléments qui composent notre désir et qui font qu’à un certain moment, on va être poussé, vers la sexualité par exemple, sauf que dans son cas, tout est concentré sur l’acte de création.

 

Comment ce livre vous a t-il changé ?

 

Même si on se dit un peu féministe, on est toujours pris dans des préfigurations, des automatismes. En tant qu’homme, j’ai découvert la complexité du problème qui touche au regard porté sur les femmes dans la société. Il faudra sans doute plusieurs générations et de la détermination, notamment chez les hommes, pour faire évoluer les comportements. En tant que psychiatre psychanalyste, je travaille désormais avec mes patients à partir de leur désir et non de leur souffrance. Il ne s’agit pas de les amener à créer, mais à trouver des leviers, des outils pour produire quelque chose qui va leur donner un plus.

 

Propos recueillis par Maïa Brami

colette.jpgColette Deblé : Je suis du pays de l’Artois et je suis une artésienne parce que la peinture coule de source. Elle jaillit comme ça. Peindre c’est une activité aberrante, alors j’ai écrit un livre, Quelque chose de très doux (éditions POL) où j’exprime mon besoin de m’exprimer, de faire de la peinture, comme la sève qui monte dans les arbres et ça n’arrête pas d’éjaculer partout ! On pourrait croire que c’est un roman porno, mais en fait pas du tout, c’est une réflexion sur la peinture et maintenant, j’ai eu besoin de faire une réflexion sur ce qui reste des femmes et je fais un essai plastique sur la représentation des femmes dans l’histoire de l’art. J’essaie de saisir comment on a les a perçues dans tous les pays, à toutes les époques. C’est un travail qui circule dans le monde entier, qui est sous la forme de petits dessins de 30X40 cm et je peux partir au bout du monde avec toute l’histoire du regard des hommes sur les femmes ! C’est un travail commencé en 1990. … J’essaie de voir comme on a vu et ça passe par le bout de mes doigts et vraiment on sent que les
hommes aiment les femmes, c’est voluptueux – c’est le mot vraiment ! » Propos recueillis par Maïa Brami

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Jean-Pierre Sag (collaborateur de l’ouvrage Penser avec Antoinette Fouque, éditions des femmes, 2008) : Je suis un compagnon de route du MLF, un ami d’Antoinette Fouque, j’ai fait une psychanalyse avec elle, c’est comme ça que je suis devenu psychanalyste par la suite. Je suis un témoin très proche.  J’a participé donc naturellement à ce livre sur la pensée d’Antoinette Fouque avec un certain nombre d’auteurs.

 

Antoinette Fouque et le désir :

S’il n’y a qu’une formule qu’on peut retenir d’Antoinette Fouque, c’est le titre de son premier livre : Il y a deux sexes. (Gallimard, 1995). C’est à la fois une évidence, une banalité et une révolution, puisque Freud, Lacan et l’énorme majorité des psychanalystes en restent à la conception phallique de la sexualité, avec un sexe de référence dont les hommes sont possesseurs et que les femmes désirent puisqu’elles ne l’ont pas. Les femmes sont donc dans l’envie du pénis et les hommes en sont fiers et les hommes en tirent leur fierté, d’où une toute puissance du phallus. En deux mots, voilà la mécanique du désir dans cette perspective psychanalytique traditionnelle, qui permet de mieux mesurer l’avancée incroyable de la pensée d’Antoinette Fouque. 

Propos recueillis par Maïa Brami                        

Ouest-France et la « féminitude » – Le 25 novembre 2009

afouque.jpgOUEST-FRANCE – 25 novembre 2009
 
REGARDS : Il faudrait peut-être parler de « féminitude » comme Aimé Césaire a parlé de « négritude ». L’égalité hommes-femmes est encore loin d’être acquise, selon Antoinette Fouque dans son dernier livre d’entretiens avec Christophe Bourseiller (« Qui êtes-vous Antoinette Fouque ? », Bourin-Editeur)

Soirée MARGUERITE DURAS. Avec Dominique Noguez et Laure Adler. Mardi 24 novembre à 18 h 30. 35 rue Jacob, 75006. Entrée libre.

