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« Maths ignition 🚀 « : Guilaine Depis, attachée de presse (Balustrade)
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Interview. Bernard Woitellier : « Je me suis borné, dans ce roman, à retranscrire un cataclysme solaire d’une telle ampleur, dans notre monde actuel »
Le maître de la lumière est une dystopie que Bernard Woitellier construit sur plusieurs plans narratifs s’emboîtant comme des tiroirs et renfermant dans un écrin tout autant d’aventures sur fond d’éruption solaire, de black-out et d’effondrement de notre civilisation. Bienvenue dans un monde où la survie devient l’unique obsession, et où les rebondissements maintiennent le lecteur en haleine dans un huis-clos à l’échelle du monde, des océans et des continents.
Bonjour Bernard Woitellier, l’idée d’un black-out ne semble pas tenir pour vous de la fiction. S’agit-il d’un phénomène réel, qui s’est déjà produit dans notre système solaire, comme le relatent les premiers chapitres de votre livre ? Partez-vous d’un événement ou des événements connus pour mettre en branle votre récit ?
Bonjour Dan,
Les tempêtes solaires très violentes et leurs conséquences sont maintenant connues, bien que rares. La dernière en date est celle de 1859 ; elle est restée dans l’histoire sous le nom d’« Événement de Carrington ». Deux éruptions à 3 jours d’intervalle ; la première provoqua des aurores boréales jusqu’aux Antilles, la deuxième illumina le ciel du Venezuela pendant cinq jours. Le champ magnétique de la Terre s’inversa. Les seuls dommages relevés survinrent sur le réseau télégraphique naissant.
Je me suis borné, dans ce roman, à retranscrire un cataclysme solaire d’une telle ampleur, dans notre monde actuel.
Un petit aperçu du danger des éruptions solaires violentes nous fut donné par la tempête de mars 1989. Bien que sans commune mesure avec « l’Événement de Carrington », elle fut à l’origine de l’explosion de trois transformateurs dans une centrale électrique canadienne. La province de Québec fut plongée dans l’obscurité en 90 secondes.
Les techniciens purent relancer le réseau après une dizaine d’heures. Heureusement, car les températures étaient largement négatives.
Quel atout offre ce bouleversement solaire sur la vie des habitants de la terre et pourquoi avez-vous choisi comme devise apocalyptique ces paroles de Cham, un de vos personnages : « L’hiver des hommes vient. Crois-moi, il va durer longtemps ; sur toute sa longueur, il fera des victimes » ?
Pour écrire ce roman –dans lequel tous les détails sont vrais–, je me suis énormément documenté. Mais le document qui m’a été essentiel est « Severe Space Weather Events ». C’est un rapport établi par différents experts, commandé par l’administration Obama, au sujet des impacts possibles d’une violente éruption solaire sur le fonctionnement de notre civilisation. Le rapport est plutôt effrayant : il prédit une baisse brutale de la population mondiale d’environ 20 % (la première année). Mais plus inquiétante encore est la phrase de conclusion : « Il faudra 4 à 10 ans pour rétablir la distribution électrique ».
Donc oui, comme disait Cham, l’hiver des hommes va durer longtemps et faire certainement beaucoup de victimes.
L’atout que les survivants ont entre leurs mains, c’est cet instinct de solidarité que l’on voit à chaque catastrophe qui frappe un coin d’humanité. Ce fut le cas lors du cyclone Katarina, lors du tsunami en 2004, ou au Japon en 2011. On croit toujours que c’est Mad Max qui va naître des cendres d’un désastre, mais le premier réflexe humain est l’entraide. Peut-être peut-on considérer qu’une telle catastrophe nous offrirait une nouvelle chance de construire « un monde meilleur », c’est-à-dire plus juste, plus respectueux de la Vie, et plus soutenable pour la planète. Il existe un mot en langue Hopi qui désigne notre mode de vie : Koyaanisqatsi, qui signifie « la vie en déséquilibre », une vie qui ne peut se perpétuer.
