En Iran, depuis notre livre et notre film, rien n’a changé… Hélas !

regfem.jpg« Mouvement de libération des femmes iraniennes, année zéro »…
Un film réalisé par des femmes du MLF et « Des femmes filment », avec des femmes iraniennes. 16 millimètres couleur, son optique, durée : 13 minutes.
 
Mars 1979, Téhéran
Une infirmière :
« … depuis jeudi dernier, les religieux nous posent des problèmes. Nous pensons qu’ils ont commencé par le voile et qu’ils n’en resteront pas là. Il y a quelques jours que nous sortons dans les rues pour dire que nous ne voulons pas de voile. Si c’était ça qu’ils voulaient, ils devaient nous dire qu’il y a une inégalité entre l’homme et la femme… Si nous ne parlons pas maintenant, quand la Constitution sera écrite, ils ne nous accorderont plus rien… »
 
Une seconde infirmière :
« Dans notre hôpital, les hommes et les femmes ont travaillé ensemble, ils ont condamné le sexisme. Le chef de notre service a fait afficher un papier disant : sera expulsé quiconque fait du tort à une femme parce qu’elle est une femme. »
 
Tanareh :
« L’islam a toujours été réactionnaire avec les femmes, elles le sentent, du moins celles qui ont commencé à manifester. Dans la famille, les femmes ont toujours été les premières victimes, les premières à être battues. Elles n’ont pas d’indépendance financière. Ma mère n’a pas pu divorcer, elle n’en avait pas les moyens économiques, elle a été obligée de tout supporter. Et en plus, mon père la battait. »
 
Nahim : « Sous le Shah, il y avait une loi, la Loi de la défense de la famille, qui interdisait la polygamie ; ils ont annulé cette loi. A partir de là, les femmes se sont dit : « Les hommes vont épouser on ne sait combien de femmes, divorcer quand ils veulent, être des super-mecs… La suprématie masculine, quoi ! » On était déjà énervées et ça nous a préparées à descendre dans la rue. »…

Kate MILLET IRAN.JPG

Quatrième de couverture :
des femmes du M.L.F. éditent…
 
EN IRAN – Kate Millett
 
1981, traduit par Sophie Dunoyer – Photos Sophie Keir
 
Téhéran, 8 mars 1979
Hier, pendant le meeting à l’Université, elles se sont soulevées pour protester, manifester. Contre l’ordre de Khomeiny de remettre le voile. Des femmes en colère, venues de toute la ville.
« Non, ont déclaré les gauchistes qui avaient organisé le meeting dans l’intention d’en faire un forum public d’éducation pour les femmes, manifester n’est pas productif, c’est de la dissidence contre le nouveau régime, cela divise la révolution. Attendons de voir comment est reçue la loi imposant le tchador.
« Non, nous n’attendrons pas. Nous allons descendre dans les rues. Tout de suite. »
Elles se sont heurtées aux grilles fermées à clé. Fermées avec des chaînes. Par de jeunes fanatiques islamiques. Alors elles ont escaladé les immenses grilles de l’Université de Téhéran. Du haut des murs, les femmes grondaient – à la foule : « C’est cela, notre liberté ? » « Avec ou sans tchador, nous avons renversé le Shah ! » « Nous, femmes iraniennes, ne nous laisserons plus enchaîner. »
Cinq mille femmes ont marché jusqu’aux bureaux du gouvernement. Elles furent accueillies par les fusils.
« Les ennemis des femmes sont aussi ceux de la révolution. »
Jusqu’ici, partout nous étions piétinées. De tout temps. De toutes parts maintenant nous redressons la tête. Un mouvement de vaste envergure, historique, colossal. Une libération mondiale… Aujourd’hui, ici, en Iran, nous proclamons la naissance d’un mouvement de libération des femmes.
 
K.M.
 