Mardi 24 novembre, à 18 h 30, l’Espace Des femmes-Antoinette Fouque, qui vient juste de coéditer avec les éditions Montparnasse un magnifique coffret DVD + CD Marguerite Duras, vous invite à assister à une soirée unique consacrée à Marguerite Duras. C’est l’un des événements les plus importants de l’année : n’oubliez pas d’emmener tous les gens à qui vous souhaitez du bonheur !

Avec Dominique Noguez et Laure Adler.

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 Dominique Noguez

Né en 1942, normalien, agrégé de philosophie et docteur d’État, Dominique Noguez enseigne à l’Université de Montréal, puis à l’Université de Paris-I. Passionné de cinéma expérimental, spécialiste du cinéma underground, il passe son temps dans les cinémathèques. Se consacrant surtout à la littérature, l’auteur, écrivain et essayiste, publie une vingtaine d’ouvrages dont certains à la fois délurés et saugrenus tels Les Trois Rimbaud, publié en 1986 où il fait vivre Arthur Rimbaud jusqu’en 1937 ! Ou encore Lénine Dada, publié en 1989 où il imagine Lénine en quasi-fondateur du mouvement dada. Il obtient le prix Femina en 1997 pour son roman Amour noir. Proche de Jean-Pierre Chevènement bien qu’ayant voté oui au traité de Maastricht, il a été candidat aux élections européennes de 1994 sur la liste du MDC. Il s’attache à défendre et faire connaître les autres écrivains, notamment lorsqu’ils sont perçus comme mal-pensants par l’époque, comme Michel Houellebecq. Il défend aussi le rayonnement de la langue française ; La Colonisation douce porte la dédicace : « À Gaston Miron et à nos frères du Québec ; aux francophones de l’an 3000 ». En 2009, les frères Larrieu portent à l’écran deux de ses romans, Amour noir et Les Derniers jours du monde, avec Mathieu Amalric dans le rôle principal. Proche de Marguerite Duras, il a eu avec elle des entretiens filmés en 1983 ( La Couleur des mots, Benoît Jacob, 2001) et a organisé en 2006 des manifestations sur elle à Madrid et à Caen.

Laure Adler

De son nom de jeune fille Laure Clozet, Laure Adler passe son enfance en Afrique où son père est ingénieur agronome. Elle ne connaîtra pas la France avant l’âge de 17 ans. En 1968, elle rencontre Fred Adler, ethnologue, son premier mari. Après une thèse d’histoire sur les féministes au XIXe siècle, la jeune femme entre à France Culture en 1974 comme secrétaire, ne se doutant certainement pas qu’elle en deviendrait la directrice, vingt-cinq ans plus tard. A son grand étonnement, elle est nommée conseillère culturelle auprès de François Mitterrand, en 1989. En 1993, la journaliste se lance dans une carrière télévisuelle avec Le Cercle de minuit, sur France 2, dont elle assure la production et l’animation durant quatre ans. Responsable des essais et documents chez Grasset à partir de 1997, elle se voit proposé le poste très convoité de directrice de France Culture en janvier 1999, poste qu’elle quitte le 31 août 2005. Sa gestion de la programmation de la station, qui bouleverse les habitudes des auditeurs, est d’abord très contestée. Fidèle à son image de ‘grande dame de la culture française’, Laure Adler écrit de nombreux ouvrages, dont une biographie de Marguerite Duras, très commentée, sortie en 1998. Dans A ce soir, publié en 2001, elle évoque, dans un registre beaucoup plus intime, la mort de son fils Rémi, survenue dix-sept ans plus tôt. En dépit de ce brillant parcours, Laure Adler aime à résumer sa vie professionnelle en un mot : ‘chance‘.

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Duras, toujours  de Dominique Noguez (Actes Sud 2009)     

            

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Essai littéraire

En ami de Marguerite Duras autant qu’en spécialiste de son oeuvre, Dominique Noguez a visité les archives Duras déposées à L’IMEC. C’est pourquoi il est ici autant question du roman Caprice, encore inédit, que de la genèse des textes les plus fameux. Il en résulte un essai en forme de portrait, très documenté, sans la moindre complaisance et qui poursuit plusieurs objectifs :

– Essayer de rendre compte de ce miracle : Duras a échappé au purgatoire. Treize ans après sa mort, elle ne cesse d’intéresser, en France et à l’étranger où elle est l’écrivain français contemporain la plus traduite et la plus diffusée.

