Choisis ses spécialités avec Caroll Le Fur (interview dans Le Parisien)

Réforme du lycée : choisir ses spécialités, un vrai casse-tête pour les lycéens

Maths, anglais, philo… les élèves de 1ère doivent décider quelles spécialités ils garderont en terminale. Un choix qu’ils craignent lourd de conséquences pour leur orientation post-bac.

Le 12 février 2020 à 07h28

Anglais ou philo ? Entre les deux matières, le cœur de Lou balance, et sa raison n’est guère plus éclairée. Laquelle de ces deux disciplines la préparera le mieux à Sciences-po ? Dans son lycée de Moulins (Allier), la jeune fille a entendu des avis contradictoires, chacun de ses profs prêchant naturellement pour sa matière. Au forum de l’orientation où elle s’est rendue récemment, elle est restée le bec dans l’eau.

Et pour cause : en rebattant largement les cartes du système scolaire, la réforme du lycée déstabilise les établissements du supérieur, et laisse des milliers d’élèves passablement perdus devant leurs « fiches avenir ». Quelle orientation, quand la boussole n’indique plus de Nord?

Garder un maximum de portes ouvertes

Jusqu’ici, les lycéens entraient après la seconde dans des filières, S, ES ou L, selon une hiérarchie dictée bien davantage par leur niveau scolaire que par leurs goûts – les meilleurs se précipitant vers la « voie royale » scientifique. La réforme a substitué à cette scolarité en couloirs un lycée « à la carte », dans lequel l’appétence des jeunes est remise au centre : chacun choisit en Première trois enseignements de spécialité, puis en conserve deux en Terminale.

Maths, anglais, histoire, philo… Tout est possible. Mais ensuite vient l’orientation post-bac, où tombe, dans de nombreux cursus, le couperet d’une sélection drastique. Quelles matières cocher pour se garantir un maximum de portes ouvertes ? « Il ne faut pas parler de ça, ça va rajouter de l’angoisse ! » s’inquiète spontanément un conseiller d’orientation.

« Le problème, c’est cette tendance à vouloir toujours des garanties sur tout… Les parents voudraient qu’on leur donne un tableau avec pour les spécialités à suivre pour chaque école, mais ça n’existe pas ! soupire Michel Roger Gilmert, directeur du centre d’information et d’orientation CIO Mediacom, à Paris. Si on faisait cela, on recréerait de fait des filières et c’est toute la réforme qui tomberait à l’eau. »

Les instructions officielles consistent donc à renvoyer les jeunes à des arguments de bon sens. « Ce sont surtout les résultats globaux des élèves qui seront regardés : ce qui nous intéresse, c’est de recruter des jeunes qui savent apprendre », rassure Christine Gangloff, vice-présidente de la conférence des présidents d’université.

Une hiérarchie entre les matières ?

Le site horizons 21, créé par l’organisme d’information sur l’orientation Onisep, permet aux élèves de tester, dans les grandes lignes, l’adéquation entre leurs choix de spécialité et les cursus du supérieur. On y apprend par exemple que la combinaison « physique SVT » colle mieux au programme de médecine que « maths physiques ». Pourtant, Téo, en 1e à L’Isle-Adam (Val-d’Oise), doute encore. « J’ai un prof qui m’a dit d’abandonner la matière que j’aurais le moins de mal à rattraper tout seul, et c’est plutôt la SVT », soupèse le jeune homme, qui aimerait revêtir la blouse blanche.

« Beaucoup d’élèves hésitent entre des cursus totalement différents et pour eux le choix est encore plus difficile », note Caroll Le Fur, coach privée à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine). Officiellement, aucune formation « ne peut exiger une combinaison de spécialité en particulier », annonce l’Education nationale sur son site. Les établissements du supérieur ont même signé une charte, en janvier 2019, dans laquelle ils s’engagent solennellement à ne pas instaurer de hiérarchie entre les matières.