Féministe active aux Etats-Unis, Kate Millett combattit pendant des années, dans le CAIFI, l’impéraialisme américain et la dictature du Shah en Iran. Au lendemain de la révolution, elle fut invitée par des femmes iraniennes à prendre part à leur premier rassemblement, à l’occasion de la journée internationale des femmes. Auteur de La politique du mâle, En vol, Sita, La cave, elle est aussi sculptrice et fait maintenant de la photographie…
 

Le Monde Libertaire hors-série (juillet-septembre 2009) se réfère à Kate Millett (article de Caroline Granier)

0404_feminism.jpg9782721005625.jpgTitre de l’article : FEMINISTES tant qu’il le faudra

« En divisant l’humanité en deux groupes et en donnant à l’un le pouvoir de dominer l’autre par droit de naissance, l’ordre social a déjà établi et ratifié un système d’oppression qui sous-tendra et corrompra toutes les relations humaines, ainsi que tous les domaines de la pensée et de l’expérience. » Kate Millett

Caroline Granier signe le dossier. (Commission Femmes de la Fédération anarchiste avec l’aide d’Alice, Barbara, Elisabeth, Frédérique, Hélène, Ludmilla, Marie-Jo, Nelly, Romain et Stéphanie)

Edmonde Charles-Roux a frémi en lisant Laurence Zordan (article du 5 juin 05 dans La Provence)

zordan3.JPGLu pour vous
A faire frémir
Par Edmonde Charles-Roux
 
Des yeux pour mourir, éditions des femmes, 174 p., 18 euros
 
Aux confins du Tadjikistan Laurence Zordan plante le décor de son roman, l’histoire d’un taliban dressé à torturer
 
Ce récit est d’une cruauté inhabituelle et par moments insoutenable. Il donne corps à un personnage juvénile que l’on voit grandir : le narrateur. C’est un jeune Afghan d’une indéniable beauté. Il a le visage nu : « La barbe réglementaire des Talibans se refusait à y pousser. Nul ne songeait à lui en faire reproche », bien qu’il fut destiné à devenir un moudjahidin. On avait donc enseigné au narrateur depuis l’enfance « la haine fulgurante », on l’avait dressé à torturer. L’auteur de ce récit – et voilà la surprise – est une femme, une occidentale, Laurence Zordan.
 
Des yeux pour mourir est son premier roman. Il a pour cadre une région lointaine, située aux confins du Tadjikistan, de la Chine et de l’Afghanistan, un pays d’érosion, de montagnes désertiques, de soleil brûlant, de tempêtes et d’hallucinations. « Le paysage s’est suicidé bien avant ma naissance », précise le narrateur. Le temps est celui de la guerre, l’époque celle de l’invasion russe, des bombardements aveugles et des villages incendiés. « Nous vivons au bord du vide », dit encore le narrateur qui s’adresse directement, d’un bout à l’autre du livre, au lecteur comme il s’adresserait à un occidental effaré, horrifié ou à un expert en profilage criminel tout occupé à l’écouter et cherchant en vain à comprendre de quelles sortes de monstres il est confronté. « Or, je suis le guetteur, le Guetteur de l’abomination. Vos gazettes s’extasient devant la beauté des yeux des Afghans. Regrettable, sans doute, qu’avec un physique hollywoodien certains se soient fait talibans… »
 
Une des questions que pose ce livre est comment écrire après le 11 septembre 2001, ce jour où les deux tours jumelles du World Trade Center s’effondraient ? « Vous devriez comprendre que l’ancrage dans la réalité appartient au passé et qu’avec les deux tours se sont également effondrées la vraisemblance et la plausibilité. » Autre question liée à ce roman : « Comment peut-on semer la terreur et la torture sans être un malade mental ? »
Pour tenter de répondre à ces questions, l’auteur bâtit cette sorte de roman d’apprentissage. L’histoire de ce petit pouilleux, élevé dans l’obscurantisme et la haine des femmes, qui apprend à tuer, devient l’enfant-assassin, maniant non pas la kalachnikov mais une arme plus silencieuse : son poignard. Il devient, par la force des choses, un fou de Dieu sans Dieu. Il mêle des actes de guerre aux missions d’infiltration destinées à déstabiliser l’armée indienne. Il trahit les uns puis les autres, mangeant à tous les râteliers et puis, chemin faisant, il passe de la guerre aux salles de torture où sa cruauté est à faire frémir et termine sa vie en clochard. « Un Afghan clochard à New-York après le 11 septembre. Vagabond glabre, terré parmi les clochards hirsutes qui, comme les Talibans, ont peur de moi, de mon poignard et de mes joues sans barbe… »
Tel est le dernier portrait paru de ce nouveau type de terroriste.
 