– Depuis trois ans, des textes posthumes – les Cahiers de la guerre et le petit récit intitulé Caprice paru en 1944 (dont on trouve ici les preuves qu’il est bien d’elle) – changent l’image qu’on avait d’elle. Caprice, histoire d’adultère rompant avec la vision vaudevillesque et bourgeoise de l’adultère, éclaire à l’avance Hiroshima mon amour.

– Tout cela nous rappelle combien Duras est l’écrivain de l’amour (et qui a, paradoxalement, suscité tant de haine).

– Avec le recul, une nouvelle vision de son oeuvre se dessine. Au théâtre, le Shaga, monté en 1968 et qui doit être bientôt remonté, nous présente une Duras inattendue, d’un comique loufoque proche de Ionesco et de Pinget. Dans l’oeuvre romanesque et au

cinéma, la dimension voyeuriste (et visionnaire) ou l’obsession du nom nous apparaissent avec plus d’évidence.

– Les archives laissées à l’IMEC nous permettent d’aller plus loin. On le verra ici dans l’étude minutieuse (sur manuscrits) de la genèse de ce qui est peut-être son plus beau roman : Le Ravissement de Lol V. Stein.

Tout cela sans langue de bois : Duras, toujours se termine sur une lettre posthume sans concession, où l’admiration se nuance de réserves et même de reproches, mais, à la fin, somme toute, se trouve renouvelée.

Né en 1942, Dominique Noguez, écrivain, prix Femina 1997 pour Amour noir (Gallimard), a été proche de Marguerite Duras. Il a eu avec elle des entretiens filmés en 1983 ( La Couleur des mots, Benoît Jacob, 2001) et a organisé en 2006 des manifestations sur elle à Madrid et à Caen. Son roman Les Derniers Jours du monde (Robert Laffont, 1991) vient d’être adapté au cinéma par les frères Larrieu. FORMAT : 11,5 X 21,7 / 130 PAGES ENVIRON

Marguerite Duras de Laure Adler (Gallimard, 1998) (Folio poche 950 pages, 2000)

Qui était Marguerite Duras ? Experte en autobiographie, professionnelle de la confession, elle a pris tant de masques et s’est tellement plu à brouiller les pistes que c’est presque une gageure de vouloir distinguer la vérité de la fiction. Ce
qu’il y a dans les livres, disait-elle d’ailleurs, est plus véritable que ce que l’auteur a vécu. Fruit des relations amicales que Laure Adler eut avec elle pendant une douzaine d’années, et de patientes recherches, cette biographie, sans avoir la prétention de dire la vérité du personnage, tente cependant de démêler les différentes versions que Marguerite Duras a données de sa vie. Elle essaie d’éclairer les zones d’ombre que l’écrivain a mises en scène avec tant de talent : la relation avec l’Amant à la fin de l’enfance, son attitude pendant la guerre et la Libération, ses passions amoureuses, littéraires et politiques. Car la vie de Marguerite Duras fut aussi celle d’une enfant du siècle, d’une femme profondément engagée dans les combats de son temps.

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Amour noir de Dominique Noguez (Gallimard, Prix Fémina 1997 et Folio, 1999)

Morceau choisi de Amour noir :
Jamais je n’avais regardé ses yeux de si près. Ils étaient d’un brun foncé, presque aussi sombres que leur pupille. Je ne pourrais pas écrire que je la regardais au fond des yeux car ces yeux-là n’avaient pas de fond. Ils n’étaient qu’une surface noire, désespérément opaque, des yeux inhumains, de rapace ou de lynx, d’une dureté de marbre ou de météorite, des yeux qui me regardaient mais ne me voyaient pas, qui ne m’aimaient pas, qui [… ]

derniersjours.jpgLes derniers jours du monde de Dominique Noguez (Robert Laffont 24/08/2009)

