Par Yves-Alexandre Julien – Journaliste Culturel
Dans son dernier roman, L’assassinat de Mark Zuckerberg Alexandre Arditti entraîne le lecteur dans un univers dystopique où la mort du fondateur de Facebook marque le début d’une enquête policière métaphorique. Alexandre Arditti nous trempe dans les tréfonds d’une société numérique en ébullition. À travers une plume acérée et une intrigue haletante, l’auteur découpe au scalpel les méfaits du progrès technologique, mettant en lumière les sombres travers d’une ère dominée par les GAFA. Une exploration sans compromis des enjeux contemporains qui secouent notre monde ultra-connecté. Dans une critique sociale sans concession, l’auteur explore également, les dérives du capitalisme sauvage et les dangers d’une société ultra-connectée et matérialiste.
I. Contrôle de la pensée et flot continu d’Informations
Arditti dépeint un monde où le contrôle de la pensée et la manipulation des masses prennent de nouvelles dimensions avec l’avènement des réseaux sociaux et du capitalisme numérique. Avec le personnage de Travis, l’auteur met en lumière la stratégie du noyage intellectuel dans un flot incessant d’informations, tant publicitaires qu’indigentes, afin de maintenir la population dans l’ignorance et la soumission. Une mise en garde percutante contre l’emprise croissante des nouvelles technologies sur nos vies, où chaque clic nous éloigne un peu plus de notre libre arbitre autant qu’une analyse pertinente qui questionne notre rapport à la vérité et à la liberté d’expression à l’ère du tout digital.
« Le meilleur moyen de vous contrôler, c’est de vous rendre complètement accros. » (George Orwell, 1984)
« Méfiez-vous de l’évidence, elle passe son temps à changer. » (Jean d’Ormesson cité au début de L’assassinat de Mark Zuckerberg)
II. Capitalisme sauvage et endoctrinement par le réseau.
En examinant les motivations du terroriste et les conséquences de ses actes, Arditti soulève des questions cruciales sur les véritables enjeux de notre société moderne. Le roman interroge le rôle des grandes multinationales du numérique, les GAFA, dans la quête effrénée du profit au détriment des libertés individuelles et de la démocratie. Il met également en garde contre les risques d’endoctrinement et de polarisation des opinions au sein d’une société de plus en plus matérialiste et fragmentée dans un monde où le profit prime sur l’humanité.
Dans une société rongée par le capitalisme sauvage et l’emprise des géants du numérique, Alexandre Arditti nous confronte à une réalité troublante. À travers les pages de son roman, l’auteur dénonce sans détour les dérives d’un système économique où le profit prime sur les valeurs humaines et la démocratie.
« Une société dont l’économie ne survit qu’en générant des besoins artificiels, avec pour objectif d’écouler des produits dont la plupart sont inutiles voire nocifs pour la population comme pour la planète, ne me paraît pas digne de survie à long terme. » (Aldous Huxley, Le Meilleur des mondes cité dans L’Assassinat de Mark Zuckerberg, p. 57.)
III. Transhumanisme et Wokisme encore et toujours…
Au fil du dialogue entre le terroriste et le commissaire, l’enquête policière devient le théâtre d’un débat philosophique sur l’idéologie moderne. Arditti explore les notions de transhumanisme et de wokisme en mettant en opposition les aspirations à un nouveau monde et les valeurs fondamentales de l’humanité, révélant les contradictions d’un monde en quête perpétuelle de progrès.
L’auteur critique la tendance à uniformiser la pensée et à censurer toute divergence d’opinions au nom d’une morale progressiste, soulignant les dangers d’une société où la liberté d’expression est menacée. Une réflexion profonde sur les enjeux éthiques et moraux qui dessinent le visage de notre avenir autant qu’une interrogation essentielle sur le devenir de l’humanité dans un monde en quête de sens et de progrès.
« La vérité n’est pas ce que vous voulez, mais ce que vous avez besoin de savoir. » (Orson Scott Card, La Stratégie Ender)
« Que se passerait-il si une partie, même minoritaire, de la population se mettait soudainement à refuser cette société du tout-numérique ? À contester ce nouveau monde où la surveillance généralisée deviendrait la norme, et par extension où la liberté d’expression, les opinions divergentes, et toute complexité dans le débat public auraient disparu. » (Extrait de L’assassinat de Mark Zuckerberg)
Selon Pierre Bourdieu, dans son ouvrage La distinction, il est essentiel de déconstruire les mécanismes de pouvoir et de domination qui régissent les sociétés modernes. L’assassinat Mark Zuckerberg offre une opportunité de réflexion sur la manière dont les élites économiques façonnent l’opinion publique et influencent les décisions politiques.De même, Manuel Castells, dans sa trilogie L’Ère de l’Information explore les transformations sociales induites par la révolution numérique. Le roman d’Arditi permet d’illustrer concrètement les concepts abordés par Castells, notamment en ce qui concerne les nouveaux rapports de pouvoir et les formes de résistance émergentes face à la domination technologique.
