Technikart salue la sortie de « Monsieur Albert » (numéro de mars 2013)

nite_TA170-2 (2).jpgLe fantôme du mois

Début mars aura lieu au Café de Flore un cocktail en l’honneur de celui qui se targuait de ne jamais travailler, de ne rien posséder et de n’admirer personne. Descendant quotidiennement et à 19h pétantes de son hôtel proche durant soixante ans, l’écrivain Albert Cossery s’y installait avant d’enchaîner l’assaut des jeunes filles dans la nuit germanopratine. Gageons que les serveurs du lieu – qui se battaient pour ne pas frayer avec le caractère changeant de l’auteur de Mendiants et Orgueilleux – se montreront prodigues en champagne et petits fours à l’occasion du centenaire de l’irascible dandy égyptien, et de la sortie d’un récit biographique par Frédéric Andrau, Monsieur Albert – Cossery, une vie (éditions de Corlevour) – 
Franck Chevalier 

France 3 annonce la parution de « Monsieur Albert – Cossery, une vie »

Dresscode999.jpgDans son Journal du 19-20 sur France 3, vendredi 1er mars, Jean-Noël Mirande annonce la sortie du livre de Frédéric Andrau sur Albert Cossery aux Éditions de Corlevour.

DÉCRYPTAGE POUR VOUS (vidéo de 24 min 35 à 24 min 52): « Et puis c’est un écrivain égyptien, parisien d’adoption, Albert Cossery a vécu plusieurs décennies à Saint-Germain des Prés. Il a fait vivre dans ses romans son pays natal avec des personnages hauts en couleurs. Une biographie intitulée Monsieur Albert lui rend hommage. Elle est signée Frédéric Andrau et paraît aux Éditions de Corlevour »
http://pluzz.francetv.fr/videos/jt_1920_paris_ile_de_france_,77934658.html

Sur France Culture, le « Tout feu, tout flamme » de Sébastien Le Fol décrypté pour vous

081832-001.jpgDans le Tout feu, tout flamme du mardi 26 février 2013Sébastien Le Fol choisit d’associer Albert Cossery à son ami Gabriel Matzneff qui publie un nouveau livre aux Éditions de La Table Ronde en même temps que Frédéric Andrau le sien aux Éditions de Corlevour.

Une émission à réécouter ici mais je l’ai décryptée pour mes chers lecteurs ci-dessous : 

– Vous, vous préférez nous parler aujourd’hui des derniers dandys de Paris, Sébastien Le Fol…

– Oui, j’aimerais vous parler aujourd’hui de deux écrivains que je trouve méprisés par les médias, qui ont été mis en quarantaine en quelque sorte – en tous cas pour l’un d’entre eux – dont l’oeuvre n’est pas étudiée au lycée, qui sont snobés par l’Académie française.

Pourtant, ces écrivains n’ont rien à envier – me semble t-il – à Marcela Iacub. Leurs lecteurs, moins nombreux que ceux de « Belle et bête » n’en sont pas moins fervents et ils s’échangent le nom de ces réfractaires comme des codes secrets. Alors Albert Cossery et Gabriel Matzneff seraient-ils des auteurs pour happy few ? Oui si on en prend l’expression au sens littéral : les livres de Cossery et Matzneff rendent effectivement heureux les rares curieux qui osent s’y plonger. 

Ces deux immigrés, l’un Égyptien, l’autre Russe, ont mis leur vie dans leur oeuvre et ils ont osé vivre leurs passions, parfois schismatiques et à leurs risques et périls. Les lire, c’est adopter une diététique, se convertir à une philosophie de l’existence que l’on pourrait réunir sous la bannière du dandysme. 

CouvCossery.jpgNé au Caire en 1913 et mort à Paris en 2008, Albert Cossery a résumé ainsi sa philosophie : « J’ai écrit pour que les gens qui me lisent n’aient pas envie d’aller retourner travailler le lendemain ». Cet oriental au profil d’aigle à qui Frédéric Andrau consacre un vibrant exercice d’admiration, Monsieur Albert aux Éditions de Corlevour, a vécu en esprit libre dans la même chambre d’hôtel de Saint-Germain des Prés pendant quarante ans, l’hôtel de la Louisiane. Cossery tenait l’oisiveté pour le souverain bien et voyait dans le travail un piège tendu par la société pour nous assujetir.

Son oeuvre est à son image, économe et subtile, une dizaine de contes qui ont été réédités par Joëlle Losfeld qui célèbrent la richesse des misérables. Je vous conseille notamment la lecture de « La violence et la dérision » qui imaginait déjà une sorte de printemps arabe. Dans une ville du Proche-Orient placée sous la coupe d’un tyran grotesque, des saltimbanques lancent une campagne de déstabilisation fondée sur la dérision. Des affiches caricaturales à la gloire du dictateur fleurissent sur les murs provoquant l’hilarité du peuple et par conséquent la chute du tyran. 