E.C.-R.
Des yeux pour mourir, éditions des femmes, 174 p., 18 euros

Brigitte Kernel conseille d’écouter Sagan grâce aux CD des Editions Des femmes (hors-série de Muze)

Grand dossier Sagan dans Muze (hors série juillet août 2009)
Destin Françoise Sagan
La vie en excès de vitesse
Par Brigitte Kernel
 
image003.jpgEcouter Sagan Avec mon meilleur souvenir
Un document exceptionnel, Françoise Sagan lit elle-même ses Mémoires, publiées en 1985. De cette expérience, elle dira : « Contrairement aux prédictions pessimistes de l’ingénieur du son, je me débrouillai fort bien. » Deux coffrets cassettes aux éd. Des femmes.

Françoise Sagan
Avec mon meilleur souvenir
lu par l’auteur

Musique originale de Frédéric Botton
Texte intégral
Tome 1 – Coffret 2 Cassettes – 25,50 €
Tome 2 – Coffret 2 Cassettes – 25,50 €

1 coffret 3CD- 32 €

Dix ans après avoir enregistré Avec mon meilleur souvenir, le plus personnel et le plus accompli de ses livres, Françoise Sagan raconte dans Derrière l’épaule cette expérience inédite : « Le studio donnait sur une cour, style Utrillo, où un enfant et un chat se succédaient. Contrairement aux prédictions pessimistes de l’ingénieur du son, je me débrouillai fort bien, ne bégayai pas et inscrivis ma voix sur un disque, comme une professionnelle, pendant trois jours… C’était l’été, je crois, et j’ai gardé un souvenir paresseux et réussi de ces trois jours ». 
Lectrice, Françoise Sagan retrouve, mieux qu’aucune autre, le ton, la voix, l’accent du cœur qui précèdent le texte et l’ont dicté. Pulsions, émotions, passions, admirations, rencontres font la musique pudique, intime, singulière de ses souvenirs.

Sylvia Plath à l’honneur dans Le Magazine littéraire (par Claude-Michel Cluny)

Article sur Sylvia Plath citant ses oeuvres aux editions des femmes dans le Magazine littéraire juillet-août 2009
 
En vers et contre tout – Par Claude-Michel Cluny
 
LIV7895.jpgExtrait Ariel « Moi je ne suis pas une esclave / Même si depuis des années j’avale la poussière / Et j’essuie les assiettes avec mon épaisse chevelure. »
 
Lu par Isabelle Carré aux Editions Des femmes (livre audio)
 
Lorsqu’elle met fin à ses jours le 11 février 1963 à Londres, Sylvia Plath laisse derrière elle le manuscrit de son second recueil de poèmes, Ariel. Considéré comme son chef-d’œuvre, il sera publié en 1965. Inspiré par l’obsession récurrente de la mort, l’impossible deuil du père et la trahison de l’homme aimé, Ariel livre une parole charnelle, haletante et sombre.
 
« Je suis habitée par un cri.
Chaque nuit il sort à tire d’aile
Cherchant, de ses crochets,
Quelque chose à aimer »

S.P.
 
sylvia.jpgSylvia Plath, native du Massachussetts (1932-1963). Epouse en 1956 le poète britannique Ted Hughes, avec qui elle aura deux enfants. Après son suicide, Hughes assurera la publication de ses oeuvres : Ariel, Arbres d’hiver, La Traversée (éd. Gallimard pour tous ces titres), Letters home (1950-1956), aux éditions Des femmes.

lettershome.jpgSylvia Plath
Letters home
Edition de Aurélia Schober Plath
Traduit de l’américain par Sylvie Durastanti