Quelle signification a le titre de votre roman ? Qui est ce maître de la lumière dont vous écrivez (page 71) : « Un artiste inconnu semble peindre le ciel, crayonne des rayures de lumière » ?
Le titre est tiré de l’exergue, une des premières citations égyptiennes datée du VIe siècle avant notre ère :
« Je flottais absolument inerte. J’ai amené mon corps à l’existence grâce à mon pouvoir magique. Je me suis créé moi-même… Je suis l’éternel. Je suis Ré,
Le Maître de la Lumière. »
Pour parler de la stratégie romanesque que vous utilisez dans votre livre, j’aimerais savoir pourquoi avez-vous choisi ce type de narration à tiroir, très mouvant, cinématographique ?
(Rires). Je n’ai rien choisi, c’est l’histoire qui s’est imposée à moi avec cette écriture très visuelle. Je dirigeais la trame du roman, mais les scènes se déroulaient devant moi sous forme de flashes.
Il y a un passage où l’un des personnages se retrouve bloqué par la glace en bordure de rivière. Je ne l’avais pas imaginé. Le personnage est tombé « devant moi » ! Ce n’était pas du tout prévu. Il a fallu que je trouve une solution, dans le même état de stress que les protagonistes de la scène –largement écrite sous adrénaline !
Il y a aussi des passages que j’ai réécrits, en pensant : « il faut que je change d’angle pour cette scène ». Ce qui se traduisait dans le récit par un changement de « caméra, de focale ou d’éclairage ».
Quant à vos personnages, on ne manque pas de remarquer la qualité de leurs traits, faisant d’eux des êtres forts, impressionnants, dans les deux sens, positifs et/ou négatifs. Pourriez-vous nous dire comment les avez-vous choisis et quels sont les traits dont vous les avez le plus fait bénéficier ?
Merci !
Je me dis souvent que la Vie, c’est comme dans les romans ou les films : le plus important, ce sont les personnages. Ce sont sur eux que repose l’histoire. Je voulais que les miens aient un fort potentiel d’évolution. Même s’ils partaient de très loin, j’espérais qu’ils avancent, qu’ils se battent ; soit pour défendre les leurs (comme Thana et Alma avec leur fils/fille), soit pour profiter de ce bouleversement, changer de vie et arrêter de la subir (comme Paola ou Aryan). Pour Raul, le personnage le plus controversé du livre, le prologue explique la vie qu’il a eue avant de devenir ce qu’il est. Il me semblait important de le faire pour laisser aux lecteurs l’opportunité de le comprendre sans le juger.
Que ce soit Alma et Sarah ou Thana et Tim, il s’agit du très symbolique couple mère-fille/mère/fils. Le lecteur attentif ne peut pas se douter de cette force parabolique qui est même contenue dans le choix de leurs prénoms. Peut-on dire qu’Alma, Thana, renferment le symbole de la vie et de la mort ?
À la relecture, on peut bien sûr le supposer. Mais l’écriture pour moi est une forme d’inconscience. J’écris sans arrière-pensées, je transpose en mots les images qui passent dans mon cerveau. Elles sont au présent immédiat. Si je ne les écris pas, elles disparaissent. Au moment où elles surviennent, elles sont des rêves, et je n’ai pas le temps de les interpréter.
Il a même fallu que je relise le livre une fois achevé, pour comprendre que Thana était l’héroïne principale. Je ne m’en étais pas rendu compte !
Que dire des hommes ? Sont-ils, selon vous, de vrais mélanges de tendresse et de violence, à quelques exceptions près ? Que veulent-ils nous dire de l’état de l’humanité soumise au danger de sa chute brutale ?
Je crois que les personnages masculins présentent des facettes très variées que la catastrophe va révéler ou exacerber. Le seul « vrai gentil » est Maxime, l’étudiant canadien, tellement amoureux de son astrophysicienne qu’il en paraît un peu benêt ; mais pour lui aussi, son existence va basculer.