 6 juillet 2010, 23 heures. Dans un discours télévisé, le président de la République annonce aux Français que de terribles événements se préparent et qu’il n’y a plus d’espoir. Depuis quelque temps déjà, les choses allaient assez mal pour décider le narrateur, vague scénariste de cinéma, à quitter Biarritz où il se remet d’une fin d’amour difficile. C’est le début d’une odyssée qui le mène, dans une France en proie à tous les périls, de Lourdes frappé par un tremblement de terre, à Limoges hanté par des bandes de tueurs, d’Orléans désert, à Paris irradié. Il connaît quelques accalmies à Pau, à Bordeaux où, comme en 1914 ou en 1940, beaucoup de Parisiens se sont repliés, voire encore à Brive-la-Gaillarde, dans la villa d’un milliardaire qui donne une ultime orgie. Ses errances sont l’occasion de retrouver de vieux amis ou de rencontrer des jeunes femmes qui l’aident à passer avec moins d’angoisse ces derniers jours du monde. Avec elles, avec eux, il parle de ce qui est en train d’arriver, de l’Histoire, du mal, de Dieu, de la littérature, de l’amour, du plaisir, de la mort, et surtout de la seule femme qu’il ait vraiment aimée, une jeune métisse belle et cruelle dont l’image le hantera jusqu’au bout. 

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Au cinéma :

Synopsis : Alors que s’annonce la fin du monde, Robinson Laborde se remet peu à peu de l’échec d’une aventure sentimentale pour laquelle il s’était décidé à quitter sa femme. Malgré l’imminence du désastre, et peut-être pour mieux y faire face, il s’élance dans une véritable odyssée amoureuse qui l’entraîne sur les routes de France et d’Espagne. http://www.lesderniersjoursdumonde.com/

Date de sortie cinéma : 19 août 2009

Réalisé par Jean-Marie Larrieu, Arnaud Larrieu
Avec
Mathieu Amalric, Catherine Frot, Karin Viard, plus

Long-métrage français. Genre : Comédie dramatique
Durée : 2h10 min Année de production : 2008
 

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718003-gf.jpg  Les femmes qui lisent sont dangereuses de Laure Adler & Stefan Bollmann (Flammarion, 2006)  

 Les femmes et la lecture dans l’art occidental « Les livres ne sont pas des objets comme les autres pour les femmes ; depuis l’aube du christianisme jusqu’à aujourd’hui, entre nous et eux, circule un courant chaud, une affinité secrète, une relation étrange et singulière tissée d’interdits, d’appropriations, de réincorporations. » Laure Adler

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Les femmes qui aiment sont dangereuses de Laure Adler & Elisa Lecosse (Flammarion, 2009)

De la Vénus de Willendorf, image d’un idéal féminin tout-puissant, à la Mariée de Niki de Saint-Phalle, offrant le regard de la femme artiste sur sa propre destinée, la quête de l’éternel féminin jalonne l’histoire de l’art depuis les temps les plus anciens. Consacré au thème de l’amante fatale, cet ouvrage propose un choix de peintures, dessins et photographies du Moyen Age à l’époque contemporaine. Avec également une réflexion sur une thématique longtemps laissée aux seuls mains et regards des hommes.

VIOLENCES : Communiqué officiel de l’Alliance des Femmes pour la Démocratie (Présidente Antoinette Fouque) du 23 novembre 2009

Alliance des Femmes pour la Démocratie

 

cou%20livre%20AF2009.jpgPrésidente : Antoinette Fouque

 

COMMUNIQUE OFFICIEL DU 23 NOVEMBRE 2009

(pour interviewer Antoinette Fouque, joindre son attachée de presse au 06.84.36.31.85)

 

La lutte contre les violences misogynes s’est imposée comme une des priorités dès les premières réunions du Mouvement de Libération des Femmes en 1968. Aujourd’hui, après 41 années de formidables conquêtes de droits, ces violences sont pourtant plus meurtrières que jamais.

En 1990, notre Observatoire de la Misogynie recensait en France 360 meurtres de petites filles, jeunes filles ou femmes, en raison de leur sexe. Il a fallu attendre encore 10 ans pour que les premières statistiques officielles viennent confirmer la gravité de cette guerre quotidiennement faite aux femmes.

A la veille de la Journée Internationale pour l’Elimination de la Violence à l’égard des Femmes, les derniers chiffres délivrés par l’Observatoire National de la Délinquance font apparaître que le nombre de femmes victimes  de violences, particulièrement au sein de leur foyer, est en augmentation : 312 000 femmes victimes de violences sexuelles, et 1 million, de violences physiques. Dans le même temps, le rapport souligne qu’elles portent de moins en moins plainte.