Tome 1 – 1950-1956

373 p. – 22 € – 1988
Sylvia Plath avait à peine dix-huit ans lorsqu’en 1950 elle envoya la première des quelque sept cents lettres qu’elle devait écrire aux siens avant de mourir à l’âge de trente ans.
Dès cette date, le désir d’écrire va de pair pour elle avec la volonté de s’insérer dans l’Amérique des années 50, une Amérique où l’aspiration au bonheur se confond souvent avec un idéal de réussite forcené.
Toute sa correspondance reflète cet écartèlement entre une vocation — écrire — et l’obsession constante, souvent douloureuse, d’atteindre à la perfection dans tous les domaines, au prix d’un travail inlassable. D’exaltations en dépressions, de crises destructrices en élans créateurs, ces lettres éclairent les raisons qui ont poussé Sylvia Plath, peu après la parution de son roman La cloche de détresse, à se donner la mort, à Londres, dans la solitude où elle se retrouvait, séparée des siens, au cours d’un hiver particulièrement difficile. Américaine d’origine autrichienne, née dans le Massachusetts en 1932, Sylvia Plath mena une double carrière d’écrivain et d’universitaire aux Etats-Unis, avant d’émigrer en Angleterre, à l’âge de vingt-trois ans. Elle mit fin à ses jours en 1963. “J’espère que tu comprends que tout ceci est fort intime, et que je le partage avec toi comme je partagerais les plus intimes secrets de mon âme — car je désire que tu comprennes combien mes lettres sont indémêlables et complexes, et que j’y fais face sans désespérer, luttant avec les anges et apprenant à m’accomoder des inévitables conflits qui sont notre lot, dans la mesure où nous vivons vraiment. Je m’aguerris au fur et à mesure. Toutes les grandissantes visions de beauté et de monde nouveau que j’éprouve, je les paie de véritables douleurs d’enfantement.”
9 mars 1956
S.P.

1200596901.jpgLu par Catherine Deneuve (cassettes de la Bibliothèque des Voix)

Catherine Deneuve lit
Letters Home
de Sylvia Plath

Coffret 2 Cassettes – 24,50 €

Dès le commencement, le désir d’écrire va de pair pour elle avec la volonté de s’insérer dans l’Amérique des années 50, une Amérique où l’aspiration au bonheur se confond avec un idéal de réussite forcené…

L’explication sur la pauvreté de Martha Nussbaum, dans la revue Transversalités (juillet/sept 09)

nussbaum.jpgTRANSVERSALITES

JUILLET / SEPTEMBRE 2009

LA PAUVRETE : UNE APPROCHE SOCIO-ECONOMIQUE – ENTRETIEN AVEC JEAN-LUC DUBOIS (Jean-Luc Dubois est Directeur de recherche à l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) et au Centre d’économie et d’Ethique pour l’Environnement et le Développement (C3ED) de l’Université de Versailles-Saint-Quentin en Yvelines (UVSQ) Il est également enseignant au Master Economie solidaire et logique de marché de l’Institut Catholique de Paris.

Cet entretien a été conduit par Elena Lasida, directrice du Master Economie solidaire et logique de marché à l’Institut Catholique de Paris (ICP), avec l’appui de Kevin Minkieba Lompo, doctorant au C3ED.

La pauvreté apparaît avant tout comme un phénomène économique. Or, l’économie a beaucoup évolué dans la manière d’appréhender la pauvreté, notamment à partir des apports de Amartya Sen. Sous forme d’entretien, Jean-Luc Dubois nous présente de façon précise les principales traces et conséquences de cette évolution. (…)

Comment peut-on, sur la base de cette notion de « capabilité », identifier les différentes formes de pauvreté ?

Dans ce cadre, la pauvreté est considérée comme un manque, ou une privation, de « capabilité » à mener la vie souhaitée. A. Sen ne considère la « capabilité » que dans un sens générique, ne citant que quelques « capabilités élémentaires », comme le fait de se procurer de la nourriture, d’apprendre à lire ou d’être soigné. Martha Nussbaum, à l’inverse, propose une liste de dix « capabilités humaines fondamentales », qui s’ajusterait aux contextes socioculturels rencontrés. On est dans une vision de la pauvreté objective et absolue, qui traverse l’espace et le temps. La subjectivité ne s’exprime qu’au travers des priorités et interactions que l’on peut établir entre différentes « capabilités ».