Les méchants sont des mythos, des escrocs, des violeurs. Comme dans les films des frères Coen, j’ai du mal à ne pas les ridiculiser, à montrer à quel point ils sont stupides. Même s’ils gagnent parfois, ils ne sont souvent que des brutes que le contexte d’une telle catastrophe va libérer. Les rues deviendraient très dangereuses.
Heureusement, il y en a d’autres qui redonnent confiance en l’espèce humaine. Comme Jesús qui danse un tango avec Alma.
Cette mise face à face des êtres humains les conduit nécessairement à des conflits, souvent radicaux. Diriez-vous que cette confrontation, facilement traduisible comme une lutte entre bien et le mal est un des thèmes de votre roman ?
La lutte entre le bien et le mal est une constante de la réalité. Prenez « L’Archipel des Hérétiques » de Mike Dash, dont la scène finale aux Canaries est tirée. Un bateau hollandais –le Batavia– chargé de trésors, de familles de colons, de soldats, marins et officiers fait naufrage. Toutes les personnes à bord se scindent en deux groupes et accostent sur deux îles. Sur la première, tout le monde s’organise pour la survie et s’entraide. Sur l’autre, une bande prend le contrôle de l’îlot, sombre dans la folie la plus meurtrière, et va vouloir attaquer le groupe de « loyalistes ». C’est une histoire vraie, et personne ne peut prévoir a priori ces comportements.
Un autre leitmotive de votre roman se penche sur la valeur étique du comportement humain, sur sa capacité de réagir devant la peur. « Le courage – écrivez-vous – ce n’est pas d’ignorer la peur ; c’est d’être capable de continuer à faire les choses malgré elle !… ». Comment interpréter ces paroles avec lesquelles Jesús, un de vos personnages, tente de rassurer Alma ?
Le courage n’est certainement pas d’ignorer le sentiment de peur. C’est d’arriver à se raccrocher à ses valeurs, et se dire qu’il faut le faire sinon on ne pourra plus se regarder dans un miroir. Pour Alma et Thana, le courage c’est d’à tout prix protéger leur enfant. C’est de tenter de faire ce que leur conscience leur souffle, même si elles tremblent à l’idée de ne pas réussir.
Jorge, navigateur expérimenté et ancien du Vietnam, nous propose une autre vérité. « Sur le pont d’un bateau, la part de vérité que les habitants des grandes métropoles s’escriment à déguiser sous des dehors clinquants, éclate dans la lumière crue : en pleine tempête, tous les hommes sont nus. L’ouragan leur arrache leur superficialité ». Diriez-vous, en conclusion, que la confrontation de l’homme avec la nature qui ne tarde pas de remettre en place cette position de prétendu maître de l’Univers est un des messages forts de votre récit ? Y a-t-il d’autres aspects de cette humanité à la dérive que vous avez souhaité nous faire savoir avec les moyens de cette riche et palpitante fiction qu’est votre roman ? Et, si oui, lesquels ?
En plein océan, c’est une vérité dont vous ne pouvez douter. Vous êtes définitivement minuscule. Quel que soit votre grade ou votre place dans la société, si la mer veut vous détruire, vous ne pourrez y échapper. Si un jour, un nouvel « événement de Carrington » survient, le monde en tant que planète ne sera pas touché. Par contre notre monde, l’organisation de notre société humaine disparaîtra en quelques jours. Et nous serons face à la nature biologique de notre environnement et aux difficultés que cela va nous poser.
En guise de conclusion, je citerai la phrase d’un philosophe (dont j’ai oublié le nom) : « Notre monde a gagné en efficacité ce qu’il a perdu en résilience ». C’est cette fragilité, invisible et immense, qui me fait peur.