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Gabriel Matzneff aurait sans doute préféré que Kadhafi fut renversé de cette manière. Dans Séraphin, c’est la fin, son nouveau recueil de chroniques paru aux Éditions de La Table Ronde, Gab la Rafale – comme il s’est surnommé – n’a pas de mots assez durs contre l’intervention franco-britannique en Lybie. On pourra le trouver complaisant avec le défunt Guide de la Révolution. Mais depuis ses premiers articles à Combat, ce bretteur hors pair n’a de cesse de fustiger le Nouvel Ordre mondial prôné par ce qu’il appelle les pharisiens glabres d’outre atlantique. Dans ce domaine-là, au moins, Matzneff se montre plus fidèle que dans sa vie amoureuse décomposée. 

On peut ne pas être d’accord avec les idées fixes de cet archange aux pieds fourchus, mais il faut reconnaître qu’il les défend avec brio, dans un style éclatant. Chacun de ses livres est un festin. Les tomes de son journal intime se lisent comme autant d’aventures de Tintin, le sexe en plus. Avec Ivre du vin perdu, il a probablement écrit l’un des plus beaux romans de sa génération. Le polémiste est aussi étincelant. Sabre de Didi au clair, Matzneff taille en pièces les lieux communs de son époque. Il provoque en duel les moralisateurs de tous bords. 

Mais cet esprit libre est aussi un passeur, il aime partager ses admirations. Il n’en finira jamais de payer sa dette aux maîtres de sa jeunesse. Le portrait qu’il dresse de Casanova est de ce point de vue un chef d’oeuvre de gratitude. Sans Matzneff, nous ne saurions peut-être pas en France qu’il existe une religion orthodoxe. Et si tous les profs de grec ou de latin parlaient comme lui de Pyrrhon ou de Sextus Empiricus, les élèves se battraient pour assister à leurs cours. 

Avec Matzneff comme avec Albert Cossery, le lecteur a l’impression de faire l’école buissonnière et c’est bien pour ça que leurs oeuvres ne sont pas inscrites au programme. Et c’est tant mieux : les grandes passions comme les conversions les plus sincères sont clandestines.

Cossery dans les tablettes de Christopher Gérard sur Archaïon

773739_515494921806619_733971462_o.jpgQui se souvient d’Albert Cossery ? Frédéric Andrau.

Qui se souvient d’Albert Cossery (1913-2008), cet écrivain égyptien de langue française qui vécut 56 ans dans une chambre d’hôtel à Saint-Germain-des-Prés ? Un jeune écrivain au moins, Frédéric Andrau, qui lui adresse, d’homme à homme, un émouvant salut où il retrace une vie sédentaire à l’extrême, car bornée par le Café de Flore, la brasserie Lipp, la rue de Buci et les jardins du Luxembourg. Né au Caire dans la bourgeoisie copte, Albert Cossery se découvre très jeune une vocation d’écrivain à laquelle il sacrifie tout : à part les huit livres qu’il publie en soixante-cinq ans, il refusera toute forme de travail et, non sans cohérence, tout statut social, toute propriété matérielle, puisque, à sa mort, ses biens – cravates, pochettes, chaussettes de luxe et vieilles photographies – seront empaquetés dans trois cartons.

Après avoir fréquenté le Lycée français et les cercles surréalistes du Caire, Cossery s’installe à Paris en 1945, où, grâce au soutien précoce d’Henry Miller et d’Albert Camus, il se fait rapidement un nom. Noceur infatigable, séducteur aux yeux de braise, il choisit l’oisiveté absolue comme art de vivre et le bronzage comme discipline, pareil aux chats des temples de l’Egypte ancienne. Indifférent à la politique, il lit Stendhal, Céline et Gorki en menant une vie essentiellement nocturne, aux côtés de Genet et de Nimier, de Piccoli et de Greco.

Pique-assiette, gigolo et écrivain des bas-fonds du Caire, qui inspirent tous ses romans, car par un plaisant paradoxe, cette légende du microcosme germanopratin n’écrit que des histoires égyptiennes ! Pas une ligne sur les boîtes existentialistes ! Pas un mot sur Sartre et consorts ! Une figure singulière du milieu littéraire, qu’il ignorait superbement. Une sorte de sybarite fasciné par la torpeur, adonné au culte – horizontal – du soleil. Un rêveur à l’élégance voyante, que l’on suit pas à pas, charmé par la musique lancinante de son fidèle biographe. 

Christopher Gérard 

Frédéric Andrau, Monsieur Albert. Cossery, une vie, Editions de Corlevour, 20€

PS : Deux erreurs à corriger dans le deuxième tirage: Le Grand d’Espagne, de Roger Nimier, n’est pas un roman; et Lipp ne sert heureusement pas de sodas.

PPS : Bravo à l’attachée de presse, Guilaine Depis, pour son enthousiasme communicatif ! ^_^ 

Au Canada aussi, on lit Frédéric Andrau (recension sur Info-Culture.biz)

FA cote bandeau.jpgYves Gauthier a tenu à recevoir outre atlantique Monsieur Albert – Cossery, une vie.

Il l’a lu pour le site de référence canadien en matière de littérature Info-Culture biz

Il est des individus qui devienne avec ou sans leur consentement des personnages. Plus grand que nature. C’est ce genre de personnage que nous présente Frédéric Andrau avec le récit de Monsieur Albert Cossery, Une vie.