Pourtant, « on voit des écoles post-bac qui commencent à passer le message qu’elles ne recrutent que des élèves qui ont choisi maths physiques », confie le patron des Arts et métiers, Laurent Champaney, qui préside la commission orientation de la conférence des grandes écoles. « Il est clair que dans l’incertitude, les formations ont tendance à rester sur ce qu’elles connaissent… » En clair, sans maths, toujours point de salut ? « Oui », admet-il.

Pour la Métropole, Youri Fedotoff a donné une histoire à l’Histoire

Le testament du Tsar de Youri FEDOTOFF par Marie Desjardins

Plus de cent ans sont passés depuis l’assassinat du tsar Nicolas II et de sa famille.

Ici et là dans le monde, des passionnés du destin tragique des Romanov continuent d’étudier, de chercher. Y aurait-il eu des survivants ? La question a été examinée sous tous ses angles. Mais encore… Parmi de très nombreuses rumeurs et suppositions, l’une d’elles voudrait que, du trésor impérial — notamment celui des bijoux — un inestimable trésor, de nombreuses pièces auraient disparu. En novembre 2018, StelleneVollandes, journaliste de Town and Country, rappelle ce dossier des joyaux, mentionnant divers catalogues existants, et qu’elle a consultés. Oui, il y a des pièces manquantes. Vols ? Héritages secrets ? Saccages ? Les enquêtes suivent leur cours… depuis un siècle

En France, un auteur du nom de Youri Fedotoff publie, en 2019, un bien étrange roman tenant de l’épopée, etqui pourrait en partie expliquer ce qu’il est advenu de certains de ces bijoux — et plus particulièrement desdiamants. Fedotoff, lui-même descendant d’un Russe blanc et d’une comtesse hongroise, est, par le cœur et l’âme, appelé par le parcours de ces monarques disparus. Comme de nombreux compatriotes, descendants d’émigrés de la révolution russe, il n’a pas oublié. Ceux qui aiment le tsar sans même l’avoir connu ; ceux qui vouent un culte à l’ancienne sainte Russie sont comme cet écrivain : en dépit du passage de décades, maintenant, l’allégeance est la même — on vénère, même en secret, cette famille dont la fin a frappé les imaginations.

Cependant, Fedotoff a quelque chose, disons de plus, qui l’autorise à s’éprendre de cette grande page humaine : son propre père, à la veille de sa mort, lui a livré un secret. Fedotoff en fait le sujet même du roman conséquemment intitulé Le testament du Tsar : au moment de son abdication, Nicolas II confie à son filleul, Michel Trepchine, une fortune en diamants, mais également le rôle de régent de toutes les Russies. Tout un programme, alors que les bolchéviques ont envahi le pays, massacrant les blancs afin d’ériger un système libéré des entraves — supposément — du régime implacable qui a régné pendant des siècles dans ce coin du monde.

Fedotoff a l’imagination féconde, mais également des connaissances extrêmement précises sur l’époque qu’il nomme le chaos 1917-1945. Au fil des chapitres transportant le lecteur en Russie, en France, en Allemagne, aux États-Unis, en Hongrie, etc., Trepchine, un héros, s’il en est, met tout en œuvre pour reconquérir la Russie, qu’en cas de réussite, il régirait. Bien sûr, on connaît le fin mot de l’histoire. Pas un Romanov, frère, neveu, oncle ou filleul n’a retrouvé ce pays comme autrefois. La révolution a été accomplie dans tous les sens du terme. Pourtant, la diaspora existe, comme le bien filtre le mal, et, dans le secret des êtres, le tsarisme n’est pas mort, Nicolas n’est pas mort — avec sa famille, de l’au-delà, il veille sur ses fidèles qui, eux, veillent sur les legs de cette dynastie.

Et si cette histoire était vraie ? Le roman, une sorte de plongée dans ce passé chaotique revisité par Fedotoffpropose des éclairages aussi généraux que particuliers sur une kyrielle de thèmes — guerre, conflits, amour, fuites, intrigues de tout acabit. Par exemple, l’auteur reproduit des conversations intimes qui auraient décidé du cours des choses, et décrit avec brio les interventions de familles influentes se retrouvant dans des palaces européens ou des manoirs à l’île des Monts Deserts — plus jamais on ne parcourra le Maine avec les mêmes yeux. Le lecteur a l’impression que l’auteur les a connus intimement, qu’il était là par un étrange voyage de l’esprit vers ce qui n’existe plus. Dès le début, on assiste à l’enfouissement des diamants dans un endroit du monde des plus improbables, et donc possible. On fait partie du secret.