En 1859, quelques câbles du télégraphe avaient fondu devant le nuage de particules électromagnétiques lancées par le soleil. Les lampes à pétrole continuèrent d’éclairer les maisons, et les percherons de labourer les champs. Aujourd’hui nos vies sont tellement sophistiquées qu’elles ne supporteraient pas un tel choc. Nous ne sommes pas prêts à vivre comme des Amish. Pourtant, la colère imprévisible du soleil est bien une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes.
Propos recueillis par Dan Burcea
Bernard Woitellier, Le maître de la lumière, Éditions Librinova, 2019, 643 pages.
Revoir l’émission Fenêtre sur l’emploi du 1er juillet 2021 avec pour invité Eric Jeux, fondateur de l’IFESD sur BSmart :
https://www.bsmart.fr/video/7401-smart-job-partie-01-juillet-2021

La vie en bleu, France Bleu Normandie, émission avec Franck Archimbaud
On cuisine ensemble – Le chef Franck Archimbaud présente sa recette de Pavlova. Itw de celui-ci. Il rappelle son livre « L’homme qui voulait otrechoze », paru aux éditions Iggybook.
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Voyages et Hôtels de rêve met à l’honneur le restaurateur Franck Archimbaud

Le nouveau magazine Epsilon s’intéresse aux Chasses aux Trésor !


Interview. Gary F. Bengier : « Un voyage sans entraves est un livre de fiction spéculative, une histoire d’amour, une histoire d’action-aventure, une histoire sur le thème de la justice sociale »
La maison d’édition Chiliagon Press publie la version française du roman de Gary F. Bengier, Unfettered Journey sous le titre Un voyage sans entraves. Le roman a reçu les éloges de la presse : « …an epic expedition into the nature of consciousness, God, Reality, and the minds of Man » [“… une expédition épique dans la nature de la conscience, de Dieu, de la réalité et de l’esprit de l’homme.”]- Indie Reader; IR Approved “Unfettered Journey is an existential adventure for the mind and a lot more besides.” [Un voyage sans entrave est une aventure existentielle pour l’esprit et beaucoup d’autres choses, par ailleurs.]- Carly Newfeld, The Last Word, KSFR Santa Fe Public Radio “Shades of Huxley and Asimov. Gary F. Bengier has created a science fiction adventure that is reminiscent of the masters.” [Mélange de Huxley et Asimov. Gary F. Bengier a créé le récit d’une aventure de science-fiction qui rappelle les maîtres] – Lee Scott, for the Florida Times-Union.
Bonjour Gary, nous sommes heureux de vous accueillir dans les media françaises, sur le blog de Lettres Capitales. Il semblerait que vous avez des origines françaises, si on tient compte de votre nom de famille. Pourriez-vous nous donner plus de détails sur votre lien avec la France ?
Selon mes recherches, les traces de ma famille paternelle remontent au XVIesiècle en France. Devenus huguenots, ils ont quitté ce pays pendant les guerres de religion pour s’installer dans les provinces allemandes de l’est. Mes recherches minutieuses ont conforté la tradition orale de ma famille selon laquelle celle-ci avait « erré hors de France ». Je pense que ma passion pour les voyages (ayant visité plus de cent pays) trouve sa source tout naturellement dans cette incessante recherche des sources.
Vous êtes écrivain, philosophe et spécialiste dans le domaine de la technologie. Quel lien y a-t-il entre ces trois disciplines, et quelle a été votre parcours scolaire et professionnel.
Le lien interdisciplinaire sur lequel vous m’interrgoez a vocation à créer une vision compréhensible du monde dans lequel nous pourrions souhaiter vivre. Ma formation comprend un MBA et, plus récemment, une maîtrise en philosophie. Ma carrière en tant que spécialiste des technologies m’a permis d’aider à créer des entreprises dans de multiples domaines, allant des biosciences à la conception de puces, en passant par les ordinateurs, les médias en ligne et Internet. J’ai vu de mes propres yeux comment nos technologies changent de façon exponentielle l’expérience humaine, pour le meilleur comme pour le pire. Le philosophe se demande alors comment pouvons-nous trouver un but dans ce monde en pleine évolution ? En tant qu’écrivain, dans mon roman Unfettered Journey [Un voyage sans entraves], j’ai créé un monde futur lié aux sciences exactes, un monde «étrangement authentique» (selon la critique), qui met en lumière certains défis auxquels l’humanité est confrontée dans notre avenir proche.
