Pays de la Loire
mardi 24 mars 2009
Intacte, cette bouteille de vin a plus de 200 ans
Anne de Bascher a déterré la bouteille de vin sous ce vieux chêne du XIXe, dans le parc, à trois cents mètres de son château. Derrière elle, à gauche de l’arbre, une cinquantaine de culots de bouteilles également exhumés.
Une cache faite à la va-vite au fond du parc d’un château, en pleine période des guerres de Vendée ? L’hypothèse d’Anne de Bascher, qui a exhumé ce flacon à Barbechat, dans le Vignoble nantais.
« Je tombe sur un culot en verre très épais. J’enfonce mes mains pour voir la longueur. Mes doigts n’en voient pas la fin ! Mon coeur bat à 100 à l’heure. J’arrache des racines. Je tourne le culot pour l’extirper. Et là, j’extrais une bouteille intacte ! D’émotion, je suis tombée dans le fossé. »
C’était il y a quinze jours. Anne de Bascher vient de mettre la main sur une bouteille de vin du XVIIIe siècle, dans le parc de son château de la Berrière, à Barbechat, dans le Vignoble nantais. Passionnée, celle qui est aussi romancière (1) raconte « Sa belle histoire ».
Belle histoire commencée dès janvier 2008. Elle fait venir un terrassier pour reconstituer un fossé de drainage à trois cents mètres du château. Il a à peine commencé que sa pelleteuse crisse sur du verre. « Je lui dis halte-là ! Ce n’est pas normal ! » Anne de Bascher, archéologue de formation, se creuse la tête. Soudain, la lumière jaillit : « C’est une cache ! Le vin a été planqué ! »
Elle déroule son hypothèse. « À l’époque des guerres de Vendée, le bruit courait que le château était sur le parcours des colonnes infernales de Turreau, le premier militaire français à avoir appliqué la politique de la terre brûlée contre les châteaux et les royalistes. » Anne de Bascher, suppose, les yeux pétillant : « Les métayers du château n’ont pas voulu abreuver leurs assassins, leur donner cette satisfaction. » Et ils auraient tout caché. Le château a finalement été incendié en 1794.
La conservatrice du musée Dobrée confirme
Dans la foulée, Anne de Bascher fouille régulièrement pour confirmer son pressentiment. Elle déterre un vase en poterie, à quarante centimètres seulement de profondeur. « La cache a dû être faite à la va-vite. » Une anse de carafe aussi. Une cinquantaine de culots de bouteille. Et, enfin, cette fameuse bouteille entière, il y a quinze jours.
« C’est émouvant. Cela donne réalité à des événements de plus de deux cents ans ! » À l’intérieur, il reste un fond du liquide. « Cela pourrait être du gros plant. Mais j’ai décidé que c’était du muscadet ! Je n’ouvrirai jamais la bouteille. Et la terre restera dessus. » La conservatrice du musée Dobrée, à Nantes, a confirmé, mercredi, qu’il s’agissait d’une bouteille du XVIIIe siècle. Selon elle, l’hypothèse historique d’Anne de Bascher tient parfaitement.
Cette dernière exposera sa trouvaille dans sa cave de dégustation. « Pour le patrimoine, c’est extraordinaire. Personnellement, cette bouteille efface le côté sanglant de l’histoire de mes ancêtres. Je n’aurais pas été plus ravie de trouver un trésor de pièces d’or. » La première personne avec qui elle aurait aimé trinquer pour cette découverte, c’est son père. « C’est lui qui a renoué avec la tradition viticole du château. Je lui dédie cette bouteille. Et à ceux qui l’ont cachée ! «
Audrey MONTILLY.
Dernier livre paru d’Anne de Bascher : Alba, correspondance à une voix, Editions Des femmes-Antoinette Fouque, 20 euros