Le roman, contrairement à la biographie, donne toutes les libertés. Ce laissez-passer permet des révélations ;même si relevant de l’interprétation, celle-ci sont un chemin vers la vérité. Tout au long de ces pages saluées par Patrick Poivre d’Arvor, l’auteur fait revivre les deux guerres de divers points de vue. Le lecteur amateur de curiosités historiques se trouvera dans ce tourbillon comme dans un musée sans gardien ; il peut toucher à tout, tout écouter, tout voir — c’est un exercice fascinant.

Le Testament du Tsar, ce travail colossal montrant clairement l’érudition et la passion de son auteur, aurait toutefois mérité une édition plus attentive. C’est souvent le lot des romans d’envergure, complexes, tissés, riches, denses ; ils ne trouvent pas preneurs dans les maisons qui mènent le bal des publications. Cela est à déplorer. Car l’auteur qui en vaut la peine est souvent celui qui n’est pas soutenu. Cependant, comme il a le feu sacré (ce lieu commun qui dit bien les choses), il s’arrange lui-même pour que son cri silencieux soit entendu, même dans la steppe balayée par le blizzard. Il faut féliciter Youri Fedotoff d’avoir donné une histoire à l’Histoire. La sienne est à lire pour qui vibre à l’évocation d’un passé toujours vivant pour ceux qui voient autrement.

Youri Fedotoff, Le testament du Tsar, Chaos 1917-1945, Y & O éditions, 2019, 420 pages

 

Noémie Marijon consacre une émission de RCF à « Mondial Stéréo »

Un conte sur l’exil à écouter ici :

https://rcf.fr/la-matinale/un-conte-sur-l-exil

Présentée par Noémie Marijon

LA CHRONIQUE JEUNESSE LUNDI 10 FÉVRIER À 8H52

DURÉE ÉMISSION : 3 MIN

Un conte sur l’exil

© Les Hurlements d’Léo

On aborde un sujet d’actualité : « Un conte sur l’exil : Mondial stéréo » aux éditions Baco, par Laurent Kebous, Tomas Jimenez

J’ai trouvé un album et un cd qui permettent d’aborder le sujet de façon réaliste et émouvante avec des enfants d’âge primaire? ça s’appelle Mondial Stéréo, les auteurs sont Tomas Jimenez et Laurent Kebous du groupe de musique Les Hurlements d’Léo. 

L’album d’une trentaine de pages est issu d’ateliers d’écriture et de temps d’échanges entre les auteurs et des classes d’enfants des Landes et de la Gironde. Cela rend le conte particulièrement adapté aux enfants. 

Mondial Stéréo cherche à alerter les lecteurs sur la situation alarmante des migrants et des réfugiés dans le monde. 

QU’EST-CE QU’ON RETROUVE DANS CET ALBUM ?

Tout d’abord Mondial Stéréo c’est un projet qui utilise plusieurs supports. Il y a le conte, mais aussi un site internet mondialstereo.com sur lequel il y a une version audio du conte raconté par Néry Catineau. Vous pourrez retrouver l’adresse sur le site de RCF. Et enfin il y a aussi un CD de 13 titres qui va sortir le 21 février et qui regroupe des jolis noms de la chanson française contemporaine notamment la rue Kétanou, Aldebert et les Ogres de Barback.

Ce disque regroupe des chansons aux accents reggae, tzigane, flamenco ou soul. 