En politique, Francis Fukuyama, dans La fin de l’Histoire et Le dernier homme, évoque les défis auxquels les démocraties libérales sont confrontées à l’ère de la mondialisation et de la technologie. L’Assassinat de Mark Zuckerberg offre une analyse subtile des tensions entre liberté individuelle et contrôle social, enrichissant ainsi le débat sur l’avenir de nos sociétés démocratiques.
En étudiant les réactions des personnages face aux événements qui secouent leur univers, ces analystes décryptent les mécanismes de résistance et d’adaptation à un environnement en constante évolution, posant ainsi les bases d’une réflexion approfondie sur les défis de la gouvernance et de la citoyenneté à l’ère du digital.
« Les médias ont le pouvoir de vous faire adorer, détester ou simplement ignorer tout le monde. » (David Foster Wallace, Infinite Jest)
« La meilleure façon de contrôler la pensée d’une population est simplement qu’elle n’en ait pas. » (L’assassinat de Mark Zuckerberg, p. 53)
V. Éviter les écueils de la stigmatisation: Pourquoi Arditi omet délibérément la religion et la nationalité de Zuckerberg dans son roman
Dans sa démarche artistique, Alexandre Arditti fait le choix délibéré de ne pas inclure la religion et la nationalité de Mark Zuckerberg dans son récit. Cette décision vise vraisemblablement à prévenir tout risque de stigmatisation et à recentrer l’attention du lecteur sur les véritables enjeux de l’histoire. En écartant ces éléments potentiellement polémiques, l’auteur évite de nourrir des narratives complotistes et xénophobes qui pourraient détourner le message central du roman.
Introduire la dimension de la religion, de la nationalité et de l’appartenance au monde du capitalisme de Mark Zuckerberg aurait pu ajouter une dimension supplémentaire au récit, mais Alexandre Arditti a probablement pris la décision consciente de ne pas le mentionner pour plusieurs raisons. En effet, cela aurait pu détourner l’attention du lecteur de l’essence même de l’histoire, qui se concentre sur les critiques sociales et les enjeux liés à la technologie et au pouvoir des grandes entreprises. Mentionner la religion ou la nationalité de Zuckerberg aurait également pu être perçu comme une tentative de stigmatisation, ce qui pourrait nuire à la réception du roman.
Cependant, certains auteurs xénophobes et complotistes pourraient avoir interprété ces éléments comme des preuves supplémentaires d’un prétendu « complot mondial ». Ils auraient peut-être invoqué des théories du complot antisémites ou anti-capitalistes pour renforcer leur argumentation. Par exemple, des auteurs comme Henry Ford, dans son ouvrage Le Juif international, ont propagé des théories du complot antisémites qui accusaient les Juifs d’être à la tête d’un complot mondial pour dominer le monde. De même, des figures complotistes modernes pourraient avoir exploité l’appartenance de Zuckerberg au monde du capitalisme et son origine juive pour étayer leurs théories sur un contrôle mondial exercé par une élite occulte.
Toutefois, en choisissant de ne pas inclure ces détails dans son roman, Arditti peut avoir évité de nourrir ces narratives complotistes et xénophobes, se concentrant ainsi sur les véritables enjeux sociétaux soulevés par son histoire. Cela permet également au lecteur de se concentrer sur les thèmes principaux du roman, sans être distrait par des considérations qui pourraient être mal interprétées ou détournées de leur contexte. En fin de compte, la décision de ne pas mentionner ces éléments spécifiques contribue à maintenir l’intégrité de l’œuvre littéraire et à éviter toute récupération par des mouvements idéologiques nocifs.
Grâce à L’assassinat de Mark Zuckerberg Alexandre Arditti offre une réflexion profonde sur les défis et les dilemmes de notre ère numérique. En mêlant intrigue policière et critique sociale, l’auteur nous invite à questionner notre rapport aux nouvelles technologies, à repenser nos valeurs et à envisager l’avenir avec lucidité. Ce roman captivant nous pousse à nous interroger sur ce que nous voulons vraiment pour notre société et sur les choix que nous devons faire pour façonner notre destinée collective.