Le fait de considérer la pauvreté comme une privation de « capabilité » a plusieurs conséquences. Tout d’abord, on doit tenir compte de l’accessibilité, ou du droit d’accès (« entitlement »), à l’ensemble des biens et services disponibles. Cette accessibilité est indispensable, car c’est elle qui permet aux personnes de constituer, par accumulation, les actifs dont elles ont besoin comme le capital physique, le capital humain résultant d’une fréquentation régulière de l’école, le capital social en tissant des liens, etc. Ensuite, il faut connaître les aspirations des personnes afin de pouvoir définir les priorités en termes de « capabilités » à renforcer ou à étendre. Ce sont ces aspirations qui vont orienter les décisions collectives et les mesures qui seront mises en oeuvre dans le cadre des politiques publiques. Enfin, se pose la question de la conversion des ressources en fonctionnements. C’est ainsi que l’on peut déterminer ce que les gens sont réellement capables de faire et d’être, en fonction de leurs aspirations et face aux opportunités disponibles. Or, cette conversion est à l’origine de l’inégalité de « capabilité » entre les personnes et soulève bien des questions de justice sociale.

martha.jpgMais la définition des « capabilités » ne rejoint-elle pas l’idée des « conditions de vie » de la première approche ?

Il est vrai que lorsqu’on détaille la « capabilité » (au sens de A. Sen) en une liste de fonctionnements, ou mieux en une liste de « capabilités humaines fondamentales » (au sens de M. Nussbaum), on rejoint la vision des conditions de vie. Les fonctionnements expriment, de fait, l’accomplissement d’un certain nombre de conditions de vie en ce qui concerne la santé, l’éducation, le logement etc. Ils se rapprocheraient même plutôt des conditions d’existence vu l’ouverture multidimensionnelle qui les caractérise. (…)

Pour en savoir plus :

Nussbaum M., Femmes et développement humain : l’approche des capabilités, Paris, Des femmes, 2000 (réédition 2008)

Cycle de conférences sur la création au féminin (par Thierry Delcourt)

colette.jpgCréation au féminin
 
Cycle de conférences
Thierry Delcourt
 
(avec notamment Lydie Arickx)
 
Médiathèque Jean Falala
Auditorium
2, rue des Fuseliers
51 100 Reims (Parvis de la Cathédrale)
 
Renseignements
Thierry Delcourt 03 26 47 13 05
Librairie La Belle Image 03 26 88 39 69
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1col.jpgMardi 15 septembre 2009 – 18 h 30
EXPRESSION, EXISTENCE ET CREATION AU FEMININ
 
La création a t-elle un sexe ? Existe t-il une différence entre femmes et hommes quant à leurs pratiques créatives ? Que met en jeu le processus de création au féminin au-delà de la singularité de chaque artiste, et de chaque oeuvre ?
Il n’y a pas si longtemps que la création artistique des femmes a droit de cité et ce n’est pas sans combat ! Au coeur de la culture, questionnant ses archétypes, refusant les contraintes de la préfiguration et des valeurs canoniques, quatorze artistes – chorégraphe, poète, peintres, plasticiennes, styliste, sculpteures et compositeurs – ont accepté de parler longuement et intimement de leiur pratique, de la place qu’elle occupe dans leur vie et des incidences de la création sur leur être-femme. Ces créatrices partagent le souci d’une liberté d’expression et la détermination à être reconnues en tant qu’artiste au-delà d’une identité figée de femme-artiste.
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2col.jpgMardi 13 octobre 2009 – 18 h 30
LE CORPS EN QUESTION DANS LA CREATION AU FEMININ
 