Mais revenons au livre, on découvre l’histoire de Léo, un lionceau (qui représente un jeune syrien). Il vit avec son père et sa mère et déjà tout petit sa vie est marquée par la musique. Léo apprend à chanter avant de parler et jouer de la guitare avant de marcher. Mais rapidement sa vie et celle de son pays est bouleversé par la guerre, son père est contraint à se battre et il meurt lors du conflit. Alors Léo et sa maman fuient, ils prennent un bateau bringuebalant. Sur le bateau Léo va rencontrer des amis mais aussi l’amour avec Calypso. Après une traversée mouvementée, les épreuves ne sont pas finies pour Léo et ses amis, en effet ils sont envoyés dans un camp de réfugiés. Je vous laisse découvrir la fin de l’histoire qui est positive et pleine d’espoir. 

EN DÉFINITIVE QUEL EST VOTRE AVIS SUR CE PROJET MONDIAL STÉRÉO ?

Je trouve l’initiative formidable, le conte est très touchant et le projet musical superbe, j’ai un peu plus de réserve sur les illustrations de l’album, mais elles sont modernes et colorées et devraient plaire à la plupart des enfants. En plus pour chaque livre vendu, un euro sera reversé à l’association SOS Méditerranée qui cherche à sauver les personnes en difficulté aux portes de l’Europe. Ce livre et le CD qui l’accompagne sont donc un bon moyen de sensibiliser les enfants à la question de l’exil et d’aider concrètem

Breizh info décortique l’essai de Marc Lumbroso, le juif Français ordinaire – Merci à Christian de Moliner

 

Chronique littéraire. Itinéraire d’un juif français ordinaire, un livre de Marc Lumbroso, critiqué par Christian de Moliner

 

L’identité française est au cœur des problèmes de notre pays. Que signifie être Français ? Quel devoir implique cette nationalité ? La question se pose surtout pour ceux qui sont nés hors de France ou dont les parents sont venus d’un autre pays. Il existe beaucoup de Français de papier, qui vivent sur notre sol, ont la carte d’identité, peuvent voter, mais préfèrent et de loin leur seconde nationalité, celle de leurs parents ; ils sont en sécession, selon les propres mots du Président Macron. Or leur poids est de plus en plus important dans notre société et ce problème grandissant sera difficile à résoudre. Peut-être même est-il insoluble.

Les Juifs pourraient faire partie de ce problème : ils ont une religion et des coutumes particulières et surtout possèdent un pays de substitution : Israël. Mais même s’ils sont nés pour une partie d’entre eux en Afrique du Nord, ils ont pour la plupart opté pour la France et se sentent pleinement citoyens de notre pays, même s’ils soutiennent pour la plupart Israël. Nous avons le cas d’Éric Zemmour qui au fil de ses livres qui sont autant de succès, célèbre notre pays et insiste sur le choix qu’il a fait, lui le juif berbère de choisir de s’intégrer dans notre peuple. Les deux allégeances ne sont pas incompatibles loin de là.

Marc Lumbroso vient de sortir un livre décrivant son itinéraire dans un livre paru aux éditions l’Harmattan. Ses ancêtres étaient originaires de Livourne (en Italie), ils avaient émigré à Tunis au dix-neuvième siècle bien avant le protectorat français. Mais la mémoire collective de cette famille garde le souvenir d’une origine encore plus lointaine : les Juifs Livournais descendaient en effet d’israélites chassés du Portugal et d’Espagne vers 1492. M. Lumbroso, né en 1943 à Tunis, est le dernier d’une famille de 3 enfants ; il est né deux ans après la mort à la naissance de son frère et a souffert d’être un enfant de substitution. À peine sorti de l’enfance, Il a perdu sa mère emportée par un cancer à 48 ans. Il a suivi sa scolarité d’abord dans une école de l’alliance israélite puis au lycée Carnot de Tunis et enfin dans un établissement secondaire tenu par les jésuites dont 40% des élèves étaient chrétiens, 30% musulmans et 30% juifs, symbole d’une société tunisienne harmonieuse, malgré l’existence de trois communautés religieuses différentes. De son enfance et de son adolescence, il a gardé un attachement à Israël après une année chez les scouts israélites, une connaissance de l’Hébreu et de sa religion, mais s’il se sent de culture juive, il est plutôt agnostique, laïque et avant tout français. Après le bac obtenu en Tunisie, M. Lumbroso est parti pour Paris effectuer des études à l’institut dentaire où il a rencontré sa femme. Il a fait son service militaire en 1968 avant de retourner terminer sa formation. Il a commencé par la suite une vie professionnelle bien remplie. Il est devenu également adjoint au maire du 16ième arrondissement, il est entré au grand Orient de France et au B’nai B’rith une association laïque juive.

