Pandemic 3 « Pour un tribunal futur » par Frederika Abbate

PANDEMIC 3
Pour un tribunal futur

Actuellement est en train de se faire la collecte des témoignages des malades guéris, des thérapeutes, de tout le personnel soignant pour laisser une trace de ce qui se passe dans les hôpitaux de France face au virus. Cela servira à plusieurs choses. L’une d’elles, et non des moindres, sera de fournir les témoignages devant le tribunal. Car les responsables seront jugés, n’est-ce pas  ? Ne m’enlevez pas cette idée de la tête s’il vous plaît. La rage m’aide à me prémunir et renforce certainement mes défenses immunitaires, du moins je veux bien le croire et c’est déjà suffisant. Cela servira aussi de matériel à ceux qui, d’une manière ou d’une autre, en feront la chronique de diverses façons, par l’histoire, la sociologie, la philosophie, les récits oraux faits de personne à personne, l’art, le poème, le roman…

Ainsi, j’ai pris dernièrement connaissance du témoignage d’une infirmière. Une chose qu’elle dit est particulièrement frappante. Une chose terrible, dans tout cet amoncellement d’horreurs, à laquelle j’avais déjà pensée et que j’avais vite écartée de mon esprit tant cela me faisait horreur. L’infirmière est en première ligne face à la mort, dit-elle, c’est son métier mais là elle témoigne de l’inédit si douloureux de cette situation. Mourir du virus n’est pas mourir de n’importe quelle autre manière. Bien sûr, chaque manière est singulière, et c’est très important. Mais là, s’y ajoute une dureté toute spéciale, la personne meurt seule. Dans la solitude extrême qui est en train de l’absorber dans le trou du néant où personne d’aimé ne pourra venir avec elle, s’ajoute l’impossibilité de l’adieu, l’impossibilité de dire la dernière parole d’amour et d’accompagnement. Du fait de la contagion. Rejetée de la société, mise au ban et d’ailleurs souvent c’est bien cela qui arrive puisque dans ce pays qu’on prenait pour un pays nullement sous-développé, les personnes meurent faute de soins appropriés, non par manquement du personnel, il est compétent et dévoué mais certes en sous-nombre, mais faute de matériel. Comment arriver à accepter cela  ? Elle les voit, impuissante, sombrer dans une solitude radicale. Et comment vont se faire les deuils de gens qu’on n’a pas pu assister au moment de la mort, parce qu’ils étaient contagieux  ?  Et qu’on ne dise plus «  infecté  », où sonne par trop le mot «  infect  ». Or, infects, ce ne sont pas les malades qui le sont mais ceux qui laissent faire cela. Contagieux est plus approprié. Pourquoi on évite «  contagieux  »  ? Sinon pour nous empêcher de penser qu’aurait pu s’éviter la prolifération de quelque chose qui ne demandait qu’à se propager et tuer. Sans intentionnalité. Il n’y est pour rien, le virus. Il n’a pas fait une déclaration de guerre. Normal, ce n’est pas d’une guerre qu’il s’agit. Ou alors, ce n’est pas le virus l’attaquant… Mais les gens, on les a laissé se côtoyer au contraire.

Oui, il y a une guerre à mener. Mais pas contre un organisme privé d’intention, que celui qu’on appelle le président et ses complices n’ont de cesse d’anthropomorphiser. Comme si le virus pouvait avoir une face humaine et un passeport. Car énoncer qu’il n’a pas de passeport c’est justement le considérer comme un être humain, en le présupposant par la négative qu’il pourrait en avoir un, et donc responsable de ce qu’il fait. Toutes ces manœuvres sont faites à dessein. Pour une raison simple et hideuse  : détourner l’attention. Alors comme ça l’idée m’est venue que le confinement sert également à détourner l’attention. Il sert à masquer qu’en vérité l’état ne fait rien. D’ailleurs, où sont les masques, les tests, les machine respiratoires, le personnel hospitalier en plus grand nombre  ? Pourquoi avait-il d’abord refusé que les cliniques privées viennent prêter main forte  ? Pourquoi refuser une molécule qui soigne bien  ? Parce que le médecin qui la préconise a les cheveux trop longs  ? Ne serait-ce pas plutôt parce qu’elle est peu coûteuse et qu’elle ne fait pas le jeu des laboratoires pharmaceutiques et de leurs complices  ?

Si un martien venait sur terre, il dirait  : tiens, ils ont trouvé un moyen radical pour se débarrasser des pauvres et des vieux. C’est un peu cruel, mais du moins c’est radical.

La personne meurt sans qu’un proche lui tienne la main. Elle est déjà rejetée du monde des humains. L’un des traits qui caractérise l’humain, c’est qu’il peut être justement inhumain, dans le sens perfide et cruel. Là, sont inhumains les états et tous leurs complices qui font que se produisent ces monstruosités. Et les médecins, les infirmiers, les infirmières, tout le personnel pleurent. Un jour viendra, et malheureusement il est très proche, où l’univers sera fait de non-humains. La cruauté et la perfidie seront intégrées par tout le monde. Les autres, les humains, seront tous morts.

7 avril 2020 – 22ème jour de «  confinement  » où s’abat la mort inédite

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