Un roman ambigu
La Croisade du mal-pensant, de Christian de Moliner se glisse, non sans une certaine habileté, dans les débats actuels sur fond de querelles « racisés ». Très dans l’air du temps, donc très, très ambigu.
Samuel Meiersohn est un homme solitaire dans un monde où il ne trouve plus ses valeurs. Universitaire désabusé et proche de la retraite, marqué par la perte d’un bébé et la séparation avec son ex-femme, il entame une croisade contre certains étudiants et professeurs qui se battent au sein de sa faculté pour obtenir un espace sans Blancs. Y opposant une défense de la laïcité, il se heurte à son administration qui craint de faire des vagues.
Mais n’est-ce pas une lutte perdue d’avance ?
Ce n’est pas un hasard si le professeur créé par Christian de Moliner (il fait partie du sérail ayant enseigné à haut niveau la mathématique) est un historien qui travaille sur les croisades en optant pour une vision uchronique et se demandant par exemple ce qui se serait passé si Saladin avait été tué à Montsigard en 1177… Car, en ce début du XXIe siècle, il fait partie sans doute de ceux qui pensent que la France actuelle se meurt de l’abandon de certaines racines, chrétiennes en l’occurrence. Au fil du récit apparaissent ainsi des groupes et des institutions qui, même si Samuel Meiersohn les tient un peu à distance, n’en font pas moins les chantres d’une certaine idéologie. Ainsi quand il évoque un journaliste d’un petit journal local, L’Observateur du Saint-Paul, il est écrit : « Il dénonçait à longueur de colonnes l’insécurité grandissante dans l’agglomération ainsi que la politique culturelle du maire jugée trop favorable aux associations progressistes. »