Selon les sources officielles les plus récentes, une femme meurt tous les deux jours et demi, du seul  fait des violences conjugales. Hier encore, on apprenait que Kavidha Bala, 29 ans, agressée et menacée par son mari depuis de longs mois, au su et au vu de tous, a été brûlée vive à Meaux sous les yeux de sa fille de 8 ans.

Le nombre de victimes du gynocide perpétré dans le monde ne cesse de croître.

Ce sont aujourd’hui 200 millions de femmes qui manquent à l’appel de la population de la planète.

Dès 1990, Antoinette Fouque travaillait à une Loi-Cadre pour que, du plus réel au plus symbolique, la condition des femmes devienne une priorité d’action, au bénéfice de tous.

Le 25 novembre 2007, elle appelait à ce que la lutte contre les violences faites aux femmes soit reconnue Grande Cause Nationale. De nombreuses associations, rassemblées en collectif, dont l’Alliance des Femmes pour la Démocratie, l’ont obtenu pour 2010.

            Il faut aller plus loin. Il faut une Politique Globale pour les femmes, généreuse et déterminée, qui prenne en compte les causes profondes des discriminations et des violences qui les frappe, et leur apport vital à l’humanité. Il faut des mesures vigoureuses et de longue durée. Comme Antoinette Fouque le propose depuis 2008, il faut un Grenelle des femmes pour oeuvrer à une nouvelle alliance entre les femmes et les hommes, à un nouveau contrat humain.

Des mots pour agir (sous la direction de EVE ENSLER) : sortie le 13 novembre 2009 – CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES

Annonce à prononcer à la radio/télé, sur vos sites et blogs, à reproduire dans la presse si vous voulez faire bouger les choses, vous joindre à l’esprit militant de la soirée :

 

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Théâtre Michel 38 rue des Mathurins 75008 Paris. M° Havre-Caumartin.

 

 

Réservation préférable à contact@desfemmes.fr

 

Participation libre au bénéfice de l’association V-Day. 

 

 Lundi 23 novembre 2009 à 19 h

 

 

« Monologues du Vagin – Représentation différente et exceptionnelle : Des mots pour agir »

 

Avec Michèle André, sénatrice, présidente de la Délégation aux droits des femmes, Nicole Ameline, députée, représentante de la France au Comité C.E.D.A.W., Taslima Nasreen, écrivain…

 

Interventions et lectures de personnalités engagées dans la lutte contre les violences faites aux femmes. Nombreuses surprises. A l’occasion de la sortie du livre (vendredi 13 nove
mbre 2009) « 
Des Mots pour agir » sous la direction de Eve Ensler et Mollie Doyle (éditions Des femmes-Antoinette Fouque)

 

Textes de Tariq Ali, Charles Berling, Mollie Doyle, Eve Ensler, Antoinette Fouque, Christine House, Carol Michèle Kaplan, Mark Matousek, Taslima Nasreen, Lynn Nottage, Betty Gale Tyson, Alice Walker

 

 

DIX FEMMES sur scène, dans l’ordre alphabétique : Aurore Auteuil, Marie-Christine Barrault, Stéphanie Bataille, Bérangère Bonvoisin, Sylvie Bourgeois-Harel, Fanny Cottençon, Andréa Férréol, Sèverine Ferrer, Marianne James (sous réserve), Christine Orban. ET DEUX HOMMES : Jacques Frantz, Daniel Mesguich.

Mise en scène : Stéphanie Bataille. Coordination : Marie-Cécile Renauld.