Pendant votre enfance passée dans une petite ville du Midwest vous aviez une vraie attraction pour la nature et l’astronomie. Comment est née la passion pour la philosophie et les mathématiques et dans quelle mesure ces disciplines ont-elles contribué à vous conduire à écrire des romans ?
Ma passion pour la nature, qui ne m’a plus jamais quitté depuis mon enfance, trouve ses origines dans les heures passées en jouant dans les bois se trouvant à proximité de la maison où j’ai grandi. Elle s’est ensuite renforcée par la randonnée en pleine nature et la randonnée pédestre (J’ai traversé la John Muir Trail en Californie), et par de modestes escalades en montagne (le Cervin, entre autres). J’aime les mathématiques, et pendant mes études au lycée, j’ai commencé à entrevoir la beauté profonde de cette discipline. J’avoue être un mathématicien de type platonicien, croyant que les mathématiques sont le résultat de découvertes, et non pas ayant été créées. Une collaboration de deux décennies avec le Santa Fe Institute a fini par me forger la conviction que la science de la complexité décrit le mieux le monde naturel. De ces contextes émerge une vision philosophique du monde. Mon désir d’explorer ces idées a conduit à l’écriture de mon roman.
Votre livre Unfettered Journey, Un voyage sans entraves, a été traduit en plusieurs langues et a reçu plusieurs prix. À quel genre littéraire appartient votre roman et pourquoi son personnage principal, Joe Denkensmith, le qualifie de puzzle entre les mathématiques, la philosophie et la physique ?
Je suis content que mon roman Un voyage sans entraves a remporté six prix jusqu’à ce jour, en cette année 2021, et qu’il va être traduit en huit langues d’ici la fin de l’été. Et ce malgré sa classification de roman inter-genre : un livre de fiction spéculative se déroulant en 2161 ; une histoire d’amour; une histoire d’action-aventure; une histoire sur le thème de la justice sociale ; un roman qui explore des questions philosophiques profondes sur la nature de la conscience humaine, l’existence de Dieu, le libre arbitre et comment nous pourrions trouver un but dans un avenir dominé par la technologie.
J’avoue que c’est un roman ambitieux, écrit pour un public cultivé. Il comporte de nombreuses strates narratifs, combinant des idées profondes sur la philosophie, les mathématiques et la physique, rendues accessibles par une histoire qui se déroule à un rythme alerte et ayant comme protagonistes des personnages forts.
Vous avez construit votre livre en plusieurs parties qui contiennent la notion de voyage (intérieur, extérieur, en arrière et à l’avant, en haut et en bas). Que pouvez-vous nous dire de la structure de votre livre ?
Le roman est construit en effet à plusieurs niveaux, et sa structure reflète ce fait. Au premier niveau, le livre explore la conscience – la conscience humaine et la mesure dans laquelle il est possible de fabriquer une machine afin d’arriver à fabriquer cette conscience. Le protagoniste, Joe, explore sa propre conscience, commençant «à l’intérieur», puis «à l’extérieur» pour comprendre sa place au sein de la communauté humaine et de l’univers. À un niveau plus profond, le livre est une allégorie de l’histoire d’Adam et Eve – l’histoire des premiers humains, bannis d’un Eden idéal, forcés à affronter le mal dans le monde. Un voyage sans entraves est une exploration de l’histoire universelle de l’humanité, afin d’essayer d’y trouver un but.
Le monde dans lequel évoluent vos personnages est un univers étrange, un mélange de robots et humains, de technologie et de règles strictes de vie sociale. Dans quelle période de l’évolution de la société humaine vivent vos personnages et de quel type de civilisation s’agit-il ?
