Retraites : La réforme à ne pas faire
Durant les «trente glorieuses » on travaillait 100 000 heures au cours d’une vie. Aujourd’hui un individu en fait moins de 50 000. On avait une durée de vie de moins de 65 ans et aujourd’hui on a plus de 80 ans. Comme en plus on accède au marché de l’emploi de plus en plus tard, le travail par année de vie a presque été divisé par trois.
Que les jeunes ne se plaignent pas qu’ils n’auront pas de retraite si ils ne réclament pas l’augmentation de la durée du travail.
Il faut résister à la tentation de dire que moins on travaille, plus on vit longtemps car jamais la mortalité n’a été aussi faible durant les périodes actives et l’augmentation de la durée de vie porte surtout sur les périodes de retraite. (Il y a clairement eu des effets sur les emplois pénibles, mais sans incidence majeure sur la statistique globale ci-dessus).
Vouloir régler le problème des retraites sans augmenter la durée du travail se traduira nécessairement par une diminution du niveau de vie.
Pour diminuer les déficits, le gouvernement voudrait raboter les retraites de ceux qui bénéficient d’un régime plus favorable en invoquant l’égalité. Il fait d’abord un mauvais calcul, il ne pourra imposer l’égalité qu’en alignant l’ensemble des retraites sur les régimes les plus favorables ce qui augmentera encore les déficits.
Il se trompe ensuite d’objectif : La diversité des différents systèmes de retraites correspond à des histoires différentes, des besoins différents, des accords différents. La retraite fait partie intégrante de la rémunération même si c’est une rémunération différée et certains peuvent choisir des conditions de travail plus difficiles associée à une retraite plus valorisée. L’unicité des régimes de retraite est une diminution de la liberté du travail.
Le gouvernement se trompe de fonction. Le système de retraite devrait être choisi par les travailleurs et uniquement par eux. Le paritarisme patronat/salariés dans la gestion des caisses de retraite (comme dans la gestion des caisses sociales) était une absurdité et l’intervention de l’Etat en est une autre. Le patronat paie le cout du travail (salaires + charges dites patronales) et il n’y a aucune raison qu’il se mêle de la gestion de ces sommes. Sur cette base pourrait se préparer une vraie réforme des retraites. La gestion de ces retraites serait confiée par les salariés à des opérateurs en concurrence pour optimiser les couts de fonctionnement qui pourraient être soit des assureurs soit des syndicats libres si on réussissait à libérer les syndicats dits « historiques » de leurs privilèges.
Il ne peut être question de transformer notre système où les actifs paient les retraites de leurs ainés par celui, moins sensible aux variations de la démographie, où chacun paie ( et donc épargne) pour sa retraite future, car il faudrait alors, le temps d’une génération, supporter une double cotisation. Par contre on devrait anticiper les variations futures du rapport actif/retraité en faisant une cotisation spécifique permettant de provisionner la valeur de cette variation.
Si il y a une chose à retirer des propositions d’Emmanuel Macron, c’est bien le calcul de la retraite par un système de points non pour qu’il soit généralisé à l’ensemble des retraités mais pour qu’il serve de mesure des systèmes de retraites. En calculant l’équivalent en points de chaque régime de retraites quel qu’il soit, chacun pourrait avoir une vraie appréciation de la valeur accumulée par ses cotisations. Il pourrait facilement les transférer dans un autre système, notamment en cas de changement d’employeur, ou par exemple apprécier la valeur d’un nouvel avantage négocié.
Ce système de mesure des retraites en points devra avoir une référence d’âge de prise de retraite, qui pourrait être par exemple de 65 ans, quelle que soit l’âge réel de départ en retraite prévu dans chaque convention spécifique. Ainsi des conventions différentes peuvent être à la disposition des salariés qui s’y retrouveront grâce à leur évaluation en « équivalent points ».
Autant notre milieu économique serait appauvri par l’instauration d’un système de retraite unique autant il serait plus efficace en étant doté d’un outil de mesure commun permettant l’évaluation des droits acquis par nos cotisations.