Mille (et une) lectures de Maeve – littérature irlandaise et autres trouvailles –
Une heure avant la vie – Svetlana Pironko
« Il faut que je te dise : celui qui mange de la viande d’ours une fois n’aura plus jamais peur dans sa vie. » Voilà ce que dit un jour papa à sa fille. Nous sommes quelque part en Asie Centrale, où la steppe est « comme un tapis multicolore pendant les premiers jours de mai. Couverte de tulipes sauvages. Jaune, blanc, rouge. A perte de vue. » C’est dans cet univers sauvage que grandit la petite Luciole, au milieu des loups, des saïgas (antilopes), des saxaouls, des lacs gelés en hiver et des serpents d’eau. Entourée de ses parents, de ce papa qui l’emmène partout et d’un petit frère, un fragile P’tit Prince. Mais un jour, il faut partir : papa est appelé pour une mission ailleurs. Luciole est arraché à cet univers et se retrouve dans un immeuble gris. Mais devant la bibliothèque de son père, elle découvre une échappatoire. Elle vient de terminer L’adieu aux armes d’Hemingway et découvre Paris est une fête. Elle décide que « Paris est la capitale du monde. Et [que] c’est là qu’elle veut être. » Joli programme !
Une heure avant la vie de Svetlana Pironko est un roman qui fait voyager. Ça parle d’enfance, de littérature, de construction de soi, de deuils, de nouveau départ. « Une heure âpre la mort, notre âme évanouie sera ce qu’elle était une heure avant la vie » : cette citation de Savinien Cyrano de Bergerac a inspiré le titre, au premier abord un peu singulier, de ce beau roman. L’histoire d’une femme libre qui se façonne grâce à sa passion immodérée pour la littérature, les voyages, les grands espaces et Paris, le tout dans l’amour inconditionnel de son père.
Une histoire pleine de love, de déclaration d’amour mais avant tout de liberté, d’autodérision et de répliques qui font mouche dans les soirées chics ! Il y a des scènes parfois « exotiques », comme une journée de mariage (marquante) chez les nomades d’Asie Centrale ou décalées dans le Paris bohème. C’est émouvant, drôle et parfois aussi un peu coquin.
« Un homme lui tend la main et se présente :
_ My name is Clavell. Edward Clavell.
Elle tend la sienne et dit :
– Pleased to meet you. My name is Bond. James Bond. »
C’est ma première lecture de la rentrée littéraire et j’ai adoré ! J’ai suivi intrépide Luciole jusqu’au bout de la nuit dans cette histoire finement tissée.
C’est le premier roman de quelqu’un qui en connaît un rayon sur le monde du livre. Svetlana Pironko a eu le courage d’inverser les rôles en prenant la plume. C’est un super challenge qui, à mon sens, a le mérite d’être relevé avec une oeuvre de qualité. (Je n’ai été payée par personne pour dire cela ! )
J’espère qu’il y en aura un prochain.
Svetlana vit entre Paris et Dublin.
Une belle découverte publiée aux éditions du Passeur.