Un voyage sans entraves propose une vision scientifique de notre avenir proche, en l’an 2161. D’après mon expérience en tant que spécialiste dans le domaine de la technologie, je pense que les deux technologies principales qui vont provoquer le plus le changement au cours du siècle prochain sont les biosciences et l’Intelligence Artificielle/la robotique. Les biosciences allongeront nos vies; la robotique changera le plus visiblement notre écosystème humain. Avec des robots marchant parmi nous, le système économique sera profondément modifié. Lorsque les robots construiront des robots, la production économique augmentera de façon exponentielle, libérant l’humanité de ses rôles de fournir les biens dits de nécessité. Les emplois disparaîtront et trouver un sens et un but à la vie deviendra une préoccupation centrale.
Cette vision scientifique du futur est fondamentalement différente des images standards. Non, les robots ne deviendront pas (à mon avis) instantanément conscients et chercheront à nous tuer ; nous ne deviendrons pas non plus des cyborgs mi-humains mi-machines. L’existence humaine avec les robots semblera tout à fait normale pour les humains dans 140 ans. Je pense qu’un avenir dominé par les robots est très probable.
Un défi majeur pour l’humanité sera de trouver un équilibre entre cette transition économique et la justice sociale. J’espère ardemment que les problèmes de justice sociale imaginés dans Un voyage sans entraves ne deviendront pas réalité, l’un des objectifs de la fiction spéculative étant de souligner les risques à venir.
Un autre symbole repose sur la différence entre deux mondes séparés par un mur : à l’intérieur la civilisation dirigé par IA, à l’extérieur le monde d’avant, sauvage. Que signifie cette dichotomie ?
Cette dichotomie apparaît d’abord dans le roman comme résultat de l’allégorie profonde de l’exploration de l’histoire humaine, depuis les premiers humains créant la civilisation dans un monde imparfait. En partie, cette vision est un antidote aux vues trop romancées de la nature. Je doute que beaucoup de gens renonceraient volontairement à leur confort technologique. Mais notre technologie nous sépare de la nature fondamentale de nous-mêmes, en tant qu’animaux conservant des pulsions fondamentales. Alors que les humains continuent d’essayer de surmonter ces impulsions, nous nous efforçons d’être des singes ressuscités, aspirant à la perfectibilité. En soulignant les différences dramatiques entre notre existence moderne abstraite et aseptisée, et la nature animale qui est notre réalité biologique, j’ai souhaité rappeler aux lecteurs ces éléments de l’humanité qui sont peu susceptibles de changer rapidement à l’avenir, même si nous pouvons espérer les améliorer.
Votre personnage principal, Joe Denkensmith, est un scientifique, spécialiste dans l’Intelligence Artificielle. Il rêvait de faire de grandes découvertes dans ce domaine, mais il a connu des année de frustration et de désenchantement. Qui est Joe Denkensmith ? A-t-il des point communs avec vous ?
Joe Denkensmith, c’est l’être humain pensant, prototype est universel, nous tous, en fait. Joe incarne toutes les faiblesses humaines, toutes nos faiblesses, tous nos péchés. C’est la raison pour laquelle je pense que les lecteurs s’identifieront à lui, alors qu’il s’efforce de trouver un sens et un but à la vie.
Votre héros prend une année sabbatique et arrive à Lone Mountain College. Pour quelle raison ? Que cherche-t-il ?
Joe prend une année sabbatique pour élucider en apparence la question de la conscience du robot : est-il possible de créer un robot doté d’une vraie conscience ? Pour répondre à cette question, Joe doit d’abord comprendre sa propre conscience. Cette question le conduit à des questions plus fondamentales : la question de ce « je » au centre de toute notre existence, et si ce « je » peut avoir accès au libre arbitre. Un voyage sans entraves est une exploration philosophique approfondie par certaines des questions les plus fondamentales de la philosophie; questions que (comme Socrate l’a suggéré) toute personne menant une vie réfléchie doit se poser.
