Il n’en fait d’ailleurs pas mystère dans le prélude à ce troisième tome, rassemblant des textes allant de 2013 à 2021 : « L’ère de Gutenberg agonise. Par goût des bouleversements je me suis renversé, à mon âge, eh oui ! vers cette manière moderne de communiquer. » François Coupry n’hésite pas à s’auto-flageller. Il a lui-même cédé à la machine, aux nouvelles technologies, et à la rapidité des blogs et des réseaux sociaux. Il est vrai, qu’au début du siècle, avec l’arrivée de toutes ces plateformes de partage, on avait cru que la liberté était libérée, et que nous avions franchi un pas de plus dans l’émancipation des masses. Que nenni !
« Le passage de la rapidité numérique à la belle pesanteur du papier, son volume, son odeur, sa tenue en main, marque son évolution dans sa violence : d’un côté un échange immédiat, consommé et aussitôt consumé, oublié, de l’autre un échange plus médiatisé, décalé, réfléchi, qui peut se garder, s’archiver, se humer, se consommer, se boire et se manger avec lenteur. »
Ce livre nous dit ce que l’on n’ose à peine penser tout bas : qu’il y eut durant le terrible 11 septembre 2001 une forme de fascination morbide pour ces tours qui s’écrasaient en chacun de nous. Il raconte les histoires de Monsieur Piano, qui écrivant un livre dont personne ne voulait, finit par acheter une maison d’édition, des librairies, des journaux pour qu’il voie le jour et qu’il soit acheté par des lecteurs. N’ayant aucun succès, c’est Monsieur Piano lui-même qui se mit à s’acheter ses propres livres.
François Coupry revisite la condition humaine et regarde le monde en face, ce monde en décomposition permanente, loin des éléments de langage et des conventions conformistes qui prétendent éloigner de nous le tragique de notre existence, la folie de nos sociétés modernes, l’épreuve de vivre dans une vie où, comme le disait Érasme, « il faut être bien fou pour se croire sage dans un monde de fou. »
À lire sans modération.
François Coupry, L’agonie de Gutenberg. Vilaines pensées 2013-2021, FCD-Livres.