Paru le 13 novembre 2009 aux éditions Des femmes-Antoinette Fouque

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 Des mots pour agir contre les violences faites aux femmes

Souvenirs, Monologues, Pamphlets et Prières

sous le direction de EVE ENSLER et Mollie Doyle

Traduit de l’américain par Samia Touhami / Première édition : 2007 par Villard Books/The random House Publishing Group – New York – ISBN : 978-2-7210-0585-4 – Format 13,5 x 21 cm, environ 280 pages, 18€

Préfaces de Rama Yade et Nicole Ameline

Postfaces de Jane Fonda et Antoinette Fouque

« Parler de l’inexprimé. Parler de ce qui a déjà été exprimé d’une façon nouvelle et viable, parler de la souffrance, de la faim. Parler. Parler des violences faites aux femmes, parce que c’est un problème qui est au coeur même de notre monde et dont on ne parle pourtant toujours pas, qu’on ne voit pas, auquel on ne donne pas de poids ou de sens. Pour que les mots brisent l’engourdissement et la négation, la dissociation et la distance, les mensonges. » EVE ENSLER 

 

Ensler_couv_dos[1].JPGEve Ensler, poète, comédienne, scénariste, consacre sa vie à la lutte contre les violences faites aux femmes. Elle est l’auteure de Les Monologues du vagin, une pièce militante jouée dans plus de 130 pays. Elle est aussi à l’initiative du mouvement et de la fondation V-Day qui soutiennent, partout dans le monde, l’action des femmes contre les violences.

Avec Mollie Doyle, auteure, productrice de pièces de théâtre et d’émissions télévisées, elle a sollicité une cinquantaine d’écrivains américains pour composer ce recueil. Leurs textes ont été mis en scène à l’occasion du festival Jusqu’à ce que cesse la violence (New York, 2006). Parmi ces auteurs, pour la plupart impliqués, selon des modalités très diverses, dans l
a lutte pour le respect des droits de l’homme et des droits des femmes, on peut citer Alice Walker, Edward Albee, Robin Morgan, Jody Williams

Ce recueil réunit des textes d’une cinquantaine d’auteurs américains, auxquels sont venus s’ajouter pour la version française des inédits de Nicole Ameline, Antoinette Fouque, Taslima Nasreen…

 

CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES, le 25 novembre, lire le texte d’Antoinette Fouque (postface du livre « Des Mots pour agir », qu’elle a publié le 13 novembre 2009)

DES MOTS POUR AGIR – CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES – SOUVENIRS, MONOLOGUES, PAMPHLETS, PRIERES – PARUTION LE 13.11.09 AUX EDITIONS DES FEMMES-ANTOINETTE FOUQUE

SOUS LA DIRECTION DE EVE ENSLER ET MOLLIE DOYLE

PREFACES DE RAMA YADE ET NICOLE AMELINE

POSTFACES DE JANE FONDA ET ANTOINETTE FOUQUE

ff.jpgPOSTFACE D’ANTOINETTE FOUQUE

POUR UN NOUVEAU CONTRAT HUMAIN

 

Pas un jour depuis quarante ans sans le souci de résister, de comprendre et d’avancer avec des millions d’autres femmes. Les progrès de ces quatre dernières décennies ont sans doute été plus décisifs que durant deux mille ans d’histoire, mais le constat négatif reste affligeant et excède largement les victoires. Partout sur la planète, encore et davantage, les femmes sont victimes d’une violence unilatérale, celle de la domination mâle dans tous ses états : privés, publics, économiques, sociaux, culturels, religieux, politiques, symboliques, réels, imaginaires… Comme si au fur et à mesure que s’affirmait leur libération, une contre-libération machiste les encadrait, les déportait, les emprisonnait, les écrasait. Chaque jour, le courage et la force des femmes défient un destin qui ne leur est pas imposé par Panatomie mais prescrit par les traditions, et construit par les civilisations et l’histoire.

La libération des femmes, la plus longue des révolutions, doit s’attendre à la plus longue et la plus sanglante des contre-révolutions. Nous devons nous armer de patience vigilante et engager notre courage dans des risques lucides. La contre-offensive – le backlash – s’est conjuguée à une crise économique, politique et symbolique mondiale dès le premier geste de réparation envers les femmes (conférence de l’ONU consacrée aux femmes, à Mexico, en 1975). Le retour des religions a précédé la montée des intégrismes. Dès le milieu des années soixante-dix, la protestation virile, la paranoïa monothéiste, plongeaient les racines de Pantiféminisme dans la misogynie.

