FRANCINE KEISER : « J’AI TOUJOURS ÉTÉ FASCINÉE PAR LES DÉFILÉS »
Ancienne avocate d’affaires, Francine Keiser a laissé ses dossiers pour lancer sa marque de mode, largement inspirée des années 60, Francini_K. Et puisqu’elle ne fait jamais les choses à moitié, moins de 12 mois après la sortie de sa première collection, la styliste a pris part à la Fashion Week de New York. Elle nous raconte cette folle aventure entre découverte de la couture et moments suspendus.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de lancer Francini_K ?
C’est une longue histoire… J’ai une longue carrière d’avocate derrière moi, j’ai exercé ce métier pendant plus de 30 ans. Ce travail ne vous permet pas de vous dégager beaucoup de temps pour vous. Pourtant, j’ai toujours eu énormément de centres d’intérêt : l’art, la mode, la cuisine, le sport, la philosophie… Il y avait tellement de domaines qui m’intéressaient et je mourrais d’envie d’y consacrer du temps. Alors, un jour, je me suis fait la promesse qu’à la moitié de ma vie, je me donnerais la possibilité d’entamer une deuxième vie. Lorsque j’ai sauté le pas, je dois avouer que ce ne fut pas un jeu d’enfants. Au début, mes associés au cabinet et mon entourage n’étaient pas très compréhensifs. Mais j’ai persisté et j’ai finalement réussi à changer de vie. Dans un premier temps, je ne me suis pas vraiment fixé d’objectifs. Je souhaitais garder une certaine liberté pour décider ce que je souhaitais faire. Et cela a commencé plutôt simplement.
Vous étiez pourtant loin du monde de la mode… Quel a été l’élément déclencheur ?
Je souhaitais faire de l’upcycling de mes vêtements. J’ai donc dû apprendre à coudre. Cela m’a énormément plu, je me suis très vite inscrite dans une école de mode à Paris. C’était au début du confinement, j’ai donc réalisé mon cursus à distance. Dans cet établissement, comme dans toutes les écoles de mode, les élèves ont l’opportunité de participer à un défilé de mode. Je me suis évidemment inscrite et j’ai été sélectionnée pour participer au concours. Et je l’ai gagné ! Je ne m’y attendais pas du tout, d’autant que j’étais en première année. Il y avait des concurrents avec beaucoup d’expérience. C’est là que tout a débuté. Avant ce concours, l’idée de créer ma propre marque de couture ne m’avait pas encore traversé l’esprit. Alors que j’avais réalisé quelques pièces pour le défilé, mes proches m’ont vivement encouragée à me lancer.
Au début, je n’étais pas vraiment pour. La mode reste un monde à part. Finalement, je me suis dit que c’était une opportunité en or. En 2021, j’ai trouvé une maison de production et tout allait très vite. J’ai sorti ma première collection en avril 2022, sur mon site internet (www.francinik.com). J’ai ensuite ouvert mon propre magasin, en septembre de la même année, à Luxembourg. J’ai trouvé ce local magnifique, niché dans une maison du XVIIIe siècle, un peu par hasard et je n’ai pas hésité une seule seconde à m’y installer. Ensuite, j’ai participé à la Fashion Week de Luxembourg. Je trouve que c’est très important de présenter ma collection localement.
Il s’est passé très peu de temps entre le lancement de votre première collection et l’ouverture de votre magasin à Luxembourg. Vous êtes de nature fonceuse, n’est-ce pas ?
J’estime qu’il est important de se remettre en question, mais il est aussi essentiel de prendre le train en marche. Parfois, il est bon de prendre des risques. J’ai une belle expérience professionnelle derrière moi ce qui permet de prendre des décisions rapidement et de les assumer. Il faut se donner les moyens d’atteindre les objectifs fixés.
Comment définiriez-vous le style Francini_K ?
Mes créations sont inspirées des années 60, et aussi du style de mon idole : André Courrèges. Il y a toutes ces robes trapèzes, colorées. Mes collections sont à la fois classiques et originales. Elles sont classiques, car les pièces sont épurées et simples à porter à tous les âges. Ce sont des pièces mi-saison, réalisées à partir de matières premières de qualité. Et même si je travaille des tissus magnifiques, j’apporte toujours une touche d’originalité. Je réalise des modèles relativement tendance, avec des empiècements miroités notamment. J’apprécie particulièrement combiner des matières techniques modernes avec des tissus plutôt classiques comme la soie ou la laine. Cela rend ma mode originale et atypique. Ces vêtements restent très confortables et peuvent être facilement portés toute la journée. C’est important pour que les femmes puissent être belles et rayonnantes à toute heure, avec des baskets ou des talons.