Le livre de M. Lumbroso est touffu et nullement linéaire, il aborde plusieurs sujets qui finalement convergent pour brosser un portrait de notre pays. À travers les multiples détours et digressions, l’auteur précise son attachement à Israël, même s’il rappelle qu’il ne peut être tenu responsable des décisions, parfois contestables, du gouvernement de ce pays. Il avance néanmoins que l’indignation sur les événements de Cisjordanie et de Gaza est sélective, puisque des massacres bien plus graves perpétrés au Yémen, en Syrie en Iran ou en Irak n’ont aucun écho en France. J’ajouterai à cette liste le massacre ignoble de chrétiens en Afrique. Autre thème largement abordé par M. Lumbroso le problème du multi-communautarisme et de la sécession des musulmans. Il rapporte une anecdote qui lui semble caractéristique de notre époque : une jeune femme lui a demandé de pouvoir se marier voilée, ce qu’il a refusé. Elle a obtenu gain de cause dans une autre mairie de quartier, la loi étant floue sur ce sujet.

En conclusion, l’essai de M. Lumbroso est intéressant, car il relativise le choix d’une partie des intellectuels musulmans de dénigrer et de critiquer leur propre pays. Une autre voie est possible

Christian de Moliner

Crédit photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2020, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

un roman très original recommandé par Lolo le blog

« EMMANUEL, BRIGITTE ET MOI »

« Emmanuel, Brigitte et moi » Un roman d’Alain Llense

(finaliste au Prix des étoiles) Librinova parution le 14/10/2019 – Prix : 14€90

Roman métaphore, « Emmanuel, Brigitte et moi » aborde les thèmes de l’amour, du pouvoir et de la chute et s’autorise quelques détours par la politique fiction car, bien entendu, cet Emmanuel et cette Brigitte là en rappellent d’autres…

Alain Llense

Alain Llense

Alain Llense est fonctionnaire de l’Education nationale.

En 2011, il publie Elle fut longue la route qui remporte le Prix Folire et le Prix du 1er roman de Draveil. Vient ensuite le tour de Frère en 2013 qui fait partie de la sélection du Prix Méditerranée des Lycéens.

En 2016, suite à sa victoire dans un concours de nouvelles, il publie Nos enfants ne sauront jamais les enfants que nous sommes avec la bannière « L’auteur découvert par Philippe Delerm ». Emmanuel, Brigitte et moi est son 4ème roman.

Toute ressemblance avec des personnages existant ou ayant existé n’est absolument pas le fruit du hasard…

Lorsqu’ils se rencontrent et tombent éperdument amoureux l’un de l’autre, Emmanuel a 15 ans et Brigitte 40. Lui est un prodige en devenir de la gastronomie française, elle est une bourgeoise, mère de famille épanouie de trois enfants dont la plus jeune a l’âge d’Emmanuel. Ensemble, ils vont affronter le scandale, courir après la gloire matérialisée par un restaurant prestigieux de la Côte d’Azur surnommé « Le Château » et connaître toutes les vicissitudes liées au succès.

Le narrateur, le « moi » du titre est, pour sa part, un journaliste qui les retrouve par hasard, quinze ans après qu’ils aient tout perdu et chuté de leur Olympe.

C’est un roman très original que je vous recommande.

Emmanuel et Brigitte élevés au rang d’un mythe, par Alain Llense

https://argoul.com/2020/02/06/alain-llense-emmanuel-brigitte-et-moi/

J’ai pris beaucoup de plaisir à lire ce roman écrit avec charme. Emmanuel et Brigitte, les personnages sont connus de tous les Français mais l’auteur les élève au rang d’un mythe. Mythe amoureux, puisque la différence d’âge et la précocité du premier les rendent différents et exemplaires ; mythe politique puisque la façon de gouverner est ici posée en modèle de ce qu’il ne faut pas faire.