À ses côtés, Evie Joneson, que Joe rencontrera dans des conditions très spéciales. Qui est cette femme avec une si forte personnalité et quel place a-t-elle dans la typologie de vos personnages ?
Selon l’histoire de la Genèse, je pourrais soutenir qu’Eve s’est vu attribuer une mauvaise réputation, portant souvent la responsabilité d’une certaine désobéissance. La science d’aujourd’hui suggère que l’univers est fermé et qu’il n’y a pas de Dieu qui interfère. Alors, dans un récit alternatif de cette histoire, d’où viennent les règles de ce qui constitue une manière juste d’organiser la société ? Le personnage puissant d’Evie Joneson croit que les gens doivent déterminer ce qui est juste, et les gens établissent les règles pour régir notre comportement. De cette croyance procède sa détermination à perfectionner notre monde.
Tout aussi spécial est Peinghtân, ministre de l’Intérieur. Quel type de personnage incarne-t-il (sans dévoiler le secret de la fin) ?
Maintenant que j’ai révélé ici l’allégorie sous-jacente du roman, je laisse au lecteur le soin de placer Peightân dans l’histoire. J’espère que cet exercice mènera à une autre lecture agréable, avec de nombreux « œufs de Pâques » trouvés tout au long du voyage.
Joe, Evie et d’autres personnes luttent pour leurs droits, pour l’égalité et la liberté. Cela va les conduire du désespoir au bonheur. Est-ce que c’est le thème principal de votre roman ?
La justice sociale est un thème majeur du roman Un voyage sans entraves. J’ai mentionné plus tôt ma conviction que lorsque les robots construiront des robots, la production économique augmentera de façon exponentielle. Il y aura, à un moment donné (peut-être dans 140 ans), suffisamment de biens pour que chacun ait une vie heureuse. Le dilemme auquel l’humanité sera confrontée sera le suivant : comment notre système économique évoluera-t-il du capitalisme de marché libre à tout ce qui suit, et cette évolution pourra-t-elle se produire avec un résultat décrit par la justice sociale pour tous ? Les humains sont déterminés par l’évolution pour rivaliser, et la compétition pour les ressources a dominé la plupart des étapes de l’histoire humaine. La question de savoir comment l’humanité arrivera à gérer ce changement de paradigme aura des conséquences profondes pour notre avenir collectif.
Une dernière question, il y a dans votre livre une recherche métaphysique menée par Joe Denkensmith. Il conseille de « prendre pour preuve la beauté du monde ». Peut-on conclure que cette idée que le monde et beau et que les valeurs de la vie méritent d’être défendues est le vrai thème de votre livre ?
Au siècle des Lumières, les penseurs se sont penchés à analyser toutes les preuves et tous les arguments logiques. Cette ouverture a conduit à la vision post-moderniste : Nietzsche a déclaré que « Dieu était mort » ; la physique a adopté une approche réductionniste ; la société de pensée moderne a combattu la vieille garde en s’accrochant à des croyances non prouvées et à une pensée non scientifique. Maintenant, tout cela est devenu une bataille retranchée d’usure. La philosophie, en grande partie isolée de la science, n’offre aucune idée révolutionnaire, et la physique, sans doute avec des progrès lents depuis 70 ans, chasse toujours les « théories du Tout ». Nous avons besoin de nouvelles approches. Alors que l’humanité est confrontée à des changements exponentiels entraînés par la technologie au cours du siècle prochain, je soutiens que peut-être un retour à un humanisme des Lumières pourrait nous aider à progresser vers la recherche de sens dans ce monde en évolution.
Propos recueillis et traduits de l’anglais par Dan Burcea
Gary F. Bengier : « Voyage sans entraves »¸ Chiliagon Press Edition, 25 janvier 2021, 514 pages.