Amartya Sen a reçu en 1998 le prix Nobel d’économie pour l’ensemble de ses travaux dont beaucoup sont consacrés à la condition des femmes. Il est traduit en France depuis plus de quinze ans et il n’a pas fait école. Son ouvrage est loin d’être un « best-seller » et le gynocide qu’il dévoile n’a pas éveillé une seule de nos grandes consciences inîello-niédiatiques. J’ai cité à maintes reprises, en particulier au Parlement Européen son enquête-scandale, sans susciter le moindre écho. Une femme disparaît ? Non, cent millions de femmes manquent à l’appel en permanence. Cent millions de déficit au capital humain. Désastre humain. De la violence réelle à la violence symbolique, du viol au voile, des meurtres conjugaux à la charia, le massacre continue et s’amplifie. Chaque jour, « si c’est une femme », les journaux banalisent le danger de mort.

Dans le nouveau monde, à Ciudad Juarez, le long de la frontière entre le Mexique et le Texas, plus de cinq cent femmes ont été assassinées depuis 1993, après avoir été mutilées, torturées, violées, et ce, en toute impunité.

Dans notre vieille Europe, en Octobre 2002 dans la banlieue parisienne, la jeune Sohane a été brûlée vive dans un local à poubelles par un amoureux éconduit. Aucun des responsables politiques qui ont protesté le même jour contre un crime raciste et un attentat homophobe n’a manifesté d’indignation pour cet assassinat sexiste ni exprimé de compassion pour la jeune martyre. On sait que cette torture mortelle s’est largement répandue en Europe. Le 1er Juillet 2003, une jeune actrice très populaire est battue à mort par son compagnon, un musicien « politically correct », sympathisant des aiter-mondialistes. Après une forte excitation médiatique, la presse noble recense sobrement les événements de l’année 2003 : «Marie Trintignant meurt après une violente dispute ». En France, l’insécurité routière tue moins depuis quelque temps, mais, chaque mois, la violence unilatérale tue cinq femmes qui finissent dans les brèves des « faits divers », autrement dit avec les «chiens écrasés ». Et, en Espagne, le terrorisme domestique tue plus que l’ETA.

Les femmes, pauvres parmi les pauvres, sont de plus en plus pauvres. À mon arrivée au Parlement Européen en 1994, j’ai trouvé un premier rapport intitulé La pauvreté se féminise en Europe. D’autres ont suivi.

Alors que les femmes produisent les deux tiers des richesses mondiales, elles n’en détiennent que 1%, ne reçoivent que 10 % des revenus disponibles, et sont 75 % des plus pauvres. En se libéralisant, nos démocraties imposent aux femmes, souvent en charge de familles mono-parentales, travail informel, emploi précaire et chômage. En se désocialisant, la France menace les gynécologues, supprime les maternités, se sous-équipe en maisons de retraite. L’immense majorité des victimes de la canicule de l’été 2003 ont été des femmes.

L’Occident et l’Orient mettent le feu à la planète et aux femmes, et le monde brûle. Dedans, dehors, dans la famille, dans la rue, à l’école, sur les routes, dans les quartiers, les cités, dans les campagnes, dans les sociétés de droit comme ailleurs, riches ou pauvres, traditionnelles ou modernistes, à tous les niveaux d’analyse possible, les femmes ont à faire face à une guerre particulière, comme si leur corps doté d’une fonction indispensable pour l’espèce, la fonction génésique, était l’objet d’une haine immémoriale.

Pourquoi de telles régressions démocratiques ? C’est moins l’engagement des femmes qui est en cause que la non pertinence des analyses, tant politiques que psychanalytiques. Ai-je assez insisté sur les défauts structurels qui, à travers les différents modèles de solution au problème, perpétuent la condition catastrophique des femmes dans l’histoire : le modèle traditionnel du tota mulier in utero ; le modèle républicain uni(sex)versaliste qui court après un féminisme indifférentialiste du tota mulier sine utero ; le premier, l’exploitation voulue, le deuxième, l’exploitation déniée. Le modèle démocratique, lui, recyclage et compromis des deux précédents, prétend harmoniser vie familiale et vie professionnelle ; le taux de fécondité, déporté du corps des femmes dont il dépend vers la famille ou la science démographique, dénie et exploite ce que j’ai appelé de longue date la production de vivant, qui s’ajoute en bien des cas au travail domestique et à l’activité professionnelle en une triple production.