Le corps féminin est trop souvent pris au piège de l’image, entre attributs du corps et beauté d’objet dans une confusion entre être et avoir. La mise en jeu et en scène dans l’acte artistique intervient en amont d’une représentation concrète du corps dans la figure ou la performance. Prendre le risque du corps, de la révélation du désir qui le traverse et de ses potentialités dès lors qu’il se libère des contraintes culturelles, constitue une étape obligée de la création artistique des femmes. Ainsi, il est possible de sortir d’une dualité aliénante entre beauté révélée d’une féminité sublimée et impure horreur de l’organe trivial. Des artistes ont osé faire oeuvre de ce corps et nous le faire accepter dans sa réalité, dans sa corporéité irréductible, dans son existence pulsatile, dans sa jouissance et parfois sa souffrance.
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3col.jpgMardi 1er décembre 2009 – 18 h 30
CONCEPT, ABSTRACTION ET FIGURES DE L’ART
 
Est-il judicieux d’entretenir une catégorisation qui oppose expression et concept, intuition et pensée, corps et langage, sensible et intellectuel, figuration et abstraction ?
La création artistique au féminin peut nous aider à sortir de ces différenciations sectaires artificiellement introduites qui découpent le mouvement prolifique de la création contemporaine. Un éclairage précieux est apporté par les parcours de créatrices ainsi que par la compréhension de leur processus de création et du motif de leur travail. Cela permet de mettre en relief certaines distinctions enrichissantes et de tendre des passerelles entre des approches artistiques que tout semble, a priori, opposer. Il n’est plus question de différence sélective purifiant un art élitiste mais de nuances et d’équivoques ouvrant à une hétérogénéité inédite. L’hétérogène distingue l’altérité au coeur du sujet singulier, entre les êtres et dans leur rapport au monde.
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4col.jpgMardi 19 janvier 2010 – 18 h 30
LES FEMMES ET L’ART BRUT
Du tricot à la broderie, de la cuisine à la décoration, un art conjugué au féminin depuis l’aube des temps et dans toutes les cultures, est contraint à rester défini comme mineur et même, le plus souvent, réduit à un artisanat répétitif, recréatif et non créatif.
Or, il s’y dévoile, pour qui sait le voir et l’entendre, un potentiel inouï derrière l’évidence du quotidien. Peut-on rapprocher ce vaste territoire d’expression créative des pratiques d’art brut ou d’art singulier ? Peut-on y voir le pivot d’une transmission culturelle essentielle en tant que facteur de pérennité et d’évolution de la culture qui préserve une précieuse dimension d’humanité dans un monde où humanité et transmission sont en crise et semblent en péril ?
Une mise en perspective de ces actes et productions séculaires des femmes avec ceux des grandes figures féminines de l’art brut (Aloïse, Magda Gil, Séraphine de Senlis…) permet de mieux situer ce lien entre pratiques quotidiennes, artistiques et culturelles dans le tissage d’une civilisation.
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Expo_Colette_Deble_018.jpgMardi 16 mars 2010 – 18 h 30
SUBVERSION ET AVANT-GARDE : L’IDENTITE A L’OEUVRE
 
La reconnaissance de valeurs dérangeantes, précaires et multiformes, introduites par la création au féminin, est desservie par l’extrême diversité des voies ainsi ouvertes dans un monde qui a besoin de classer, de catégoriser et de valider. Ce n’est donc pas d’une absence de valeur réelle dont souffre cette création, mais de ne pas se conformer à un système préétablies de valeurs esthétiques, culturelles et économiques, au risque de s’en trouver pénalisée dans sa visibilité auprès du public.
La plupart des créatrices travaillent, sous différentes modalités, l’aliénation symbolique qui traverse le corps, le langage, l’identité et les comportements. De ce fait, elles se cherchent, et se trouvent, au coeur de la révolution esthétique contemporaine. Elles prennent un risque réel dans leur acte et leur vie, sans hésiter à aller jusqu’à une subversion bouleversant le regard et l’entendement de celles et ceux qui tentent de saisir une oeuvre qui leur échappe dans la complexité de ses fragmentations et réagencements.
 
Thierry Delcourt, psychiâtre et psychanalyste à Reims,
auteur de Au risque de l’Art (éd. L’Âge d’Homme, 2007)
et Artiste Féminin Singulier chez le même éditeur, mai 2009