Le couple est saisi en 2032, dans une grande ville improbable de France où ils tiennent un vulgaire snack d’ouvriers. Lui a 55 ans et bedonne un peu, le cheveu rare ; elle en a 79 et accuse son âge. Un journaliste décati du même âge qu’Emmanuel entre par hasard un jour de pluie et reconnait les anciennes célébrités. Il les convainc de faire un livre avec lui en intervieweur et eux en grands maîtres des propos tenus. Ils acceptent, nostalgiques des années écoulées mais peut-être pour expliquer et convaincre qu’ils avaient raison.

Les chapitres alternent donc entre le récit du journaliste, qui ne manque pas de se glisser dans l’histoire pour raconter sa vie, les propos d’Emmanuel, ceux de Brigitte. La première moitié du roman est ainsi composée de cette passion universelle qui saisit les humains après la puberté et traverse les siècles et les milieux. Lui est adolescent serveur dans un grand restaurant pour l’été ; elle mûre et directrice-adjointe de l’office de tourisme du coin. Ils se rencontrent lors d’un cocktail et c’est le flash : ils se reconnaissent, ils sont amoureux, ils le resteront toute leur vie. La question de « la première fois » taraude journaliste et lecteurs, et le duo la joue sans rien révéler car cela appartient au domaine de l’intime : c’était un jour d’automne, il pleuvait, ou peut-être au printemps, l’air était léger, ou bien… Malgré la réprobation familiale et sociale, on ne peut plus mourir d’aimer au début des années 1990, les mœurs ont changé. Peu à peu, le couple se fait reconnaître, surtout après la majorité du garçon ; la différence d’âge se remarque moins. Mais l’écart à la norme et les langues de vipère confortent Emmanuel et Brigitte dans la discrétion, la garde rapprochée et un splendide isolement.

Pour lui, il s’agit de réussir, d’être meilleur que tout le monde pour imposer son couple, sa façon de vivre. « J’étais un différent, un supérieur qui s’interdisait de regarder ses semblables de haut mais qui, pourtant, était vécu par la masse comme un surplombant, un qui évolue dans des sphères que les autres ne font qu’apercevoir » p.47 Pour elle, il s’agit de le guider, de lui éviter les phrases trop ironiques qui le desservent, de mettre de l’huile dans les rouages sociaux par sa plus longue expérience des bourgeois hypocrites (c’est un pléonasme), les plus récents étant « nos barbus et nos meufs quinoa » p.117. « Ils déguisaient leur distraction gourmande sous les atours d’une pseudo-morale dont ils auraient été les gardiens zélés et vigilants » p.55.

Cela ne se résout pas en politique comme dans la vraie vie, mais dans la restauration. Cette seconde partie m’a moins convaincu, même si le lecteur y prend plaisir comme un possible qui ne s’est pas réalisé. « On jouerait à… » Mais je respecte trop la politique, sa grandeur et ses dangers, sa nécessité et ses embûches, pour ne pas être marri de la voir réduite au badinage. Traduire la façon de gouverner un pays par la petite chefferie d’une cuisine, c’est mettre la politique à portée des caniches. Donc la rabaisser au niveau de la médiocrité de masse où tout le monde pourrait s’improviser politicien. Tant pis pour les revendications en gilet jaune, la politique est une fonction et désormais un métier : on le constate aisément chez les « nouveaux » qui passent par une période de flottement et de gaffes avant de se patiner. L’égalité n’est jamais que théorique et tout citoyen ne ferait pas un président comme certains feignent de le croire.

Emmanuel, aidé de Brigitte, exige dans son restaurant, sur son exemple, l’excellence : de la cuisine, du service, du décor. Il a été « élu » au « Château » dans sa petite ville du sud de la France au nom inventé, par un maire et une sous-préfète. Vous parlez d’une « élection » ! d’autant que l’un couche avec l’autre. Emmanuel succède à François, trop mou, qui lui-même a remplacé Nicolas, trop agité, successeur de Jacques qui a pris le flambeau à un François précédent après Valéry… l’auteur arrête son énumération-miroir de la Ve République à 1974. Est-ce la crainte de Charles ? la méconnaissance de Georges ? L’absence de profondeur historique ? La croyance (fort répandue chez les intellos) que l’histoire commence après mai 68 ? Parce qu’il n’était pas né avant ? – ce qui revient au même.