Il y a des personnes qui spontanément s’affublent d’une personnalité qui leur colle à la peau jusqu’à la mort. Il est fascinant de constater comment Albert Cossery a été capable d’ajouter un peu de mystère autour de sa personne pour devenir un tel personnage du monde littéraire et artistique de Paris. Et ce sur une période de plus de soixante ans.

Frédéric Andrau présente ce personnage, auteur de huit ouvrages littéraires, de quelques scénarios de films, avec une tendresse presque une affection communicative. Le lecteur ne peut y échapper. Mais il faut faire attention car chez ce personnage tout n’est pas que beauté. Il y a des côtés sombres qui portent ombrage à la grandeur du personnage.

Le lecteur va y découvrir, en plus de Monsieur Albert, nombre d’autres personnes appartenant à la faune artistique de chaque époque. Saint-Germain-des-Prés vivait des heures de gloire!

Frédéric Andrau nous propose un récit très intéressant et divertissant. (…)

Cossery parmi les réfractaires mis à l’honneur dans Le Figaro et vous (23/24 février 2012)

184040_362550027192438_779297239_n (1).jpgPRIÈRE POUR LES RÉFRACTAIRES

CHRONIQUE : Jean de La Ville de Mirmont, Albert Cossery, Jean-René Huguenin… Ces trois écrivains francs-tireurs font l’objet d’exercices d’admiration. L’occasion de les (re)découvrir.

L’HUMEUR DU TEMPS

par SÉBASTIEN LE FOL

On ne les étudie pas au lycée. Ils ne siègent pas à l’Académie française. Certains d’entre eux sont tenus en quarantaine. Ou relégués au rayon des auteurs pour happy few, ce qui revient au même. Sans la ferveur d’une petite troupe de lecteurs fidèles, il y a longtemps que leurs livres seraient épuisés. Leur nom est introuvable sur Google. Heureusement, cet hiver, une série d’étoiles filantes de la littérature et de petits maîtres ont décroché leur quart d’heure de célébrité.

9782070130610.jpgDans Bleus horizons (Gallimard), Jérôme Garcin sort de l’ombre Jean de La Ville de Mirmont, ce poète bordelais enseveli par un obus allemand. Le 28 novembre 1914, dont le lyrisme à la musicalité prodigieuse inspira Fauré et fut salué par Mauriac « Je suis né dans un port et depuis mon enfance/J’ai vu passer par là des pays bien divers/Attentif à la brise et toujours en partance/Mon coeur n’a jamais pris le chemin de la mer » (L’Horizon chimérique)

CouvCossery.jpgCent ans après sa naissance, le regretté Albert Cossery inspire un beau livre de gratitude à Frédéric Andrau Monsieur Albert aux éditions de Corlevour). Locataire durant un demi-siècle de la chambre 58 à l’Hôtel La Louisiane, dans le quartier Saint-Germain des Prés, ce dandy oriental s’adonna à l’art difficile de la paresse. Il laissa une demi douzaine de contes parmi lesquels Les hommes oubliés de Dieu et Un complot de saltimbanques, odes malicieuses à la richesse des misérables, à relire à la lumière du printemps arabe et du nouveau fascisme vert . Jean-René Huguenin, lui, n’a pas eu le temps de faire une oeuvre. Le 22 septembre 1962 ce jeune hussard ardent, ancien élève de Julien Gracq et fils spirituel de Mauriac, sortant de la nationale 10, entre Paris et Chartres. Quelques jours plus tard Roger Nimier se tuait au volant de son Aston Martin.

Revenons à Huguenin. Il venait d’avoir 26 ans. Depuis ce jour-là, les fidèles prononcent son nom comme un sésame ouvre-toi. Son journal intime a été le compagnon et le miroir de leur adolescence. Ils en connaissent encore certains passages par coeur. Jérôme Michel est de ceux-là.

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Dans Un jeune mort d’autrefois (à paraître le 14 mars chez Pierre-Guillaume de Roux), ce haut fonctionnaire paie sa dette à ce grand frère spirituel, silhouette rimbaldienne des Trente Glorieuses, version Tel Quel du romantisme. Huguenin avait la tentation du phalanstère. Il croyait à l’aristocratie des âmes fortes. S’il avait vévu, il aurait probablement consacré un exercice d’admiration à son cher Lermontov, l’auteur d’Un héros de notre temps, qui l’avait tant marqué. Manifester son admiration, c’est non seulement transmettre la flamme, mais aussi espérer une résurrection. Les livres de Garcin, Andrau et Michel sont des prières. Les morts auxquels elles s’adressent sont probablement des auteurs qui les ont révélé à eux-mêmes , aidé à devenir ceux qu’ils sont aujourd’hui. Pour des raisons diverses, ils se sentent en communion avec eux. Peut-être la confidentialité de ces auteurs les a-t-elle attirés. Mais cette envie de se distinguer n’explique pas tout. Ce que raconte chacun de ces essais, c’est ce moment magique où un lecteur se dit ce livre a été écrit pour moi.