Catégorie : Rama Yade
Rama Yade voit régulièrement Antoinette Fouque (in VSD 4 au 11 mars)
VSD (4 au 11 mars 2009) EXTRAIT interview Rama Yade
– Vous définissez vous comme féministe ?
RY – Oui,je suis féministe, et ce n’est pas un gros mot ! je ne comprends pas ceux à qui ce mot fait peur. Le genre ne doit, certes, être ni une excuse ni un prétexte. Le féminisme a ouvert le champ des possibles. Je vois régulièrement A. Fouque (cofondatrice du MLF qui milite pour l’émancipation des femmes) avec qui j’échange sur cette question du genre.Et puis, dans ma mission, je suis confrontée aux droits des femmes les plus bafoués dans le monde.
VSD – Lors de vos déplacements notamment en Afrique, quelles situations vous ont le plus choquée?
RY – Au Darfour, en Afganistan, c’est terrible, mais là où j’ai vu le pire c’est en République Démocratique du Congo : trois cent mille femmes violées depuis 2003 ! sans compter le sida, les fistules et les grossesses non désirées. Il n’y a qu’un seul gynécologue pour toute la région du Kivu. Ces femmes sont une cible privilégiée, puisque les viols détruisent les communautés. Eve Ensler (auteur des monologues du vagin) appelle cela un fémicide. J’ai décidé de projeter à Paris le documentaire
qu’elle a réalisé là-bas lors d’une soirée de mobilisation pour les femmes congolaises. Ce qui s’y passe blesse la conscience humaine, car cela dure depuis quinze ans. Quand j’en pars, j’ai l’impression d’y laisser un peu de mon coeur.
VSD – Et en France quelle serait l’urgence, selon vous ?
R Y – La lutte contre les violences conjugales. On parle beaucoup,et à juste titre, de l’égalité salariale. Mais la violence la plus primaire reste celle qui surgit dans l’intimité. Il ne suffit pas de séparer les couples mais de trouver un toit aux femmes battues. Il y a la soumission psychologique, cette culpabilité dont on met des années à se sortir. Les droits de l’homme, ce sont d’abord ceux de la femme. Soeur Emmanuelle disait:
« quand on éduque un homme, on éduque un être humain ; quand on éduque une femme, on éduque tout un peuple »