Né à Buenos Aires dans une famille Juive, et après une carrière captivante d’ingénieur puis d’écrivain, c’est finalement depuis son balcon parisien que l’homme aux trois identités, Philippe Enquin, 86 ans, choisit humblement de consacrer sa dernière œuvre dédiée à sa nouvelle passion : la photographie. Le contexte s’impose de lui-même : deux mois de confinement d’une crise sanitaire durant laquelle cet Argentain-Français-Juif nous partagera ses 140 meilleurs clichés.
Lorsqu’on se retrouve avec « De mon balcon » en main, le livre apparaît d’emblée comme un comble ironique, tant l’angle de vue que Philippe Enquin a pris pour rendre son isolement productif est paradoxal : Saisir la moindre mobilité restreinte pendant le confinement, pour finalement la rendre immobile.
Le photographe capture ces instants, alors figés dans cette période particulière d’ébranlement sociétal sans pareille. Au fil des pages, un rappel est étouffant voire douloureux, la présence de ce fameux masque, marquant la gravité de la situation, camouflant une grande partie des visages, annihilant ainsi toute expression. Les images parlent d’elles-mêmes, la tragédie se reflète jusqu’au choix de la colorimétrie, les couleurs sont graves, le noir et blanc est de mise. Les corps sont repliés, tendus. Les visages, baissés. Les regards sont marqués d’inquiétudes. L’angoisse est palpable, il y a de l’empressement dans l’air, de la solitude dans les cœurs, de la peur du manque, des achats compulsifs, des visites d’urgence. Et tantôt, au détour d’une page, une lumière perce quelque part, dans un regard souriant, dans une main tendue, dans un geste altruiste. Puis elle grandit encore davantage dans les partages avec les voisins, les occupations diverses et variées des confinés, les services rendus, le soutien du 20h aux soignants. Nonobstant l’obscurité, l’humanité éclaire la fraternité.
Ces mêmes clichés se retrouveront peut-être un jour dans un manuel d’histoire, dans les mains d’élèves des générations à venir, racontant le désastre de l’année 2020… A ce moment là, est-ce que les cours se feront enfin dans des salles de classe, au sein d’un établissement scolaire comme autrefois ou bien sont-ils destinés à se pérenniser derrière un écran, seul, depuis son domicile ?
Le terme « distanciel », aujourd’hui devenu à la mode restera t-il dans notre langage courant ? La Covid aura t-elle marquée à jamais un virage irréversible quant aux méthodes d’enseignement et plus largement, à la société ? « Depuis mon balcon » ne l’imagine pas, il ne parle ni du passé, ni du futur. Les photos de Philippe Enquin s’ancrent bel et bien dans un présent, redoutablement inédit. Et c’est bien là que puise toute la force de ce recueil de photographies : l’immédiateté, dans un quotidien bouleversé.
Les personnes que ce jeune photographe de 86 ans prend en photo, par ici et par là, au gré du hasard depuis son balcon du second étage apparaissent alors comme des petites abeilles ouvrières, appartenant à un essaim, dissimulé dans l’ombre, dans un ailleurs imperceptible. Ces insectes singuliers vont et viennent, et butinent la vie comme un nectar rare et précieux.
Cest cette vie qui est racontée dans son livre, rythmé par ses photos classées par thématiques ; photos qui valent mieux que tous les mots du monde. C’est la vie telle quelle est, quoi qu’on en dise. C’est la vie qui persiste, c’est la vie qui déborde malgré tout, comme de la mousse polyuréthane dans un trou à reboucher. C’est la vie qui doit se vivre, un point c’est tout. Plus grande, plus forte que tout. Pour Philippe Enquin, il semblerait qu’il la vive dans la générosité, avec un regard humble et tendre, et décide, avec bienveillance, de nous partager sa vision.
Blandine Dherse
« Tantum ergo » à l’honneur dans Bulles et polar du 26 juin 2021
A réécouter ici : http://idfm98.fr/emissions/bulles-et-polar-emission-du-26-juin-2021/