Toujours est-il qu’Emmanuel réussit, une fois de plus, après avoir été major de son école de cuisine prestigieuse. Le monde entier se presse à sa table, les bourgeois français en premier, le guide Michelin lui accordant une deuxième étoile. Il faut toujours être vu là où ça se passe. Le populaire se sent de trop par ses manières empruntées et par le prix du menu. Monte alors le ressentiment bien connu de l’envie : dénigrer ce à quoi on ne peut accéder, détruire ce qu’on ne peut occuper. La suite est tristement banale en France, pays d’égalitarisme jaloux : revendications, grèves, banderoles, accusations d’inhumanité envers les ouvriers et – pire – les migrants venus on ne sait comment sur la plage. « L’élection » suivante balaye Emmanuel pour Marion : et c’est la catastrophe annoncée, le licenciement des non-locaux, l’embauche avec de meilleurs salaires d’incompétents notoires nés sur le terroir, la chute de qualité, de l’image de marque, la gestion inepte, la rage du populaire pour promesses non tenues et la destruction du Château dans une quasi guerre civile.

Donc Emmanuel n’était pas si mal. Est-ce la leçon de « politique » de ce roman qui n’ose aller jusqu’au bout ? Est-ce la dérision de la cinquantaine, si bien décrite par le journaliste dont la vie n’est qu’une usure jusqu’à toucher la corde ? Sans peur et sans reproche en sa jeunesse, arpentant le monde en guerre pour dénoncer la violence et la misère, reconverti en chroniqueur people des sauteries mondaines des starlettes et des minets de télé, progressivement acheté et truqueur en son âge mûr, jusqu’à être désabusé et viré sur la fin. Triste humanité qui rappelle celle des profs, laminés par le système et leur public.

Le thème de l’amour maudit qui surmonte les obstacles d’un adolescent et d’une mère de famille de 23 ans plus âgée est un thème magnifique qui aurait mérité d’être l’unique sujet de ce roman, disséqué en l’âge mûr. Avec des remarques fort justes sur la famille pour un adolescent qui est plus que les parents mais aussi la maison, la télé, la bagnole, les vacances, tout le milieu où ils baignent. Ou sur « la capitale au soleil avare où le bonheur n’est possible qu’en fabriquant soi-même et à grand prix son propre soleil, où, une fois introduit dans les castes qui dirigent et décident, il est de bon ton de cultiver une originalité distinctive pour n’être confondu avec personne » p.89. Au lieu de cela, la réduction politicienne aux recettes de cuisine affaiblit le livre.

Le lectorat visé semble être celui des lycéens, ignorants en politique, mal informés par les réseaux (et par leurs enfeignants), adeptes selon les films et les séries du mystère des gnomes qui manipulent et complotent pour « gouverner le monde ». Les ados préfèrent ressembler à leur horde que distinguer leur talent, ce pourquoi ils haïront Emmanuel, l’élitiste qui leur montre pourtant la voie de la surhumanité méritocratique en démocratie niveleuse. (…)

Le style est fluide et gouleyant. Ne boudez pas votre plaisir de lecture, ce petit roman sans prétention le mérite. La façon de parler de l’amour m’a conquis.

Alain Llense, Emmanuel, Brigitte et moi, 2019 autoédition Librinova, 197 pages, €14.90 

Attachée de presse BALUSTRADE : Guilaine Depis, 06 84 36 31 85 guilaine_depis@yahoo.com

Marie-Ange de Montesquieu consacre une émission à Kathya de Brinon sur Radio Notre Dame

Réécoutez le podcast ici https://radionotredame.net/emissions/rencontre/05-02-2020/

Kathya de Brinon, écrivain, qui publie « Des larmes dans les yeux et un monstre par la main. » (Ed. Maïa). Violentée jeune dans sa famille, Kathya de Brinon s’engage aujourd’hui auprès des enfants violentés. À ce titre, elle a créé l’association SOS Violenfance, qui se concentre sur la prévention de l’inceste et de la pédo-criminalité.