Je pense qu’au fondement de cette haine envers les femmes, qui ravage l’espèce humaine, il y a l’envie primordiale, archaïque, universelle et radicalement déniée, de leur capacité procréatrice, une envie d’utérus qui taraude infiniment plus l’inconscient mâle que l’envie de pénis la conscience féministe. Il faut en penser les effets politiques que sont, dans tous les champs, les violences réelles et symboliques infligées aux femmes.

L’ennemi principal de la libération des femmes n’a pas été suffisamment désigné : c’est le monisme mâle, le phallocentrisme, l’égocentrisme, le Un comme seul représentant de toute l’espèce humaine. Des monothéismes à l’égalité républicaine, il n’y a que de l’Un : un seul Dieu, mâle, une seule libido, phallique, une seule économie, capitaliste-libérale, une seule citoyenneté, neutre, un seul sujet» universel, un seul sexe, un seul individu, monadique, hors connexion. Mais voilà, si Dieu a besoin des hommes, les hommes ont besoin de « la race des femmes » pour leur faire des enfants, d’où la colonisation du continent noir, la mise en esclavage – la femme comme instrument vivant -, l’appropriation de l’utérus, principal moyen de production, l’exploitation de la production utérine.

La procréation, maîtrisable et pensable, ne peut plus être un esclavage. Elle n’a plus à être oubliée, refoulée, forclose, mise en position de menace inconsciente du moi paranoïaque. Il faut en foire, au contraire, le motif du travail sur la différence. Libérer à la source la libido creandi des femmes lance un défi permanent à la guerre et à la pulsion de mort. Elle donne lieu, au XXIe siècle, à une révolution pour le genre humain et ouvre à la génialité des deux sexes.

Survivors, super vivantes plutôt que survivantes, bien au-delà de leur condition de victimes, là où elles portent un triple fardeau, les femmes trouvent l’énergie, pour peu qu’on les y encourage, de se transformer en actrices principales du changement, en force de proposition, en coeur battant d’une triple dynamique de démographie, de développement et de démocratie, pour accomplir une triple révolution, du symbolique, de l’économique, du politique. En Afrique, 95 % des O.N.G sont prises en charge par des femmes, mais le sida ravage leurs enfants. Au Niger, elles font reculer le désert, reconquièrent et irriguent, par un travail acharné, la terre devenue stérile pour nourrir la population et faire revivre les marchés dans les villages.

Ni soumises ni esclaves, sans dieu ni maître, laïques, des femmes déjà s’éloignent de la genèse du Livre, dont les Écritures les ont forcloses, pour apprendre à lire en se rappelant, en remerciant, en pensant le lieu d’où elles viennent sans y revenir mais en allant de l’avant ; des femmes ont commencé à vivre leur nouvelle condition historique, à inscrire la genèse d’une modernité tardive. Bouleversements. Viennent les temps des fécondités croisées. Charnelles et spirituelles. Pour un nouveau contrat humain. Ensemble. Tempus est creandi. Pour chacun des deux sexes, l’un par l’autre enrichi, sans dette ni marchandage.

L’ancien monde et l’histoire moderne s’en vont. Au commencement… Cette fois encore. Pensée première et force de proposition. Courage de concevoir, de porter, de mettre au monde ce qui vient. Ni riveraines ni sans rivage, ni sédentaires ni nomades. Mémoire gracieuse. Promesse durable. Pulsion de vie enfin, alliance, résistance, délivrance ; sexe jouant, corps travaillant, chair pensant, des femmes, dès maintenant, libres, en mouvements.

 

Antoinette Fouque sur France Info, mercredi 25 novembre 2009

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Carine Bécard, dans « Femmes d’influence » sur France Info, ayant déjà reçu Antoinette Fouque l’an dernier, a signalé la sortie du nouveau livre de la cofondatrice du MLF chez Bourin-Editeur, lors de son émission du 21 novembre consacrée à Julie Pfeiffer, ingénieure clé du futur A350.

Par ailleurs, Antoinette Fouque a pu s’exprimer deux minutes trente à 15 h 46 mercredi 25 novembre à l’antenne de France Info à l’occasion de la Journée internationale de Lutte contre les Violences faites aux femmes.

Je lance un appel à qui aurait un enregistrement ou un décryptage de ses propos. Merci de l’entendre ! et de me contacter par l’intermédiaire des commentaires ouverts dans ce blog par exemple.