Une mode inspirée des années 60… Qu’est-ce qui vous plaît tant dans cette époque ?
C’est une très bonne question et je ne suis pas certaine de pouvoir y répondre. Je suis née dans les années 60 donc je n’ai pas vraiment vécu consciemment cette époque. Mais je me rappelle, lorsque j’étais jeune, nous avions toujours à la maison des magazines de mode. J’ai toujours été fascinée par les photos des défilés et des couturiers présentes dans ces revues. Je trouve aussi que c’était une époque mode très féminine. Il y a eu l’invention de la minijupe par André Courrèges. Il y avait énormément de couleurs. De nos jours, il y a de moins en moins d’élégance. J’aimerais redonner aux femmes l’envie de s’habiller avec classe.
Quel est votre processus créatif ? Comment une pièce prend-elle vie dans votre tête ?
Souvent, il m’arrive, dès mon réveil, de faire mes croquis, car j’ai énormément d’idées. J’ai comme des flashs de vêtements. Je les dessine et je les retravaille pour finaliser ma création. Je fais ensuite des prototypes avec les tissus que j’aime utiliser. J’en réalise plusieurs jusqu’au moment où je fixe mon idée. C’est un processus relativement long, je me laisse le temps de faire toute la partie création. Je travaille avec une société parisienne qui s’occupe de la digitalisation des patrons et des gradations. Nous faisons ensuite des essayages, et après des semaines, voire des mois, nous entamons la production.
Vous produisez l’ensemble de votre collection en Europe, en quoi est-ce important pour vous ?
D’un point de vue écologique et économique, il est important de garder une production européenne. L’autre raison c’est que le savoir-faire européen n’est plus à démontrer. Les tissus sont d’une grande qualité. Les créations Francini_K prennent vie en Roumanie, les ateliers de couture locaux ont une immense expertise. Je ne suis pas certaine de retrouver une même qualité ailleurs.
Moins de 12 mois avant le lancement de votre première collection, vous avez participé à la Fashion Week de New York. Quelles émotions vous ont traversée sur le podium ?
En février, j’ai pris part à la Fashion Week de New York. C’était époustouflant, au-delà de mes espérances. En réalité, participer à cet événement était mon accomplissement ultime. C’était presque irréel. Je ne m’imaginais pas que cette semaine mode générait autant de festivités. Dans la ville, il y a plus d’une centaine de défilés. Les mannequins font des shootings dans les rues. Toute la ville est sous le sigle de la Fashion Week. J’étais déjà extrêmement contente d’en faire partie. En ce qui concerne le défilé en lui-même, nous étions hyper excités. J’ai participé à un défilé nommé « The Ones to Watch », destiné aux jeunes créateurs. Malgré une montée de stress avant le top départ, tout s’est bien passé. Et finalement, après le passage de mannequins, je suis montée sur scène pour saluer le public. C’était un moment hors du temps, tout à fait exceptionnel.
Justement, si on remonte en 2021, est-ce que vous vous attendiez à un tel succès ?
On ne peut jamais savoir comment cela va évoluer. Au départ, il faut bien avoir à l’idée que je ne savais pas vraiment ce que je souhaitais faire de ma deuxième vie. J’adore rêver, j’imagine toujours les meilleurs scénarios. Lorsque je regarde en arrière, je me rends compte de toutes les étapes franchies.
Quels sont les projets de la marque ?
La barre est très haute ! J’ai envie de faire d’autres Fashion Week, j’ai confirmé ma présence à celle qui se déroulera au Luxembourg. Je suis donc en train de travailler sur mes futures collections. J’aimerais beaucoup participer à la Fashion Week de Paris. Grâce à ma participation à celle de New York, j’ai un point de vente dans la ville. Je vais également ouvrir une boutique à Paris et un autre magasin éphémère à Sorrento, en Italie, pour quatre mois.
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