Le Journal du Dimanche annonce le lancement de S.O.S. VIOLENFANCE

Pierre Bafoil qui a interviewé pendant deux heures Kahya de Brinon annonce dans le Journal du Dimanche le lancement de S.O.S. VIOLENFANCE

Briser le tabou de l’inceste dans les familles aisées. Voilà l’objectif que s’est fixé Kathya de Brinon en fondant SOS Violenfance, association de prévention et de lutte contre la pédocriminalité qu’elle lance ce jeudi soir à Paris, au café François Coppée (6e arrondissement), en présence du psychiatre spécialiste de ces questions, Gérard Lopez. Cette ancienne journaliste de 71 ans entend faire de la prévention en intervenant dans les écoles, lycées ou les universités. « Attention, ce n’est pas une énième association de lutte contre la pédophilie, se défend-elle d’emblée. Je veux me concentrer sur l’inceste dans les classes supérieures où la parole est parfois plus compliquée à libérer du fait de la pression sociale. Je veux prévenir plutôt que de guérir. Car on ne guérit jamais. »


D’après une étude de 2017 sur « les violences sexuelles à caractère incestueux sur mineur(e)s » réalisée dans le cadre de la mission « Sciences et société » mené par le CNRS, l’inceste est présent dans tous les milieux sociaux.

Culture du silence

 

La coordinatrice de l’étude, Sylvie Cromer, battait en brèche l’idée reçue selon laquelle les milieux paupérisés étaient plus touchés par le phénomène. Selon cette maîtresse de conférences en sociologie à l’université Lille 2 et directrice de l’Institut du genre, ces dernières semblent plus sujettes à ces violences car elles sont plus étroitement surveillées par les travailleurs sociaux. Autre raison, rapportait alors dans le journal du CNRS, « les familles à fort capital économique et culturel disposent de stratégies fortes de déni et de maintien d’une culture du silence ».

Ça va, ça n’a duré que quelques jours

Kathya de Brinon en sait quelque chose. De ses 9 à 12 ans, cette « survivante », comme elle se décrit, a été violée et prostituée par son grand-père paternel à des notables de sa ville d’enfance. Dans le silence assourdissant de sa famille. Lorsqu’elle s’en ouvre à ses parents, si son père tente de la soutenir, sa mère prend le dessus et impose une omerta familiale. Cette dernière évacuera l’affaire de ces mots glaçants : « Ça va, ça n’a duré que quelques jours. »

Double peine

Car l’histoire de Kathya de Brinon, c’est aussi celle d’une double peine : les sévices intrafamiliaux d’abord, le tabou ensuite. Et le second survit même si les premiers cessent. Après le déni de sa mère, Kathya de Brinon s’est confronté à celui de sa propre fille qui l’a à son tour accusée de détruire la famille lorsqu’elle a souhaité en parler. Qu’importe, la sexagénaire a coupé les ponts et publié coup sur coup deux livres témoignages, où elle raconte les viols endurés pendant l’enfance et la complicité passive de son entourage.

L’argent couvre tout. Rien n’est plus facile que de menacer ou acheter un enfant

« L’inceste est présent dans toutes les familles, mais dans les classes supérieures peut-être plus qu’ailleurs. Car l’argent couvre tout, décrit-elle. Rien n’est plus facile que de menacer ou acheter un enfant. Et ça continue à l’âge adulte, on entre alors dans une espèce de logique de prostitution : argent contre silence. 

Pour l’instant, SOS Violenfance n’a pas encore de financements pérennes, mais engrange le soutien de municipalités huppés comme celles de Puteaux ou Reuil-Malmaison. Kathya de Brinon compte également sur ses contacts dans les Rotary Club, haut-lieu de l’entre-soi élitistes, où son combat a fort bien été reçu, assure-t-elle.